Texte intégral
Q - La baisse de l'aide française au développement en 2007 ne met-elle pas en cause la crédibilité de votre présidence ?
R - Il y a des sujets qui fâchent, alors autant en parler tout de suite. Avant de présider il faut balayer devant sa porte. Mais hors annulation de dette, on est en augmentation de 4,3 %. Et rien ne dit que d'ici à 2015 on n'aura pas la possibilité de taux de croissance meilleurs qu'aujourd'hui.
Q - La Commission appelle à une planification pluriannuelle. Est-ce possible ?
R - Pour nous et un certain nombre d'Etats, c'est assez difficile pour l'instant car nous sommes en pleine négociation budgétaire. Mais à partir de 2009 on pourra bénéficier d'une visibilité triennale. C'est ce que nous négocions avec notre gouvernement.
Q - Quelles sont vos priorités pour les six mois à venir ?
R - Il n'y aura pas de rupture par rapport à ce qui a été fait sous présidence slovène. La trame de tout, ce sont les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). On proposera une petite évolution des moyens pour atteindre ces objectifs, mais tout cela est en débat et devra d'abord être validé par les 26 autres Etats membres. La Présidence française proposera de donner la priorité à la lutte contre la crise alimentaire avec la relance de l'agriculture alimentaire vivrière et familiale dans tous les pays en voie de développement. C'est une façon d'aller vers les OMD. Si la crise alimentaire continue à frapper, cela sera un recul pour les OMD, car nous aurons de plus en plus de gens qui ne peuvent se nourrir et donc un impact sur la santé et l'éducation. Sur ce sujet je veux qu'on avance. En terme de volonté politique on est dans le tempo international comme l'ont démontré les sommets de la FAO : Rome et du G8. On est bien sur un objectif partagé.
Q - Soutenez-vous la proposition de la Commission d'allouer les surplus de la Politique agricole commune (PAC) aux pays pauvres ?
R - J'ai bien entendu les propositions importantes qui ont été faites, mais j'ai aussi noté qu'il n'y avait pas de consensus européen. La Présidence française ouvrira le débat avec la volonté d'arriver à un consensus pour qu'on trouve les moyens financiers.
Q - N'est-ce pas un débat opposant ministres du Développement et du Budget ?
R - Oui. Il faudrait trouver un consensus entre les ministres du Développement de l'Union européenne pour que nous puissions aboutir avec nos ministres du Budget à un accord compatible avec les propositions de la Commission. Il est trop tôt aujourd'hui pour prendre une position car ce consensus n'existe pas. Je ne sais pas combien de temps cela prendra mais il faut qu'on trouve une formule pour aller le plus vite possible, car la crise alimentaire n'attend pas. C'est pourquoi la France proposera aussi d'établir la notion "d'exception alimentaire" à l'échelon international.
Q - Ce principe s'appliquerait aux Accords de partenariat économique (APE) ?
R - Les APE doivent être liés aux autres dossiers. Je vais proposer à la Commission une réorientation des APE, ce qui me paraît quelques chose d'important. Il faudrait des APE qui tiennent compte un peu plus du développement. Des accords qui soient moins organisés autour du commerce, mais plus du développement, des OMD et en concordance avec la crise alimentaire, ainsi que le redémarrage des agricultures vivrières.
Q - Qu'allez-vous faire du rapport très critique que Christiane Taubira a remis à Nicolas Sarkozy ?
R - Il s'agit de propositions à disposition des décideurs. Je pense qu'il y a des choses intéressantes et des choses qui n'engagent qu'elle. La chose intéressante c'est l'idée qu'il faut que les APE aient une connotation développement évidente. On ne peut pas parler uniquement de commerce avec les pays en développement. Je plaide également pour une exception agricole.
Q - S'agit-il de donner plus de flexibilités aux ACP dans les négociations ?
R - On souhaite donner beaucoup de flexibilité, aussi bien dans le pourcentage de libéralisation exigé, que sur l'ampleur de périodes de transition. Si on veut une cohérence de notre politique de développement on ne peut pas rester aussi strict qu'aujourd'hui.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 juillet 2008