Texte intégral
M. Biraben : Bonjour J.-L. Borloo.
Bonjour.
M. Biraben : Soyez le bienvenu. Vous avez l'air en pleine forme. C'est au numéro 2 du Gouvernement que s'adresse cette première question. Les négociations, vous l'avez vu, s'enlisent chez Caterpillar ; il y a une nouvelle séquestration chez Molex ; un sixième jour de grève de la faim chez Mad range. Est-ce que le Gouvernement n'échoue pas à apaiser le conflit social ?
C'est un sujet extrêmement difficile. On comprend la situation des salariés à qui on explique qu'on ferme des sites et en même temps il faut absolument avoir un dialogue social normal sur l'ensemble de ces sites industriels. Donc moi ça me préoccupe évidemment beaucoup, comme membre du Gouvernement, comme ancien ministre des Affaires sociales. J'ai toujours souhaité qu'on puisse tisser des rapports de dialogue importants. C'est vrai que c'est assez préoccupant mais enfin j'espère que le dialogue va pouvoir reprendre.
M. Biraben : Avec le Gouvernement ?
Avec les actionnaires d'une manière générale ou les représentants de ces actionnaires. C'est plus compliqué quand ils sont plus lointains. On voit bien que lorsqu'on est dans un rapport de décision de proximité, les choses sont un peu plus faciles que lorsque les prises de décision sont éloignées.
G. Delafon : Alors venons-en à l'environnement. Demain vous partez pour Syracuse, un G8 environnement. Là, vous allez retrouver vos homologues du G8 et notamment les Américains. Qu'est-ce que la France va demander aux Etats-Unis de B. Obama sur le climat ? On a le sentiment que le courant n'est pas passé entre N. Sarkozy et son homologue américain. Qu'est-ce qu'on va leur demander ?
D'abord de quoi s'agit-il ? Au mois de décembre, le monde a rendez-vous, tous les gouvernements du monde ont rendez-vous parce que les scientifiques disent clairement et accentuent la pression à juste titre en disant : il y a extrême danger, que ce soit sur la calotte glaciaire, l'état d'acétification des mers, l'état des forêts, le réchauffement climatique est presque dans l'irréversible. Et il faut que les pays industrialisés réduisent entre 25 et 40% leurs émissions de gaz à effet de serre. Or depuis dix ans, quinze ans, les Etats-Unis considéraient qu'ils n'étaient pas concernés par ce sujet-là, l'administration Bush en gros pour simplifier. Alors on a un nouveau président américain qui arrive avec beaucoup d'enthousiasme, avec une envie de faire en disant : nous allons prendre nos responsabilités. Et puis, il est face à son Congrès. Ce qu'on souhaite de la part des Etats-Unis, c'est clairement une réduction des émissions de gaz à effet de serre, au moins aussi importants d'ici 2020 que ce que fait l'Europe, c'est-à-dire 20 ou 30%.
G. Delafon : Et vous avez reçu des assurances à cet égard ou pas ?
On voit bien que c'est un débat aux Etats-Unis. Vous avez vu d'abord que la Cour Suprême a dit pour la première fois que les émissions de gaz à effet de serre rentraient dans la catégorie des polluants et que l'administration américaine avait par voie de conséquence le droit de mettre la pression, j'allais dire presque indépendamment du Congrès. Enfin ça ne veut pas dire ça exactement mais à peu près. C'est une façon de pousser le Congrès.
G. Delafon : Mais votre homologue qu'est-ce qu'il vous a dit quand vous l'avez vu ?
Ils disent : écoutez on va essayer de ramener nos émissions de gaz à effet de serre au niveau de 1990. C'est évidemment insuffisant mais il y a d'autres Américains, au Congrès, qui disent : il faut effectivement aller tout de suite à moins 20%. Ca va être un débat extrêmement important.
G. Delafon : Mais visiblement, il a commencé le débat parce qu'on a vu que pendant le G20, N. Sarkozy s'était opposé à B. Obama sur ce sujet.
Oui, parce que le président américain avait dit : on va aller vers une stabilisation par rapport aux émissions de 1990. Ce n'est pas possible pour la première puissance du monde, ce n'est pas possible pour une puissance comme celle-là, qui a des chercheurs, qui a des universités, qui a une puissance économique alors qu'ils sont, par habitant, ceux qui pour l'essentiel émettent le plus dans le monde, ils doivent absolument prendre le leadership de cet accord à Copenhague.
