Texte intégral
A. Caron.- Depuis deux jours, depuis le recadrage de N. Sarkozy, les ministres ne peuvent plus dire tout à fait ce qu'ils veulent. Ils sont toujours libres de leurs paroles, attention, il ne s'agit pas de censure, surtout pas, il faut juste que ce qu'ils disent soit en parfait accord avec la parole officielle de l'Elysée. C'est de la liberté encadrée, si vous voulez. Cette nouvelle règle comportementale ne va pas forcément arranger celle qui est notre invitée ce matin car elle est sans doute celle qui avait initié la liberté de parole au sein du Gouvernement ; elle fut en effet la première, il y a des mois de cela, à mettre les pieds dans le plat et les doigts dans la prise. Prise de position personnelle contre les tests ADN, par exemple, prise de bec avec C. Boutin et avec N. Morano, bref des prises de risque qui ne sont plus vraiment admises aujourd'hui. Du coup, va-t-elle vraiment pouvoir rester elle-même ? On va lui demander tout de suite. F. Amara, secrétaire d'Etat chargée de la politique de la ville est notre invitée ce matin. Bonjour. Bonjour. Merci d'être avec nous. Alors est-ce que ce recadrage de N. Sarkozy, ça veut dire qu'on ne peut plus dire aujourd'hui qu'une mesure gouvernementale ou alors un amendement de la majorité, "c'est dégueulasse" ?
R.- Non, je ne pense pas. Ce n'est pas en tout cas ce que j'ai compris. Ce que j'ai compris, surtout, c'est que les Français en ont marre un peu de cette cacophonie qui peut exister à travers les déclarations des uns et des autres. Mais je pense que le Président a raison. En réalité, il faut harmoniser la parole du Gouvernement et je pense qu'avec F. Fillon, ils ont eu raison de dire qu'une fois que les décisions sont arbitrées et par le Président et par le Premier ministre, eh bien il faut qu'il y ait je dirais le même discours. Ca n'empêche pas, contrairement à ce que certains pensent, ça n'empêche pas les débats démocratiques en interne. Moi, je suis attachée à un certain ensemble de principes et de valeurs, je veux pouvoir le dire. Ma liberté, elle existe toujours contrairement à ce qu'on peut penser, et pour moi et pour les autres, ceci dit. Et le président de la République a été très clair, c'est-à-dire que les débats démocratiques avant l'arbitrage sont possibles, tout le monde peut s'exprimer, tout le monde peut dire ce qu'il a à dire, mais une fois que c'est arbitré, c'est normal qu'il n'y ait que la parole ...
Q.- Que la parole publique soit unifiée en quelque sorte.
R.- Oui, parce qu'il faut penser à un truc - c'est très important, d'ailleurs on le retrouve dans les partis politiques - il faut penser une chose : c'est que les messages qui sortent comme ça du Gouvernement doivent être reçus par les Français. Et donc il ne faut pas qu'il y ait 50 choses en même temps dans lesquelles on a l'impression qu'on avance quelques pas, deux heures après on fait trois pas en arrière. Donc voilà, il faut qu'il y ait une harmonisation et je pense que le président de la République a eu raison, même si pour certains, ça va faire bizarre que ce soit moi qui le dise. Mais moi je suis assez attachée à ça aussi, déjà quand j'étais dans mon association, il y avait des vrais débats démocratiques où vraiment on se prenait la tête et une fois que la décision était prise, après c'était tout le monde qui faisait bloc.
Q.- Lorsqu'on regarde quand même la situation depuis plusieurs mois, ces voix discordantes, on va dire, souvent elles sont venues de femmes, pas souvent, c'était tout le temps en fait...
R.- C'est macho ce que vous allez dire ou...
Q.- Non, mais j'ai constaté. Justement, je vais vous demander pourquoi R. Yade, maintenant N. Kosciusko-Morizet, pourquoi est-ce que celles qu'on entend le plus, qui osent dire des choses qui vont à l'encontre peut-être de la pensée classique, ce sont des femmes ? Est-ce que c'est - c'est J. Dray qui posait la question sur ce plateau la semaine dernière - est-ce que c'est parce qu'elles sont plus courageuses ou parce qu'elles sont plus maladroites ?
