Texte intégral
M. Biraben et C. Roux M. Biraben : Notre invitée politique est arrivée sur le plateau de « la Matinale », il s'agit C. Lagarde, la ministre de l'Économie et des Finances, elle vient défendre ce matin un impôt qui n'est pas un impôt, une taxe qui finit en chèque Vert censé faire changer les comportements et un moment historique pour l'écologie, nous dit le président de la République. Les écolos évoquent, eux, un rendez-vous manqué et les Français, eux, sont 72 % à le dire : ils n'y comprennent rien. C. Lagarde bonjour, bienvenue.
C. Roux : Alors on nous dit : ça ne rapporte rien à l'État, ça ne coûte rien aux contribuables. On nous dit pourtant que ça va faire changer les comportements. Hier, même F. Fillon avait un peu le nez dans ses fiches pour nous expliquer tout cela. Est-ce que vous comprenez que les Français soient sceptiques ?
Je comprends qu'ils se posent des questions parce que chaque fois qu'on met en place un nouveau système, on s'interroge. Et quand en plus c'est une taxe - qu'on a pris vraiment la résolution d'appeler une taxe -, on se pose encore plus de questions. Mais ce qu'il faut bien comprendre c'est que c'est un - comment vous dire - un transfert de taxe. D'un côté on taxe la pollution ; la pollution aujourd'hui c'est essentiellement les émissions qui sont produites par les consommations de pétrole et de gaz, c'est pour ça qu'on la met sur les produits pétroliers et sur le gaz, pas sur l'électricité. Et de l'autre côté, puisqu'on a pris d'un côté, on rend au niveau de l'impôt sur le revenu. Donc on taxe un peu moins le travail et on taxe la pollution, c'est pour cela que N. Sarkozy a dit que c'est une révolution, parce qu'on change de base.
C. Roux : Alors si je vous dis, pour faire simple : les pollueurs qui ont le choix vont payer pour les pollueurs qui n'ont pas le choix ?
Ça c'est un peu vrai aujourd'hui parce que certains n'ont pas le choix. Et c'est bien pour cela qu'on a fait une compensation différente selon que les gens habitent dans un endroit où il y a plein de transports en commun et où on peut choisir de ne pas polluer, et les zones où il n'y a pas de transports en commun et où les gens sont obligés de prendre leur voiture. La compensation n'est pas parfaite et vous allez trouver plein d'exemples où les gens vont devoir payer un peu plus que ce qu'ils recevront, mais en progressif, ça devrait se rejoindre.
C. Roux : Donc pour certains pollueurs ce sera quand même un impôt ?
Ils vont payer un peu plus d'impôt en pollution et recevoir en contrepartie de l'impôt sur le revenu. Ça veut dire plus sur la pollution, moins sur le travail. Ça ne va pas être complètement égal pour tout le monde, il y en a certains pour lesquels ça va être un peu plus difficile, il y aura un peu plus pendant un moment.
C. Roux : Donc ça veut dire qu'il y en a certains qui vont payer pour l'écologie. Ce n'est pas grave de le dire mais juste on aimerait peut-être que quelqu'un nous le dise une fois clairement.
Vous savez, moi je l'assume complètement, que l'on décide de payer pour protéger la planète qui est en grand danger, bien sûr qu'il faut l'assumer, c'est indispensable.
C. Roux : Alors pourquoi ne pas le dire depuis le début, pourquoi nous dire : c'est un impôt qui n'est pas un impôt, c'est une taxe mais ne vous inquiétez pas...
M. Biraben : Ce n'est pas vous qui paierez.
D'abord on dit haut et fort : c'est la taxe carbone. Mais de l'autre côté, on met en face, pour faire changer de base, un bonus carbone, si vous voulez, qui opère par une réduction d'impôt sur le revenu. Moins de taxe sur le travail et le capital, plus de taxe sur la pollution.
C. Roux : Est-ce que certains vont pouvoir se faire de l'argent sur le dos de l'État en ne polluant pas, en ayant un comportement exemplaire ?
C'est-à-dire ?
C. Roux : C'est-à-dire je suis célibataire, je me chauffe à l'électricité, je suis rurale, je me déplace à vélo. Est-ce que je recevrai une compensation malgré tout ?
