Interview de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'Etat chargée de l'écologie, à RMC le 13 janvier 2009, sur le conflit entre Israël et le Hamas, l'éventuelle extension du RSA aux jeunes et la pollution induite par les poids lourds.

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Média : Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral

J.-J. Bourdin.- Notre invitée ce matin, Nathalie Kosciusko-Morizet, bonjour.
 
Bonjour.
 
Merci d'être avec nous. Il paraît que vous êtes très populaire maintenant, ministre très populaire.
 
Oh ben, écoutez, pourvu que ça dure !
 
C'est quoi, pourquoi cette popularité ?
 
Je ne sais pas, c'est vous qui le dites ça.
 
Non, non, moi, je lis les journaux, je lis les... bon.
 
Ecoutez, si les Français veulent me créditer de popularité...
 
Bon, allez, regardons l'actualité ensemble, d'accord ?
 
Je vous en prie, allons-y !
 
Le Proche-Orient, Gaza. Qui est responsable de la situation, le Hamas ou Israël ?
 
 Oh ! Oh ! Oh !
 
Dure comme question.
 
Oui, mais en plus inextricable, parce qu'il y a la question de la responsabilité du déclenchement et Israël, manifestement, répond pour faire cesser à une attaque de roquettes sur le sud de son territoire. Et puis après, il y a les responsabilités de fond, les responsabilités à travers l'histoire. Moi, je ne sais pas si le jeu des responsabilités peut vraiment nous permettre de nous en sortir.
 
Conduire à la paix.
 
Or, tout ce qu'on veut, tous, c'est trouver la paix, tous, y compris dans cette région-là, je crois, l'immense majorité. Donc, je ne fonde pas beaucoup d'espoir sur le jeu des responsabilités mais je fonde plutôt des espoirs sur le jeu justement des espérances, une espérance de paix partagée.
 
Espérance de paix partagée. Pour l'instant, tous les appels à la paix sont inefficaces, ils ne sont pas entendus ni par le Hamas, ni par Israël.
 
Oui, parce qu'il ne faut pas seulement des appels à la paix, il faut des projets concrets, c'est ce que le président de la République a essayé de faire à l'occasion de sa tournée là-bas en début de semaine dernière, allant voir les uns, les autres, retournant voir notamment l'Egypte pour essayer de trouver des solutions qui, semble-t-il, pourraient passer autour de la sécurisation de la ligne sud, là.
 
Oui, Rafah et tout le passage, oui.
 
Oui, la ligne qu'on appelle la ligne de Philadelphie, la ligne de passage entre Gaza et l'Egypte.
 
N. Kosciusko-Morizet, est-ce que vous craigniez pour la paix en France même, enfin le calme en France même ?
 
En tout cas, moi j'y fais très attention. J'y fais très attention par exemple comme maire dans ma ville.
 
Oui, dans votre ville, justement.
 
Je fais très attention à ce que ma porte reste ouverte à tous, à ce que la mairie en particulier, et même la municipalité parce que moi j'ai une équipe municipale très mélangée, reste un lieu de dialogue. On a eu, par exemple, en bureau municipal avec des conseillers municipaux qui étaient plus sensibles à ces problématiques, à la cause palestinienne, des discussions de fond sur la question de savoir quelle devait être la position de la mairie. Je crois que les élus ont un rôle apaisant à jouer, à la fois d'ouverture, d'écoute, et en même temps de non prise de position. Je veux dire, on n'a pas à interférer. La France est un lieu d'expression libre, chacun doit pouvoir dire en France quelles sont ses positions, je veux dire dans le respect des uns et des autres et de la mesure par rapport à ce conflit. En revanche, on n'a pas à interférer et à importer. Ca ne servirait à rien, on n'apporterait rien là-bas et on se créerait des problèmes ici, des problèmes graves.
 
N. Kosciusko-Morizet, parlons de l'actualité et de la nomination d'un Haut commissariat à la Jeunesse, M. Hirsch, en l'occurrence. B. Laporte perd donc le secrétariat d'Etat à la Jeunesse. Qui a pu dire, écoutez bien cette phrase, qui a pu dire, « ça va faire une belle jambe aux jeunes » ?
 