R.- Maladroites, je ne dirais pas ça, moi je pense...
Q.- C'est J. Dray qui posait la question, donc je vous la pose directement.
R.- Oui, je connais bien J. Dray, je pense que les femmes en réalité ont une idée pragmatique de la politique, plus réaliste, je dirais de la politique. C'est vrai, je le reconnais, et particulièrement moi, on est moins dans les discours théoriques, etc. Mais on est plus dans la réalité de la vie, parce que les femmes de tout temps ont eu des doubles vies, à la fois s'occuper des gamins, de la maison etc., mais y compris après s'occuper de sa vie professionnelle et de temps en temps essayer d'avoir un minimum de carrière professionnelle. Donc du coup, on va à l'essentiel, on jette un peu ce qui peut paraître un peu du surplus et donc on va à l'essentiel. Et donc très vite, ça forge un esprit, et donc très vite on se rend compte de ce qu'il faut faire rapidement et concrètement. Ca n'empêche pas que les collègues hommes ont des qualités évidement parce que sinon on va dire que je fais l'inverse.
Q.- Lesquelles, citez en une ?
R.- Ca je vous laisse.
Q.- Une.
R.- Non, je pense que certains hommes politiques ont du courage. Je vais vous dire, je pense que certains hommes politiques ont du courage ; quand on est tout seul, par exemple, à avoir une idée, on ne démord pas de cette idée, parce qu'on pense qu'on a raison et que c'est bien pour la société, et je crois que c'est courageux, même si la majorité est contre, c'est courageux de l'imposer, voilà par exemple.
Q.- Alors, on va voir si vous mettez bien maintenant en application ce que demande N. Sarkozy. Quelques questions comme ça : que pensez-vous de l'arrivée de N. Morano au Gouvernement ?
R.- Je trouve que le casting à la Fogiel est sympa. C'est une boutade, je lui fais un clin d'oeil, elle comprendra.
Q.- Elle n'a plus de voix de Castafiore, pas trop gênant au Conseil des ministres, c'est vous qui l'avez dit, ce n'est pas moi.
R.- Oui mais moi j'assume ce qui s'est passé, avec Nadine on a eu quelques petites prises de bec, mais sur des débats politiques, aujourd'hui elle est rentrée dans le Gouvernement, c'est pour cela que je lui fais un clin d'oeil en disant ça, mais on s'entend bien dans le Gouvernement. Moi, je suis attentive un peu à la politique familiale, d'ailleurs, parce que, pourquoi, je considère que dans les familles, par exemple quand nous avons des gamins qui dérapent, c'est bien qu'à un moment donné les parents quelque part ont quelques petites difficultés. Donc moi je compte travailler avec elle pour aider à la restauration de l'autorité parentale pour les parents qui ont quelques difficultés et voir comment on peut mettre en place des dispositifs qui peuvent leur redonner cette autorité naturelle pour réellement arriver à assumer la responsabilité de l'éducation des enfants, sans les culpabiliser par ailleurs.
Q.- On parle d'éducation, que pensez-vous des suppressions de postes dans l'Education nationale alors que par ailleurs, dans le Plan banlieue, il y a justement cette idée qu'il faut renforcer les écoles de la deuxième chance etc., donc mettre plus de profs dans les quartiers difficiles ?
