Déclaration de M. Jean-François Copé, président du groupe parlementaire UMP à l'Assemblée nationale, sur les raisons de la poursuite de l'engagement de la France en Afghanistan, à l'Assemblée nationale le 22 septembre 2008.

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Circonstance : Débat à l'Assemblée nationale sur l'Afghanistan, le 22 septembre 2008

Texte intégral

Monsieur le Président,
Monsieur le Premier ministre,
Mes chers collègues,
1. Hommage aux soldats français tombés en Afghanistan
En venant m'exprimer devant vous à cette tribune, c'est d'abord à nos soldats engagés en Afghanistan aux côtés des forces afghanes et de nos alliés que je veux penser. C'est aux 24 fils de France qui sont morts dans ce pays depuis le début de notre engagement en 2001 que je veux rendre hommage. C'est aux combattants blessés que je veux exprimer tout notre soutien et notre compassion.
Oui, je veux le dire ici, avant toute chose, en participant à ce débat aujourd'hui, chacun d'entre nous a en tête le sacrifice de ces 24 jeunes Français qui ont donné leur vie pour nous protéger. 24 jeunes Français fauchés au combat pour des valeurs qu'ils avaient choisi de défendre avec courage et au péril de leur vie.
La mort de ces soldats est une douleur immense pour leurs proches. Qu'en ce jour à nouveau, leurs familles soient assurées de l'appui et de la sympathie profonde de toute la communauté nationale.
Quand un soldat tombe pour la défendre, c'est la France toute entière qui est touchée. Ces soldats morts au combat donnent un exemple poignant pour chaque Français. Dans notre monde souvent marqué par les stigmates de l'égoïsme, voilà des citoyens de France qui laissent le témoignage héroïque d'une vie donnée pour les autres. Ils nous transmettent un message plein d'exigence. Ce message, nous devons l'entendre : nos valeurs et la paix sont des trésors si précieux que leur défense exige parfois jusqu'au don de sa vie.
Comme je veux dire, au nom de l'ensemble des députés UMP, notre reconnaissance à nos 12 500 soldats engagés dans des opérations extérieures, en Afghanistan ou ailleurs. De Haïti au Soudan, de la Côté d'Ivoire au Liban. Nous sommes fiers d'eux et de notre armée. Professionnelle. Au service de la Nation. Soumise à l'autorité politique.
2. Le vote de ce jour, une responsabilité nouvelle pour les députés.
Voilà qui m'amène à cette idée essentielle que je veux partager avec vous : à l'origine de toute action militaire, il y a une décision politique.
Si certains l'oublient, la Fête nationale nous rappelle tous les ans ce lien indissociable entre notre armée, le peuple français et ses représentants. Le défilé du 14 juillet, c'est chaque année une image marquante : nos militaires venant manifester leur loyauté et leur soumission au Président de la République, Chef des Armées, en lui rendant les honneurs.
Quel plus fort symbole que les étendards de chaque régiment, sur la place de la Concorde, saluant tour à tour le Chef de l'Etat élu par tous les Français ?
Et bien, chacun de nous dans cette assemblée doit comprendre que, désormais, il porte avec le Président de la République, une part de cette responsabilité. Avec l'article 35 de la Constitution que nous venons de modifier, nous pouvons autoriser ou refuser la prolongation d'une opération militaire à l'étranger au-delà de 4 mois.
Cette co-responsabilité, qui prend effet pour la 1ère fois aujourd'hui, est un changement historique. Que personne ne le minimise : de notre choix cet après-midi va dépendre la poursuite de l'engagement français en Afghanistan.
Peu importe l'incohérence de ceux qui, en septembre, se félicitent de pouvoir décider sur un sujet si crucial, alors qu'en juillet, ils ont tout fait pour que cette nouvelle prérogative ne voie jamais le jour.
Peu importe les outrances de ceux qui osaient dire que la réforme des institutions conduirait à une « monocratie présidentielle », alors même qu'elle met fin aujourd'hui au domaine réservé.
