Texte intégral
F. Namias.- Mercredi, en Conseil des ministres, le Gouvernement annoncera officiellement la récession pour 2009. Le chômage, on le sait maintenant, va flamber toute l'année, la question se pose donc : le plan de relance français est-il suffisant ?
En tout cas, les mesures que nous prenons, là, me paraissent être les seules possibles. Il faut quand même se dire les choses, il n'y a pas de surprise, nous savons depuis plusieurs mois que l'année 2009 sera une année super difficile. Pas d'ailleurs du fait de la France, mais du fait d'une crise mondiale, et je crois que c'est une période qui est une période de test aussi pour les décideurs politiques. Vous savez quand les choses sont très dures, que ce soit des crises diplomatiques, économiques, sociales, financières, c'est le moment où tous les regards se tournent vers les politiques, c'est le moment où on regarde qui a une colonne vertébrale solide. Eh bien ce moment est un moment de vérité.
Et pour l'instant, le test, il est satisfaisant ?
Moi, je considère que depuis le mois de septembre, à l'initiative d'ailleurs du président de la République, nous avons, les uns et les autres, pris les décisions qui nous semblaient être les plus sages, il fallait réagir très vite et il fallait réagir de manière très opérationnelle. Je crois que le choix qui a été fait, qui est de dire : il y a une priorité absolue, c'est l'emploi, est la bonne méthode. Je n'en vois pas d'autres aujourd'hui...
Mais est-ce que, aujourd'hui, il ne faut pas aller plus loin, en terme de plan de relance ? Par exemple, aux Etats-Unis, il y a plus de cinq points du PIB qui sont consacrés à la relance ; en Allemagne, ce n'est pas loin de 3, chez nous, c'est un petit 1,5. Est-ce que c'est à la mesure de la situation ?
Attention, il faut quand même bien voir qu'on ne part pas du même point de départ. Je sais que les socialistes en ce moment parlent beaucoup du plan Obama ; je voudrais quand même rappeler qu'aujourd'hui...
M. Aubry disait hier qu'il n'y a pas de plan de relance en France - elle l'a dit à la télévision hier...
Oui, je voudrais quand même rappeler que, en France, nous avons, et je le dis ici, cette chance, parce qu'il faut aussi le dire aux Français, un tiers des revenus des Français sont des revenus sociaux, de subventions, d'aides, dans tous les domaines, la maladie, le chômage, etc. Cela représente...
Et il y a un million de Français protégés, grâce notamment à ces transferts sociaux...
Oui, mais ça représente juste - il faut qu'on ait ça en tête - à peu près 11.000 euros par an et par Français. Aux Etats-Unis, le niveau de protection sociale les amène à 5.000 euros par Américain et par an. Juste pour montrer qu'ils ont beaucoup de retard de ce point de vue. Et donc, nous, on a des amortisseurs, dont on doit tirer le meilleur profit pour commencer à se préparer à la suite. Je me permets de le dire parce qu'il est absolument indispensable d'avoir vis-à-vis des Français un message vers l'avenir, c'est-à-dire, en disant que dans l'immédiat, la première mobilisation, c'est pour l'emploi, parce qu'il y a l'angoisse première des Français qui ont peur de perdre leur emploi dans les secteurs menacés, ou qui ne l'ont pas aujourd'hui, et qui craignent de devenir des chômeurs de longue durée. Mais il faut bien remettre ça en perspective par rapport à ce qu'on prépare pour la suite.
Il y a un choix qui a été fait pour le moment, c'est de privilégier l'investissement et pas la consommation. On dit, en France, que la consommation, elle tient, et on voit qu'elle s'effondre un peu partout dans le monde. Combien de temps on peut tenir ce pari ? Est-ce qu'il ne faut pas un geste supplémentaire ?
On peut toujours imaginer ici ou là des gestes, d'ailleurs, il y a quelques jours, le président de la République en a fait la meilleure démonstration à travers ce qui a été fait sur les tranches les plus faibles de l'impôt sur le revenu...
Et il en faut d'autres ? Vous dites : on peut toujours imaginer des gestes...