R.- Je suis très attentive à cette question-là, j'en ai beaucoup discuté avec X. Darcos, le ministre de l'Education et je suis assez d'accord avec lui, on a un gros problème dans notre pays, c'est-à-dire qu'on est tous et les Français sont attachés au service public, mais en même temps, à côté, nous avons un budget qui est très important et une dette publique qui est très importante. Donc il va falloir jongler, ce n'est pas facile, mais en même temps ce que je crois, c'est que je suis assez pour la formule, il s'agit de "pas plus de professeurs mais de bons professeurs". Et donc je crois que l'idée de faire en sorte que dans les quartiers, en tout cas les territoires dont je m'occupe, les territoires prioritaires, moi je suis très attentive à ce qu'on ne touche pas, à ce que les coupes qui sont faites, si jamais il n'y a pas de remplacement - attention ! Ce n'est pas "on enlève", c'est "pas de remplacement". J'ai fait attention que dans ces territoires prioritaires dont on a un réel besoin, ils ne soient pas touchés.
Q.- Sachant que dans ces territoires prioritaires, les enseignants qu'on va mettre, ça va plutôt être des enseignants du privé, des écoles de la seconde chance, c'est plutôt du privé...
R.- Non, non, non.
Q.- Il y en a une bonne partie...
R.- Non, nous avons un problème dans les cités, on ne va pas se raconter des histoires, nous avons une école publique qui a quelques difficultés, mais il n'y a pas que dans les quartiers, nous avons un problème dans certains établissements scolaires, mais nous avons aussi la possibilité de faire en sorte que pour élargir l'offre de faire en sorte que des écoles privées viennent s'installer dans les quartiers etc., pour pouvoir éclater un petit peu la concentration et donc casser un petit peu ces ghettos etc., moi je suis très attentive à l'école publique parce que j'y suis très attachée, mais en même temps, je pense que c'est bien d'offrir la possibilité de cette palette-là. Mais je crois moi surtout qu'il faut faire en sorte que la qualité de l'instruction doit être importante dans nos quartiers parce que là on part avec un peu plus de difficulté et avec X. Darcos, dans le cadre du programme pour la banlieue, nous avons beaucoup travaillé ensemble et les mesures qui ont été prises et arrêtées par X. Darcos, donc le ministre de l'Education, vont être opérationnelles à la rentrée prochaine. Donc on renforce à travers le dispositif de l'Education réussite etc.
Q.- Donc ça veut dire a priori pas de suppression de postes dans les quartiers qu'on appelle difficiles.
R.- On ne remplacera pas ce qui doit pas être remplacé, mais on fera attention à ce que de toute manière, il n'y ait pas de suppression de postes directe, sèche.
Q.- On a un peu le sentiment, lorsqu'on regarde les dernières mesures annoncées par le Gouvernement, que les économies se font surtout sur le volet social en ce qui concerne les économies de dépense de l'Etat : la réforme des allocations familiales, le désengagement de la Sécu pour un certain nombre de dépenses de santé, l'abaissement du plafond de l'attribution des HLM, le Revenu de solidarité actif qui pour l'instant ne se met pas en place... Vous, en tant que femme de gauche, est-ce que ça ne vous gène pas ?
R.- Moi, je suis un peu attentive, je regarde ça aussi avec M. Hirsch, moi je suis très attachée au RSA par exemple parce que je pense que c'est très important aujourd'hui qu'on casse cette logique de rester dans des logiques d'assistanat et qu'on maintienne des populations dans des logiques d'assistanat. Et qu'effectivement il fallait avoir cette idée lumineuse qu'a eue Martin, c'est-à-dire de rajouter donc et de fusionner différentes allocations pour permettre à des gens de revenir et de retravailler, etc., sans qu'ils soient pénalisés financièrement. Je trouve que c'est très important, c'est un dispositif qu'il ne faut pas lâcher, surtout pas lâcher et je pense que c'est à travers ce dispositif là que nous allons permettre de créer une vraie dynamique. Mais c'est vrai que...
Q.- Voilà pour la question générale en fait...
R.- C'est vrai que sur la question générale, on a l'impression que les questions sociales sont touchées, c'est une réalité, mais en même temps je pense que dans le Gouvernement, il y a des débats, pour l'instant il y a beaucoup de choses qui n'ont pas encore été arbitrées officiellement, donc...
Q.- Ca ne vous gène pas un petit peu, franchement ?