G. Delafon : Alors est-ce qu'Obama c'est d'ores et déjà pour vous en matière d'environnement, une déception ?
Non pas du tout, il met une grosse pression, il s'exprime de manière très très forte. Le plan de relance américain l'a intégré de manière importante. Mais c'est difficile. Vous savez ça a été difficile en France au moment du Grenelle.
G. Delafon : Ca reste difficile en France.
Ca reste difficile. Ca a été difficile en Europe pour que 27 pays s'engagent aux réductions d'émissions de gaz à effet de serre. C'est évidemment difficile pour les Etats-Unis. Mais il ne faut pas se tromper. S'il n'y a pas un accord à Copenhague, ambitieux, vraiment ambitieux - 25, 40% pour les pays industrialisés - c'est le début d'un chaos à la fois diplomatique, moral, écologique, climatique, très, très grave.
G. Delafon : Mais est-ce que la crise n'est pas en train de tout balayer ?
Non au contraire. La seule sortie de la crise passera par l'économie verte. Je crois que là-dessus, il n'y a plus aucun expert qui le conteste.
G. Delafon : Oui mais ça tout le monde le répète matin, midi et soir. Mais concrètement...
M. Biraben : On entend ça depuis des années. Zapatero, qui est un président engagé, ne relance pas du tout par le vert, et au contraire construit des bâtiments, repasse par la route et oublie totalement l'argument environnement.
Non, regardez le plan Grenelle, 440 milliards d'euros pour la France. 440 milliards d'euros sur huit ans, c'est quoi ? C'est des énergies renouvelables, c'est des tramways. On a un appel d'offre qui sort à la fin du mois. C'est des lignes à grande vitesse. C'est les chantiers thermiques des bâtiments. Le prêt économie d'énergie, éco PTZ. On l'a lancé il y a huit jours.
G. Delafon : Ca marche ça ?
108 000 personnes sont venues sur les sites. On a signé les premiers à Gif-sur-Yvette la semaine dernière. Par exemple, réduire les économies dans les bâtiments français ; 42% de l'énergie c'est 400 milliards d'euros de travaux. Et c'est de l'activité qui est locale. Donc on était dans une économie de la rente, on achetait des énergies très loin alors qu'on en a à proximité. On ne faisait pas d'économies d'énergie. Enfin on était peu respectueux des ressources naturelles. On est sur un nouveau modèle. La mutation... on assiste à une mutation d'une rapidité, d'une profondeur...
G. Delafon : Elle est lente.
Non en France ça va à une vitesse extraordinaire.
G. Delafon : Regardez Heuliez, fabricant de voitures électriques, donc l'avenir. Ils sont menacés de liquidation judiciaire.
Une mutation ce n'est pas hier, c'est simple, enfin c'est comme ça et le lendemain c'est autrement. Heuliez a un produit.
G. Delafon : Il faut aider Heuliez ?
Evidemment qu'il faut aider Heuliez. On travaille sur les voitures décarbonées avec Heuliez, avec Renault, avec PSA, enfin l'ensemble des constructeurs et des plus petits. Dans trois, quatre ans, vous aurez 15 ou 20% des voitures vendues qui seront ou électriques ou extrêmement hybrides. On va faire en cinq, six ou sept ans une mutation dans nos économies que la dernière révolution industrielle a faite en 50 ou 60 ans. Ca va à une vitesse folle. Le comportement des consommateurs a complètement changé. L'éco conception des produits a changé. Les industriels s'engagent. Les collectivités locales. J'écoutais ce matin à la radio des restaurateurs éco-labellisés, plantant un arbre à chaque fois qu'un client vient avec la récupération de l'eau, récupération des déchets complètement neutres au plan carbonique. C'est toute la société qui bouge. Alors c'est vrai qu'en même temps, cette mutation elle est tellement rapide qu'elle peut être un petit peu inquiétante. Mais en réalité, on revient à des choses respectueuses de la nature, de l'homme, beaucoup plus localisées, l'évolution de l'agriculture qui est, elle aussi, en circuit court avec des capacités de faire localement en développant du bio, de l'agriculture de saison. On revient à des choses saines.
G. Delafon : Demain, vous allez à Syracuse, vous allez être face à vos homologues, qu'est-ce que vous allez décider ensemble les ministres de l'Environnement du G8, pour avancer justement vers cette transition ?