Tout cela est du passé. Ce qui compte, c'est la responsabilité que nous portons chacun en ce jour sur nos épaules.
Désormais, nous devons répondre personnellement du sort de nos soldats devant nos concitoyens. Quand nos armées sont à l'honneur. Mais aussi quand elles sont à la peine. Une telle responsabilité doit faire changer notre façon de travailler. La défense ne peut plus rester une question de spécialistes. Chacun de nous a le devoir personnel de s'impliquer sur ces questions. Pour décider en connaissance de cause. Pour rendre compte aux Français de nos décisions.
Alors qu'allons-nous faire de cette responsabilité si grave ? Sera-t-elle instrumentalisée à des fins politiciennes ? Je ne peux pas l'imaginer et je mets chacun en garde contre des dérives que les Français ne nous pardonneraient pas. Ayons conscience que, de notre vote d'aujourd'hui, nous rendrons compte devant l'Histoire.
Nous, députés UMP, nous entendons assumer cette responsabilité dignement et sereinement, dans l'intérêt de la France et des Français. Pour éclairer nos consciences et former notre jugement, nous avons donc beaucoup consulté, auditionné, lu, écouté. A droite, à gauche, sans aucun préjugé. Certains d'entre nous se sont rendus sur le terrain, en Afghanistan. Et pour la 1ère fois dans l'histoire de la Vème République, nous avons fait intervenir le Chef d'Etat-major des Armées dans une réunion de notre groupe parlementaire. A huis clos, il nous a parlé très librement. De tels échanges sont désormais indispensables dans l'exercice de notre mission.
3. Une présence nécessaire pour la sécurité de nos concitoyens.
Au terme de cette réflexion, je veux exprimer ici ma conviction profonde :
Bien sûr, la France n'a pas vocation à rester éternellement en Afghanistan. Mais le maintien de nos troupes dans ce pays est actuellement légitime et nécessaire. En conscience, le groupe UMP entend donc exprimer son soutien total au Président de la République et au Gouvernement qui nous demandent la poursuite de l'effort engagé.
Je regrette que certains l'aient oublié mais si l'engagement des troupes françaises en Afghanistan est aussi vital, c'est parce qu'il relève d'abord et avant tout de la sécurité nationale.
Il faut que tous les Français le sachent : en Afghanistan, c'est leur protection directe qui est en jeu. En Afghanistan, nous ne sommes pas état de guerre. Mais nous faisons la guerre aux terroristes.
Le terrorisme, ce n'est pas un lointain souvenir, un fantasme ou spectre éloigné.
C'est une réalité cruelle qui brise des vies et frappe aveuglement à Londres, New-York, Madrid.
C'est un poison mortel qui vise à semer la peur et le doute au coeur de nos démocraties fondées sur la confiance.
C'est une expérience douloureuse que la France a subie plusieurs fois et contre lequel notre devoir de responsables politiques est de lutter sans relâche.
Or les Talibans n'ont qu'une idée en tête : reprendre le pouvoir. Avec Al Qaïda, ils veulent revenir 7 ans en arrière.
Ils veulent refaire de l'Afghanistan la base logistique indispensable à la poursuite d'opérations terroristes à grande échelle.
C'est pour mettre fin à cette menace que la communauté internationale a décidé d'intervenir après les attentats du 11 septembre 2001. Dans le respect du droit international. Avec un mandat clair de l'Onu.
C'est pour assurer sa sécurité que la France, présidée par Jacques Chirac et gouvernée par Lionel Jospin, a décidé de prendre part à cette intervention internationale. Nous sommes aujourd'hui engagés avec 40 pays.
Avec tous nos partenaires européens, exceptés Malte et Chypre.
Avec des pays à majorité musulmane : la Turquie, la Jordanie, l'Albanie, l'Azerbaïdjan. Preuve si elle était nécessaire que cela n'a rien à voir avec le Choc des Civilisations voulu par les Islamistes.
