Texte intégral
J.-P. Elkabbach.- Les premiers propos sont toujours très attendus. Merci d'être avec nous B. Hortefeux, bonjour.
Bonjour.
Votre ministère, quelle surface, quel territoire, monsieur Superman !
Ecoutez d'abord, dommage que mes enfants soient déjà à l'école parce que l'évocation, sinon la comparaison avec Superman, leur aurait naturellement fait énormément plaisir. En réalité, plus prosaïquement et surtout plus modestement, le président de la République et le Premier ministre m'ont effectivement confié des responsabilités larges qui touchent à la vie quotidienne et qui s'inscrivent très directement dans le cadre des préoccupations des Français.
Mais pour qui est-ce le plus difficile, pour E. Besson qui vous succède ou pour vous qui prenez la suite de X. Bertrand ?
D'abord, il n'existe pas de ministère facile, ça c'est un mythe. Tout exercice gouvernemental est un exercice difficile dans lequel on est sous pression, attentif mais en même temps on est heureux parce que c'est servir son pays. Très concrètement, j'ai eu la responsabilité de créer le ministère de l'Immigration, il appartient à E. Besson aujourd'hui de le pérenniser. Il a toutes les qualités humaines, personnelles, d'intelligence et de coeur, pour y parvenir.
Oui, vous ne parlez pas de Bertrand, il n'a pas les mêmes qualités ?
Si, si. Mais X. Bertrand, je m'inscris... Ce sont d'ailleurs les mêmes qualités parce que vous savez pour exercer une fonction gouvernementale, il y a des marques qui sont indélébiles, c'est la patience, c'est l'écoute, c'est le dialogue, c'est le partage, c'est la concertation. Et je m'inscris d'ailleurs directement dans la continuité de X. Bertrand.
Est-ce que vous avez la patience et le goût et le sens de la négociation ?
En réalité, sans dialogue social, la société est bloquée. Et une société qui est bloquée, ça signifie que cela avive les tensions, cela peut nourrir les extrêmes. Et donc c'est le ministère qui doit permettre une démocratie apaisée et c'est ce à quoi je vais me consacrer. Cela signifie plus loin, parce que vous m'avez posé une question précise, ça signifie que je conçois l'exercice de ce ministère comme un moment de dialogue, de concertation et de négociation.
C'est ce qu'on dit toujours quand on arrive...
Non, non, mais je dis la totalité. Après le dialogue, après la concertation, après la négociation, vient le temps de la décision. Mais l'un ne doit pas bousculer l'autre.
Qu'est-ce X. Bertrand vous a laissé à faire en urgence ?
D'abord il m'a donné un conseil que j'ai suivi à la lettre. Moins de cinq minutes, réellement, moins de cinq minutes après la passation de pouvoir, j'ai symboliquement souhaité appeler individuellement la totalité des partenaires sociaux. Parce que, encore une fois, je veux que le premier signal, ce soit celui du dialogue et de la concertation.
Est-ce qu'ils vous ont dit ? Ils étaient sceptiques ou ils ont étaient surpris les syndicats que vous avez eus au téléphone ?
Mais non, ils ont considéré d'abord que c'était correct de ma part et deuxièmement, surtout, ils ont dit, "nous on ne juge pas sur la personne, on jugera sur les actes et sur les résultats". C'est tout ce que je leur demande. Et donc, la concertation et le dialogue vont commencer dès les prochaines heures.
Est-ce que vous leur avez donné votre numéro de portable ?
Comme racontait un jour J. Lang, je n'ai pas changé de numéro de portable depuis 1994 et je n'ai pas l'intention de le modifier aujourd'hui.
X. Bertrand vous a donné un conseil, et vous quelle est votre priorité ? Vous arrivez, vous avez un ministère immense encore une fois, c'est vrai quand on fait l'énumération. Il y a une priorité, au moins une ?