Mais, je ne crois pas. Enfin, bien sûr, il peut y avoir des gestes, mais je crois qu'il ne faut pas se tromper de cap. Ce qui est très important, c'est que les Français voient bien quel est l'état d'esprit dans lequel nous, on travaille. Quelle est l'idée ? Elle est de dire : tout doit aller en faveur de l'emploi, parce qu'en réalité, c'est l'emploi qui détermine le pouvoir d'achat, et pas l'inverse. Quand vous avez aujourd'hui un système qui fait qu'un salarié sait que, malheureusement, dans deux mois ou un mois, il va perdre son emploi. On ne va pas attendre qu'il l'ait perdu pour l'emmener au service public de l'emploi pour trouver une solution, il faut tout de suite le mettre en situation d'accompagnement personnalisé, comme ça se fait dans d'autres pays. Allons emprunter ailleurs des bonnes techniques. Je prends un deuxième exemple : celui qui est aujourd'hui au chômage, s'il retrouve un boulot avant la fin de la période d'indemnisation, on peut peut-être imaginer de lui rendre une petite partie de ce qu'il aurait touché s'il était resté au chômage. Voyez, il y a, comme ça, des tas de mesures pragmatiques qu'on peut imaginer pour accompagner un objectif : l'emploi. Ça nous fait une différence avec le PS, je le reconnais, mais je crois que c'est important qu'on le voie bien.
Dans la majorité UMP, vous êtes patron des députés UMP à l'Assemblée, on entend de plus en plus monter cette réclamation : N. Sarkozy doit annoncer une pause dans les réformes, il faut arrêter de se disperser, tout doit être tourné vers la crise, et uniquement la crise.
Moi, je n'ai pas toujours entendu ça. Enfin, il peut y avoir tel ou tel qui le dit.
On l'entend, à l'Assemblée...
Non, mais d'accord. Enfin, je ne sais pas où on l'entend, mais moi, ce n'est pas mon point de vue en tout cas. Non, moi, ce n'est pas mon point de vue. Je pense que quand il y a marqué "crise", il n'y a pas marqué "on arrête tout et on attend de prendre l'orage sur la tête". Quand il y a marqué "crise", il y a marqué "on anticipe l'avenir aussi". Vous savez, je crois que ce qui est important, c'est d'avoir...
Mais tout est utile ? Par exemple, il y a des textes, le travail le dimanche, c'est en suspens ; un texte comme ça, ça doit revenir à l'Assemblée ?
Ecoutez, en tout cas, ça ne peut pas revenir tant qu'on n'a pas changé notre règlement intérieur qui fait que les socialistes ayant déposé 7.000 amendements, tous plus crétins les uns que les autres, pour bloquer complètement le Parlement, inutile de vous dire qu'on a d'autres urgences dans l'immédiat par rapport à cette [inaud.]. Mais allons, si vous voulez, on peut peut-être aller plus loin, c'est-à-dire quelle est l'idée ? Moi, je pense qu'il faut les continuer, les réformes, qu'il ne faut pas les craindre, parce qu'elles améliorent les choses. Et la deuxième chose que je veux dire, c'est qu'il faut aussi se projeter un peu : à court terme, il faut se mobiliser sur l'emploi. Il faut, dans le même temps, faire un gros travail de coordination internationale, et c'est tout ce qui est en train de se faire. Alors, quand on dit ça, on dit : "vous n'y arriverez jamais !" Oui, mais enfin, quand même. Et je crois que N. Sarkozy, il a raison d'y aller, et de ce point de vue, le rendez-vous du G20, les 20 pays qui vont se mobiliser pour quand même tirer quelques conséquences de cette crise...
Ce sera au mois d'avril...
...C'est indispensable. Parce que je ne voudrais pas qu'on se trompe, cette crise aujourd'hui, ce n'est pas une crise parmi d'autres, ce n'est pas comme la bulle Internet qui a éclaté il y a six ans ou la bulle immobilière d'il y a quinze ans. En fait, on est en train de changer d'époque, on est en train de changer de système. Et en réalité, cela va bien au-delà de quelques risques de faillites.
Le Gouvernement et N. Sarkozy ont pris, selon vous, donc, la mesure de la situation ?
