Texte intégral
Madame Speaker,
Monsieur le Président,
Madame la Présidente,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Mesdames, Messieurs,
MOLWENI, DUMELA, SANIBONANI
Je suis très sensible à l'honneur que vous m'avez fait en m'invitant à m'exprimer devant votre Parlement. C'est pour moi un motif de fierté et surtout d'émotion. Je sais en effet que la plupart d'entre vous ont souffert, jusque dans leur chair, de l'Apartheid, ce régime meurtrier qui, en séparant les hommes, a déchiré votre peuple et choqué la conscience humaine. Mais, depuis maintenant sept ans, depuis ces élections tant attendues d'avril 1994, toutes et tous, quel que soit votre passé, quelles que soient vos origines, vous unissez vos efforts pour construire ensemble une nouvelle Afrique du Sud.
Celle-ci a trouvé ses fondements dans une constitution reconnaissant les droits et les libertés de tous, sans aucune considération raciale, religieuse ou de croyance. Vous célébrez ainsi l'égalité dans la diversité. En témoigne votre nouveau drapeau sur lequel figurent les couleurs de tous les mouvements d'opposition d'hier, qui sont aussi les couleurs de cette " nation arc-en-ciel " que vous formez ensemble. Vous-même, Madame Speaker, qui êtes une femme d'origine indienne dans un pays qui se veut multiracial et multiculturel, vous incarnez cette diversité.
Cette nouvelle Afrique du Sud, vous l'avez construite ensemble dans un esprit de tolérance et de réconciliation. Parce que la recherche de la vérité est la seule voie qui permette de guérir les blessures du passé et de construire un avenir serein, vous avez décidé d'affronter lucidement une histoire douloureuse, faite de violences et de crimes. Vous avez eu ce courage pour que soient reconnues les souffrances des victimes et la responsabilité de ceux qui ont bafoué les droits de l'homme ; pour que soient accordées des réparations à ceux qui en avaient besoin et le pardon à ceux qui le demandaient. L'uvre accomplie par la Commission " Vérité et réconciliation ", animée par Monseigneur Desmond TUTU, a contribué à rendre leur dignité à ceux qui avaient été humiliés, l'espoir à ceux qui l'avaient perdu, et la confiance à votre Nation tout entière.
Cette révolution -radicale, mais pacifique-, que votre pays vient de connaître, est un exemple pour l'Afrique. Pour une Afrique qui continue à souffrir de maux nombreux, mais qui peut compter, dans son combat pour la démocratie et le développement, sur la France.
Mon pays est un ami fidèle et respectueux de l'Afrique.
Une relation ancienne, chaque jour raffermie, nous unit.
La France et l'Afrique ont en commun une histoire qui les a liées pour longtemps, faite de lumières, mais aussi d'ombres. Nous ne voulons pas occulter la période de domination coloniale, pendant laquelle l'Afrique a souffert, et qui a laissé, assurément, de profondes cicatrices. Pour autant, tout n'est pas à rejeter dans ce passé partagé. Il nous faut aujourd'hui conserver le meilleur de cet héritage commun : d'importants échanges, de fortes relations de coopération et une amitié réciproque qui unit des pays égaux en droit et en dignité, des pays qui se respectent mutuellement.
Cette relation d'amitié, la France la partage aussi avec l'Afrique du Sud. Les Français apprécient, depuis maintenant bien longtemps, les richesses naturelles et la diversité de votre pays. Au XVIIème siècle, des huguenots français, réfugiés aux Pays-Bas au lendemain de la Révocation de l'Édit de Nantes, s'installèrent en Afrique du Sud, à l'invitation du gouverneur du Cap, et mirent en culture les terres de cette région. Un siècle plus tard, c'est un Français encore, l'explorateur François LE VAILLANT, qui fit circuler en Europe des récits sur l'Afrique du Sud qui donnèrent de cette région du monde une image attrayante et plus juste.
Malgré ces affinités anciennes, nos chemins se sont écartés, le temps des guerres coloniales et d'un régime d'apartheid contre lequel de très nombreux Français -parmi lesquels j'étais- se sont mobilisés. Puis la France a soutenu le processus qui vous a conduits à la réconciliation. Lorsque les ennemis d'hier ont souhaité se parler, mon pays les a encouragés. Je me souviens des rencontres organisées à Dakar, en 1987, sous le haut patronage du Président Abdou DIOUF et de la Fondation France-Libertés, entre des intellectuels blancs sud-africains et des responsables de l'ANC en exil, puis, en France, à Marly-le-Roi, en 1988. Nous espérions le succès, à l'époque, mais nous n'imaginions pas que les événements iraient si vite.
Lorsque vous avez aboli l'Apartheid, nos deux pays ont pu renouer une amitié qui leur était naturelle. En juillet 1994, vous l'avez rappelé, la visite du Président François MITTERRAND, premier chef d'Etat à se rendre en Afrique du Sud démocratique, a signifié la fidélité de la France à votre pays. Ma présence aujourd'hui parmi vous, 3 ans après celle du Président CHIRAC, doit avoir à vos yeux le même sens.