Il n'y a pas une priorité puisque que comme la surface, la superficie de ce ministère est large, en réalité, c'est un ministère qui doit relever des défis quotidiens afin de préserver l'avenir. Qu'est-ce que ça veut dire ? Cela veut dire d'abord qu'il faut que j'aie des clauses de rendez-vous, des clauses d'objectifs. La première clause de rendez-vous, ce sont les retraites. F. Fillon a initié une réforme très importante en 2003, il y a une clause de rendez-vous en 2010, il faut s'y préparer. Avec, en même temps, le souci, naturellement, d'aider les plus fragiles et de respecter l'engagement d'augmentation du minimum vieillesse de 25 % sur ce quinquennat. Mais il n'y a pas que cela, il y a la question de la famille ; la famille c'est essentiel. Vous savez, le matin, on a tendance à entendre que des mauvaises nouvelles, la réalité c'est qu'il y a de bonnes nouvelles. Aujourd'hui, la France est le pays qui a le taux de fécondité le plus élevé d'Europe, nous sommes en tête de l'Europe. Cela signifie d'abord que la politique française de natalité est une politique volontariste. On dépense 90 milliards d'euros chaque année, c'est 5 % du PIB, c'est le double de la moyenne des autres pays européens.
Ça va, vous commencez à avaler les dossiers...
Mais ça signifie très précisément, que comme l'a expliqué N. Morano, il y a des besoins très importants de garde, 200 à 400.000. Il faut que nous puissions répondre à cette demande, parce qu'il faut concilier vie professionnelle et vie familiale.
Nous savons quels résultats chiffrés vous étiez obligé, avant, de livrer chaque année. Et maintenant, à quoi saurez-vous, saurons-nous que ça marche ?
Si vous me laissez terminer, je vais vous le dire. Donc j'ai parlé de clause de rendez-vous des retraites, j'évoque la famille... Hier - ça a été diffusé sur cette antenne d'ailleurs ce matin -, j'étais hier dans une maison de retraite ; pourquoi ? Parce que le défi aussi du vieillissement est un défi majeur, et toutes les familles sont concernées. Vous avez aujourd'hui 1,5 million de personnes qui a plus de 85 ans. Dans six ans, c'est-à-dire en 2015, c'est-à-dire demain, il y en aura deux millions. Il faut proposer aux familles les moyens soit de rester à domicile, soit d'aller dans des établissements. Aujourd'hui, avec V. Létard, est initié un plan qui va permettre de créer trois établissements supplémentaires par région. C'est donc très concret. Et juste un point sur ceux qui sont atteints de la maladie d'Alzheimer, vous savez que c'était aussi un enjeu majeur, il y a 850.000 personnes qui sont concernées dans notre pays. Cela signifie très concrètement qu'il y a 1 Français sur 4 qui a une connaissance ou un membre de sa famille qui est touché par cela. On ne peut pas rester les bras ballants, et là aussi, il faut agir.
Génial ce que vous découvrez depuis deux jours...
Mais il a aussi un peu de vécu quand même ! Ne croyez pas que j'ai découvert cela il y a simplement 48 heures.
Vous êtes ministre pas de l'Emploi en période de chômage, vous êtes ministre du Travail. Il faut d'abord qu'il y en ait et qu'on puisse le garder. Ministre du Travail ?
Oui, cela signifie très concrètement là aussi, que mon rôle c'est de dialoguer avec les partenaires sociaux pour utiliser, notamment tous les moyens du code du travail, afin de préserver, protéger l'emploi. C'est la mission principale puisque le travail, c'est le lien social.
A ceux qui ont un travail, comment garantissez-vous qu'ils y arrivent à leur travail ? Est-ce que vous allez compléter, corriger les disfonctionnements et les insuffisances de la loi sur le service minimum ?
En réalité, dans votre interrogation, il y a deux questions. Un, est-ce que la loi qui a réformé le service minimum était utile ? Et deux, est-elle perfectible ?
Réponse ?
Première question : oui, c'était utile puisque dans près de 75% des cas, les préavis de grève qui ont été déposés n'ont pas entraînés de perturbations majeures. C'est donc un succès. Simplement, vous me direz, il y a 25 % des cas dans lesquels il y a des problèmes. Donc je crois qu'il faut observer ce qui s'est passé à la gare Saint-Lazare, deuxième gare de notre pays dans laquelle 400.000 personnes ont été bloquées.