Le 1er objectif de l'intervention alliée était de renverser le pouvoir des Talibans, complices des terroristes. Il a été atteint. Mais cela n'était pas suffisant : si nous étions repartis aussitôt, la menace serait revenue aussitôt.
Pour notre sécurité, il faut atteindre un deuxième objectif : Aider les autorités afghanes, élues démocratiquement, à stabiliser leur pays afin d'empêcher un retour au pouvoir de la barbarie.
4. Une lutte contre la barbarie, aux côtés des Afghans.
C'est en effet à la demande expresse du Gouvernement afghan que la France est engagée en Afghanistan.
N'en déplaise à la propagande d'Al Qaïda, ce qui se joue dans ce pays, ce n'est pas le combat de l'Islam contre l'Occident. C'est la lutte des autorités légales afghanes, avec le soutien de la communauté internationale, contre des forces insurgées.
Faut-il d'ailleurs rappeler que les premières victimes des Talibans, ce sont les Afghans ? que les premières victimes du terrorisme islamiste à travers le monde, ce sont des musulmans ?
Si nous soutenons l'engagement français en Afghanistan, c'est donc aussi pour manifester notre solidarité à un peuple ami de la France depuis des décennies. Un peuple ami qui a tant souffert de l'obscurantisme. Pour lequel tant d'entre nous se sont mobilisés lorsque les fondamentalistes au pouvoir le martyrisaient. Souvenez-vous de notre effroi devant les horreurs perpétrées par cette dictature....
Oui, je l'affirme ici avec force, pour les députés socialistes et communistes, dont les propos et la position sont indéfendables : vous n'avez pas le droit d'abandonner nos amis Afghans ! Pour le démontrer, je veux pousser votre raisonnement jusqu'au bout. Si demain, à la suite de votre vote, nous partions de Kaboul... si demain, les lapidations de femmes reprenaient dans les stades de la capitale afghane, qui parmi vous oserait assumer son vote sans rougir ?
Qui parmi vous oserait encore parler sans honte de la vocation de la France au service des droits de l'homme ?
Signer des pétitions et prendre des postures depuis Paris, c'est confortable. Mais les droits de l'homme valent parfois la peine qu'on prenne des risques et qu'on s'engage vraiment !
5. Voter pour le départ des troupes, une option irresponsable
Chers collègues, voter pour le retrait de nos troupes aujourd'hui, c'est capituler devant une idéologie qui considère que la vie des autres ne vaut rien, que les femmes valent encore moins.
Voter pour le retrait de nos troupes aujourd'hui, c'est perdre toute crédibilité aux yeux de la communauté internationale.
- Comment la France, membre permanent du Conseil de Sécurité de l'Onu, pourrait-elle expliquer l'abandon d'une mission sous mandat des Nations Unis alors que nous défendons en permanence le principe de la coopération internationale ? Une telle incohérence fragiliserait l'Onu. Et donnerait à ceux qui n'attendent que ça un prétexte de plus pour agir de façon unilatérale, au mépris du droit international.
- Comment la France, en pleine présidence de l'Union européenne, pourrait-elle justifier sa décision de quitter une opération engageant pour la première fois ensemble presque tous nos partenaires européens alors que nous proposons sans relâche de mieux coopérer sur les questions militaires ? Une telle faiblesse, ce serait enterrer pour longtemps les chances de bâtir une véritable défense européenne.
Voter pour le retrait de nos troupes aujourd'hui, c'est trahir nos valeurs et nos engagements sans préserver pour autant notre sécurité. Au contraire... Rappelez-vous Churchill : lorsqu'on choisit le déshonneur pour s'épargner la guerre, on finit par avoir ET le déshonneur ET la guerre.
6. Un soutien qui tient compte des difficultés du terrain
Cependant, notre soutien à l'engagement des forces françaises n'est pas un soutien aveugle. Nous avons bien conscience des difficultés sur place.
