Déclaration franco-britannique en faveur d'une ambition industrielle européenne, à Evian le 6 juillet 2009.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Auteur(s) moral(aux) : Présidence de la République

Circonstance : Sommet franco-britannique, à Evian le 6 juillet 2009

Texte intégral

La place de l'Europe dans la compétition économique mondiale dépendra de sa capacité à doter ses citoyens et ses entreprises des compétences, des ressources et d'un environnement réglementaire adéquats et à diffuser les innovations. L'innovation industrielle a besoin de s'inscrire dans une stratégie et une vision de long terme clairement définies, et demande un appui des pouvoirs publics. Cet appui et cette vision seront d'autant plus efficaces qu'ils seront partagés à l'échelle de l'Union européenne. Ces raisons rendent plus que jamais nécessaire la mise en oeuvre d'une véritable ambition industrielle européenne. Elle s'attachera en particulier à relever les grands défis de nos sociétés, tels que le changement climatique ou la santé.
La crise appelle une réponse coordonnée. La France et le Royaume-Uni s'emploient ainsi tous deux à mener une stratégie industrielle qui soutienne des entreprises et des emplois viables dans cette période de conjoncture difficile tout en contribuant à la modernisation et à l'adaptation de notre tissu industriel, en particulier le développement et la croissance des PME européennes les plus prometteuses. Cette stratégie doit également viser à consolider les secteurs dans lesquels nous excellons et à préserver la prospérité européenne, tout en faisant du développement durable un moteur essentiel de l'innovation et de la croissance de nos entreprises et de notre économie. Elle doit également nous permettre de coordonner les différents outils et politiques pour favoriser le développement des entreprises tout en tenant compte des spécificités des différents secteurs de l'économie. Enfin, elle doit promouvoir sur le plan international des règles respectées par tous et permettre ainsi de réguler les marchés mondiaux.
Cette vision commune se traduit, tant au plan national, bilatéral, que communautaire, par les principales initiatives suivantes :
La France et le Royaume-Uni réaffirment l'importance du Small Business Act et appellent à sa pleine mise en oeuvre, notamment en ce qui concerne l'accès aux financements et l'amélioration de la régulation et de l'accès aux marchés, qui constituent la première des priorités du SBA.
La France et le Royaume-Uni, qui ont agi pour permettre aux PME de disposer des fonds propres et des crédits dont elles avaient besoin, se félicitent que la BEI ait jusqu'à présent atteint, voire dépassé, ses objectifs, dans l'exécution de son plan de 30 milliards d'euros en faveur des PME pour la période 2008-2011 et l'encouragent à renforcer cet effort. La France et le Royaume-Uni demandent à la BEI de mettre à la disposition des entreprises et des projets d'infrastructures critiques des ressources supplémentaires au cours des deux prochaines années, de prendre davantage de risques dans son activité de prêt, et que les procédures d'accès aux financements de l'UE soient rationalisées pour les PME. Dans le même temps, nous nous réjouissons de l'intention de la Commission d'alléger toutes les charges inutiles qui pèsent sur les entreprises (en particulier les PME). La France et le Royaume-Uni demandent une accélération des travaux dans ce domaine pour faire en sorte que toutes les mesures de simplification soient en place dès que possible et pour que les dix premiers milliards d'euros d'économies soient réalisés dès que possible avant la fin 2010.
Pour améliorer la trésorerie des PME, la France et le Royaume-Uni se sont engagés sur la voix de la réduction des délais de paiement publics et souhaitent que la révision de la directive 2000/35/CE sur les retards de paiement aboutisse le plus rapidement possible. La France et le Royaume-Uni sont par ailleurs décidés à réduire les délais de création d'une entreprise pour atteindre trois jours ouvrables. Pour cela, ils proposeront d'ici la fin 2009 aux entrepreneurs des procédures dématérialisées dans le cadre du guichet unique prévu par la directive service.
Par ailleurs, en vue de permettre aux PME de renforcer leurs fonds propres, il faut améliorer le cadre européen de capital-investissement. Pour cela, il convient de faciliter l'accès des PME à la cote en allégeant leurs obligations d'information. Dans le cadre de l'examen de la directive sur les gestionnaires de fonds d'investissement alternatifs, et de la révision des directives transparence, prospectus, et abus de marché, une réflexion globale sur un statut européen pour les petites et moyennes entreprises doit être menée. A ce titre, une meilleure représentation de ces petites et moyennes entreprises dans les comités de révision des directives est très souhaitable. La France et le Royaume-Uni souhaitent que l'un des objectifs de ces travaux soit de simplifier les procédures, notamment pour les offres publiques, et de réduire les coûts pour les petites et moyennes entreprises. Nos deux pays encouragent la Commission européenne à travailler dans ce sens. Un marché actif des valeurs technologiques est la condition indispensable du bon développement du capital risque.