Ca on sait mais est-ce que vous allez éviter de contourner la loi avec les grèves successives de 59 minutes ?
Je dis un principe simple, j'affirme un principe simple : cela n'est pas acceptable. Mais en même temps, il faut aussi comprendre l'émotion d'un cheminot qui a été agressé. Une agression c'est quelque chose qui est ressenti très vivement par soi-même, par ses proches, par ses collègues de travail. Donc il faut aussi avoir cela en mémoire. Mais n'en demeure pas moins que moi je suis naturellement ouvert à tout, et notamment aux propositions, aux initiatives des partenaires sociaux, du monde syndical, des élus et aussi de la SNCF. Et cela doit se faire naturellement en liaison avec D. Bussereau, le secrétaire d'Etat aux Transports.
Voilà tout le monde y passe. Mais vous êtes d'accord qu'il faut réévaluer cette loi, en tous cas l'usage de cette loi ?
Je suis ouvert à cela, mais ne me demandez pas 48 heures après d'avoir des certitudes alors que précisément, je viens de vous expliquer que ma méthode ce serait celle de la concertation et du dialogue.
A Vesoul, le président de la République a stigmatisé "les irresponsables" de SUD Rail. O. Besancenot l'a aussitôt accusé de vouloir "criminaliser" le mouvement social.
Oui, criminaliser, cela relève naturellement des fantasmes habillés de grands mots. Et je suis sûr que les 400.000 personnes qui ont été victimes de cette grève organisée par des personnes minoritaires au sein de l'entreprise, y seront très sensibles. La vérité, c'est que sans doute O. Besancenot ne se sent pas concerné puisque chacun sait que lui, il se promène à vélo.
Mais qui joue avec le feu, qui provoque ?
Je trouve que le mot de "criminalisation" est un mot outrancier qui n'a pas sa place dans le débat aujourd'hui du monde du travail.
Vous arrivez dans ce ministère dans un climat international et national tendu, est-ce que vous craignez désormais à tout moment des risques de radicalisation et d'agitation sociale ? Parce que ça existe, on le sent, on sent l'électricité ?
La réalité naturellement, c'est qu'il faut être vigilant à toutes les formes de tension. Mais il y a aussi une réalité claire, qu'il ne faut pas négliger, c'est que quand il y a une crise, et c'est celle que nous vivons, elle est mondiale donc européenne donc nationale, cela signifie que l'on doit réformer. Pourquoi réformer ? Pour préserver notre mode de vie. Si l'on choisit l'immobilisme, c'est à coup sûr la remise en cause de notre mode de vie. Il faut donc poursuivre la réforme.
La loi annoncée sur le travail conditionnel du dimanche a disparu du Parlement. Est-ce qu'elle sera oubliée ou débattue et votée cette année en 2009 ?
Il faut concilier naturellement les deux. Le principe du respect du repos dominical, mais en même temps tenir compte des aspirations, notamment dans certaines agglomérations. Cela signifie que le débat a été engagé en 2008 à l'Assemblée nationale, il n'est pas terminé, il se poursuivra à l'Assemblée, puis au Sénat, et cela se fera en 2009.
Vous avez oublié de citer F. Amara. Vous en faites une Auvergnate de plus...
Oui, vous ne m'avez pas laissé terminer parce que naturellement, le plan de F. Amara a suscité de grands espoirs et je suis naturellement décidé à l'accompagner afin que ceci se concrétise sur le terrain, s'accélère. Quant à Fadela, c'est une ministre de la République, c'est une référence, c'est un exemple et le fait qu'elle soit auvergnate, naturellement, cela constitue un atout supplémentaire pour moi.
Voila, elles ont toutes été récompensées ! Une dernière remarque : le social, rue de Grenelle, c'est un enjeu pour tous et c'est un test pour vous. La marche suivante c'est peut-être Matignon ; il ne faut pas la louper...
Moi j'y ferai attention, mais je ne parle pas de Matignon, je ferai attention à l'exercice de mon travail ministériel. Je le fais avec une équipe, je le fais avec le conseiller spécial du président de la République, R. Soubie, sur ces sujets. Et en tous cas, toute mon énergie est consacrée au succès de ce ministère. Le reste ne me préoccupe pas.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 19 janvier 2009
Bonjour.