L'Afrique du Sud et la France partagent les mêmes objectifs de démocratie et de développement pour l'Afrique.
Dès sa formation en 1997, le Gouvernement que je dirige a fait de l'ouverture à l'ensemble du continent africain, au-delà des seules régions francophones, un principe fort de sa politique étrangère. Le ministre des Affaires Etrangères, Hubert VEDRINE, avait tenu à venir vous en exposer lui-même les principes en octobre 1997. Notre pays devait s'adapter aux nouvelles réalités de l'Afrique et, notamment, à la constitution d'ensembles régionaux distincts des anciennes divisions coloniales. Dans cette perspective, la France entend approfondir encore son partenariat avec l'Afrique du Sud, en laquelle mon pays voit une puissance régionale incontournable, consciente des enjeux africains, riche de ses ressources et de son expérience démocratique.
C'est avec vous que la France entend répondre à l'injonction morale que Nelson MANDELA nous adressait à tous à l'occasion du dixième anniversaire de sa libération : " personne ne pourra se reposer en paix, tant que des gens seront courbés par le poids de la faim, des maladies, du manque d'éducation, tant que des millions de personnes vivront dans l'insécurité et la crainte quotidienne ".
La France soutient l'Afrique dans sa lutte contre les fléaux qui la menacent.
Le premier de ces fléaux, c'est la guerre.
L'Afrique, longtemps divisée par les rivalités coloniales, puis par l'opposition des deux blocs de la guerre froide, reste aujourd'hui le théâtre d'incessants conflits armés. La mort, les violences, l'exode de millions d'Africains, les terres laissées à l'abandon et qui deviennent stériles, la faim qui tue à son tour, les haines qui s'enracinent : la guerre épuise l'Afrique. L'Afrique a besoin de paix.
Il lui faut d'abord lutter contre le racisme. Celui-ci est au cur des conflits ethniques qui déchirent ce continent. La xénophobie et l'intolérance, qui minent aujourd'hui tant de sociétés africaines, sont les ferments de nouvelles violences entre voisins, entre frères. C'est pourquoi je me réjouis de la tenue à Durban, à l'initiative de l'Organisation des Nations-Unies, en septembre prochain, de la Conférence mondiale contre le racisme.
En faveur de la paix, l'Afrique du Sud assume un rôle exemplaire. Exemplaire par la façon dont elle a réussi à éteindre ses propres haines pour construire une société démocratique. Exemplaire aussi par les efforts de médiation qu'elle a engagés hors de ses frontières afin d'enrayer la prolifération des luttes armées. Je pense aux efforts que vous avez déployés dans la crise du Burundi. Votre pays a aussi joué un rôle de premier plan dans la signature de l'accord de paix à Lusaka, le 7 juillet 1999. La France a relayé les efforts de l'Afrique du Sud au sein du Conseil de sécurité. La mise en place de la Mission des Nations-Unies au Congo verra, côte à côte, des soldats sud-africains et français travailler au rétablissement de la paix dans ce pays.
Pour sa part la France reste attachée au service de la paix en Afrique. Elle a condamné les quatre coups d'Etat qui ont eu lieu en 1999 en Afrique francophone, demandant un retour rapide à l'ordre et au calme tout en veillant à ne pas s'immiscer dans les affaires internes de ces Etats. Cette volonté de contribuer à la paix sans tomber dans l'ingérence a conduit la France à aider certains Etats à régler par eux-mêmes les situations de crise dans lesquelles ils se trouvaient. Dans le même esprit, la France renforce les capacités africaines de maintien de la paix (RECAMP) : nous consacrons une part importante de notre coopération militaire à une formation dont 5.000 militaires africains ont déjà bénéficié.
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Il y a un combat qui concerne le continent tout entier, pour lequel il faut unir et mobiliser toutes nos forces : c'est celui contre le sida.
L'impact dévastateur de ce virus constitue pour l'Afrique une grave menace de déstabilisation. Dans le monde, 46 millions de personnes sont aujourd'hui atteintes du sida, qui a déjà provoqué la mort de 22 millions d'êtres humains, laissant des millions d'orphelins. En Afrique australe, l'épidémie a progressé très rapidement lors des dix dernières années, surtout dans les zones urbaines où près de 20 % des femmes enceintes sont contaminées. Face à cette catastrophe, les travaux de la conférence organisée par l'Afrique du Sud en juillet 2000 à Durban ont permis une prise de conscience internationale. Il revient désormais aux responsables politiques d'engager une politique de santé publique à la hauteur de la menace. Cette politique a pour fondement le droit universel à la santé et à la vie.