Depuis la chute des Talibans, des progrès majeurs ont été accomplis en Afghanistan. Dans un pays qui avait été balayé par trois vagues successives - l'invasion soviétique, la guerre civile et la dictature talibane -, les efforts de la communauté internationale ont permis des avancées considérables qui n'auraient jamais eu lieu sans la présence de la coalition.
Pourtant, depuis un an, il faut le reconnaître, les progrès marquaient le pas.
- Du point de vue de la sécurité, on note dans certaines régions une multiplication des attentats et des attaques par les insurgés.
- Du point de vue du développement économique, les populations locales attendent de nouveaux résultats encore plus rapidement.
- Quant à la drogue, elle est devenu un fléau encore plus inquiétant. Quel avenir est possible dans un pays où la drogue représente la moitié de la richesse produite ? Face à cette situation préoccupante, nous, les députés UMP sommes extrêmement vigilants.
Nous avons notamment demandé que toutes les leçons soient tirées de l'embuscade qui a coûté la vie à 10 de nos soldats dans la vallée d'Uzbin. C'est donc avec satisfaction que j'ai pris connaissance des moyens supplémentaires annoncés par le Premier ministre.
6. Un soutien à la stratégie avec 4 points de vigilance particulière
Mais, au-delà de cette attaque qui ne résume pas la situation de nos forces en Afghanistan, l'enjeu crucial, c'est celui de la stratégie capable de relancer la dynamique de progrès. A droite comme à gauche, nous sommes nombreux à en convenir.
Cela tombe bien puisque il y a 5 mois, au sommet de Bucarest, la France a convaincu ses alliés de redessiner la stratégie de la coalition en Afghanistan. L'envoi de renforts français était même conditionné à cette redéfinition stratégique.
Je demande à chacun de le reconnaître de manière objective : au moment où la lassitude et même parfois le doute commençaient à gagner certains esprits, l'action du Président de la République a été décisive pour qu'une nouvelle stratégie soit adoptée et désormais appliquée.
Bien sûr, des défis considérables restent à présent à relever. Je veux insister sur 4 points qui sont pour moi capitaux.
- D'abord, le passage de relais aux Afghans. Si nous sommes tant attachés à « l'afghanisation », c'est parce que nous sommes convaincus qu'il n'y aura pas de succès en Afghanistan sans que les Afghans eux-mêmes reprennent en main leur sécurité.
Pour pacifier le pays et ouvrir la voie d'un retour progressif des troupes alliées, la condition sine qua none, c'est une armée afghane, bien formée, bien payée et représentative de la diversité des populations locales.
Cette conviction justifie tous les efforts déployés par la France pour former l'Armée nationale afghane. Je note les avancées : 50 000 hommes déjà formés, un objectif de 134 000 soldats. Il faut à présent limiter les désertions et élargir le recrutement à toutes les ethnies pour que le peuple afghan se reconnaisse davantage dans son armée.
Je me félicite également que cette politique d'afghanisation que nous appelons tous de nos voeux, deviennent réalité : la France en effet a passé le relais aux Afghans dans la ville de Kaboul le 28 août dernier. Et d'ici mars 2009, c'est toute la région Centre, autour de Kaboul, qui va passer sous responsabilité afghane. Au fur et à mesure des progrès de l'Armée afghane, il ne faudra pas hésiter à amplifier ce transfert.
- Deuxième impératif à mes yeux : l'aide au développement et à la reconstruction doit être une priorité perceptible pour les Afghans.
Même si je regrette que la contribution de la France reste trop limitée, la Conférence de Paris en juin dernier a été une grande avancée, avec près de 20 milliards de dollars collectés.
Maintenant, il faut vraiment s'assurer que les sommes soient bien utilisées et rapidement, en évitant détournements et corruption. Je souhaite donc que les ministres de la Défense et des Affaires Etrangères puissent nous faire un état des lieux régulier des progrès obtenus grâce à la solidarité internationale.