On va préparer Copenhague. Et puis je vais à Washington la semaine prochaine, plus spécifiquement invité par mes homologues américains. On ne peut pas louper le rendez-vous de Copenhague. Pour vos enfants, pour mes enfants, il faut qu'il y ait un accord ambitieux, il ne faut pas qu'il y ait un petit accord à Copenhague. Ce n'est pas possible. Nous sommes la première génération de l'histoire de l'humanité qui a entre ses mains en moins d'une décennie, le sauvetage de la planète ou le drame absolu. C'est en même temps très excitant.
M. Biraben : On va voir si ça excite vraiment nos téléspectateurs. Silvère, vous avez une question ?
Silvère : J'ai une question monsieur le ministre, monsieur Borloo, d'un Silvère - ce n'est pas moi - mais de quelqu'un qui s'appelle Silvère et qui parle de la schizophrénie du Gouvernement. « N'y a-t-il pas un paradoxe en France à développer le nucléaire et à prôner tout en même temps l'écologie et le Grenelle de l'Environnement ? ». C'est un grand débat. Globalement, on double les énergies renouvelables, le plan énergies renouvelables. On lance aujourd'hui un appel d'offres sur des centrales solaires, que chaque région ait une grande centrale solaire. On multiplie par 800 le photovoltaïque en France sur les huit années qui viennent. Et, parallèlement, on va avoir des centrales qui vont être démantelées. Et je rappelle que le nucléaire au plan du changement climatique, du seul changement climatique, est quelque chose qui n'aggrave absolument pas, il n'y a pas d'émission de gaz à effet de serre pour l'essentiel. Donc on avance sur deux pieds. Il se trouve qu'on a de l'énergie moins chère qui n'émet pas de Co² et avec un certain nombre de centrales qui seront, à terme, démantelées. Donc on renouvelle notre parc, on a une technologie. Mais il est clair qu'il faut en même temps réduire nos besoins énergétiques et développer les énergies renouvelables de manière puissante. On a un avantage compétitif, il ne faut pas le perdre.
M. Biraben : On va passer au "J'aime, j'aime pas". Je pense que ça va vous faire plaisir, vous allez nous dire si vous aimez ou si vous n'aimez pas : le retour du savon noir breton de nos grands-mères, ça revient, c'est en vente.
J'adore.
M. Biraben : C'est écologique et c'est économique. G. Delafon : Vous l'utilisez ?
Pas depuis un certain temps mais ne le dites surtout pas.
G. Delafon : J'aime, j'aime pas l'invitation faite par N. Sarkozy à son homologue chinois Hu Jintao de visiter la France ?
J'aime bien sûr. Vous savez, pour des tas de raisons, on souhaite avoir des bonnes relations avec les Chinois mais plus particulièrement [pour] Copenhague. L'accord mondial il se fera aussi avec la Chine et d'ailleurs la Chine prend des mesures en matière...
G. Delafon : Mais ils créent une centrale à charbon par jour pratiquement en Chine.
Parce que la mutation, elle est aussi contradictoire parce que vous avez des problèmes sociaux, des problèmes d'énergie et en même temps vous avez des évolutions fortes. Mais la Chine depuis un an s'était engagée à mettre un bonus malus sur les voitures, ce qu'elle a fait, sur les assurances automobiles. Ils ont décidé que d'ici quatre ou cinq ans, un tiers des automobiles vendues seraient plus ou moins décarbonées en Chine. Donc on a une évolution très forte et en même temps on a une croissance qui a des besoins énergétiques. Tout ça est un peu... par nature il n'y a pas de système parfait. On ne passe pas d'une situation à l'autre de matière simple. Mais nous avons besoin des Chinois pour Copenhague.
G. Delafon : Ils évoluent les Chinois ? Oui beaucoup plus qu'on ne le croit et il ne faudra surtout pas que l'Occident vienne expliquer : nous on ne s'engage pas parce que les Chinois ne s'engagent pas assez. Par habitant, ils ne sont qu'à trois tonnes d'émission de Co². Je rappelle qu'il y a plus de 20 tonnes pour les Américains et 12 pour les Européens en moyenne. Donc ils ont une croissance industrielle qui fait qu'ils vont augmenter mais il faut qu'on ait un accord avec eux. On a besoin de nos amis chinois.
M. Biraben : Merci beaucoup J.-L. Borloo, un ministre de l'Ecologie animé par son sujet.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 21 avril 2009
Bonjour.
