Texte intégral
- Après les ennuis de l'an dernier, notamment le drame de Carcassonne, ce 14 juillet est plus « calme »... Est-ce le signe d'une France réconciliée avec son armée ?
Il n'y a jamais eu de divorce ! Chaque année nous réalisons un sondage sur la relation des Français avec leur armée. Le dernier taux de confiance est de l'ordre de 90%. C'est dire si les Français nous font confiance. Cette année, le 14 juillet est marqué par un symbole fort : le défilé de troupes indiennes. C'est l'occasion pour nous d'affirmer notre volonté de partenariat stratégique avec l'une des plus grandes démocraties du monde. La brigade franco-allemande défilera également sur les Champs-Elysées. Le niveau d'amitié entre nos deux pays est tel que les Français ont trouvé naturel qu'un régiment allemand s'installe sur notre territoire. Qui aurait pu l'imaginer en 1945? C'est le plus beau des symboles de cette communauté de destin qui unit nos deux pays.
- L'armée est en plein chantier depuis deux ans... Vous présentez cette semaine au sénat la loi de programmation militaire. Quel est le montant de la dépense ?
Il est de 377 milliards d'euros d'ici à 2020 dont 186 milliards pour la première tranche en 2014. C'est un immense effort. L'enjeu est la modernisation de nos structures, mais aussi de notre gouvernance. Nous mutualisons l'administration et le soutien pour faire des économies et chaque euro généré est investi pour améliorer nos équipements et la condition de nos personnels. L'augmentation des soldes indiciaires est entre un peu moins d'un mois jusqu'à trois mois supplémentaires de salaire.
- Vous regrettez la disparition du service militaire ?
Quand cette décision a été prise, j'étais contre. Je trouvais que le principe de mélanger dans les casernes des jeunes issus de différentes origines sociales était un bon principe. Il permettait à des jeunes sans repère de retrouver un cadre et d'apprendre que dans la vie en société, il y a des règles. C'était également un moyen de former les jeunes. Ils pouvaient par exemple passer leur permis de conduire. Cela étant dit, aujourd'hui tout retour en arrière serait impossible. Nous n'aurions plus les équipements pour accueillir chaque année 800 000 jeunes. L'armée française reste tout de même le premier recruteur de France. Nous recrutons 30 000 jeunes par an.
- Combien de temps faudra-t-il rester en Afghanistan, au Kosovo ou en Côte d'Ivoire ?
Au Kosovo nous allons réduire progressivement notre présence parce la situation s'améliore. En Côte d'Ivoire, nous avons dissous le 43e BIMA, mais nous restons présents dans le cadre de la mission de l'ONU tant que le processus de reconstruction nationale n'est pas terminé. Quant à l'Afghanistan, même si nous n'avons pas vocation à y rester indéfiniment, aujourd'hui, notre présence est importante pour que ce pays retrouve le chemin de la paix et du développement. Dans cette zone de forte instabilité se joue une partie de notre sécurité.
- Les américains ont lancé cette semaine la plus grosse opération aéroportée depuis le Vietnam... N'y a-t-il pas un risque d'enlisement ?
Tout l'enjeu est d'arriver à créer un lien de confiance assez fort avec les populations pour qu'elles renoncent à une sorte de complicité passive avec les Talibans par peur de représailles. Tout en assurant leur sécurité, nous devons créer les ponts, des écoles, des dispensaires... J'ai vu cette semaine le 27ème bataillon de chasseurs alpins qui revenait de Kapisa. Ils ont réalisé plus de 6 000 consultations médicales ! Ils m'ont expliqué que la situation s'améliorait dans certains villages. Mais tout cela sera long.
- Où en est le redécoupage de la carte militaire...
Nous avons opéré une révolution tranquille. Tout le monde disait que c'était impensable, irréalisable. J'ai dialogué avec les élus un par un. Sur le fond, tout le monde était d'accord mais personne n'en voulait chez lui... Ce redéploiement était attendu par les armées qui constataient le coût considérable de notre dispersion sur 471 sites. Il aurait dû être lancé depuis bien longtemps. Les premières fermetures de caserne sont en cours. A ce jour, 95% des personnels concernés par les restructurations ont retrouvé une affectation.
- Comment voyez-vous l'armée dans 20 ans ? Plus de drones, des satellites, des équipements high-tech ?
Nos équipements connaîtront évidemment une évolution technologique. Mais la question de l'armée du futur n'est pas qu'une question de matériel. Le fantasme d'une armée dont les moyens sophistiqués seraient la clé de tout serait une grave erreur. Les équipements performants ne remplaceront jamais des hommes qui ont l'intelligence de leur mission. Regardez en Afghanistan, vous pouvez mettre tous les équipements que vous voulez, un taliban dans la montagne, s'il ne bouge pas, vous ne le verrez jamais.
J'ai deux priorités : que l'on soit meilleur dans la disponibilité opérationnelle, en faisant notamment des efforts dans la maintenance du matériel, et que l'on fasse de la France le pivot de l'industrie de la défense européenne. D'abord parce que nous sommes les leaders dans ce domaine, et ensuite parce que c'est un bon investissement pour la France en période de crise car chaque euro investi dans la défense est un euro investi dans une industrie française qui n'est pas délocalisée.
- Vous êtes saisi par des juges de demandes de levée du secret défense, dans les dossiers Karachi et des moines de Tibéhirine...