- Je veux en troisième point évoquer le problème de la drogue. A mon sens, c'est une des difficultés majeures à laquelle nous sommes confrontés. Le pavot, c'est le « nerf de la guerre » qui finance l'insurrection et le cancer qui corrompt tout.
Je comprends que ce problème de stupéfiants relève en priorité du ressort des autorités afghanes. Mais je ne peux pas accepter que nous laissions les Afghans seuls, en prise aux barons de la drogue. J'encourage donc le gouvernement à rechercher des solutions concertées, avec les autorités locales et nos alliés.
Félicitons-nous déjà que, pour la première fois dans une opération internationale de ce type, à l'initiative de la France, l'Onu ait reconnu la nécessité de lutter contre ce fléau pour le règlement du conflit. Mais cela ne résout pas tout et ouvre même bien des débats.
Faut-il étendre le mandat de l'OTAN pour contrer plus efficacement les trafiquants ? Je le pense et nous devons viser en priorité les laboratoires chimiques, les réseaux et les trafiquants qui importent les éléments chimiques indispensables à la fabrication de l'héroïne.
Et surtout donnons à la police locale la formation et les moyens de prendre en charge elle-même cette répression, avec notre appui.
Mais tous ces efforts resteraient vains si le Gouvernement afghan ne s'engageait pas plus activement contre la corruption et l'influence des trafiquants dans l'administration. Le Président Karzaï a pris des engagements très clairs devant la communauté internationale. Je le dis au ministre des Affaires Etrangères : ne nous contentons pas de promesses. Veillons à ce qu'elles soient tenues.
- Enfin, quatrième impératif tout aussi décisif : la nécessité d'une approche globale de la question afghane, en tenant compte des puissances voisines. Je pense particulièrement au Pakistan.
Tant que les zones frontalières du Pakistan resteront des « trous noirs », l'équilibre régional restera fragile. A mes yeux, le pire scénario serait une déstabilisation de l'ensemble de la région. Voilà pourquoi laisser tomber l'Afghanistan serait irresponsable.
C'est le 1er domino qui risquerait d'en faire chuter beaucoup d'autres. A commencer par le Pakistan, détenteur de l'arme nucléaire et qui vient d'être frappé par un nouvel attentat meurtrier, comme par hasard, peu après le discours de son nouveau président s'engageant à lutter avec ardeur contre le terrorisme.
7. Contre le fatalisme. Pour l'évaluation régulière des avancées.
Chers collègues, vous l'entendez, je ne nie pas la difficulté de la situation. Nous avons devons nous des défis considérables qui ne se règlent pas en six mois.
Mais je rejette fermement le défaitisme de ceux qui n'ont qu'un mot à la bouche : « l'enlisement », de ceux qui n'ont qu'une stratégie : « après, nous le déluge », de ceux qui n'ont qu'une réponse à tous les problèmes : « Je m'en lave les mains. »
Je rejette également le simplisme des donneurs de leçons habituels qui posent leurs exigences depuis Paris sans rien entendre à la complexité locale. Il serait absurde de donner rendez-vous aux Talibans en leur disant par avance à quelle date nous pourrions partir, sans tenir compte des évolutions du terrain...
Depuis 2001, nous avons prouvé que des progrès majeurs étaient possibles. Avec une stratégie clarifiée, des moyens conséquents et un engagement persévérant de tous les alliés, je crois que nous pouvons aller plus loin. Jusqu'à redonner progressivement aux Afghans la maîtrise de leur propre destin.
Voilà l'objectif que nous devons viser. C'est à condition de l'atteindre que nous pourrons revoir le dispositif militaire et le réduire progressivement.
Dans cette logique, je vous demande, Monsieur le Premier Ministre, au nom des députés du groupe UMP, de procéder à une évaluation régulière de la situation militaire et civile sur le terrain. Et de nous en rendre compte aussi souvent que possible, afin que nous en débattions.