La France s'engage résolument aux côtés des Africains dans la lutte contre le sida. Il faut faire face à trois urgences. La première est l'accès aux soins. Des millions de malades en sont aujourd'hui privés, faute de moyens financiers. Or les traitements existent : en France, grâce aux nouvelles thérapies, la mortalité des malades du sida a été réduite des deux tiers. L'étendue de l'épidémie exige de généraliser le principe de la fabrication et de la commercialisation des médicaments génériques pour les pays les plus pauvres. Je me réjouis que les grands laboratoires pharmaceutiques aient finalement admis ce principe. Les accords multilatéraux sur la propriété intellectuelle doivent permettre de concilier la liberté d'industrie et de commerce avec les réalités économiques et sanitaires du monde contemporain. Un consensus international sur le principe de prix différenciés pour les médicaments sous brevet est devenu indispensable pour que tous les malades, dans tous les pays, puissent accéder aux meilleurs soins disponibles.
La deuxième urgence est de renforcer les infrastructures hospitalières. En effet, sans capacités de dépistage, d'accueil et de suivi des malades, le combat contre le sida est vain. Or ce sont les pays les plus touchés qui manquent le plus cruellement de ces structures. Sous l'impulsion de son ministre délégué à la Santé, le docteur Bernard KOUCHNER, la France propose donc un programme de partenariat hospitalier permettant le jumelage entre établissements français et européens d'une part et entre établissements africains d'autre part. C'est là une mesure concrète, efficace, solidaire.
La troisième urgence, c'est de donner à la recherche scientifique les moyens d'accomplir de nouveaux progrès, notamment dans le domaine des vaccins. Nous devons conjuguer au niveau international tous les efforts de recherche face à une maladie qui, elle, ne connaît pas de frontières.
Par-delà ces trois urgences, la France milite pour une approche globale de l'épidémie. En effet, une approche seulement médicale du sida ne suffirait pas à circonscrire le désastre humain dont l'Afrique est la première victime. La propagation de l'épidémie relève aussi de facteurs sociaux : la pauvreté, l'accès à l'éducation, l'état des infrastructures de prévention. C'est pourquoi la lutte contre le sida doit devenir une priorité de l'aide publique internationale. L'objectif défini par l'Organisation Mondiale de la Santé est clair : il s'agit de porter à cinq millions en trois ans le nombre de personnes bénéficiant d'un traitement. Cela peut sembler considérable. En réalité, c'est un minimum, qui ne représente que le quart des malades actuellement recensés sur le continent africain.
La santé des hommes exige la solidarité de la communauté internationale. C'est la conviction de la France, qu'elle traduit par une politique active de coopération en matière de santé publique. Elle y consacre déjà plus de 100 millions de francs par an. En outre, sur les 10 milliards d'euros que le Gouvernement français affectera à l'annulation de la dette des pays les plus pauvres, un milliard d'euros sera consacré à la lutte contre le sida dans les pays concernés. Enfin, la France contribuera à hauteur de 150 millions d'euros, sur trois ans, à la constitution d'un fonds multilatéral consacré à la lutte contre le sida, mais aussi le paludisme et la tuberculose, maladies qui touchent surtout les pays les plus pauvres et qui constituent une entrave majeure à leur développement.
Mesdames, Messieurs,
La mobilisation que la France appelle de ses vux au profit de l'Afrique va au-delà de la question du sida. Elle doit mettre un terme à la marginalisation de l'Afrique sur le plan international. Aujourd'hui, 1 % seulement des investissements étrangers vont vers le continent africain. A l'échelle de la planète, la plupart des Africains sont en situation d'exclusion économique et sociale, à l'écart des grands flux de savoirs et d'information. Les écarts se creusent. Cette situation est inacceptable, d'abord parce qu'elle est injuste, ensuite parce que ces déséquilibres menacent la stabilité internationale. Le monde ne peut rester indifférent au destin de l'Afrique. Il est temps que ses ressources immenses soient exploitées par elle-même et pour elle-même. Ce développement doit être favorisé par une mondialisation maîtrisée. Telle est la position de la France ; tel est aussi le point de vue que traduit le Programme de partenariat du millénaire (MAP) du Président MBEKI, à qui j'apporte mon appui
L'Afrique du Sud et la France partagent une approche exigeante de la mondialisation.
La mondialisation est la réalité dans laquelle nous évoluons aujourd'hui. L'ouverture des marchés, la libre circulation des capitaux, l'accélération sans précédent de la diffusion des informations ont créé dans le monde une dynamique globale de croissance. Mais ette réalité est ambivalente. Elle libère les échanges, mais elle porte en elle la menace d'un monde uniforme. Elle libère les initiatives, mais elle creuse les inégalités. Pourtant, la mondialisation sera ce que les hommes en feront. Elle est un fait, non une fin en soi. C'est pourquoi les Etats doivent définir et respecter des " règles du jeu " qui orientent la mondialisation dans le sens du droit et de la justice. Seule cette régulation pourra apporter une réponse aux inégalités économiques et aux déséquilibres commerciaux entre le Nord et le Sud.
L'économie mondiale a besoin d'un cadre stable.