Mais je pense qu'il va falloir continuer, et de ce point de vue, il y a quelques idées simples. Par exemple, imaginez que les citoyens de la planète vont chercher demain les pays les plus attractifs d'après crise, c'est-à-dire les pays où l'on se nourrit le mieux, où l'on se loge le mieux, où on est le mieux soigné, où l'on éduque le mieux ses enfants, où on a l'air ou l'eau la plus propre, eh bien, de ce point de vue, la France, elle est très compétitive, et voilà de quoi créer des emplois pour demain.
J.-F. Copé, je vous entends prodiguer des avis au Gouvernement. Je voudrais faire appel à votre expérience d'ancien ministre : comment jugez-vous actuellement ce qui se passe au sein de ce Gouvernement ? Les universités, la Guadeloupe, pourquoi les ministres n'endiguent pas davantage les problèmes ? Pourquoi, d'ailleurs, ne protègent-ils pas davantage le Président ?
Moi, je ne sais pas. Moi, vous savez, je suis dans le législatif, j'ai quitté le gouvernement, il y a déjà deux ans, et chacun...
Mais vous jetez un regard ?
...et chacun, sa mission. Moi, je m'occupe de la mienne, et c'est vrai que mon objectif, aujourd'hui, est de faire qu'on coproduise les réformes avec le Gouvernement, ce que l'on fait d'ailleurs. On le voit bien aujourd'hui sur l'hôpital...
Mais le Gouvernement bosse suffisamment bien, selon vous ?
Oui, enfin, évidemment ; on n'est pas en train de faire des bulletins de notes, ce n'est pas le sujet. Vous savez, c'est dur ce que l'on vit tous ; on est dans une période où on n'est pas là pour aller donner des jugements aux petits copains ou balancer des petites phrases. Enfin, en tout cas, moi, cela n'a jamais été mon tempérament. Moi, mon idée est simple : c'est une période où il faut, premièrement, être rassemblés, parce que l'objectif, c'est de s'en sortir, et puis, deuxièmement, c'est d'essayer de faire que chacun soit à son poste. Et moi, mon rôle d'animateur de notre majorité parlementaire à l'UMP, il est simple, il consiste juste à ce que, sur toutes ces réformes, nous, qui voyons les Français, toutes les semaines, dans nos circonscriptions, on puisse, à Paris, dire au gouvernement : "voilà, sur ces points, voilà ce qu'on a envie d'ajouter, voilà comment on voit les choses", qu'il y ait un débat de fond. C'est cela, la coproduction...
C'est ça, la coproduction ?
Et c'est ce qui se fait dans tous les parlements modernes du monde...
Vous dites "chacun à son poste". On entend de temps en temps que le Gouvernement pourrait être musclé et qu'il faudrait un gouvernement de crise. Vous ne vous sentez pas concerné ? Pas question pour vous d'y retourner, même si on vous appelle ?
Non, mais enfin, ça, ce n'est pas le sujet. Qu'est-ce que c'est, un gouvernement de crise ? C'est un gouvernement qui gère la crise. Mais qu'est-ce qu'il fait le gouvernement ? Et le Parlement, qu'est-ce qu'il fait ? Vous croyez qu'on...
Un gouvernement remusclé...
Mais attendez, c'est matin, midi et soir qu'on est sur le sujet. De quoi parle-t-on ? Tous nos débats ne portent que là-dessus, et c'est bien normal. Ce que j'ai demandé, moi, à mes amis députés, c'est que l'on apporte notre contribution en donnant des idées nouvelles. Et maintenant, avec la réforme qui va être mise en place, on va pouvoir commencer à le faire. Et donc, nous allons lancer une première proposition de loi dans les jours qui viennent, initiée par ma collègue C. Brunel, qui vise justement à trouver des solutions pour accéder plus facilement au crédit pour les entreprises.
Un mot sur la Guadeloupe : la grève n'est toujours pas levée. Faut-il forcer la main au Medef pour signer l'accord ?
Ecoutez, on va voir ce que ça donne. Moi, j'ai le sentiment tout de même qu'après des longues journées et semaines de crise, on est en train d'aller vers l'apaisement et de trouver la voie d'une solution pour une Guadeloupe qui,il faut bien le dire, a souffert terriblement de cette grève, donc...
