Interview de M. Xavier Bertrand, secrétaire général de l'UMP, à France 2 le 26 janvier 2009, sur le partage des responsabilités au sein de l'UMP, la vie du mouvement et la grève prévue le 29 janvier 2009.

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Média : France 2

Texte intégral

R. Sicard.- Bonjour à tous. Bonjour X. Bertrand.
 
Bonjour.
 
Avant de parler de l'UMP, un mot sur la tempête qui a secoué le Sud-Ouest ce week-end. Est-ce que les leçons de 1999 ont été tirées ?
 
On le voit sur la réactivité, on voit également qu'il y a une mobilisation très importante sur le terrain, des différents services de l'Etat, aussi des collectivités locales. Il y a eu des victimes, quand même, et on pense bien sûr à leurs familles, et puis aussi à toutes celles et ceux qui ne peuvent pas nous regarder ce matin, parce qu'il y a encore de nombreux foyers qui sont privés d'électricité, mais on voit vraiment que la réactivité, aujourd'hui, n'a rien à voir avec ce que l'on a pu connaître par le passé, parce que nombre de leçons ont été tirées.
 
Mais à propos d'électricité, justement, est-ce qu'il ne faut pas enfouir davantage les lignes ?
 
C'est une tempête quasiment sans précédent. Ce qui est dit par les spécialistes aujourd'hui, c'est qu'elle est même plus importante en certains endroits, que ce que l'on a connu en 1999. Une chose est certaine, c'est qu'il faudra voir derrière s'il y a d'autres procédés à utiliser, et la priorité des priorités, aujourd'hui, c'est le retour à la vie normale pour ceux qui depuis maintenant quelques jours, sont en train de s'éclairer à la bougie et de se chauffer par tous les moyens.
 
Alors, l'UMP. La direction, maintenant, c'est vous qui l'avez prise, mais le vrai patron, c'est qui ? C'est X. Bertrand ou c'est N. Sarkozy ? P. Devedjian, votre prédécesseur, par exemple, disait toujours : « Le vrai patron de l'UMP, c'est N. Sarkozy ». Est-ce que c'est toujours le cas ?
 
Les vrais patrons de l'UMP, ce sont les militants du Mouvement populaire, ce sont eux, les vrais patrons.
 
Mais, « le » patron ?
 
Maintenant, soyons très clairs : il y a un lien très fort entre le président de la République et sa famille politique, et on est très heureux de ce lien très fort, et je vais vous dire une chose : arrêtons les hypocrisies sur les rapports entre les présidents de la République et leur famille politique, comme si V. Giscard d'Estaing, F. Mitterrand et J. Chirac ne s'intéressaient pas à la vie de leur formation politique. Bien sûr qu'ils s'y intéressaient, mais en cachette. Là, les choses sont claires : on a un président de la République qui est attaché à sa famille politique, sa famille politique, le Mouvement populaire, est très attaché à la personne du président, et c'est très bien comme ça.
 
Donc, c'est lui qui va continuer à donner les grandes orientations ?
 
Les grandes orientations du changement, voulues par les Français, voulues aussi par les membres du Mouvement populaire, bien sûr, et d'ailleurs on a vocation à soutenir le président de la République, comme le mouvement populaire qu'est l'UMP a vocation à soutenir le Gouvernement, mais pas seulement. Nous sommes une formation politique, qui a un rôle à jouer dans la vie publique, dans la vie politique, et à être aussi devant le Gouvernement et avant le Gouvernement. Avoir des idées, et des idées, je serai tenté de dire, d'avance et même des idées en avance.
 
Vous allez le pousser à la roue, un petit peu ?
 
Il s'agit aussi d'être dans le débat d'idées. Prenons par exemple le débat sur la bioéthique, il va y avoir cette année, la révision des lois bioéthiques. C'est essentiel la bioéthique, c'est ce qui touche à l'individu même. Or, de ces questions-là, nous allons parler, nous allons débattre, au sein du Mouvement populaire, de façon à ce que nos adhérents, mais aussi celles et ceux qui s'intéressent à ces questions, puissent venir en débattre avec nous. Parce qu'on ne va pas en débattre seulement entre nous. Nous allons nous ouvrir et nous allons aussi pouvoir mettre en avant des idées, des idées pour cette année 2009 mais aussi des idées pour les années à venir.
 
Mais l'UMP, parti godillot, d'après vous, c'est fini.
 
Ah oui, ça je pense que ça ne correspond absolument pas à la vocation du Mouvement populaire, et d'ailleurs, les membres de l'UMP, aujourd'hui, ne veulent pas être spectateurs de la vie politique, ils veulent être acteurs. J'étais hier à Avrillé, dans le Maine-et-Loire, j'ai voulu être sur le terrain aussitôt. Une chose est certaine, les meetings d'hier c'est terminé. Hier, la réunion publique a eu lieu autour des questions des personnes qui étaient présentes, des personnes qui ont voulu, justement, sur Internet, poser des questions. C'est beaucoup plus interactif, c'est plus vivant, et pour le secrétaire général que je suis, c'est beaucoup plus enrichissant. Plus éprouvant. Parce qu'il est évident qu'il faut jouer le jeu, jouer le jeu du collectif, jouer le jeu des questions-réponses, mais moi, en tout cas, j'ai beaucoup plus appris hier, que dans des réunions traditionnelles.
 
Pour prendre la direction de l'UMP, vous avez dû quitter le Gouvernement. C'est un regret ?
 