Votre ministère, quelle surface, quel territoire, monsieur Superman !
Ecoutez d'abord, dommage que mes enfants soient déjà à l'école parce que l'évocation, sinon la comparaison avec Superman, leur aurait naturellement fait énormément plaisir. En réalité, plus prosaïquement et surtout plus modestement, le président de la République et le Premier ministre m'ont effectivement confié des responsabilités larges qui touchent à la vie quotidienne et qui s'inscrivent très directement dans le cadre des préoccupations des Français.
Mais pour qui est-ce le plus difficile, pour E. Besson qui vous succède ou pour vous qui prenez la suite de X. Bertrand ?
D'abord, il n'existe pas de ministère facile, ça c'est un mythe. Tout exercice gouvernemental est un exercice difficile dans lequel on est sous pression, attentif mais en même temps on est heureux parce que c'est servir son pays. Très concrètement, j'ai eu la responsabilité de créer le ministère de l'Immigration, il appartient à E. Besson aujourd'hui de le pérenniser. Il a toutes les qualités humaines, personnelles, d'intelligence et de coeur, pour y parvenir.
Oui, vous ne parlez pas de Bertrand, il n'a pas les mêmes qualités ?
Si, si. Mais X. Bertrand, je m'inscris... Ce sont d'ailleurs les mêmes qualités parce que vous savez pour exercer une fonction gouvernementale, il y a des marques qui sont indélébiles, c'est la patience, c'est l'écoute, c'est le dialogue, c'est le partage, c'est la concertation. Et je m'inscris d'ailleurs directement dans la continuité de X. Bertrand.
Est-ce que vous avez la patience et le goût et le sens de la négociation ?
En réalité, sans dialogue social, la société est bloquée. Et une société qui est bloquée, ça signifie que cela avive les tensions, cela peut nourrir les extrêmes. Et donc c'est le ministère qui doit permettre une démocratie apaisée et c'est ce à quoi je vais me consacrer. Cela signifie plus loin, parce que vous m'avez posé une question précise, ça signifie que je conçois l'exercice de ce ministère comme un moment de dialogue, de concertation et de négociation.
C'est ce qu'on dit toujours quand on arrive...
Non, non, mais je dis la totalité. Après le dialogue, après la concertation, après la négociation, vient le temps de la décision. Mais l'un ne doit pas bousculer l'autre.
Qu'est-ce X. Bertrand vous a laissé à faire en urgence ?
D'abord il m'a donné un conseil que j'ai suivi à la lettre. Moins de cinq minutes, réellement, moins de cinq minutes après la passation de pouvoir, j'ai symboliquement souhaité appeler individuellement la totalité des partenaires sociaux. Parce que, encore une fois, je veux que le premier signal, ce soit celui du dialogue et de la concertation.
Est-ce qu'ils vous ont dit ? Ils étaient sceptiques ou ils ont étaient surpris les syndicats que vous avez eus au téléphone ?
Mais non, ils ont considéré d'abord que c'était correct de ma part et deuxièmement, surtout, ils ont dit, "nous on ne juge pas sur la personne, on jugera sur les actes et sur les résultats". C'est tout ce que je leur demande. Et donc, la concertation et le dialogue vont commencer dès les prochaines heures.
Est-ce que vous leur avez donné votre numéro de portable ?
Comme racontait un jour J. Lang, je n'ai pas changé de numéro de portable depuis 1994 et je n'ai pas l'intention de le modifier aujourd'hui.
X. Bertrand vous a donné un conseil, et vous quelle est votre priorité ? Vous arrivez, vous avez un ministère immense encore une fois, c'est vrai quand on fait l'énumération. Il y a une priorité, au moins une ?