Oui.
C. Roux : C'est juste, ça ? Ça a du sens ?
Aujourd'hui, ce n'est pas une question de juste ou pas juste. Parce qu'il va y avoir de légères injustices à la marge, je suis bien d'accord avec vous parce qu'il y a des situations où les gens vont devoir dépenser plus qu'ils ne recevront. Et puis il y en a d'autres, parce qu'ils ont déjà un comportement vertueux, parce qu'ils ont la chance d'habiter en ville où il y a des transports en commun, parce qu'ils ont fait le choix en son temps de l'électricité, qui vont en bénéficier parce qu'ils sont déjà vertueux...
C. Roux : Donc ça veut dire que vous nous décrivez une taxe qui n'est pas parfaite, qui est perfectible ?
Mais aucune taxe n'est parfaite. C'est pour cela d'ailleurs qu'on lutte contre les paradis fiscaux, qu'on lutte contre les abus et qu'on essaie de pourchasser les fraudeurs.
M. Biraben : Vous êtes tout de même une des premières à le dire et ça simplifierait peut-être beaucoup les choses pour ceux qui nous écoutent si on leur disait : voilà, les pollueurs vont payer pour ceux qui n'ont pas le choix et qui ne peuvent pas faire autrement.
Non, attendez, ce n'est pas cela. On taxe la pollution et on allège la fiscalité sur le travail et sur le capital. Mais c'est vrai qu'il y a des situations factuelles. Si vous prenez par exemple un couple avec deux enfants, en rural, qui travaille en ville, qui se chauffe au fuel, lui ça va être un peu plus compliqué et il va payer un peu plus en différentiel. Mais j'ajoute qu'on met en place des tas de mesures : un, l'éco PTZ, c'est-à-dire que vous pouvez emprunter à taux zéro pour faire de l'isolation, pour faire de l'amélioration de votre bilan carbonique à la maison. Progressivement vous changez votre environnement pour dépenser moins en énergie carbonée. Dès que les voitures électriques vont être disponibles, il y aura une prime de 5 000 euros qui sera payée par l'État pour encourager les gens à changer de voiture. Donc il faut que sur tous les plans on avance pour précisément éviter ce réchauffement climatique qui va nous transformer la planète en poêle à frire.
C. Roux : Alors cette taxe carbone rapporte combien à l'État ?
À peu près 4 mil... Non, alors, on prélève...
C. Roux : Allez-y...
Non, non, mais vous savez, les glissements sémantiques sont douloureux. On lève 4 milliards d'impôt, on redistribue 4 milliards d'impôt. OK ? Donc l'État ne prend rien au passage.
C. Roux : Vous alliez dire autre chose ?
Non, non, non.
C. Roux : Alors est-ce que le principe de la compensation intégrale, puisque vous venez de le dire, de la taxe carbone, doit être inscrit dans le marbre, d'une certaine manière ? Parce que pour ce budget vous dites que c'est compensé intégralement, mais après, quelles certitudes on a sur le fonctionnement même de cet impôt qui n'est pas un impôt ?
Le président de la République hier a été très clair. Il n'est pas question d'augmenter les prélèvements, il est question de faire glisser la base. On taxe les pollueurs, on allège sur le travail et sur le capital. Donc au fur et à mesure qu'on devra augmenter le taux de la taxe sur la pollution, pour faire simple, eh bien on remboursera plus de crédit d'impôt ou on remboursera plus de charges pour alléger le poids du travail. Vous savez...
C. Roux : Le principe est acquis : jamais l'État ne se fera d'argent sur la taxe carbone ?
Si un martien descendait sur la terre aujourd'hui, il se dirait qu'on adore la pollution et qu'on déteste le travail. Parce que qu'est-ce qu'on fait : on laisse prospérer cette pollution, qui a un coût monumental pour la planète, pour la génération suivante et pour celle d'après, et on taxe le travail qui produit de la valeur.
C. Roux : On sait que Bercy et la rue de Grenelle, J.-L. Borloo, ont bataillé ferme. É. Woerth avait dit : compenser tout ou partie. Ce sera compenser tout. Ça veut dire que Borloo a gagné ?
Non, ça veut dire qu'on compense tout parce qu'on considère qu'on n'est pas en train de créer un prélèvement nouveau, on est en train de changer de base. On taxe la pollution, on allège sur le travail.