Mais pour l'instant, le Medef rechigne à signer. M. Alliot-Marie dit qu'il faut que le Medef fasse un geste, et vous ?
Enfin, en même temps, les discussions continuent ; les uns et les autres, sur place, discutent ; il y a un médiateur, il y a un Gouvernement qui est à la manoeuvre le mieux possible, et nous, en ce qui nous concerne, vous le savez, , nous, les députés, nous avons créé un groupe de travail avec, et des députés d'Outre-mer, mais aussi des députés métropolitains, et nous allons, au mois de juin, faire les assises de l'Outre-mer, pour avoir une réflexion qui va bien au-delà de la seule question économique. Sur l'Outre-mer. Il y a une question derrière, qui est la question de l'identité, qui me paraît être absolument majeure.
En quelques mots, parce qu'il nous reste peu de temps, E. Balladur remettra cette semaine au chef de l'Etat son rapport sur la réforme des collectivités territoriales. Vous aviez mandaté un groupe parlementaire sur le sujet. Aujourd'hui, vous signez des deux mains ? Les conclusions sont à peu près les mêmes que les vôtres...
Enfin, moi, je suis très content de voir qu'il y a beaucoup des contributions que nous avons faites, nous, à l'UMP, que nous retrouvons dans ce rapport, qui est passionnant, qui d'ailleurs, je le regrette, a été un peu caricaturé. Moi, ce que je veux dire, c'est que, après, il faut cibler les grandes priorités. A mes yeux, si je devais n'en retenir qu'une, je crois qu'il est indispensable d'aller vers la fusion entre les départements et les régions ; aujourd'hui, il n'y a plus un Français qui comprend...
Cela se fera assez vite, c'est 2014, la date qui a été retenue...
C'est un bon rendez-vous. Il n'y a plus un Français aujourd'hui qui comprend pourquoi les départements font les collèges, et les régions font les lycées. On voit bien que demain, c'est une manière de faire mieux et moins cher en impôts locaux, bref, de moderniser la France. Cela tombe bien, on en a besoin en période de crise.
Merci J.-F. Copé.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 2 mars 2009
En tout cas, les mesures que nous prenons, là, me paraissent être les seules possibles. Il faut quand même se dire les choses, il n'y a pas de surprise, nous savons depuis plusieurs mois que l'année 2009 sera une année super difficile. Pas d'ailleurs du fait de la France, mais du fait d'une crise mondiale, et je crois que c'est une période qui est une période de test aussi pour les décideurs politiques. Vous savez quand les choses sont très dures, que ce soit des crises diplomatiques, économiques, sociales, financières, c'est le moment où tous les regards se tournent vers les politiques, c'est le moment où on regarde qui a une colonne vertébrale solide. Eh bien ce moment est un moment de vérité.
Et pour l'instant, le test, il est satisfaisant ?
Moi, je considère que depuis le mois de septembre, à l'initiative d'ailleurs du président de la République, nous avons, les uns et les autres, pris les décisions qui nous semblaient être les plus sages, il fallait réagir très vite et il fallait réagir de manière très opérationnelle. Je crois que le choix qui a été fait, qui est de dire : il y a une priorité absolue, c'est l'emploi, est la bonne méthode. Je n'en vois pas d'autres aujourd'hui...
Mais est-ce que, aujourd'hui, il ne faut pas aller plus loin, en terme de plan de relance ? Par exemple, aux Etats-Unis, il y a plus de cinq points du PIB qui sont consacrés à la relance ; en Allemagne, ce n'est pas loin de 3, chez nous, c'est un petit 1,5. Est-ce que c'est à la mesure de la situation ?
Attention, il faut quand même bien voir qu'on ne part pas du même point de départ. Je sais que les socialistes en ce moment parlent beaucoup du plan Obama ; je voudrais quand même rappeler qu'aujourd'hui...
M. Aubry disait hier qu'il n'y a pas de plan de relance en France - elle l'a dit à la télévision hier...
Oui, je voudrais quand même rappeler que, en France, nous avons, et je le dis ici, cette chance, parce qu'il faut aussi le dire aux Français, un tiers des revenus des Français sont des revenus sociaux, de subventions, d'aides, dans tous les domaines, la maladie, le chômage, etc. Cela représente...