Les récentes crises économiques et financières ont démontré que des règles sont indispensables au bon fonctionnement de l'économie de marché. D'importants progrès ont été accomplis, mais beaucoup reste à faire en matière de régulation financière internationale. Une des finalités des grandes institutions multilatérales de coopération mises en place après 1945 demeure l'intégration des pays les moins avancés dans l'économie mondiale. Le FMI et la Banque mondiale, ainsi que les institutions régionales de développement, doivent aujourd'hui travailler de façon complémentaire et assurer la cohérence globale de leurs interventions.
Le monde a besoin d'un partage des richesses plus harmonieux.
La réduction de la pauvreté dans le monde est une priorité absolue. Elle passe en premier lieu par l'allègement du poids de la dette des pays les plus pauvres, qui est le premier obstacle à leur développement. Un processus de réduction, voire d'annulation, de la dette de ces pays s'est engagé sur l'initiative de la France en 1996, dans le cadre du G 7. Il doit être poursuivi afin de permettre à ces pays de se consacrer aux urgences sociales : l'alimentation, la santé, l'éducation.
La France contribue à ce partage plus harmonieux à travers son aide publique au développement. En 2001, celle-ci s'élèvera à 33,5 milliards de francs, dont 60 % seront consacrés à votre continent. La France se situe au premier rang des pays du G 7, en pourcentage du produit national brut. Chaque année, elle destine un milliard de francs au développement institutionnel des pays africains. Ainsi, la France contribue à la consolidation des progrès de la démocratie et de l'état de droit, sans lesquels le développement ne peut tenir toutes ses promesses.
Le monde a besoin d'un commerce équitable, qui est la condition d'un développement durable.
Un demi-siècle après la Charte de La Havane et la création du GATT, les Etats se sont dotés d'une Organisation mondiale du commerce. La France et l'Union européenne plaident pour que la prochaine conférence de l'OMC fasse une priorité de l'intégration économique des pays en développement, dont la plupart sont africains. Dans ce même esprit, la France souhaite que le nouveau cycle de négociations commerciales multilatérales qui doit prochainement s'ouvrir soit défini comme " le cycle du développement ". L'OMC devra trouver les voies d'un dialogue serein et équilibré entre tous ses membres afin d'établir au niveau international des modalités de régulation de l'investissement et de la concurrence ainsi que des règles communes de protection de l'environnement et de la santé humaine.
C'est en posant dès aujourd'hui les fondations d'un développement durable que nous pourrons assumer nos responsabilités collectives face aux générations futures. Je pense en particulier au respect des engagements pris depuis le sommet de Rio en 1992.
Enfin, le monde a besoin de la diversité de ses cultures, qui doivent être préservées.
La multiplication des sources d'information, la circulation accrue des idées, l'extension des réseaux numériques sont riches de promesses. Mais le risque de voir dominer une forme unique de culture et de divertissement, véhiculée par une seule langue, est déjà perceptible dans bien des pays. Parce qu'elle est restée plus longtemps à l'écart des grands circuits de distribution, l'Afrique semble apparemment mieux préservée du risque d'uniformisation culturelle. L'Afrique du Sud fait cependant comme nous-même l'expérience de la rapidité avec laquelle la jeunesse s'approprie les standards d'une culture internationale, et du risque de dilution à terme de son identité historique et culturelle. Le patrimoine culturel du continent africain, naguère pillé, aujourd'hui menacé par de nouvelles formes de colonisation, fait partie intégrante du patrimoine de l'Humanité, dont l'Afrique est le berceau. Il faut le préserver, l'enrichir et le transmettre.
La mondialisation ne trouvera son sens profond que si elle crée une communauté de destin entre les peuples. Si nous sommes aujourd'hui capables de lui donner des raisons d'habiter ce monde, je suis sûr que la jeunesse de ce continent, qui est la première de ses richesses, aura demain à cur de construire une Afrique démocratique, prospère, ouverte sur le monde et réconciliée avec elle-même.
Mesdames, Messieurs,
Du XIVème au XVIème siècle, après de longues décennies de guerres, d'épidémies et de famines, l'Europe s'est relevée, au point que l'on a parlé pour cette période historique de " Renaissance ". Je forme le vu que sur le continent africain se dessinent aujourd'hui les contours d'une nouvelle Renaissance, selon une perspective que je sais chère au Président MBEKI. Le modèle proposé par la République d'Afrique du Sud, qui concilie sur son territoire tant de diversités linguistique, ethnique, culturelle et religieuse, est une source d'enseignements précieux pour ce continent et, au-delà, pour notre monde. Renaître, pour votre peuple, c'est mettre à l'épreuve du réel l'" ubuntu ", cette morale collective traditionnelle, fondée sur l'acceptation de l'autre, le respect, la compassion, l'hospitalité, la dignité et la responsabilité. Vertus qui sont autant d'atouts pour relever les défis qui attendent l'Afrique du Sud.
Mesdames, Messieurs,
Face à vous, dans ce Parlement où bat désormais le cur d'une grande démocratie, je veux dire mon admiration, mon amitié et ma confiance aux représentants d'une nation dont les terres australes portent le nom prédestiné de " bonne espérance ".