Ah oui, j'ai vu, c'est F. Bayrou.
 
C'est F. Bayrou, oui.
 
Eh bien, moi, ça m'a choqué, je vais vous dire parce que si F. Bayrou ne croit pas à la politique, il faut qu'il arrête. Donc, il pense que les ministres ne servent à rien, ils pensent que l'action publique ne sert à rien. Mais il faut qu'il arrête, il faut qu'il aille faire autre chose.
 
Mais à quoi sert, par exemple, le ministre de la Relance ? Moi, je cherche toujours, à quoi sert-il ?
 
Oh ben ça, je vous assure, le ministre de la Relance il est sur le dos de tous les ministères, de toutes les administrations...
 
... oui, votre ami P. Devedjian.
 
... pour vérifier que l'argent qui est prévu pour la relance va bien dans la relance et qu'il y va vite, et qu'il est vite injecté dans l'économie française pour servir l'économie, pour servir l'emploi, pour remettre du jus. Je veux dire, on ne peut pas avoir une réaction comme celle de F. Bayrou ou alors on arrête la politique, parce que c'est une réaction désabusée, « oh la la, ça sert à rien, ça va encore servir à rien ». Ben, écoutez, M. Hirsch a fait la preuve dans ses fonctions précédentes qu'il était bien utile, il est le père du RSA, et moi je gage que dans ses nouvelles fonctions, il saura mettre...
 
Puisque vous parlez du RSA, faut-il étendre le RSA aux jeunes de 18-25 ans en activité ?
 
Pouuuf !
 
Ah, N. Kosciusko-Morizet ! Mais c'est une question claire.
 
Oui.
 
Oui, claire. Pourquoi est-ce que quand on a moins de 25 ans, on a 24 ans et demi, on n'a pas droit au RSA dans ce pays ?
 
Non mais ça... la question c'est de savoir si ces différentes prestations sont un outil pour aller vers l'emploi, ce qu'elles sont, et à ce moment-là il n'est pas certain que le chemin vers l'emploi entre 18 et 25 ans soit le même qu'à plus de 25 ans, ou si ces prestations sont simplement des prestations statutaires. Nous, ce qu'on a dit, le choix qu'on a fait...
 
...enfin, à 23 ans, on a déjà commencé peut-être sa vie professionnelle, et puis on s'est retrouvé en difficulté, et puis on a besoin du RSA.
 
Oui, mais on n'a pas la même histoire, on est dans un chemin vers l'emploi, on n'a pas la même histoire que quelqu'un qui a 45 ans et qui est en phase de reconversion. Ce n'est pas la même chose.
 
Mais selon vous, est-ce qu'il faut l'étendre aux 18-25 ans le RSA ? Vous y seriez favorable ?
 
Ca mérite au moins examen. Moi, comme ça, spontanément, je n'y courrais pas.
 
Bien, bon ! N. Kosciusko-Morizet, on va parler d'autre chose, des chauffeurs routiers, parce que j'ai vu cette étude européenne à propos de la pollution des poids lourds en Europe. Les émissions de CO² vont augmenter de 50 % à l'échéance 2030 en partie à cause des poids lourds qui sont responsables de 20 % de la congestion routière et qui causent deux fois plus de morts que les voitures particulières. Que préparez-vous pour les poids lourds ?
 
On est dans une lutte contre la montre, véritablement, pour essayer de diminuer la part des poids lourds dans le transport de fret.
 
Ce sont des pollueurs ?
 
Oh ben, un poids lourd c'est un poids lourd. Alors, proportionnellement, si vous voulez, par rapport aux poids lourds des années 70-80, compte tenu des nouvelles normes - et on en a encore négociées pendant la présidence française de l'Union européenne - un poids lourd par rapport à un poids lourd d'il y a trente ans est de moins en moins polluant, mais ça ne change rien au problème de fond qui est qu'on transporte de plus en plus de marchandises. Donc, même si à l'unité c'est moins polluant, ça reste considérable.
 
Ca fait des années qu'on nous dit « on va développer le fret et tout », mais il y a plus de poids lourds.
 