R.- Cela me gène parce que je pense que... ça me gène dans le sens où je crois très sincèrement que les Français, beaucoup de Français sont touchés dans leur pouvoir d'achat et que je pense qu'il faut les aider à faire en sorte qu'effectivement le pouvoir d'achat augmente. Et qu'ils aient une meilleure qualité de vie. Il ne faut pas qu'ils soient déçus justement par rapport à ça. Moi, je suis convaincue qu'à la fois le président de la République et le Gouvernement feront tout ce qu'il faut faire pour qu'on réussisse ce pari fou, mais il faut tenir compte d'une chose, c'est que le contexte n'est pas favorable.
Q.- Si je vous entends bien, ça veut quand même dire que... vous dites "ça me gène un petit peu quand même", c'est ça que j'ai entendu ?
R.- Bien sûr.
Q.- Vous allez vous battre, vous, au sein de ce Gouvernement pour faire entendre une voix qui dit "non, ne touchons pas aux mesures sociales" ?
R.- Je ne suis pas la seule, nous avons beaucoup de députés UMP aussi qui disent la même chose et ils ont raison, je partage complètement leur opinion. Il y a des députés UMP qui disent très clairement qu'il faut aussi que notre Gouvernement ait une politique plus offensive sur la question sociale et je crois que c'est une réalité, il faut le faire. Alors, après, voyons comment nous pouvons le faire. Donc j'insiste sur le fait que c'est vrai que le contexte n'est pas favorable, c'est compliqué, mais je pense que le président de la République comme le Premier ministre sont attachés aussi à ces revendications.
Q.- Merci beaucoup d'avoir été notre invitée.
R.- Merci à vous, et j'espère la prochaine fois être invitée pour parler du Plan banlieue.
Q.- Voilà, j'allais vous le dire justement, c'est vrai que ce matin, on a abordé un certain nombre de sujets... Plan banlieue qui va bientôt se mettre en place concrètement, c'est ça...
R.- Concrètement, très franchement, on est en train de le mouliner techniquement pour qu'il devienne concret parce qu'on n'aime que le concret, évidement, pour qu'il devienne concret le plus rapidement possible.
Q.- C'est pour ça que pour l'instant, il est encore un peu trop tôt pour faire un bilan, évidement, mais dans combien de temps ça va vraiment commencé, dans quelques semaines ?
R.- Moi je pense qu'il sera prêt définitivement au mois de mai, c'est-à-dire à l'annonce du conseil interministériel des villes qui va définitivement asseoir le programme pour la banlieue.
Q.- Rendez-vous est pris pour mai, alors, F. Amara, vous revenez nous voir.
R.- Yes, avec plaisir.
Q.- Merci beaucoup.
R.- Merci à vous.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 18 avril 2008
R.- Non, je ne pense pas. Ce n'est pas en tout cas ce que j'ai compris. Ce que j'ai compris, surtout, c'est que les Français en ont marre un peu de cette cacophonie qui peut exister à travers les déclarations des uns et des autres. Mais je pense que le Président a raison. En réalité, il faut harmoniser la parole du Gouvernement et je pense qu'avec F. Fillon, ils ont eu raison de dire qu'une fois que les décisions sont arbitrées et par le Président et par le Premier ministre, eh bien il faut qu'il y ait je dirais le même discours. Ca n'empêche pas, contrairement à ce que certains pensent, ça n'empêche pas les débats démocratiques en interne. Moi, je suis attachée à un certain ensemble de principes et de valeurs, je veux pouvoir le dire. Ma liberté, elle existe toujours contrairement à ce qu'on peut penser, et pour moi et pour les autres, ceci dit. Et le président de la République a été très clair, c'est-à-dire que les débats démocratiques avant l'arbitrage sont possibles, tout le monde peut s'exprimer, tout le monde peut dire ce qu'il a à dire, mais une fois que c'est arbitré, c'est normal qu'il n'y ait que la parole ...
Q.- Que la parole publique soit unifiée en quelque sorte.