Ma doctrine est intangible: je suis systématiquement l'avis de la commission consultative du secret de la défense nationale dont la qualité du travail n'est pas contestée. Dans ces dossiers, si la commission nous le demande, nous transmettrons les dossiers aux juges car nous devons participer à la recherche de la vérité.
source http://www.defense.gouv.fr, le 22 juillet 2009
Il n'y a jamais eu de divorce ! Chaque année nous réalisons un sondage sur la relation des Français avec leur armée. Le dernier taux de confiance est de l'ordre de 90%. C'est dire si les Français nous font confiance. Cette année, le 14 juillet est marqué par un symbole fort : le défilé de troupes indiennes. C'est l'occasion pour nous d'affirmer notre volonté de partenariat stratégique avec l'une des plus grandes démocraties du monde. La brigade franco-allemande défilera également sur les Champs-Elysées. Le niveau d'amitié entre nos deux pays est tel que les Français ont trouvé naturel qu'un régiment allemand s'installe sur notre territoire. Qui aurait pu l'imaginer en 1945? C'est le plus beau des symboles de cette communauté de destin qui unit nos deux pays.
- L'armée est en plein chantier depuis deux ans... Vous présentez cette semaine au sénat la loi de programmation militaire. Quel est le montant de la dépense ?
Il est de 377 milliards d'euros d'ici à 2020 dont 186 milliards pour la première tranche en 2014. C'est un immense effort. L'enjeu est la modernisation de nos structures, mais aussi de notre gouvernance. Nous mutualisons l'administration et le soutien pour faire des économies et chaque euro généré est investi pour améliorer nos équipements et la condition de nos personnels. L'augmentation des soldes indiciaires est entre un peu moins d'un mois jusqu'à trois mois supplémentaires de salaire.
- Vous regrettez la disparition du service militaire ?
Quand cette décision a été prise, j'étais contre. Je trouvais que le principe de mélanger dans les casernes des jeunes issus de différentes origines sociales était un bon principe. Il permettait à des jeunes sans repère de retrouver un cadre et d'apprendre que dans la vie en société, il y a des règles. C'était également un moyen de former les jeunes. Ils pouvaient par exemple passer leur permis de conduire. Cela étant dit, aujourd'hui tout retour en arrière serait impossible. Nous n'aurions plus les équipements pour accueillir chaque année 800 000 jeunes. L'armée française reste tout de même le premier recruteur de France. Nous recrutons 30 000 jeunes par an.
- Combien de temps faudra-t-il rester en Afghanistan, au Kosovo ou en Côte d'Ivoire ?
Au Kosovo nous allons réduire progressivement notre présence parce la situation s'améliore. En Côte d'Ivoire, nous avons dissous le 43e BIMA, mais nous restons présents dans le cadre de la mission de l'ONU tant que le processus de reconstruction nationale n'est pas terminé. Quant à l'Afghanistan, même si nous n'avons pas vocation à y rester indéfiniment, aujourd'hui, notre présence est importante pour que ce pays retrouve le chemin de la paix et du développement. Dans cette zone de forte instabilité se joue une partie de notre sécurité.
- Les américains ont lancé cette semaine la plus grosse opération aéroportée depuis le Vietnam... N'y a-t-il pas un risque d'enlisement ?
Tout l'enjeu est d'arriver à créer un lien de confiance assez fort avec les populations pour qu'elles renoncent à une sorte de complicité passive avec les Talibans par peur de représailles. Tout en assurant leur sécurité, nous devons créer les ponts, des écoles, des dispensaires... J'ai vu cette semaine le 27ème bataillon de chasseurs alpins qui revenait de Kapisa. Ils ont réalisé plus de 6 000 consultations médicales ! Ils m'ont expliqué que la situation s'améliorait dans certains villages. Mais tout cela sera long.
- Où en est le redécoupage de la carte militaire...
Nous avons opéré une révolution tranquille. Tout le monde disait que c'était impensable, irréalisable. J'ai dialogué avec les élus un par un. Sur le fond, tout le monde était d'accord mais personne n'en voulait chez lui... Ce redéploiement était attendu par les armées qui constataient le coût considérable de notre dispersion sur 471 sites. Il aurait dû être lancé depuis bien longtemps. Les premières fermetures de caserne sont en cours. A ce jour, 95% des personnels concernés par les restructurations ont retrouvé une affectation.
- Comment voyez-vous l'armée dans 20 ans ? Plus de drones, des satellites, des équipements high-tech ?
Nos équipements connaîtront évidemment une évolution technologique. Mais la question de l'armée du futur n'est pas qu'une question de matériel. Le fantasme d'une armée dont les moyens sophistiqués seraient la clé de tout serait une grave erreur. Les équipements performants ne remplaceront jamais des hommes qui ont l'intelligence de leur mission. Regardez en Afghanistan, vous pouvez mettre tous les équipements que vous voulez, un taliban dans la montagne, s'il ne bouge pas, vous ne le verrez jamais.
J'ai deux priorités : que l'on soit meilleur dans la disponibilité opérationnelle, en faisant notamment des efforts dans la maintenance du matériel, et que l'on fasse de la France le pivot de l'industrie de la défense européenne. D'abord parce que nous sommes les leaders dans ce domaine, et ensuite parce que c'est un bon investissement pour la France en période de crise car chaque euro investi dans la défense est un euro investi dans une industrie française qui n'est pas délocalisée.
- Vous êtes saisi par des juges de demandes de levée du secret défense, dans les dossiers Karachi et des moines de Tibéhirine...
Ma doctrine est intangible: je suis systématiquement l'avis de la commission consultative du secret de la défense nationale dont la qualité du travail n'est pas contestée. Dans ces dossiers, si la commission nous le demande, nous transmettrons les dossiers aux juges car nous devons participer à la recherche de la vérité.
source http://www.defense.gouv.fr, le 22 juillet 2009