SIABONGA, ENKOSI
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 7 juin 2001)
Monsieur le Président,
Madame la Présidente,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Mesdames, Messieurs,
MOLWENI, DUMELA, SANIBONANI
Je suis très sensible à l'honneur que vous m'avez fait en m'invitant à m'exprimer devant votre Parlement. C'est pour moi un motif de fierté et surtout d'émotion. Je sais en effet que la plupart d'entre vous ont souffert, jusque dans leur chair, de l'Apartheid, ce régime meurtrier qui, en séparant les hommes, a déchiré votre peuple et choqué la conscience humaine. Mais, depuis maintenant sept ans, depuis ces élections tant attendues d'avril 1994, toutes et tous, quel que soit votre passé, quelles que soient vos origines, vous unissez vos efforts pour construire ensemble une nouvelle Afrique du Sud.
Celle-ci a trouvé ses fondements dans une constitution reconnaissant les droits et les libertés de tous, sans aucune considération raciale, religieuse ou de croyance. Vous célébrez ainsi l'égalité dans la diversité. En témoigne votre nouveau drapeau sur lequel figurent les couleurs de tous les mouvements d'opposition d'hier, qui sont aussi les couleurs de cette " nation arc-en-ciel " que vous formez ensemble. Vous-même, Madame Speaker, qui êtes une femme d'origine indienne dans un pays qui se veut multiracial et multiculturel, vous incarnez cette diversité.
Cette nouvelle Afrique du Sud, vous l'avez construite ensemble dans un esprit de tolérance et de réconciliation. Parce que la recherche de la vérité est la seule voie qui permette de guérir les blessures du passé et de construire un avenir serein, vous avez décidé d'affronter lucidement une histoire douloureuse, faite de violences et de crimes. Vous avez eu ce courage pour que soient reconnues les souffrances des victimes et la responsabilité de ceux qui ont bafoué les droits de l'homme ; pour que soient accordées des réparations à ceux qui en avaient besoin et le pardon à ceux qui le demandaient. L'uvre accomplie par la Commission " Vérité et réconciliation ", animée par Monseigneur Desmond TUTU, a contribué à rendre leur dignité à ceux qui avaient été humiliés, l'espoir à ceux qui l'avaient perdu, et la confiance à votre Nation tout entière.
Cette révolution -radicale, mais pacifique-, que votre pays vient de connaître, est un exemple pour l'Afrique. Pour une Afrique qui continue à souffrir de maux nombreux, mais qui peut compter, dans son combat pour la démocratie et le développement, sur la France.
Mon pays est un ami fidèle et respectueux de l'Afrique.
Une relation ancienne, chaque jour raffermie, nous unit.
La France et l'Afrique ont en commun une histoire qui les a liées pour longtemps, faite de lumières, mais aussi d'ombres. Nous ne voulons pas occulter la période de domination coloniale, pendant laquelle l'Afrique a souffert, et qui a laissé, assurément, de profondes cicatrices. Pour autant, tout n'est pas à rejeter dans ce passé partagé. Il nous faut aujourd'hui conserver le meilleur de cet héritage commun : d'importants échanges, de fortes relations de coopération et une amitié réciproque qui unit des pays égaux en droit et en dignité, des pays qui se respectent mutuellement.
Cette relation d'amitié, la France la partage aussi avec l'Afrique du Sud. Les Français apprécient, depuis maintenant bien longtemps, les richesses naturelles et la diversité de votre pays. Au XVIIème siècle, des huguenots français, réfugiés aux Pays-Bas au lendemain de la Révocation de l'Édit de Nantes, s'installèrent en Afrique du Sud, à l'invitation du gouverneur du Cap, et mirent en culture les terres de cette région. Un siècle plus tard, c'est un Français encore, l'explorateur François LE VAILLANT, qui fit circuler en Europe des récits sur l'Afrique du Sud qui donnèrent de cette région du monde une image attrayante et plus juste.
Malgré ces affinités anciennes, nos chemins se sont écartés, le temps des guerres coloniales et d'un régime d'apartheid contre lequel de très nombreux Français -parmi lesquels j'étais- se sont mobilisés. Puis la France a soutenu le processus qui vous a conduits à la réconciliation. Lorsque les ennemis d'hier ont souhaité se parler, mon pays les a encouragés. Je me souviens des rencontres organisées à Dakar, en 1987, sous le haut patronage du Président Abdou DIOUF et de la Fondation France-Libertés, entre des intellectuels blancs sud-africains et des responsables de l'ANC en exil, puis, en France, à Marly-le-Roi, en 1988. Nous espérions le succès, à l'époque, mais nous n'imaginions pas que les événements iraient si vite.
Lorsque vous avez aboli l'Apartheid, nos deux pays ont pu renouer une amitié qui leur était naturelle. En juillet 1994, vous l'avez rappelé, la visite du Président François MITTERRAND, premier chef d'Etat à se rendre en Afrique du Sud démocratique, a signifié la fidélité de la France à votre pays. Ma présence aujourd'hui parmi vous, 3 ans après celle du Président CHIRAC, doit avoir à vos yeux le même sens.