C. Roux : Ce qu'on comprend aussi, c'est que l'État n'a pas besoin de rentrées fiscales. Est-ce que c'est le cas ?
Non...
C. Roux : On a une question simple à vous poser. Il y a un an, à votre place, il y avait H. Guaino qui était là. Il avait été le tout premier à dire : vous savez, les déficits ça n'est plus une priorité. Est-ce qu'aujourd'hui c'est encore un sujet, le déficit ?
Il y a un an, il avait raison, parce qu'on était en train de relancer la machine économique qui était en train de caler complètement sous l'effet de la crise financière. Aujourd'hui, on voit des signes de reprise et la France est, avec l'Allemagne et le Japon, le seul pays à avoir sorti une croissance positive au 2e trimestre. J'ai bon espoir pour le 3e. Et dans ces conditions...
C. Roux : Est-ce que vous avez un plan de sortie des déficits, ça inquiète les Français...
... dans ces conditions-là, il faut évidemment sortir, il faudra sortir impérativement, sur la pointe des pieds. Pourquoi ? Parce que la reprise est toute douce, et il ne faut surtout pas la casser maintenant. C'est-à-dire que si on arrête la dépense aujourd'hui, c'est la seule qui alimente avec les exportations et la consommation. Mais l'investissement privé n'est pas là. Si on arrête la dépense publique maintenant, on risque de casser cette croissance qui démarre. Donc il faut l'accompagner, la soutenir, continuer la relance telle qu'on l'a prévue, ne pas en rajouter, ça ne me paraît pas indispensable pour le moment...
C. Roux : Ça veut dire que ça n'est pas un sujet tant que la reprise n'est pas confirmée ?
... et dès qu'on commence à sentir une reprise stabilisée, là il faut revenir vers une gestion de finances publiques qui nous amène vers nos objectifs de stabilité.
C. Roux : Et vous avez un calendrier pour la reprise ?
On a été obligés de faire tous la même chose. Si vous regardez l'Angleterre, elle est à 12 % de déficit. Là on est autour de 7 - 7,5 %, l'Espagne est à des seuils considérables, tous les pays ont été obligés de faire la même chose. Donc on va revenir vers la stabilité financière, c'est un engagement européen, c'est un engagement aussi vis-à-vis des générations futures parce qu'on...
C. Roux : Il n'y a pas un plan de sortie des déficits, il n'y a pas une commission qui va se préoccuper de cela ?
On a une commission verte qui sera chargée de savoir quand est-ce qu'on doit faire remonter le taux de la taxe. Mais il faudra revenir vers une stabilité des finances publiques. C'est indispensable.
C. Roux : Dernière question, vous avez parlé de la reprise, vous nous confirmez un chiffre pour la reprise du 3e trimestre ?
Non. Ce que je pense c'est que nous aurons un chiffre qui sera positif et qui attestera de la stabilisation de l'économie française parce qu'on a fait la relance qu'il fallait au moment où il fallait.
M. Biraben : Alors on passe maintenant au « j'aime, j'aime pas », vous allez nous dire si vous aimez ou pas les propos de B. Hortefeux.
Écoutez, ça c'est une vaste polémique, qui fait beaucoup plaisir à l'opposition. Moi je connais bien B. Hortefeux et je trouve complètement incongru d'imaginer qu'il puisse avoir du racisme dans son coeur. Ce n'est pas un type comme ça. C'est un type qui...
C. Roux : Vous avez vu l'extrait ?
Je l'ai vu une fois hier soir en regardant la télévision. C'est un type qui est drôle, qui blague tout le temps, qui est extrêmement rigoureux aussi et extrêmement droit dans ses principes moraux. Donc pour moi ce n'est vraiment pas une belle chose.
M. Biraben : On doit bien entendre que vous avez trouvé drôle ce que vous avez vu et ce que vous avez entendu ?
Vous savez, ce sont surtout des polémistes, des gens qui sont hostiles, contre lui, et qui veulent le casser, qui sont en train de faire monter une sauce. Moi, je me fie aux fondamentaux du personnage et je sais la qualité de l'homme.