Ces débats que nous n'avons pas eus pendant trop d'années sur des questions essentielles comme l'envoi de nos soldats à l'étranger, il faut que nous les ayons régulièrement. Dans le calme et la sérénité. C'est ainsi que nous pourrons constater ensemble quand nos objectifs seront atteints et quand le début d'un désengagement progressif sera raisonnable.
Je veux à nouveau m'adresser à mes collègues socialistes. Sans aucune polémique. Simplement dans un souci de clarté pour notre débat. La question qui se pose aujourd'hui n'est pas celles des conditions de notre présence, de la stratégie. Nous en avons bien sûr parlé devant le Gouvernement et c'était important de le faire. Mais in fine, la question à laquelle vous devez répondre aujourd'hui, c'est bien : « la France doit-elle se désengager de l'Afghanistan ? Oui ou non ? »
Dans votre lettre au Président de la République le 13 septembre, vous répondiez à cette question en écrivant - c'est en bas de la page 2 - « elle ne le doit pas ». A vous d'en tirer les conséquences aujourd'hui en votant de façon cohérente. Faire le contraire serait irresponsable.
Comme si tous nos efforts n'avaient servi à rien. Comme si nos soldats étaient morts pour rien. Nous ne pouvons pas l'accepter.
8. Appel au courage et à la détermination pour tous les Français.
Enfin, alors que c'est la 1ère fois depuis longtemps que les Français suivent avec autant d'intensité une opération extérieure de nos soldats, je voudrais m'adresser à tous nos concitoyens, au-delà des murs de cet hémicycle.
Dans le combat que nous menons, contre la misère, contre la terreur ; dans le combat que nous menons, pour les Afghans et pour la paix ; dans le combat que nous menons pour la sécurité de notre pays ; il ne faut pas flancher. Même si nous risquons de payer encore le prix du sang.
Parmi les soldats qui ont survécu à l'embuscade de la Vallée d'Uzbin, ils sont nombreux à vouloir repartir au combat. Après cette épreuve, ils ont une conscience encore plus claire du risque qu'ils prennent. Mais ils ne le fuient pas. Ils sont prêts à se battre. Avec courage et détermination. Nous devons nous inspirer de cet exemple.
Face à la guerre des images, face aux chocs des photos, il est parfois difficile de dissimuler notre émotion.
Les Talibans en sont conscients. Ils jouent de notre système médiatique pour faire basculer l'opinion publique des pays engagés et inciter au retrait des troupes.
La course aux scoops et aux tirages records sont les complices de fait de cette stratégie. Faut-il pour autant blâmer ou pire, censurer tel ou tel journal ? Je ne le pense pas.
Comme Tocqueville, je considère que « pour recueillir les biens inestimables qu'assure la liberté de la presse, il faut savoir se soumettre aux maux inévitables qu'elle fait naître. »
Je préfère en appeler à la conscience de chaque journaliste, de chaque responsable de presse, avant la publication d'un article ou d'une photo qui jouerait objectivement le jeu des Talibans.
J'invite donc chaque Français à éviter les pièges que nous tendent nos ennemis à travers la mise en scène de leurs horreurs.
Tout autant que la soif de vengeance haineuse, bannissons le repli dicté par la peur. Gardons en tout temps notre lucidité, notre courage et notre confiance. Nous le devons à nos soldats.
Mes chers collègues, à nous aujourd'hui d'assumer notre responsabilité, en votant clairement pour la prolongation de la présence française en Afghanistan.
Dans ce pays ami, la France refuse le choc des civilisations comme elle refuse de sortir de l'Histoire. Elle prend ses responsabilités. Dans l'intérêt de nos concitoyens et de leur sécurité, dans l'intérêt de la paix et de nos valeurs.
Je vous remercie.
Source http://www.ump.assemblee-nationale.fr, le 23 septembre 2008