Déclaration prononcée au nom de M. Alain Joyandet, secrétaire d'Etat à la coopération et à la francophonie, sur l'aide au développement dans un contexte de fragilité et de conflit, à Paris le 2 décembre 2008.

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Circonstance : Première réunion sur le suivi des principes du Comité d'aide au développement sur le traitement des situations de fragilité et de conflit, à Paris le 2 décembre 2008

Texte intégral

Madame et Messieurs les Ministres,
Chers Collègues,
Je suis très heureux de vous accueillir à cette réunion au nom du secrétaire d'Etat chargé de la Coopération et de la Francophonie, M.Alain Joyandet, qui participe en ce moment même à la conférence sur le financement du développement à Doha.
A travers la réunion que vous organisez aujourd'hui, vous jetez, nous jetons les fondements d'un nouveau dialogue international entre pays partenaires et membres de l'OCDE sur le traitement en commun des situations de fragilité et de conflit.
Ce dialogue est double : sur le suivi des principes d'engagement du CAD (Comité d'aide au développement) d'avril 2007, thème de la réunion d'aujourd'hui ; au-delà, sur la conception même et les objectifs de la "construction de la paix" et du "renforcement de l'Etat" (c'est la traduction en français des expressions jumelles de peace-building et state-building). Ce thème plus large sera abordé demain à nouveau ici même par les pays partenaires, avant qu'ils ne fassent part de leurs réflexions le jeudi 4 aux membres de l'OCDE, au siège de cette organisation.
Par cet exercice inédit, qui est le résultat presque inespéré du Forum d'Accra et de sa préparation, notamment la réunion de Kinshasa en juillet dernier, le traitement des situations de fragilité se transforme profondément. Il s'agit bien d'un "tournant majeur" ou encore, en anglais et d'une manière plus imagée, d'un "watershed" : nous avons franchi en commun une "ligne de partage des eaux" entre la tentation récurrente du monologue paternaliste qui guettait les donneurs d'aide et le véritable partenariat international avec les bénéficiaires, sur une base d'égalité de statut, pour traiter en commun les situations de fragilité.
Cette dernière formule, je dois le rappeler, n'est pas une expression vague de technocrates, mais traduit la persistance aujourd'hui de tragédies bien réelles, qui restent au coeur de l'insécurité mondiale, autant de drames localisés mais aussi reliés entre eux par les logiques du désordre international, qui sont vécues quotidiennement par les populations déshéritées du "milliard d'en bas" (bottom billion), prises au "piège des conflits" (conflict trap) et du non-développement, comme l'a souligné Paul Collier d'une manière prémonitoire. Les urgences de la crise financière mondiale ne doit pas nous faire oublier cette dimension elle aussi cruciale des relations internationales, que la première risque même d'aggraver.
Pour rompre définitivement ce cercle vicieux, ce qui est un impératif tout aussi politique qu'éthique, la France veut être en avec vous tous, partenaires et donneurs d'aide, sur la ligne de front de ce combat. Nous l'avons été au FSG (Fragile States Group), que j'ai l'honneur de co-présider jusqu'à la constitution du Network on Conflicts and Fragilities (INCAF), de dimension vraiment "internationale", qui lui fera suite ; nous l'avons confirmé dans le cadre de la préparation de la table-ronde 7 d'Accra, comme co-président avec la RDC et la BAD (Banque africaine de développement), avec l'appui constant de son rapporteur, les Pays-Bas ; nous le serons toujours à l'avenir en soutenant la configuration nouvelle et encore à promouvoir pour ce dialogue, avec toute la force de conviction qui anime tous ceux, ici présent, qui ont travaillé si fortement dans ce sens et veulent rester entièrement mobilisés à l'avenir.
Je salue donc tout spécialement le "groupe des 5" pour les suivis des principes du CAD, qui donne une nouvelle dimension à l'appropriation par les partenaires, au-delà de la Déclaration de Paris mais aussi en continuité avec elle. Je salue aussi, au niveau national et individuel, tous les "vétérans" (car ils méritent ce terme d'éloge), de Kinshasa où se sont réunis pour la première fois sur une base non régionale les partenaires et les donneurs d'aide pour esquisser autour d'une même table ce nouveau dialogue international.
Celui-ci transforme et dépasse dores et déjà le seul cadre de l'OCDE . Il devient crucial d'y associer les structures de l'ONU, jusqu'au niveau le plus politique. Dans la suite des engagements pris lors de la table-ronde d'Accra et qui se traduisent dans le "triple A" (par. 21), vous pouvez compter sur les soutiens sans faille de la France à cet égard.
Que dire d'autre ? Je vous souhaite à tous une excellente discussion sous l'autorité courtoise, ferme et avertie, de M. le ministre Kamitatu, avant de vous retrouver à l'OCDE mais aussi, demain soir, à nouveau en ces lieux pour un cocktail amical.
Bons et riches débats donc et à bientôt !.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 3 décembre 2008