C. Roux : J'aime, j'aime pas récupérer à Bercy la cagnotte de France Télévisions.
J'aime. Tout ce qu'on peut faire rentrer, c'est bien, mais il faut aussi que France Télévisions fonctionne.
M. Biraben : Merci beaucoup à vous d'avoir été avec nous ce matin.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 11 septembre 2009
C. Roux : Alors on nous dit : ça ne rapporte rien à l'État, ça ne coûte rien aux contribuables. On nous dit pourtant que ça va faire changer les comportements. Hier, même F. Fillon avait un peu le nez dans ses fiches pour nous expliquer tout cela. Est-ce que vous comprenez que les Français soient sceptiques ?
Je comprends qu'ils se posent des questions parce que chaque fois qu'on met en place un nouveau système, on s'interroge. Et quand en plus c'est une taxe - qu'on a pris vraiment la résolution d'appeler une taxe -, on se pose encore plus de questions. Mais ce qu'il faut bien comprendre c'est que c'est un - comment vous dire - un transfert de taxe. D'un côté on taxe la pollution ; la pollution aujourd'hui c'est essentiellement les émissions qui sont produites par les consommations de pétrole et de gaz, c'est pour ça qu'on la met sur les produits pétroliers et sur le gaz, pas sur l'électricité. Et de l'autre côté, puisqu'on a pris d'un côté, on rend au niveau de l'impôt sur le revenu. Donc on taxe un peu moins le travail et on taxe la pollution, c'est pour cela que N. Sarkozy a dit que c'est une révolution, parce qu'on change de base.
C. Roux : Alors si je vous dis, pour faire simple : les pollueurs qui ont le choix vont payer pour les pollueurs qui n'ont pas le choix ?
Ça c'est un peu vrai aujourd'hui parce que certains n'ont pas le choix. Et c'est bien pour cela qu'on a fait une compensation différente selon que les gens habitent dans un endroit où il y a plein de transports en commun et où on peut choisir de ne pas polluer, et les zones où il n'y a pas de transports en commun et où les gens sont obligés de prendre leur voiture. La compensation n'est pas parfaite et vous allez trouver plein d'exemples où les gens vont devoir payer un peu plus que ce qu'ils recevront, mais en progressif, ça devrait se rejoindre.
C. Roux : Donc pour certains pollueurs ce sera quand même un impôt ?
Ils vont payer un peu plus d'impôt en pollution et recevoir en contrepartie de l'impôt sur le revenu. Ça veut dire plus sur la pollution, moins sur le travail. Ça ne va pas être complètement égal pour tout le monde, il y en a certains pour lesquels ça va être un peu plus difficile, il y aura un peu plus pendant un moment.
C. Roux : Donc ça veut dire qu'il y en a certains qui vont payer pour l'écologie. Ce n'est pas grave de le dire mais juste on aimerait peut-être que quelqu'un nous le dise une fois clairement.
Vous savez, moi je l'assume complètement, que l'on décide de payer pour protéger la planète qui est en grand danger, bien sûr qu'il faut l'assumer, c'est indispensable.
C. Roux : Alors pourquoi ne pas le dire depuis le début, pourquoi nous dire : c'est un impôt qui n'est pas un impôt, c'est une taxe mais ne vous inquiétez pas...
M. Biraben : Ce n'est pas vous qui paierez.
D'abord on dit haut et fort : c'est la taxe carbone. Mais de l'autre côté, on met en face, pour faire changer de base, un bonus carbone, si vous voulez, qui opère par une réduction d'impôt sur le revenu. Moins de taxe sur le travail et le capital, plus de taxe sur la pollution.
C. Roux : Est-ce que certains vont pouvoir se faire de l'argent sur le dos de l'État en ne polluant pas, en ayant un comportement exemplaire ?
C'est-à-dire ?
C. Roux : C'est-à-dire je suis célibataire, je me chauffe à l'électricité, je suis rurale, je me déplace à vélo. Est-ce que je recevrai une compensation malgré tout ?
Oui.