R.- Oui, parce qu'il faut penser à un truc - c'est très important, d'ailleurs on le retrouve dans les partis politiques - il faut penser une chose : c'est que les messages qui sortent comme ça du Gouvernement doivent être reçus par les Français. Et donc il ne faut pas qu'il y ait 50 choses en même temps dans lesquelles on a l'impression qu'on avance quelques pas, deux heures après on fait trois pas en arrière. Donc voilà, il faut qu'il y ait une harmonisation et je pense que le président de la République a eu raison, même si pour certains, ça va faire bizarre que ce soit moi qui le dise. Mais moi je suis assez attachée à ça aussi, déjà quand j'étais dans mon association, il y avait des vrais débats démocratiques où vraiment on se prenait la tête et une fois que la décision était prise, après c'était tout le monde qui faisait bloc.
Q.- Lorsqu'on regarde quand même la situation depuis plusieurs mois, ces voix discordantes, on va dire, souvent elles sont venues de femmes, pas souvent, c'était tout le temps en fait...
R.- C'est macho ce que vous allez dire ou...
Q.- Non, mais j'ai constaté. Justement, je vais vous demander pourquoi R. Yade, maintenant N. Kosciusko-Morizet, pourquoi est-ce que celles qu'on entend le plus, qui osent dire des choses qui vont à l'encontre peut-être de la pensée classique, ce sont des femmes ? Est-ce que c'est - c'est J. Dray qui posait la question sur ce plateau la semaine dernière - est-ce que c'est parce qu'elles sont plus courageuses ou parce qu'elles sont plus maladroites ?
R.- Maladroites, je ne dirais pas ça, moi je pense...
Q.- C'est J. Dray qui posait la question, donc je vous la pose directement.
R.- Oui, je connais bien J. Dray, je pense que les femmes en réalité ont une idée pragmatique de la politique, plus réaliste, je dirais de la politique. C'est vrai, je le reconnais, et particulièrement moi, on est moins dans les discours théoriques, etc. Mais on est plus dans la réalité de la vie, parce que les femmes de tout temps ont eu des doubles vies, à la fois s'occuper des gamins, de la maison etc., mais y compris après s'occuper de sa vie professionnelle et de temps en temps essayer d'avoir un minimum de carrière professionnelle. Donc du coup, on va à l'essentiel, on jette un peu ce qui peut paraître un peu du surplus et donc on va à l'essentiel. Et donc très vite, ça forge un esprit, et donc très vite on se rend compte de ce qu'il faut faire rapidement et concrètement. Ca n'empêche pas que les collègues hommes ont des qualités évidement parce que sinon on va dire que je fais l'inverse.
Q.- Lesquelles, citez en une ?
R.- Ca je vous laisse.
Q.- Une.
R.- Non, je pense que certains hommes politiques ont du courage. Je vais vous dire, je pense que certains hommes politiques ont du courage ; quand on est tout seul, par exemple, à avoir une idée, on ne démord pas de cette idée, parce qu'on pense qu'on a raison et que c'est bien pour la société, et je crois que c'est courageux, même si la majorité est contre, c'est courageux de l'imposer, voilà par exemple.
Q.- Alors, on va voir si vous mettez bien maintenant en application ce que demande N. Sarkozy. Quelques questions comme ça : que pensez-vous de l'arrivée de N. Morano au Gouvernement ?
R.- Je trouve que le casting à la Fogiel est sympa. C'est une boutade, je lui fais un clin d'oeil, elle comprendra.
Q.- Elle n'a plus de voix de Castafiore, pas trop gênant au Conseil des ministres, c'est vous qui l'avez dit, ce n'est pas moi.