Et il y a un million de Français protégés, grâce notamment à ces transferts sociaux...
Oui, mais ça représente juste - il faut qu'on ait ça en tête - à peu près 11.000 euros par an et par Français. Aux Etats-Unis, le niveau de protection sociale les amène à 5.000 euros par Américain et par an. Juste pour montrer qu'ils ont beaucoup de retard de ce point de vue. Et donc, nous, on a des amortisseurs, dont on doit tirer le meilleur profit pour commencer à se préparer à la suite. Je me permets de le dire parce qu'il est absolument indispensable d'avoir vis-à-vis des Français un message vers l'avenir, c'est-à-dire, en disant que dans l'immédiat, la première mobilisation, c'est pour l'emploi, parce qu'il y a l'angoisse première des Français qui ont peur de perdre leur emploi dans les secteurs menacés, ou qui ne l'ont pas aujourd'hui, et qui craignent de devenir des chômeurs de longue durée. Mais il faut bien remettre ça en perspective par rapport à ce qu'on prépare pour la suite.
Il y a un choix qui a été fait pour le moment, c'est de privilégier l'investissement et pas la consommation. On dit, en France, que la consommation, elle tient, et on voit qu'elle s'effondre un peu partout dans le monde. Combien de temps on peut tenir ce pari ? Est-ce qu'il ne faut pas un geste supplémentaire ?
On peut toujours imaginer ici ou là des gestes, d'ailleurs, il y a quelques jours, le président de la République en a fait la meilleure démonstration à travers ce qui a été fait sur les tranches les plus faibles de l'impôt sur le revenu...
Et il en faut d'autres ? Vous dites : on peut toujours imaginer des gestes...
Mais, je ne crois pas. Enfin, bien sûr, il peut y avoir des gestes, mais je crois qu'il ne faut pas se tromper de cap. Ce qui est très important, c'est que les Français voient bien quel est l'état d'esprit dans lequel nous, on travaille. Quelle est l'idée ? Elle est de dire : tout doit aller en faveur de l'emploi, parce qu'en réalité, c'est l'emploi qui détermine le pouvoir d'achat, et pas l'inverse. Quand vous avez aujourd'hui un système qui fait qu'un salarié sait que, malheureusement, dans deux mois ou un mois, il va perdre son emploi. On ne va pas attendre qu'il l'ait perdu pour l'emmener au service public de l'emploi pour trouver une solution, il faut tout de suite le mettre en situation d'accompagnement personnalisé, comme ça se fait dans d'autres pays. Allons emprunter ailleurs des bonnes techniques. Je prends un deuxième exemple : celui qui est aujourd'hui au chômage, s'il retrouve un boulot avant la fin de la période d'indemnisation, on peut peut-être imaginer de lui rendre une petite partie de ce qu'il aurait touché s'il était resté au chômage. Voyez, il y a, comme ça, des tas de mesures pragmatiques qu'on peut imaginer pour accompagner un objectif : l'emploi. Ça nous fait une différence avec le PS, je le reconnais, mais je crois que c'est important qu'on le voie bien.
Dans la majorité UMP, vous êtes patron des députés UMP à l'Assemblée, on entend de plus en plus monter cette réclamation : N. Sarkozy doit annoncer une pause dans les réformes, il faut arrêter de se disperser, tout doit être tourné vers la crise, et uniquement la crise.
Moi, je n'ai pas toujours entendu ça. Enfin, il peut y avoir tel ou tel qui le dit.
On l'entend, à l'Assemblée...
Non, mais d'accord. Enfin, je ne sais pas où on l'entend, mais moi, ce n'est pas mon point de vue en tout cas. Non, moi, ce n'est pas mon point de vue. Je pense que quand il y a marqué "crise", il n'y a pas marqué "on arrête tout et on attend de prendre l'orage sur la tête". Quand il y a marqué "crise", il y a marqué "on anticipe l'avenir aussi". Vous savez, je crois que ce qui est important, c'est d'avoir...