C. Roux : C'est juste, ça ? Ça a du sens ?
Aujourd'hui, ce n'est pas une question de juste ou pas juste. Parce qu'il va y avoir de légères injustices à la marge, je suis bien d'accord avec vous parce qu'il y a des situations où les gens vont devoir dépenser plus qu'ils ne recevront. Et puis il y en a d'autres, parce qu'ils ont déjà un comportement vertueux, parce qu'ils ont la chance d'habiter en ville où il y a des transports en commun, parce qu'ils ont fait le choix en son temps de l'électricité, qui vont en bénéficier parce qu'ils sont déjà vertueux...
C. Roux : Donc ça veut dire que vous nous décrivez une taxe qui n'est pas parfaite, qui est perfectible ?
Mais aucune taxe n'est parfaite. C'est pour cela d'ailleurs qu'on lutte contre les paradis fiscaux, qu'on lutte contre les abus et qu'on essaie de pourchasser les fraudeurs.
M. Biraben : Vous êtes tout de même une des premières à le dire et ça simplifierait peut-être beaucoup les choses pour ceux qui nous écoutent si on leur disait : voilà, les pollueurs vont payer pour ceux qui n'ont pas le choix et qui ne peuvent pas faire autrement.
Non, attendez, ce n'est pas cela. On taxe la pollution et on allège la fiscalité sur le travail et sur le capital. Mais c'est vrai qu'il y a des situations factuelles. Si vous prenez par exemple un couple avec deux enfants, en rural, qui travaille en ville, qui se chauffe au fuel, lui ça va être un peu plus compliqué et il va payer un peu plus en différentiel. Mais j'ajoute qu'on met en place des tas de mesures : un, l'éco PTZ, c'est-à-dire que vous pouvez emprunter à taux zéro pour faire de l'isolation, pour faire de l'amélioration de votre bilan carbonique à la maison. Progressivement vous changez votre environnement pour dépenser moins en énergie carbonée. Dès que les voitures électriques vont être disponibles, il y aura une prime de 5 000 euros qui sera payée par l'État pour encourager les gens à changer de voiture. Donc il faut que sur tous les plans on avance pour précisément éviter ce réchauffement climatique qui va nous transformer la planète en poêle à frire.
C. Roux : Alors cette taxe carbone rapporte combien à l'État ?
À peu près 4 mil... Non, alors, on prélève...
C. Roux : Allez-y...
Non, non, mais vous savez, les glissements sémantiques sont douloureux. On lève 4 milliards d'impôt, on redistribue 4 milliards d'impôt. OK ? Donc l'État ne prend rien au passage.
C. Roux : Vous alliez dire autre chose ?
Non, non, non.
C. Roux : Alors est-ce que le principe de la compensation intégrale, puisque vous venez de le dire, de la taxe carbone, doit être inscrit dans le marbre, d'une certaine manière ? Parce que pour ce budget vous dites que c'est compensé intégralement, mais après, quelles certitudes on a sur le fonctionnement même de cet impôt qui n'est pas un impôt ?
Le président de la République hier a été très clair. Il n'est pas question d'augmenter les prélèvements, il est question de faire glisser la base. On taxe les pollueurs, on allège sur le travail et sur le capital. Donc au fur et à mesure qu'on devra augmenter le taux de la taxe sur la pollution, pour faire simple, eh bien on remboursera plus de crédit d'impôt ou on remboursera plus de charges pour alléger le poids du travail. Vous savez...
C. Roux : Le principe est acquis : jamais l'État ne se fera d'argent sur la taxe carbone ?
Si un martien descendait sur la terre aujourd'hui, il se dirait qu'on adore la pollution et qu'on déteste le travail. Parce que qu'est-ce qu'on fait : on laisse prospérer cette pollution, qui a un coût monumental pour la planète, pour la génération suivante et pour celle d'après, et on taxe le travail qui produit de la valeur.
C. Roux : On sait que Bercy et la rue de Grenelle, J.-L. Borloo, ont bataillé ferme. É. Woerth avait dit : compenser tout ou partie. Ce sera compenser tout. Ça veut dire que Borloo a gagné ?
Non, ça veut dire qu'on compense tout parce qu'on considère qu'on n'est pas en train de créer un prélèvement nouveau, on est en train de changer de base. On taxe la pollution, on allège sur le travail.
C. Roux : Ce qu'on comprend aussi, c'est que l'État n'a pas besoin de rentrées fiscales. Est-ce que c'est le cas ?
Non...