L'Afrique du Sud et la France partagent les mêmes objectifs de démocratie et de développement pour l'Afrique.
Dès sa formation en 1997, le Gouvernement que je dirige a fait de l'ouverture à l'ensemble du continent africain, au-delà des seules régions francophones, un principe fort de sa politique étrangère. Le ministre des Affaires Etrangères, Hubert VEDRINE, avait tenu à venir vous en exposer lui-même les principes en octobre 1997. Notre pays devait s'adapter aux nouvelles réalités de l'Afrique et, notamment, à la constitution d'ensembles régionaux distincts des anciennes divisions coloniales. Dans cette perspective, la France entend approfondir encore son partenariat avec l'Afrique du Sud, en laquelle mon pays voit une puissance régionale incontournable, consciente des enjeux africains, riche de ses ressources et de son expérience démocratique.
C'est avec vous que la France entend répondre à l'injonction morale que Nelson MANDELA nous adressait à tous à l'occasion du dixième anniversaire de sa libération : " personne ne pourra se reposer en paix, tant que des gens seront courbés par le poids de la faim, des maladies, du manque d'éducation, tant que des millions de personnes vivront dans l'insécurité et la crainte quotidienne ".
La France soutient l'Afrique dans sa lutte contre les fléaux qui la menacent.
Le premier de ces fléaux, c'est la guerre.
L'Afrique, longtemps divisée par les rivalités coloniales, puis par l'opposition des deux blocs de la guerre froide, reste aujourd'hui le théâtre d'incessants conflits armés. La mort, les violences, l'exode de millions d'Africains, les terres laissées à l'abandon et qui deviennent stériles, la faim qui tue à son tour, les haines qui s'enracinent : la guerre épuise l'Afrique. L'Afrique a besoin de paix.
Il lui faut d'abord lutter contre le racisme. Celui-ci est au cur des conflits ethniques qui déchirent ce continent. La xénophobie et l'intolérance, qui minent aujourd'hui tant de sociétés africaines, sont les ferments de nouvelles violences entre voisins, entre frères. C'est pourquoi je me réjouis de la tenue à Durban, à l'initiative de l'Organisation des Nations-Unies, en septembre prochain, de la Conférence mondiale contre le racisme.
En faveur de la paix, l'Afrique du Sud assume un rôle exemplaire. Exemplaire par la façon dont elle a réussi à éteindre ses propres haines pour construire une société démocratique. Exemplaire aussi par les efforts de médiation qu'elle a engagés hors de ses frontières afin d'enrayer la prolifération des luttes armées. Je pense aux efforts que vous avez déployés dans la crise du Burundi. Votre pays a aussi joué un rôle de premier plan dans la signature de l'accord de paix à Lusaka, le 7 juillet 1999. La France a relayé les efforts de l'Afrique du Sud au sein du Conseil de sécurité. La mise en place de la Mission des Nations-Unies au Congo verra, côte à côte, des soldats sud-africains et français travailler au rétablissement de la paix dans ce pays.
Pour sa part la France reste attachée au service de la paix en Afrique. Elle a condamné les quatre coups d'Etat qui ont eu lieu en 1999 en Afrique francophone, demandant un retour rapide à l'ordre et au calme tout en veillant à ne pas s'immiscer dans les affaires internes de ces Etats. Cette volonté de contribuer à la paix sans tomber dans l'ingérence a conduit la France à aider certains Etats à régler par eux-mêmes les situations de crise dans lesquelles ils se trouvaient. Dans le même esprit, la France renforce les capacités africaines de maintien de la paix (RECAMP) : nous consacrons une part importante de notre coopération militaire à une formation dont 5.000 militaires africains ont déjà bénéficié.
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Il y a un combat qui concerne le continent tout entier, pour lequel il faut unir et mobiliser toutes nos forces : c'est celui contre le sida.
L'impact dévastateur de ce virus constitue pour l'Afrique une grave menace de déstabilisation. Dans le monde, 46 millions de personnes sont aujourd'hui atteintes du sida, qui a déjà provoqué la mort de 22 millions d'êtres humains, laissant des millions d'orphelins. En Afrique australe, l'épidémie a progressé très rapidement lors des dix dernières années, surtout dans les zones urbaines où près de 20 % des femmes enceintes sont contaminées. Face à cette catastrophe, les travaux de la conférence organisée par l'Afrique du Sud en juillet 2000 à Durban ont permis une prise de conscience internationale. Il revient désormais aux responsables politiques d'engager une politique de santé publique à la hauteur de la menace. Cette politique a pour fondement le droit universel à la santé et à la vie.
