Déclaration de M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale, sur l'accès de tous les enfants à la connaissance, l'échec scolaire et l'insertion des jeunes par l'enseignement professionnel, Paris le 25 novembre 2008.

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Circonstance : Conférence mondiale de l'Unesco sur l'éducation à Paris le 25 novembre 2008

Texte intégral


Permettez-moi d'abord de remercier le directeur général de l'UNESCO de m'avoir invité à participer à cette 48e session de la Conférence internationale de l'éducation, organisée par le Bureau international de l'éducation.
Je suis très heureux et honoré de pouvoir m'exprimer aujourd'hui dans cette enceinte, où tous les continents sont représentés, pour évoquer avec vous le thème retenu : « L'Éducation pour l'inclusion : la voie de l'avenir ».
Sur ce sujet, nous avons des attentes communes. Quelles que soient les régions du monde, nous sommes tous confrontés aux mêmes défis. Je crois pour ma part qu'ils sont au nombre de deux :
Comment faire émerger une école plus juste, plus ouverte et plus ambitieuse pour tous les jeunes, quels que soient leur sexe, leur appartenance ethnique ou religieuse ou encore la situation économique ou sociale dans laquelle ils se trouvent ?
Comment, par ailleurs, les systèmes éducatifs peuvent-ils contribuer à accroître la compétitivité de nos économies ? Cela pose la question des études et des formations que nous devons développer, pour favoriser l'insertion économique et sociale tout au long de la vie.
Aujourd'hui, je suis convaincu que l'investissement dans l'éducation et la formation est essentiel pour préparer nos sociétés à affronter les défis de l'avenir et pour que chacun puisse y prendre sa place :
Faire le choix de l'éducation, c'est d'abord une aspiration éthique, car l'éducation fait partie des droits fondamentaux de la personne humaine comme le souligne l'article 26 de la déclaration universelle des droits de l'homme et du citoyen dont nous célébrons le 60e anniversaire.
Faire le choix de l'éducation, c'est aussi une décision stratégique en faveur d'une croissance durable, de la lutte contre la pauvreté et de l'amélioration de la santé des populations. En effet, l'éducation augmente les compétences des individus, contribue à accroître les niveaux de vie et facilite l'ouverture sur l'économie mondiale.
C'est pour cette double raison que la communauté internationale a clairement pris position pour l'éducation pour tous à partir des années 1990. Elle l'a réaffirmée avec force à Dakar en 2000 et repris la même année aux Nations-Unies avec l'ambition, affichée dans les objectifs du millénaire, d'une scolarisation primaire universelle d'ici 2015 et d'une parité dans l'accès à l'éducation entre les garçons et les filles.
Aujourd'hui, il est certain que des progrès ont été accomplis dans toutes les régions du monde. Pourtant, atteindre l'objectif affiché suppose de prolonger et même d'amplifier cette dynamique. C'est pourquoi, la France et l'Europe continueront à se mobiliser pour soutenir l'effort des pays en développement dans le secteur de l'éducation.
Si nous sommes tous convaincus de la priorité absolue que représente la scolarisation primaire partout dans le monde, je ne crois pas pour autant qu'il faille négliger l'enseignement secondaire.
Il s'agit en effet d'un maillon décisif de tous systèmes éducatifs car il joue un rôle majeur dans le développement du capital humain de chaque pays, et partant dans l'effort collectif engagé en faveur du développement durable.
Il faut donc se réjouir que les pays du sud connaissent actuellement une explosion du nombre de leurs élèves scolarisés dans le secondaire. C'est une évolution qu'il faut souligner, mais aussi soutenir afin qu'une part croissante des jeunes générations accède à l'enseignement secondaire.
D'ailleurs, la modernisation de l'enseignement secondaire n'est pas seulement un enjeu pour les pays du Sud mais aussi pour ceux du Nord.
En effet, je ne puis accepter qu'en France 150 000 élèves quittent chaque année le système éducatif sans aucune qualification, je ne puis accepter que 15% des lycéens redoublent la classe de seconde, je ne puis accepter que la moitié des lycéens qui entrent à l'université échoue à obtenir une licence au bout de trois ans. C'est parce que je considère que ces échecs sont un véritable gâchis et parce que je veux que les lycéens français réussissent que j'ai réformé en profondeur la voie professionnelle et que je réforme actuellement le lycée général et technologique.
Qu'elle soit primaire ou plus encore secondaire, l'éducation est absolument incontournable pour favoriser le processus « d'inclusion » auquel cette conférence est consacrée. En effet, qu'il soit considéré sous l'angle du refus de l'exclusion, de l'effort en faveur de l'intégration des plus démunis, ou même du sentiment d'appartenance à la nation, le processus d'inclusion est inséparable de l'école.
De fait, c'est d'abord à l'école que peuvent et doivent se corriger les inégalités liées à la naissance.
Bien entendu, il s'agit là d'un chantier immense mais je crois qu'il est absolument nécessaire de donner plus à ceux qui ont moins. En effet, je suis convaincu qu'une politique volontariste d'égalité des chances menée en direction des élèves défavorisés peut contribuer à offrir à tous les élèves les moyens de réussir leur scolarité et à terme leur intégration sociale.
C'est aussi à l'école que doivent se transmettre ces savoirs partagés et cette culture commune qui seuls peuvent permettre de lutter contre les dérives communautaires et fonder le sentiment d'appartenance à une même société nationale et, au-delà, mondiale. Bien entendu, la diversité culturelle a toute sa place à l'école, mais elle doit être comprise comme l'occasion d'une découverte de l'autre et de sa richesse et non pas devenir le prétexte d'un repli identitaire.
C'est enfin à l'école que se jouent les défis de l'avenir qu'il s'agisse de préparer l'intégration de tous les enfants ou de bâtir cette société de la connaissance que l'Union européenne appelle de ses voeux depuis le conseil européen de Lisbonne en 2000.
Je sais, pour en avoir parlé avec plusieurs d'entre vous à la réunion des ministres de la CONFEMEN au mois de juin dernier à Caraquet, que de très nombreux pays ont le souci de développer les formations professionnelles en relation avec le monde économique pour faciliter l'insertion de la jeunesse sur le marché de l'emploi. C'est un souci que je partage et j'ai d'ailleurs souhaité réformer l'enseignement professionnel français pour le rendre plus efficace et plus attractif. Mais favoriser « l'inclusion », c'est aussi amener davantage de jeunes dans le supérieur et mieux les préparer à y réussir et la réforme du lycée général et technologique que j'ai engagée a pour ambition de répondre à ce défi.
Vous le voyez mesdames et messieurs, la France est aujourd'hui convaincue que l'équilibre et la cohésion des sociétés contemporaines passent par l'accès de tous les enfants à la connaissance, par l'élévation du niveau général de qualification et donc par un effort résolu en faveur de l'école, tant dans le domaine du primaire que du secondaire.
Bâtir une école plus juste et offrir à tous les mêmes chances de réussite, telle est l'ambition de la France. Plus profondément, je suis convaincu que c'est un projet sur lequel nous pouvons tous nous accorder, car il est à la fois résolument humain, profondément universel et parfaitement en phase avec les défis de notre temps.
Je vous remercie.
Source http://www.education.gouv.fr, le 3 décembre 2008