M. Biraben : Soyez le bienvenu. Vous avez l'air en pleine forme. C'est au numéro 2 du Gouvernement que s'adresse cette première question. Les négociations, vous l'avez vu, s'enlisent chez Caterpillar ; il y a une nouvelle séquestration chez Molex ; un sixième jour de grève de la faim chez Mad range. Est-ce que le Gouvernement n'échoue pas à apaiser le conflit social ?
C'est un sujet extrêmement difficile. On comprend la situation des salariés à qui on explique qu'on ferme des sites et en même temps il faut absolument avoir un dialogue social normal sur l'ensemble de ces sites industriels. Donc moi ça me préoccupe évidemment beaucoup, comme membre du Gouvernement, comme ancien ministre des Affaires sociales. J'ai toujours souhaité qu'on puisse tisser des rapports de dialogue importants. C'est vrai que c'est assez préoccupant mais enfin j'espère que le dialogue va pouvoir reprendre.
M. Biraben : Avec le Gouvernement ?
Avec les actionnaires d'une manière générale ou les représentants de ces actionnaires. C'est plus compliqué quand ils sont plus lointains. On voit bien que lorsqu'on est dans un rapport de décision de proximité, les choses sont un peu plus faciles que lorsque les prises de décision sont éloignées.
G. Delafon : Alors venons-en à l'environnement. Demain vous partez pour Syracuse, un G8 environnement. Là, vous allez retrouver vos homologues du G8 et notamment les Américains. Qu'est-ce que la France va demander aux Etats-Unis de B. Obama sur le climat ? On a le sentiment que le courant n'est pas passé entre N. Sarkozy et son homologue américain. Qu'est-ce qu'on va leur demander ?
D'abord de quoi s'agit-il ? Au mois de décembre, le monde a rendez-vous, tous les gouvernements du monde ont rendez-vous parce que les scientifiques disent clairement et accentuent la pression à juste titre en disant : il y a extrême danger, que ce soit sur la calotte glaciaire, l'état d'acétification des mers, l'état des forêts, le réchauffement climatique est presque dans l'irréversible. Et il faut que les pays industrialisés réduisent entre 25 et 40% leurs émissions de gaz à effet de serre. Or depuis dix ans, quinze ans, les Etats-Unis considéraient qu'ils n'étaient pas concernés par ce sujet-là, l'administration Bush en gros pour simplifier. Alors on a un nouveau président américain qui arrive avec beaucoup d'enthousiasme, avec une envie de faire en disant : nous allons prendre nos responsabilités. Et puis, il est face à son Congrès. Ce qu'on souhaite de la part des Etats-Unis, c'est clairement une réduction des émissions de gaz à effet de serre, au moins aussi importants d'ici 2020 que ce que fait l'Europe, c'est-à-dire 20 ou 30%.
G. Delafon : Et vous avez reçu des assurances à cet égard ou pas ?
On voit bien que c'est un débat aux Etats-Unis. Vous avez vu d'abord que la Cour Suprême a dit pour la première fois que les émissions de gaz à effet de serre rentraient dans la catégorie des polluants et que l'administration américaine avait par voie de conséquence le droit de mettre la pression, j'allais dire presque indépendamment du Congrès. Enfin ça ne veut pas dire ça exactement mais à peu près. C'est une façon de pousser le Congrès.
G. Delafon : Mais votre homologue qu'est-ce qu'il vous a dit quand vous l'avez vu ?
Ils disent : écoutez on va essayer de ramener nos émissions de gaz à effet de serre au niveau de 1990. C'est évidemment insuffisant mais il y a d'autres Américains, au Congrès, qui disent : il faut effectivement aller tout de suite à moins 20%. Ca va être un débat extrêmement important.
G. Delafon : Mais visiblement, il a commencé le débat parce qu'on a vu que pendant le G20, N. Sarkozy s'était opposé à B. Obama sur ce sujet.
Oui, parce que le président américain avait dit : on va aller vers une stabilisation par rapport aux émissions de 1990. Ce n'est pas possible pour la première puissance du monde, ce n'est pas possible pour une puissance comme celle-là, qui a des chercheurs, qui a des universités, qui a une puissance économique alors qu'ils sont, par habitant, ceux qui pour l'essentiel émettent le plus dans le monde, ils doivent absolument prendre le leadership de cet accord à Copenhague.