Mais tout est utile ? Par exemple, il y a des textes, le travail le dimanche, c'est en suspens ; un texte comme ça, ça doit revenir à l'Assemblée ?
Ecoutez, en tout cas, ça ne peut pas revenir tant qu'on n'a pas changé notre règlement intérieur qui fait que les socialistes ayant déposé 7.000 amendements, tous plus crétins les uns que les autres, pour bloquer complètement le Parlement, inutile de vous dire qu'on a d'autres urgences dans l'immédiat par rapport à cette [inaud.]. Mais allons, si vous voulez, on peut peut-être aller plus loin, c'est-à-dire quelle est l'idée ? Moi, je pense qu'il faut les continuer, les réformes, qu'il ne faut pas les craindre, parce qu'elles améliorent les choses. Et la deuxième chose que je veux dire, c'est qu'il faut aussi se projeter un peu : à court terme, il faut se mobiliser sur l'emploi. Il faut, dans le même temps, faire un gros travail de coordination internationale, et c'est tout ce qui est en train de se faire. Alors, quand on dit ça, on dit : "vous n'y arriverez jamais !" Oui, mais enfin, quand même. Et je crois que N. Sarkozy, il a raison d'y aller, et de ce point de vue, le rendez-vous du G20, les 20 pays qui vont se mobiliser pour quand même tirer quelques conséquences de cette crise...
Ce sera au mois d'avril...
...C'est indispensable. Parce que je ne voudrais pas qu'on se trompe, cette crise aujourd'hui, ce n'est pas une crise parmi d'autres, ce n'est pas comme la bulle Internet qui a éclaté il y a six ans ou la bulle immobilière d'il y a quinze ans. En fait, on est en train de changer d'époque, on est en train de changer de système. Et en réalité, cela va bien au-delà de quelques risques de faillites.
Le Gouvernement et N. Sarkozy ont pris, selon vous, donc, la mesure de la situation ?
Mais je pense qu'il va falloir continuer, et de ce point de vue, il y a quelques idées simples. Par exemple, imaginez que les citoyens de la planète vont chercher demain les pays les plus attractifs d'après crise, c'est-à-dire les pays où l'on se nourrit le mieux, où l'on se loge le mieux, où on est le mieux soigné, où l'on éduque le mieux ses enfants, où on a l'air ou l'eau la plus propre, eh bien, de ce point de vue, la France, elle est très compétitive, et voilà de quoi créer des emplois pour demain.
J.-F. Copé, je vous entends prodiguer des avis au Gouvernement. Je voudrais faire appel à votre expérience d'ancien ministre : comment jugez-vous actuellement ce qui se passe au sein de ce Gouvernement ? Les universités, la Guadeloupe, pourquoi les ministres n'endiguent pas davantage les problèmes ? Pourquoi, d'ailleurs, ne protègent-ils pas davantage le Président ?
Moi, je ne sais pas. Moi, vous savez, je suis dans le législatif, j'ai quitté le gouvernement, il y a déjà deux ans, et chacun...
Mais vous jetez un regard ?
...et chacun, sa mission. Moi, je m'occupe de la mienne, et c'est vrai que mon objectif, aujourd'hui, est de faire qu'on coproduise les réformes avec le Gouvernement, ce que l'on fait d'ailleurs. On le voit bien aujourd'hui sur l'hôpital...
Mais le Gouvernement bosse suffisamment bien, selon vous ?
Oui, enfin, évidemment ; on n'est pas en train de faire des bulletins de notes, ce n'est pas le sujet. Vous savez, c'est dur ce que l'on vit tous ; on est dans une période où on n'est pas là pour aller donner des jugements aux petits copains ou balancer des petites phrases. Enfin, en tout cas, moi, cela n'a jamais été mon tempérament. Moi, mon idée est simple : c'est une période où il faut, premièrement, être rassemblés, parce que l'objectif, c'est de s'en sortir, et puis, deuxièmement, c'est d'essayer de faire que chacun soit à son poste. Et moi, mon rôle d'animateur de notre majorité parlementaire à l'UMP, il est simple, il consiste juste à ce que, sur toutes ces réformes, nous, qui voyons les Français, toutes les semaines, dans nos circonscriptions, on puisse, à Paris, dire au gouvernement : "voilà, sur ces points, voilà ce qu'on a envie d'ajouter, voilà comment on voit les choses", qu'il y ait un débat de fond. C'est cela, la coproduction...