R.- Oui mais moi j'assume ce qui s'est passé, avec Nadine on a eu quelques petites prises de bec, mais sur des débats politiques, aujourd'hui elle est rentrée dans le Gouvernement, c'est pour cela que je lui fais un clin d'oeil en disant ça, mais on s'entend bien dans le Gouvernement. Moi, je suis attentive un peu à la politique familiale, d'ailleurs, parce que, pourquoi, je considère que dans les familles, par exemple quand nous avons des gamins qui dérapent, c'est bien qu'à un moment donné les parents quelque part ont quelques petites difficultés. Donc moi je compte travailler avec elle pour aider à la restauration de l'autorité parentale pour les parents qui ont quelques difficultés et voir comment on peut mettre en place des dispositifs qui peuvent leur redonner cette autorité naturelle pour réellement arriver à assumer la responsabilité de l'éducation des enfants, sans les culpabiliser par ailleurs.
Q.- On parle d'éducation, que pensez-vous des suppressions de postes dans l'Education nationale alors que par ailleurs, dans le Plan banlieue, il y a justement cette idée qu'il faut renforcer les écoles de la deuxième chance etc., donc mettre plus de profs dans les quartiers difficiles ?
R.- Je suis très attentive à cette question-là, j'en ai beaucoup discuté avec X. Darcos, le ministre de l'Education et je suis assez d'accord avec lui, on a un gros problème dans notre pays, c'est-à-dire qu'on est tous et les Français sont attachés au service public, mais en même temps, à côté, nous avons un budget qui est très important et une dette publique qui est très importante. Donc il va falloir jongler, ce n'est pas facile, mais en même temps ce que je crois, c'est que je suis assez pour la formule, il s'agit de "pas plus de professeurs mais de bons professeurs". Et donc je crois que l'idée de faire en sorte que dans les quartiers, en tout cas les territoires dont je m'occupe, les territoires prioritaires, moi je suis très attentive à ce qu'on ne touche pas, à ce que les coupes qui sont faites, si jamais il n'y a pas de remplacement - attention ! Ce n'est pas "on enlève", c'est "pas de remplacement". J'ai fait attention que dans ces territoires prioritaires dont on a un réel besoin, ils ne soient pas touchés.
Q.- Sachant que dans ces territoires prioritaires, les enseignants qu'on va mettre, ça va plutôt être des enseignants du privé, des écoles de la seconde chance, c'est plutôt du privé...
R.- Non, non, non.
Q.- Il y en a une bonne partie...
R.- Non, nous avons un problème dans les cités, on ne va pas se raconter des histoires, nous avons une école publique qui a quelques difficultés, mais il n'y a pas que dans les quartiers, nous avons un problème dans certains établissements scolaires, mais nous avons aussi la possibilité de faire en sorte que pour élargir l'offre de faire en sorte que des écoles privées viennent s'installer dans les quartiers etc., pour pouvoir éclater un petit peu la concentration et donc casser un petit peu ces ghettos etc., moi je suis très attentive à l'école publique parce que j'y suis très attachée, mais en même temps, je pense que c'est bien d'offrir la possibilité de cette palette-là. Mais je crois moi surtout qu'il faut faire en sorte que la qualité de l'instruction doit être importante dans nos quartiers parce que là on part avec un peu plus de difficulté et avec X. Darcos, dans le cadre du programme pour la banlieue, nous avons beaucoup travaillé ensemble et les mesures qui ont été prises et arrêtées par X. Darcos, donc le ministre de l'Education, vont être opérationnelles à la rentrée prochaine. Donc on renforce à travers le dispositif de l'Education réussite etc.
Q.- Donc ça veut dire a priori pas de suppression de postes dans les quartiers qu'on appelle difficiles.
R.- On ne remplacera pas ce qui doit pas être remplacé, mais on fera attention à ce que de toute manière, il n'y ait pas de suppression de postes directe, sèche.
Q.- On a un peu le sentiment, lorsqu'on regarde les dernières mesures annoncées par le Gouvernement, que les économies se font surtout sur le volet social en ce qui concerne les économies de dépense de l'Etat : la réforme des allocations familiales, le désengagement de la Sécu pour un certain nombre de dépenses de santé, l'abaissement du plafond de l'attribution des HLM, le Revenu de solidarité actif qui pour l'instant ne se met pas en place... Vous, en tant que femme de gauche, est-ce que ça ne vous gène pas ?