Il n'y a pas une priorité puisque que comme la surface, la superficie de ce ministère est large, en réalité, c'est un ministère qui doit relever des défis quotidiens afin de préserver l'avenir. Qu'est-ce que ça veut dire ? Cela veut dire d'abord qu'il faut que j'aie des clauses de rendez-vous, des clauses d'objectifs. La première clause de rendez-vous, ce sont les retraites. F. Fillon a initié une réforme très importante en 2003, il y a une clause de rendez-vous en 2010, il faut s'y préparer. Avec, en même temps, le souci, naturellement, d'aider les plus fragiles et de respecter l'engagement d'augmentation du minimum vieillesse de 25 % sur ce quinquennat. Mais il n'y a pas que cela, il y a la question de la famille ; la famille c'est essentiel. Vous savez, le matin, on a tendance à entendre que des mauvaises nouvelles, la réalité c'est qu'il y a de bonnes nouvelles. Aujourd'hui, la France est le pays qui a le taux de fécondité le plus élevé d'Europe, nous sommes en tête de l'Europe. Cela signifie d'abord que la politique française de natalité est une politique volontariste. On dépense 90 milliards d'euros chaque année, c'est 5 % du PIB, c'est le double de la moyenne des autres pays européens.
Ça va, vous commencez à avaler les dossiers...
Mais ça signifie très précisément, que comme l'a expliqué N. Morano, il y a des besoins très importants de garde, 200 à 400.000. Il faut que nous puissions répondre à cette demande, parce qu'il faut concilier vie professionnelle et vie familiale.
Nous savons quels résultats chiffrés vous étiez obligé, avant, de livrer chaque année. Et maintenant, à quoi saurez-vous, saurons-nous que ça marche ?
Si vous me laissez terminer, je vais vous le dire. Donc j'ai parlé de clause de rendez-vous des retraites, j'évoque la famille... Hier - ça a été diffusé sur cette antenne d'ailleurs ce matin -, j'étais hier dans une maison de retraite ; pourquoi ? Parce que le défi aussi du vieillissement est un défi majeur, et toutes les familles sont concernées. Vous avez aujourd'hui 1,5 million de personnes qui a plus de 85 ans. Dans six ans, c'est-à-dire en 2015, c'est-à-dire demain, il y en aura deux millions. Il faut proposer aux familles les moyens soit de rester à domicile, soit d'aller dans des établissements. Aujourd'hui, avec V. Létard, est initié un plan qui va permettre de créer trois établissements supplémentaires par région. C'est donc très concret. Et juste un point sur ceux qui sont atteints de la maladie d'Alzheimer, vous savez que c'était aussi un enjeu majeur, il y a 850.000 personnes qui sont concernées dans notre pays. Cela signifie très concrètement qu'il y a 1 Français sur 4 qui a une connaissance ou un membre de sa famille qui est touché par cela. On ne peut pas rester les bras ballants, et là aussi, il faut agir.
Génial ce que vous découvrez depuis deux jours...
Mais il a aussi un peu de vécu quand même ! Ne croyez pas que j'ai découvert cela il y a simplement 48 heures.
Vous êtes ministre pas de l'Emploi en période de chômage, vous êtes ministre du Travail. Il faut d'abord qu'il y en ait et qu'on puisse le garder. Ministre du Travail ?
Oui, cela signifie très concrètement là aussi, que mon rôle c'est de dialoguer avec les partenaires sociaux pour utiliser, notamment tous les moyens du code du travail, afin de préserver, protéger l'emploi. C'est la mission principale puisque le travail, c'est le lien social.
A ceux qui ont un travail, comment garantissez-vous qu'ils y arrivent à leur travail ? Est-ce que vous allez compléter, corriger les disfonctionnements et les insuffisances de la loi sur le service minimum ?
En réalité, dans votre interrogation, il y a deux questions. Un, est-ce que la loi qui a réformé le service minimum était utile ? Et deux, est-elle perfectible ?
Réponse ?
Première question : oui, c'était utile puisque dans près de 75% des cas, les préavis de grève qui ont été déposés n'ont pas entraînés de perturbations majeures. C'est donc un succès. Simplement, vous me direz, il y a 25 % des cas dans lesquels il y a des problèmes. Donc je crois qu'il faut observer ce qui s'est passé à la gare Saint-Lazare, deuxième gare de notre pays dans laquelle 400.000 personnes ont été bloquées.
Ca on sait mais est-ce que vous allez éviter de contourner la loi avec les grèves successives de 59 minutes ?