C. Roux : On a une question simple à vous poser. Il y a un an, à votre place, il y avait H. Guaino qui était là. Il avait été le tout premier à dire : vous savez, les déficits ça n'est plus une priorité. Est-ce qu'aujourd'hui c'est encore un sujet, le déficit ?
Il y a un an, il avait raison, parce qu'on était en train de relancer la machine économique qui était en train de caler complètement sous l'effet de la crise financière. Aujourd'hui, on voit des signes de reprise et la France est, avec l'Allemagne et le Japon, le seul pays à avoir sorti une croissance positive au 2e trimestre. J'ai bon espoir pour le 3e. Et dans ces conditions...
C. Roux : Est-ce que vous avez un plan de sortie des déficits, ça inquiète les Français...
... dans ces conditions-là, il faut évidemment sortir, il faudra sortir impérativement, sur la pointe des pieds. Pourquoi ? Parce que la reprise est toute douce, et il ne faut surtout pas la casser maintenant. C'est-à-dire que si on arrête la dépense aujourd'hui, c'est la seule qui alimente avec les exportations et la consommation. Mais l'investissement privé n'est pas là. Si on arrête la dépense publique maintenant, on risque de casser cette croissance qui démarre. Donc il faut l'accompagner, la soutenir, continuer la relance telle qu'on l'a prévue, ne pas en rajouter, ça ne me paraît pas indispensable pour le moment...
C. Roux : Ça veut dire que ça n'est pas un sujet tant que la reprise n'est pas confirmée ?
... et dès qu'on commence à sentir une reprise stabilisée, là il faut revenir vers une gestion de finances publiques qui nous amène vers nos objectifs de stabilité.
C. Roux : Et vous avez un calendrier pour la reprise ?
On a été obligés de faire tous la même chose. Si vous regardez l'Angleterre, elle est à 12 % de déficit. Là on est autour de 7 - 7,5 %, l'Espagne est à des seuils considérables, tous les pays ont été obligés de faire la même chose. Donc on va revenir vers la stabilité financière, c'est un engagement européen, c'est un engagement aussi vis-à-vis des générations futures parce qu'on...
C. Roux : Il n'y a pas un plan de sortie des déficits, il n'y a pas une commission qui va se préoccuper de cela ?
On a une commission verte qui sera chargée de savoir quand est-ce qu'on doit faire remonter le taux de la taxe. Mais il faudra revenir vers une stabilité des finances publiques. C'est indispensable.
C. Roux : Dernière question, vous avez parlé de la reprise, vous nous confirmez un chiffre pour la reprise du 3e trimestre ?
Non. Ce que je pense c'est que nous aurons un chiffre qui sera positif et qui attestera de la stabilisation de l'économie française parce qu'on a fait la relance qu'il fallait au moment où il fallait.
M. Biraben : Alors on passe maintenant au « j'aime, j'aime pas », vous allez nous dire si vous aimez ou pas les propos de B. Hortefeux.
Écoutez, ça c'est une vaste polémique, qui fait beaucoup plaisir à l'opposition. Moi je connais bien B. Hortefeux et je trouve complètement incongru d'imaginer qu'il puisse avoir du racisme dans son coeur. Ce n'est pas un type comme ça. C'est un type qui...
C. Roux : Vous avez vu l'extrait ?
Je l'ai vu une fois hier soir en regardant la télévision. C'est un type qui est drôle, qui blague tout le temps, qui est extrêmement rigoureux aussi et extrêmement droit dans ses principes moraux. Donc pour moi ce n'est vraiment pas une belle chose.
M. Biraben : On doit bien entendre que vous avez trouvé drôle ce que vous avez vu et ce que vous avez entendu ?
Vous savez, ce sont surtout des polémistes, des gens qui sont hostiles, contre lui, et qui veulent le casser, qui sont en train de faire monter une sauce. Moi, je me fie aux fondamentaux du personnage et je sais la qualité de l'homme.
C. Roux : J'aime, j'aime pas récupérer à Bercy la cagnotte de France Télévisions.
J'aime. Tout ce qu'on peut faire rentrer, c'est bien, mais il faut aussi que France Télévisions fonctionne.
M. Biraben : Merci beaucoup à vous d'avoir été avec nous ce matin.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 11 septembre 2009