G. Delafon : Alors est-ce qu'Obama c'est d'ores et déjà pour vous en matière d'environnement, une déception ?
Non pas du tout, il met une grosse pression, il s'exprime de manière très très forte. Le plan de relance américain l'a intégré de manière importante. Mais c'est difficile. Vous savez ça a été difficile en France au moment du Grenelle.
G. Delafon : Ca reste difficile en France.
Ca reste difficile. Ca a été difficile en Europe pour que 27 pays s'engagent aux réductions d'émissions de gaz à effet de serre. C'est évidemment difficile pour les Etats-Unis. Mais il ne faut pas se tromper. S'il n'y a pas un accord à Copenhague, ambitieux, vraiment ambitieux - 25, 40% pour les pays industrialisés - c'est le début d'un chaos à la fois diplomatique, moral, écologique, climatique, très, très grave.
G. Delafon : Mais est-ce que la crise n'est pas en train de tout balayer ?
Non au contraire. La seule sortie de la crise passera par l'économie verte. Je crois que là-dessus, il n'y a plus aucun expert qui le conteste.
G. Delafon : Oui mais ça tout le monde le répète matin, midi et soir. Mais concrètement...
M. Biraben : On entend ça depuis des années. Zapatero, qui est un président engagé, ne relance pas du tout par le vert, et au contraire construit des bâtiments, repasse par la route et oublie totalement l'argument environnement.
Non, regardez le plan Grenelle, 440 milliards d'euros pour la France. 440 milliards d'euros sur huit ans, c'est quoi ? C'est des énergies renouvelables, c'est des tramways. On a un appel d'offre qui sort à la fin du mois. C'est des lignes à grande vitesse. C'est les chantiers thermiques des bâtiments. Le prêt économie d'énergie, éco PTZ. On l'a lancé il y a huit jours.
G. Delafon : Ca marche ça ?
108 000 personnes sont venues sur les sites. On a signé les premiers à Gif-sur-Yvette la semaine dernière. Par exemple, réduire les économies dans les bâtiments français ; 42% de l'énergie c'est 400 milliards d'euros de travaux. Et c'est de l'activité qui est locale. Donc on était dans une économie de la rente, on achetait des énergies très loin alors qu'on en a à proximité. On ne faisait pas d'économies d'énergie. Enfin on était peu respectueux des ressources naturelles. On est sur un nouveau modèle. La mutation... on assiste à une mutation d'une rapidité, d'une profondeur...
G. Delafon : Elle est lente.
Non en France ça va à une vitesse extraordinaire.
G. Delafon : Regardez Heuliez, fabricant de voitures électriques, donc l'avenir. Ils sont menacés de liquidation judiciaire.
Une mutation ce n'est pas hier, c'est simple, enfin c'est comme ça et le lendemain c'est autrement. Heuliez a un produit.
G. Delafon : Il faut aider Heuliez ?
Evidemment qu'il faut aider Heuliez. On travaille sur les voitures décarbonées avec Heuliez, avec Renault, avec PSA, enfin l'ensemble des constructeurs et des plus petits. Dans trois, quatre ans, vous aurez 15 ou 20% des voitures vendues qui seront ou électriques ou extrêmement hybrides. On va faire en cinq, six ou sept ans une mutation dans nos économies que la dernière révolution industrielle a faite en 50 ou 60 ans. Ca va à une vitesse folle. Le comportement des consommateurs a complètement changé. L'éco conception des produits a changé. Les industriels s'engagent. Les collectivités locales. J'écoutais ce matin à la radio des restaurateurs éco-labellisés, plantant un arbre à chaque fois qu'un client vient avec la récupération de l'eau, récupération des déchets complètement neutres au plan carbonique. C'est toute la société qui bouge. Alors c'est vrai qu'en même temps, cette mutation elle est tellement rapide qu'elle peut être un petit peu inquiétante. Mais en réalité, on revient à des choses respectueuses de la nature, de l'homme, beaucoup plus localisées, l'évolution de l'agriculture qui est, elle aussi, en circuit court avec des capacités de faire localement en développant du bio, de l'agriculture de saison. On revient à des choses saines.
G. Delafon : Demain, vous allez à Syracuse, vous allez être face à vos homologues, qu'est-ce que vous allez décider ensemble les ministres de l'Environnement du G8, pour avancer justement vers cette transition ?