Je dis un principe simple, j'affirme un principe simple : cela n'est pas acceptable. Mais en même temps, il faut aussi comprendre l'émotion d'un cheminot qui a été agressé. Une agression c'est quelque chose qui est ressenti très vivement par soi-même, par ses proches, par ses collègues de travail. Donc il faut aussi avoir cela en mémoire. Mais n'en demeure pas moins que moi je suis naturellement ouvert à tout, et notamment aux propositions, aux initiatives des partenaires sociaux, du monde syndical, des élus et aussi de la SNCF. Et cela doit se faire naturellement en liaison avec D. Bussereau, le secrétaire d'Etat aux Transports.
Voilà tout le monde y passe. Mais vous êtes d'accord qu'il faut réévaluer cette loi, en tous cas l'usage de cette loi ?
Je suis ouvert à cela, mais ne me demandez pas 48 heures après d'avoir des certitudes alors que précisément, je viens de vous expliquer que ma méthode ce serait celle de la concertation et du dialogue.
A Vesoul, le président de la République a stigmatisé "les irresponsables" de SUD Rail. O. Besancenot l'a aussitôt accusé de vouloir "criminaliser" le mouvement social.
Oui, criminaliser, cela relève naturellement des fantasmes habillés de grands mots. Et je suis sûr que les 400.000 personnes qui ont été victimes de cette grève organisée par des personnes minoritaires au sein de l'entreprise, y seront très sensibles. La vérité, c'est que sans doute O. Besancenot ne se sent pas concerné puisque chacun sait que lui, il se promène à vélo.
Mais qui joue avec le feu, qui provoque ?
Je trouve que le mot de "criminalisation" est un mot outrancier qui n'a pas sa place dans le débat aujourd'hui du monde du travail.
Vous arrivez dans ce ministère dans un climat international et national tendu, est-ce que vous craignez désormais à tout moment des risques de radicalisation et d'agitation sociale ? Parce que ça existe, on le sent, on sent l'électricité ?
La réalité naturellement, c'est qu'il faut être vigilant à toutes les formes de tension. Mais il y a aussi une réalité claire, qu'il ne faut pas négliger, c'est que quand il y a une crise, et c'est celle que nous vivons, elle est mondiale donc européenne donc nationale, cela signifie que l'on doit réformer. Pourquoi réformer ? Pour préserver notre mode de vie. Si l'on choisit l'immobilisme, c'est à coup sûr la remise en cause de notre mode de vie. Il faut donc poursuivre la réforme.
La loi annoncée sur le travail conditionnel du dimanche a disparu du Parlement. Est-ce qu'elle sera oubliée ou débattue et votée cette année en 2009 ?
Il faut concilier naturellement les deux. Le principe du respect du repos dominical, mais en même temps tenir compte des aspirations, notamment dans certaines agglomérations. Cela signifie que le débat a été engagé en 2008 à l'Assemblée nationale, il n'est pas terminé, il se poursuivra à l'Assemblée, puis au Sénat, et cela se fera en 2009.
Vous avez oublié de citer F. Amara. Vous en faites une Auvergnate de plus...
Oui, vous ne m'avez pas laissé terminer parce que naturellement, le plan de F. Amara a suscité de grands espoirs et je suis naturellement décidé à l'accompagner afin que ceci se concrétise sur le terrain, s'accélère. Quant à Fadela, c'est une ministre de la République, c'est une référence, c'est un exemple et le fait qu'elle soit auvergnate, naturellement, cela constitue un atout supplémentaire pour moi.
Voila, elles ont toutes été récompensées ! Une dernière remarque : le social, rue de Grenelle, c'est un enjeu pour tous et c'est un test pour vous. La marche suivante c'est peut-être Matignon ; il ne faut pas la louper...
Moi j'y ferai attention, mais je ne parle pas de Matignon, je ferai attention à l'exercice de mon travail ministériel. Je le fais avec une équipe, je le fais avec le conseiller spécial du président de la République, R. Soubie, sur ces sujets. Et en tous cas, toute mon énergie est consacrée au succès de ce ministère. Le reste ne me préoccupe pas.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 19 janvier 2009