C'était un moment important que d'exercer ces fonctions ministérielles, j'avais connu 5 ans d'activités ministérielles, j'ai connu des moments forts : l'interdiction de fumer dans les lieux publics, que j'ai réussi à mettre en place, comme quoi d'ailleurs, impossible n'est pas français, parce que plus d'une fois j'ai entendu dire que l'on n'y arriverait pas. On a su le faire. Mais au Gouvernement, j'ai pu aussi mettre en oeuvre des réformes qui étaient attendues, sous l'autorité du Président, mais je quitte ces fonctions sans nostalgie et sans regret, parce que la vie politique n'est pas que gouvernementale. Et puis, je vais vous dire aussi les choses telles que je les ressens, j'ai eu la confiance du président de la République, j'ai eu aussi la confiance de ma famille politique. Eh bien je pense qu'il est important aussi de se consacrer aussi à sa famille politique, c'est pour ça qu'être secrétaire général de l'UMP c'est enthousiasmant, et comme je ne fais pas le choses à moitié, j'avais bien l'intention aussi de me consacrer entièrement à ces nouvelles fonctions.
 
Un mot sur R. Yade, il paraît que N. Sarkozy est furieux contre elle, parce qu'elle a refusé de prendre la direction de la campagne des européennes en Ile-de-France, ça veut dire qu'elle va quitter le Gouvernement ?
 
Ecoutez, toutes les interprétations, je les laisse aux commentateurs. Rama est quelqu'un qui a du talent et qui est quelqu'un aussi qui compte dans notre famille politique. La preuve, elle est conseillère politique du Mouvement populaire, elle a été confirmée dans ses fonctions, samedi dernier, et j'ai bien l'intention de continuer à travailler avec elle au sein de l'UMP.
 
Mais, dans le Gouvernement ?
 
Ecoutez, aujourd'hui, les choses sont claires, il y a un remaniement qui a été opéré, aujourd'hui il n'y a pas de remaniement qui est à l'ordre du jour. Et vous le savez bien.
 
Jeudi, il y a une grève très importante qui est prévue, dans tous les secteurs : transports, éducation, etc. Est-ce que le Gouvernement a vraiment pris la mesure de l'inquiétude des Français ?
 
Je pense que ce mouvement de grève, jeudi prochain, peut être important, peut être vraiment suivi. Parce que c'est une forme de réponse, pour les salariés, face à cette crise, cette crise importante qui n'est pas une crise comme les autres. Les salariés veulent être entendus, ils veulent être respectés dans leurs entreprises, dans la société en général, et je pense que c'est cela qui motive l'action de nombreux salariés et qui frappe ce mouvement peut-être important.
 
Le service minimum sera appliqué ?
 
Le service minimum sera appliqué, ce qui veut dire avec le service minimum qu'il y a plusieurs principes très clairs, qui figurent dans la loi : avant de faire grève, on doit négocier, et quand on fait grève, on doit se déclarer avant. Et ensuite, un principe qui est très clair : si on fait grève, on ne travaille pas, si on ne travaille pas, on n'est pas payé. Maintenant, vous le savez, de nouvelles questions se posent parce que certains, le syndicat SUD, pour être très précis, ont décidé, comme ça n'est plus payé, de pouvoir contourner les choses, en faisant grève juste 59 minutes, de façon à ce que l'on ne retienne pas une journée complète, il n'est pas possible que le service public soit l'otage de quelques-uns seulement.
 
Sur le travail du dimanche, on croyait que le projet était enterré, et puis, hier, vous étiez dans une zone commerciale, vous êtes allé voir des salariés qui travaillaient, et vous avez même été traité par un syndicat, d'aider des délinquants, je crois. Je crois que c'était le terme. Comment vous prenez ça ? D'abord, est-ce que ce projet sur le travail du dimanche va être mis en application, ou pas, alors qu'on disait : « on ne le verra pas » ?
 
Je vais être très précis. Il ne s'agit pas de faire travailler le dimanche, les Français, il s'agit tout simplement, là où on travaille le dimanche, aujourd'hui, de pouvoir continuer à le faire, avec des garanties et des avantages, pour les salariés. Hier, je suis allé rencontrer des salariés à Eragny, dans le Val d'Oise. Ils ne ressemblaient pas à des délinquants économiques, ces salariés. J'ai vu justement quelqu'un qui travaille dans une grande chaîne de magasins de jouets. Cette entreprise-là, ce magasin, Toys« R »Us, je le cite, est fermé parce que la loi n'a toujours pas bougé. Il perd 200 euros par mois, sur 1.268 euros. Ce n'est pas un délinquant économique. Et il me dit tout simplement : « laissez-moi travailler, parce que je veux le faire ». Donc, ce dossier n'est pas enterré, le président de la République en a reparlé lors du Conseil national du Mouvement populaire samedi. La seule chose c'est que ce n'est pas un débat pour opposer celles et ceux qui voudraient travailler le dimanche et les autres, c'est tout simplement pour ceux qui, aujourd'hui, travaillent le dimanche et veulent le faire, de continuer à le faire, parce qu'ils le souhaitent.
 
D'un mot : J.-F. Copé disait hier que pour 2017, pour les élections présidentielles de 2017, il serait sans doute candidat. Vous aussi ?
 
Moi, ce qui m'intéresse, c'est que dès 2009, le Mouvement populaire soit à 100 % utile pour les Français. Vous savez, ce qui intéresse les Français, ce n'est pas ce que les hommes politiques veulent, c'est ce qu'ils font pour eux, pour les Français et pour une société française qui a envie aujourd'hui de retrouver un sens, c'est ça qui m'intéresse.
 
Merci.
 
Merci.
 Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 26 janvier 2009