On va préparer Copenhague. Et puis je vais à Washington la semaine prochaine, plus spécifiquement invité par mes homologues américains. On ne peut pas louper le rendez-vous de Copenhague. Pour vos enfants, pour mes enfants, il faut qu'il y ait un accord ambitieux, il ne faut pas qu'il y ait un petit accord à Copenhague. Ce n'est pas possible. Nous sommes la première génération de l'histoire de l'humanité qui a entre ses mains en moins d'une décennie, le sauvetage de la planète ou le drame absolu. C'est en même temps très excitant.
M. Biraben : On va voir si ça excite vraiment nos téléspectateurs. Silvère, vous avez une question ?
Silvère : J'ai une question monsieur le ministre, monsieur Borloo, d'un Silvère - ce n'est pas moi - mais de quelqu'un qui s'appelle Silvère et qui parle de la schizophrénie du Gouvernement. « N'y a-t-il pas un paradoxe en France à développer le nucléaire et à prôner tout en même temps l'écologie et le Grenelle de l'Environnement ? ». C'est un grand débat. Globalement, on double les énergies renouvelables, le plan énergies renouvelables. On lance aujourd'hui un appel d'offres sur des centrales solaires, que chaque région ait une grande centrale solaire. On multiplie par 800 le photovoltaïque en France sur les huit années qui viennent. Et, parallèlement, on va avoir des centrales qui vont être démantelées. Et je rappelle que le nucléaire au plan du changement climatique, du seul changement climatique, est quelque chose qui n'aggrave absolument pas, il n'y a pas d'émission de gaz à effet de serre pour l'essentiel. Donc on avance sur deux pieds. Il se trouve qu'on a de l'énergie moins chère qui n'émet pas de Co² et avec un certain nombre de centrales qui seront, à terme, démantelées. Donc on renouvelle notre parc, on a une technologie. Mais il est clair qu'il faut en même temps réduire nos besoins énergétiques et développer les énergies renouvelables de manière puissante. On a un avantage compétitif, il ne faut pas le perdre.
M. Biraben : On va passer au "J'aime, j'aime pas". Je pense que ça va vous faire plaisir, vous allez nous dire si vous aimez ou si vous n'aimez pas : le retour du savon noir breton de nos grands-mères, ça revient, c'est en vente.
J'adore.
M. Biraben : C'est écologique et c'est économique. G. Delafon : Vous l'utilisez ?
Pas depuis un certain temps mais ne le dites surtout pas.
G. Delafon : J'aime, j'aime pas l'invitation faite par N. Sarkozy à son homologue chinois Hu Jintao de visiter la France ?
J'aime bien sûr. Vous savez, pour des tas de raisons, on souhaite avoir des bonnes relations avec les Chinois mais plus particulièrement [pour] Copenhague. L'accord mondial il se fera aussi avec la Chine et d'ailleurs la Chine prend des mesures en matière...
G. Delafon : Mais ils créent une centrale à charbon par jour pratiquement en Chine.
Parce que la mutation, elle est aussi contradictoire parce que vous avez des problèmes sociaux, des problèmes d'énergie et en même temps vous avez des évolutions fortes. Mais la Chine depuis un an s'était engagée à mettre un bonus malus sur les voitures, ce qu'elle a fait, sur les assurances automobiles. Ils ont décidé que d'ici quatre ou cinq ans, un tiers des automobiles vendues seraient plus ou moins décarbonées en Chine. Donc on a une évolution très forte et en même temps on a une croissance qui a des besoins énergétiques. Tout ça est un peu... par nature il n'y a pas de système parfait. On ne passe pas d'une situation à l'autre de matière simple. Mais nous avons besoin des Chinois pour Copenhague.
G. Delafon : Ils évoluent les Chinois ? Oui beaucoup plus qu'on ne le croit et il ne faudra surtout pas que l'Occident vienne expliquer : nous on ne s'engage pas parce que les Chinois ne s'engagent pas assez. Par habitant, ils ne sont qu'à trois tonnes d'émission de Co². Je rappelle qu'il y a plus de 20 tonnes pour les Américains et 12 pour les Européens en moyenne. Donc ils ont une croissance industrielle qui fait qu'ils vont augmenter mais il faut qu'on ait un accord avec eux. On a besoin de nos amis chinois.
M. Biraben : Merci beaucoup J.-L. Borloo, un ministre de l'Ecologie animé par son sujet.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 21 avril 2009