Je prends un exemple très concret, Canal Seine/Nord Europe, ça fait des années qu'on en parle, là on est en train de lancer et ça fait partie du plan de relance. C'est-à-dire qu'en fait quand on parle du plan de relance, vous savez, 35 % des financements du plan de relance vont vers le grand ministère de l'Ecologie et, en fait, ce sont des anticipations...
 
... ils ne vont pas au ministère de la Relance, c'est vers le grand ministère de l'Ecologie.
 
Mais ils sont gérés par le ministère de la Relance, mais ils vont vers des projets, si vous voulez, qui sont portés par nous et qui sont des anticipations des investissements du Grenelle de l'environnement. Donc, par exemple, le Canal Seine/Nord Europe qui est très intéressant parce qu'il permet... ce n'est pas seulement quelques kilomètres de canal en plus, c'est que ça permet de connecter, en fait, différents réseaux de canaux entre eux. Donc, ça permet de diminuer d'un nombre considérable les poids lourds qui sont sur les routes. Bon, là, maintenant, c'est lancé, on y est.
 
Bon, ils ne sont pas suffisamment taxés...
 
... et ça fait des années qu'on en parlait.
 
Est-ce qu'ils sont suffisamment taxés, franchement, vous, ministre de l'Ecologie ?
 
Moi, surtout ce que je crois c'est qu'il faut plus moduler en fonction de leur pollution, et ça c'est dans la loi Grenelle 2 qu'on va discuter à l'Assemblée à partir du printemps, là, dans les assemblées parlementaires. Dans la loi Grenelle 2, on prévoit à partir de 2010 de différencier la taxation des poids lourds en fonction de leurs émissions de CO². Moi, j'y crois beaucoup parce que, si vous voulez, c'est une incitation aux gestionnaires de flottes à adapter leurs flottes plus rapidement. Et puis c'est juste. Ce n'est pas normal qu'un poids lourd très polluant paie autant qu'un poids lourd moins polluant, et vice versa, surtout que maintenant il y a des évolutions technologiques qui permettent quand même d'améliorer beaucoup les choses. Mais, il faut appuyer sur les deux, c'est-à-dire à la fois avoir... c'est comme la voiture particulière, il faut à la fois avoir des moyens de transport individuel, le poids lourd, la voiture particulière, moins polluant, et puis il faut aussi aller vers l'alternative, c'est pour ça que je parle de Canal/Seine Nord Europe. Et je pourrais parler aussi du fret ferroviaire, les nouvelles voies qu'on lance dans le Grenelle et qui vont traverser la France.
 
Sur le LGV, le futur TGV qui va relier Paris à Nice, ce n'est pas votre secteur, N. Kosciusko-Morizet.
 
Non.
 
Vous ne savez pas quel tracé sera choisi, le nord ou le sud, vous n'avez pas d'information.
 
Disons que j'ai de scoop à vous donner sur le sujet.
 
Vous n'avez pas de scoop !
 
Mais vous savez, regardez de près puisque à l'intérieur du grand ministère, vous avez à la fois J.-L. Borloo bien sûr, vous avez D. Bussereau qui est le premier en charge, et vous H. Falco qui est le maire de Toulon.
 
Oui, et qui est en charge de...
 
...et qui s'intéresse de près à la question. ...
 
de l'aménagement du territoire.
 
 
 
Et puis, vous avez moi qui veille à ce que les espaces naturels soient le mieux possible préservés.
 
Alors, les espaces naturels seront plus préservés par le tracé nord ou par le tracé sud ?
 
Du point de vue strictement environnemental, le tracé sud est moins agressif pour les espaces naturels...
 
Moins agressif pour les espaces naturels.
 
...Mais peut poser d'autres types de problèmes, si vous voulez. C'est plus un secret pour personne, c'est dans les documents.
 
Bon, N. Kosciusko-Morizet est notre invitée. Il est 08 h 42. On va parler d'éclairage public parce que je sais que ça vous tient à coeur, et on va parler politique, cette invraisemblable course à la candidature régionale en Ile-de-France. Je dis « invraisemblable » parce qu'il y a des sondages qui sortent, il y a l'un des deux candidats qui parle de coups bas, de manipulations - je parle de R. Karoutchi qui est opposé à V. Pécresse. Vous allez nous parler de tout cela.
 
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 13 janvier 2009