C'est ça, la coproduction ?
Et c'est ce qui se fait dans tous les parlements modernes du monde...
Vous dites "chacun à son poste". On entend de temps en temps que le Gouvernement pourrait être musclé et qu'il faudrait un gouvernement de crise. Vous ne vous sentez pas concerné ? Pas question pour vous d'y retourner, même si on vous appelle ?
Non, mais enfin, ça, ce n'est pas le sujet. Qu'est-ce que c'est, un gouvernement de crise ? C'est un gouvernement qui gère la crise. Mais qu'est-ce qu'il fait le gouvernement ? Et le Parlement, qu'est-ce qu'il fait ? Vous croyez qu'on...
Un gouvernement remusclé...
Mais attendez, c'est matin, midi et soir qu'on est sur le sujet. De quoi parle-t-on ? Tous nos débats ne portent que là-dessus, et c'est bien normal. Ce que j'ai demandé, moi, à mes amis députés, c'est que l'on apporte notre contribution en donnant des idées nouvelles. Et maintenant, avec la réforme qui va être mise en place, on va pouvoir commencer à le faire. Et donc, nous allons lancer une première proposition de loi dans les jours qui viennent, initiée par ma collègue C. Brunel, qui vise justement à trouver des solutions pour accéder plus facilement au crédit pour les entreprises.
Un mot sur la Guadeloupe : la grève n'est toujours pas levée. Faut-il forcer la main au Medef pour signer l'accord ?
Ecoutez, on va voir ce que ça donne. Moi, j'ai le sentiment tout de même qu'après des longues journées et semaines de crise, on est en train d'aller vers l'apaisement et de trouver la voie d'une solution pour une Guadeloupe qui,il faut bien le dire, a souffert terriblement de cette grève, donc...
Mais pour l'instant, le Medef rechigne à signer. M. Alliot-Marie dit qu'il faut que le Medef fasse un geste, et vous ?
Enfin, en même temps, les discussions continuent ; les uns et les autres, sur place, discutent ; il y a un médiateur, il y a un Gouvernement qui est à la manoeuvre le mieux possible, et nous, en ce qui nous concerne, vous le savez, , nous, les députés, nous avons créé un groupe de travail avec, et des députés d'Outre-mer, mais aussi des députés métropolitains, et nous allons, au mois de juin, faire les assises de l'Outre-mer, pour avoir une réflexion qui va bien au-delà de la seule question économique. Sur l'Outre-mer. Il y a une question derrière, qui est la question de l'identité, qui me paraît être absolument majeure.
En quelques mots, parce qu'il nous reste peu de temps, E. Balladur remettra cette semaine au chef de l'Etat son rapport sur la réforme des collectivités territoriales. Vous aviez mandaté un groupe parlementaire sur le sujet. Aujourd'hui, vous signez des deux mains ? Les conclusions sont à peu près les mêmes que les vôtres...
Enfin, moi, je suis très content de voir qu'il y a beaucoup des contributions que nous avons faites, nous, à l'UMP, que nous retrouvons dans ce rapport, qui est passionnant, qui d'ailleurs, je le regrette, a été un peu caricaturé. Moi, ce que je veux dire, c'est que, après, il faut cibler les grandes priorités. A mes yeux, si je devais n'en retenir qu'une, je crois qu'il est indispensable d'aller vers la fusion entre les départements et les régions ; aujourd'hui, il n'y a plus un Français qui comprend...
Cela se fera assez vite, c'est 2014, la date qui a été retenue...
C'est un bon rendez-vous. Il n'y a plus un Français aujourd'hui qui comprend pourquoi les départements font les collèges, et les régions font les lycées. On voit bien que demain, c'est une manière de faire mieux et moins cher en impôts locaux, bref, de moderniser la France. Cela tombe bien, on en a besoin en période de crise.
Merci J.-F. Copé.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 2 mars 2009