Le Royaume-Uni et la France soutiennent au niveau communautaire la mise en oeuvre du plan d'action politique industrielle durable / consommation et production durables. Nous considérons en effet que la transition vers une économie plus efficace dans l'utilisation des ressources avec un niveau d'émissions moindre est aujourd'hui un impératif reconnu par tous et que ce changement dans nos modes de production et de consommation offre des opportunités économiques considérables pour nos entreprises. Ce plan incite en particulier au développement de produits plus efficaces en matière de consommation d'énergie et de ressources et vise à fournir toutes les informations nécessaires sur la performance environnementale des produits au consommateur, lui permettant ainsi de faire un choix informé.
L'innovation est vitale pour réaliser une transition réussie vers une économie plus efficace dans l'utilisation des ressources. Nos deux pays demandent à l'UE des investissements plus stratégiques dans des technologies commercialement viables qui aideront à mener ce changement. Nous sommes conscients de la nécessité de créer les bonnes conditions pour des investissements dans l'innovation et nous demandons une amélioration de l'accès des PME aux programmes de recherche de l'UE. Enfin, nous devons nous assurer qu'il existe dans l'UE un marché unique de la connaissance totalement réalisé afin d'accélérer et d'encourager l'innovation. A cette fin, la France et le Royaume-Uni demandent la mise en oeuvre intégrale de l'Espace européen de la recherche.
Nos deux pays soutiennent également la modernisation de l'industrie automobile à travers le développement de véhicules plus respectueux de l'environnement. L'automobile est en effet un secteur clef de notre économie par les 12 millions d'emplois en Europe qui en dépendent et par le rôle qu'elle joue dans la mobilité de nos citoyens. Or, l'avenir appartient au développement de véhicules moins émetteurs. Dans cette perspective, nos deux pays ont contribué, début 2009, à l'adoption au niveau européen du règlement réduisant les émissions de CO2 des véhicules automobiles. Par ailleurs, au plan national, nous soutenons le financement des grands programmes de développement de véhicules et de processus de fabrication plus propres, tant en direction des constructeurs automobiles pour un montant de 6,5 milliards d'euros en France et de 2,3 milliards de livres au Royaume-Uni, que dans le cadre de nos plans publics respectifs en faveur des véhicules « dé-carbonés » ou à émissions presque nulles (électriques, hybrides...) axés sur la R&D collaborative ou le déploiement et la commercialisation de nouvelles technologies, pour près de 300 millions d'euros en France et 400 millions de livres au Royaume-Uni. Parallèlement à cet effort d'investissement et de manière complémentaire, nos deux Gouvernements encouragent également l'achat de véhicules plus propres par les utilisateurs, à travers notamment des dispositifs de primes à la casse et de bonus pour les véhicules plus écologiques.
Nous considérons que l'Europe a là l'occasion de devenir un site privilégié pour des investissements mondiaux et le déploiement de technologies de véhicules à très faibles émissions de carbone. Nous considérons que la question de l'interopérabilité des systèmes et infrastructures revêt une importance particulière. La normalisation et l'harmonisation de technologies d'appui nous aidera à l'assurer et accélérera l'introduction de véhicules à très faibles émissions de carbone. A cette fin, la France et le Royaume-Uni s'engagent à tirer parti de l'étroite coopération existante qu'ils pratiquent dans des forums techniques multilatéraux (tant à l'échelle européenne que mondiale) pour promouvoir une adoption rapide des normes internationales et de l'interopérabilité. Une initiative européenne forte en la matière permettra à nos constructeurs de gagner une avance sur le plan international.
Le Marché unique est le moteur de la croissance et nous devons tout mettre en oeuvre pour augmenter le plus possible les bénéfices de cette croissance. La France et le Royaume-Uni demandent à la Commission de mettre au point un agenda spécifique privilégiant les secteurs dans lesquels l'Europe peut devenir le leader mondial, comme les technologies à faibles émissions de carbone, les services commerciaux, les produits industriels à forte valeur ajoutée, les infrastructures numériques et les sciences de la vie. Nous appelons également la Commission à développer une stratégie globale pour faire en sorte que le marché unique fonctionne plus efficacement et à recourir aux instruments d'une politique concurrentielle pour continuer à éliminer les obstacles auxquels se heurtent les entreprises.
La France et le Royaume-Uni ont par ailleurs en commun une industrie aéronautique puissante, pourvoyeuse d'emplois et d'exportations à haute valeur ajoutée. Ils marquent leur soutien à son développement en accordant des avances remboursables à Airbus pour son programme A350XWB, afin que l'entreprise puisse développer l'avion de la prochaine génération, plus économe en énergie.
Nous devons également veiller à ce que nos citoyens aient les capacités et les opportunités de participer de la même manière à un marché de l'emploi paneuropéen. La France et le Royaume-Uni reconnaissent le rôle important que le Fonds social européen peut jouer en matière de mobilité de la main-d'oeuvre et demandent au Fonds de jouer un rôle plus important en intensifiant le développement et la formation professionnels, notamment en fixant de nouveaux objectifs ambitieux pour l'apprentissage.