La France s'engage résolument aux côtés des Africains dans la lutte contre le sida. Il faut faire face à trois urgences. La première est l'accès aux soins. Des millions de malades en sont aujourd'hui privés, faute de moyens financiers. Or les traitements existent : en France, grâce aux nouvelles thérapies, la mortalité des malades du sida a été réduite des deux tiers. L'étendue de l'épidémie exige de généraliser le principe de la fabrication et de la commercialisation des médicaments génériques pour les pays les plus pauvres. Je me réjouis que les grands laboratoires pharmaceutiques aient finalement admis ce principe. Les accords multilatéraux sur la propriété intellectuelle doivent permettre de concilier la liberté d'industrie et de commerce avec les réalités économiques et sanitaires du monde contemporain. Un consensus international sur le principe de prix différenciés pour les médicaments sous brevet est devenu indispensable pour que tous les malades, dans tous les pays, puissent accéder aux meilleurs soins disponibles.
La deuxième urgence est de renforcer les infrastructures hospitalières. En effet, sans capacités de dépistage, d'accueil et de suivi des malades, le combat contre le sida est vain. Or ce sont les pays les plus touchés qui manquent le plus cruellement de ces structures. Sous l'impulsion de son ministre délégué à la Santé, le docteur Bernard KOUCHNER, la France propose donc un programme de partenariat hospitalier permettant le jumelage entre établissements français et européens d'une part et entre établissements africains d'autre part. C'est là une mesure concrète, efficace, solidaire.
La troisième urgence, c'est de donner à la recherche scientifique les moyens d'accomplir de nouveaux progrès, notamment dans le domaine des vaccins. Nous devons conjuguer au niveau international tous les efforts de recherche face à une maladie qui, elle, ne connaît pas de frontières.
Par-delà ces trois urgences, la France milite pour une approche globale de l'épidémie. En effet, une approche seulement médicale du sida ne suffirait pas à circonscrire le désastre humain dont l'Afrique est la première victime. La propagation de l'épidémie relève aussi de facteurs sociaux : la pauvreté, l'accès à l'éducation, l'état des infrastructures de prévention. C'est pourquoi la lutte contre le sida doit devenir une priorité de l'aide publique internationale. L'objectif défini par l'Organisation Mondiale de la Santé est clair : il s'agit de porter à cinq millions en trois ans le nombre de personnes bénéficiant d'un traitement. Cela peut sembler considérable. En réalité, c'est un minimum, qui ne représente que le quart des malades actuellement recensés sur le continent africain.
La santé des hommes exige la solidarité de la communauté internationale. C'est la conviction de la France, qu'elle traduit par une politique active de coopération en matière de santé publique. Elle y consacre déjà plus de 100 millions de francs par an. En outre, sur les 10 milliards d'euros que le Gouvernement français affectera à l'annulation de la dette des pays les plus pauvres, un milliard d'euros sera consacré à la lutte contre le sida dans les pays concernés. Enfin, la France contribuera à hauteur de 150 millions d'euros, sur trois ans, à la constitution d'un fonds multilatéral consacré à la lutte contre le sida, mais aussi le paludisme et la tuberculose, maladies qui touchent surtout les pays les plus pauvres et qui constituent une entrave majeure à leur développement.
Mesdames, Messieurs,
La mobilisation que la France appelle de ses vux au profit de l'Afrique va au-delà de la question du sida. Elle doit mettre un terme à la marginalisation de l'Afrique sur le plan international. Aujourd'hui, 1 % seulement des investissements étrangers vont vers le continent africain. A l'échelle de la planète, la plupart des Africains sont en situation d'exclusion économique et sociale, à l'écart des grands flux de savoirs et d'information. Les écarts se creusent. Cette situation est inacceptable, d'abord parce qu'elle est injuste, ensuite parce que ces déséquilibres menacent la stabilité internationale. Le monde ne peut rester indifférent au destin de l'Afrique. Il est temps que ses ressources immenses soient exploitées par elle-même et pour elle-même. Ce développement doit être favorisé par une mondialisation maîtrisée. Telle est la position de la France ; tel est aussi le point de vue que traduit le Programme de partenariat du millénaire (MAP) du Président MBEKI, à qui j'apporte mon appui
L'Afrique du Sud et la France partagent une approche exigeante de la mondialisation.
La mondialisation est la réalité dans laquelle nous évoluons aujourd'hui. L'ouverture des marchés, la libre circulation des capitaux, l'accélération sans précédent de la diffusion des informations ont créé dans le monde une dynamique globale de croissance. Mais ette réalité est ambivalente. Elle libère les échanges, mais elle porte en elle la menace d'un monde uniforme. Elle libère les initiatives, mais elle creuse les inégalités. Pourtant, la mondialisation sera ce que les hommes en feront. Elle est un fait, non une fin en soi. C'est pourquoi les Etats doivent définir et respecter des " règles du jeu " qui orientent la mondialisation dans le sens du droit et de la justice. Seule cette régulation pourra apporter une réponse aux inégalités économiques et aux déséquilibres commerciaux entre le Nord et le Sud.
L'économie mondiale a besoin d'un cadre stable.