R.- Moi, je suis un peu attentive, je regarde ça aussi avec M. Hirsch, moi je suis très attachée au RSA par exemple parce que je pense que c'est très important aujourd'hui qu'on casse cette logique de rester dans des logiques d'assistanat et qu'on maintienne des populations dans des logiques d'assistanat. Et qu'effectivement il fallait avoir cette idée lumineuse qu'a eue Martin, c'est-à-dire de rajouter donc et de fusionner différentes allocations pour permettre à des gens de revenir et de retravailler, etc., sans qu'ils soient pénalisés financièrement. Je trouve que c'est très important, c'est un dispositif qu'il ne faut pas lâcher, surtout pas lâcher et je pense que c'est à travers ce dispositif là que nous allons permettre de créer une vraie dynamique. Mais c'est vrai que...
Q.- Voilà pour la question générale en fait...
R.- C'est vrai que sur la question générale, on a l'impression que les questions sociales sont touchées, c'est une réalité, mais en même temps je pense que dans le Gouvernement, il y a des débats, pour l'instant il y a beaucoup de choses qui n'ont pas encore été arbitrées officiellement, donc...
Q.- Ca ne vous gène pas un petit peu, franchement ?
R.- Cela me gène parce que je pense que... ça me gène dans le sens où je crois très sincèrement que les Français, beaucoup de Français sont touchés dans leur pouvoir d'achat et que je pense qu'il faut les aider à faire en sorte qu'effectivement le pouvoir d'achat augmente. Et qu'ils aient une meilleure qualité de vie. Il ne faut pas qu'ils soient déçus justement par rapport à ça. Moi, je suis convaincue qu'à la fois le président de la République et le Gouvernement feront tout ce qu'il faut faire pour qu'on réussisse ce pari fou, mais il faut tenir compte d'une chose, c'est que le contexte n'est pas favorable.
Q.- Si je vous entends bien, ça veut quand même dire que... vous dites "ça me gène un petit peu quand même", c'est ça que j'ai entendu ?
R.- Bien sûr.
Q.- Vous allez vous battre, vous, au sein de ce Gouvernement pour faire entendre une voix qui dit "non, ne touchons pas aux mesures sociales" ?
R.- Je ne suis pas la seule, nous avons beaucoup de députés UMP aussi qui disent la même chose et ils ont raison, je partage complètement leur opinion. Il y a des députés UMP qui disent très clairement qu'il faut aussi que notre Gouvernement ait une politique plus offensive sur la question sociale et je crois que c'est une réalité, il faut le faire. Alors, après, voyons comment nous pouvons le faire. Donc j'insiste sur le fait que c'est vrai que le contexte n'est pas favorable, c'est compliqué, mais je pense que le président de la République comme le Premier ministre sont attachés aussi à ces revendications.
Q.- Merci beaucoup d'avoir été notre invitée.
R.- Merci à vous, et j'espère la prochaine fois être invitée pour parler du Plan banlieue.
Q.- Voilà, j'allais vous le dire justement, c'est vrai que ce matin, on a abordé un certain nombre de sujets... Plan banlieue qui va bientôt se mettre en place concrètement, c'est ça...
R.- Concrètement, très franchement, on est en train de le mouliner techniquement pour qu'il devienne concret parce qu'on n'aime que le concret, évidement, pour qu'il devienne concret le plus rapidement possible.
Q.- C'est pour ça que pour l'instant, il est encore un peu trop tôt pour faire un bilan, évidement, mais dans combien de temps ça va vraiment commencé, dans quelques semaines ?
R.- Moi je pense qu'il sera prêt définitivement au mois de mai, c'est-à-dire à l'annonce du conseil interministériel des villes qui va définitivement asseoir le programme pour la banlieue.
Q.- Rendez-vous est pris pour mai, alors, F. Amara, vous revenez nous voir.
R.- Yes, avec plaisir.
Q.- Merci beaucoup.
R.- Merci à vous.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 18 avril 2008