Les récentes crises économiques et financières ont démontré que des règles sont indispensables au bon fonctionnement de l'économie de marché. D'importants progrès ont été accomplis, mais beaucoup reste à faire en matière de régulation financière internationale. Une des finalités des grandes institutions multilatérales de coopération mises en place après 1945 demeure l'intégration des pays les moins avancés dans l'économie mondiale. Le FMI et la Banque mondiale, ainsi que les institutions régionales de développement, doivent aujourd'hui travailler de façon complémentaire et assurer la cohérence globale de leurs interventions.
Le monde a besoin d'un partage des richesses plus harmonieux.
La réduction de la pauvreté dans le monde est une priorité absolue. Elle passe en premier lieu par l'allègement du poids de la dette des pays les plus pauvres, qui est le premier obstacle à leur développement. Un processus de réduction, voire d'annulation, de la dette de ces pays s'est engagé sur l'initiative de la France en 1996, dans le cadre du G 7. Il doit être poursuivi afin de permettre à ces pays de se consacrer aux urgences sociales : l'alimentation, la santé, l'éducation.
La France contribue à ce partage plus harmonieux à travers son aide publique au développement. En 2001, celle-ci s'élèvera à 33,5 milliards de francs, dont 60 % seront consacrés à votre continent. La France se situe au premier rang des pays du G 7, en pourcentage du produit national brut. Chaque année, elle destine un milliard de francs au développement institutionnel des pays africains. Ainsi, la France contribue à la consolidation des progrès de la démocratie et de l'état de droit, sans lesquels le développement ne peut tenir toutes ses promesses.
Le monde a besoin d'un commerce équitable, qui est la condition d'un développement durable.
Un demi-siècle après la Charte de La Havane et la création du GATT, les Etats se sont dotés d'une Organisation mondiale du commerce. La France et l'Union européenne plaident pour que la prochaine conférence de l'OMC fasse une priorité de l'intégration économique des pays en développement, dont la plupart sont africains. Dans ce même esprit, la France souhaite que le nouveau cycle de négociations commerciales multilatérales qui doit prochainement s'ouvrir soit défini comme " le cycle du développement ". L'OMC devra trouver les voies d'un dialogue serein et équilibré entre tous ses membres afin d'établir au niveau international des modalités de régulation de l'investissement et de la concurrence ainsi que des règles communes de protection de l'environnement et de la santé humaine.
C'est en posant dès aujourd'hui les fondations d'un développement durable que nous pourrons assumer nos responsabilités collectives face aux générations futures. Je pense en particulier au respect des engagements pris depuis le sommet de Rio en 1992.
Enfin, le monde a besoin de la diversité de ses cultures, qui doivent être préservées.
La multiplication des sources d'information, la circulation accrue des idées, l'extension des réseaux numériques sont riches de promesses. Mais le risque de voir dominer une forme unique de culture et de divertissement, véhiculée par une seule langue, est déjà perceptible dans bien des pays. Parce qu'elle est restée plus longtemps à l'écart des grands circuits de distribution, l'Afrique semble apparemment mieux préservée du risque d'uniformisation culturelle. L'Afrique du Sud fait cependant comme nous-même l'expérience de la rapidité avec laquelle la jeunesse s'approprie les standards d'une culture internationale, et du risque de dilution à terme de son identité historique et culturelle. Le patrimoine culturel du continent africain, naguère pillé, aujourd'hui menacé par de nouvelles formes de colonisation, fait partie intégrante du patrimoine de l'Humanité, dont l'Afrique est le berceau. Il faut le préserver, l'enrichir et le transmettre.
La mondialisation ne trouvera son sens profond que si elle crée une communauté de destin entre les peuples. Si nous sommes aujourd'hui capables de lui donner des raisons d'habiter ce monde, je suis sûr que la jeunesse de ce continent, qui est la première de ses richesses, aura demain à cur de construire une Afrique démocratique, prospère, ouverte sur le monde et réconciliée avec elle-même.
Mesdames, Messieurs,
Du XIVème au XVIème siècle, après de longues décennies de guerres, d'épidémies et de famines, l'Europe s'est relevée, au point que l'on a parlé pour cette période historique de " Renaissance ". Je forme le vu que sur le continent africain se dessinent aujourd'hui les contours d'une nouvelle Renaissance, selon une perspective que je sais chère au Président MBEKI. Le modèle proposé par la République d'Afrique du Sud, qui concilie sur son territoire tant de diversités linguistique, ethnique, culturelle et religieuse, est une source d'enseignements précieux pour ce continent et, au-delà, pour notre monde. Renaître, pour votre peuple, c'est mettre à l'épreuve du réel l'" ubuntu ", cette morale collective traditionnelle, fondée sur l'acceptation de l'autre, le respect, la compassion, l'hospitalité, la dignité et la responsabilité. Vertus qui sont autant d'atouts pour relever les défis qui attendent l'Afrique du Sud.
Mesdames, Messieurs,
Face à vous, dans ce Parlement où bat désormais le cur d'une grande démocratie, je veux dire mon admiration, mon amitié et ma confiance aux représentants d'une nation dont les terres australes portent le nom prédestiné de " bonne espérance ".
SIABONGA, ENKOSI
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 7 juin 2001)