Texte intégral
M. Biraben et C. Roux.- M. Biraben : Vous êtes la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. Vous savez, enfin ça ne vous aura pas échappé, les étudiants ont un peu de mal à se loger. Justement on va en parler, et c'est l'objet de l'enquête de « l'infoman » ce matin, le logement. Il est allé, Cyrille, au Salon de l'Immobilier pour tenter de résoudre les problèmes d'un jeune couple, qui s'installerait - ça tombe bien, justement - il est tombé sur un jeune ministre.
[Extrait...]
M. Biraben : ... V. Pécresse regardait cet « infoman de l'info » avec le sourire. Nous allons maintenant l'accueillir, elle est la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche. Les militants UMP l'ont choisie pour défendre les couleurs de la majorité en Ile-de-France. Tout lui sourit : un budget en hausse, des étudiants calmes et sereins, une opposition divisée avant les régionales, tout serait parfait si les derniers scrutins sur ses terres dans les Yvelines n'avaient révélé les limites de la stratégie du parti unique, l'UMP. Bonjour, soyez la bienvenue !
Bonjour.
C. Roux : C'est vrai, 5 voix d'écart, dans les Yvelines, c'est très peu pour le candidat UMP. C. Boutin - c'était sa circonscription - s'inquiète : avec la politique du Gouvernement, dit-elle, l'électorat de droite ne sait plus où il en est. Est-ce qu'elle a raison ?
Non. Ce n'est pas les leçons que je tire du scrutin de Rambouillet. C'était une élection partielle, il n'y a pas eu une mobilisation, j'allais dire massive de l'électorat UMP, parce que c'était une partielle, parce que notre candidat avait fait au premier tour presque 45 % des voix, et que les gens, il faisait beau, les gens ne se sont pas mobilisés, n'ont pas senti une nécessité d'aller voter pour ce candidat, qui avait, je vous le rappelle 25 points d'avance au premier tour sur le deuxième. Il y a eu, en revanche, une très, très forte mobilisation autour de la candidate Verte. On a vu défiler F. Bayrou, M. Aubry, tout le monde est venu, le ban et l'arrière-ban sont venus la soutenir.
C. Roux : Ça, ça peut se reproduire aux régionales, ça ne vous inquiète pas ?
Non, parce qu'il y aura le ban et l'arrière-ban aussi de l'UMP, du Nouveau centre, de la Gauche moderne et des progressistes qui se mobiliseront pour les régionales.
C. Roux : Vous ne reconnaissez même pas qu'il y a une percée des Verts ?
Ah ! Si ! Je le reconnais, mais je pense qu'elle doit à mon avis inquiéter beaucoup plus le Parti socialiste que nous. Parce que c'est quand même la première fois que le Parti socialiste, confronté à des Verts au premier tour, fait 8 points de moins que le candidat Vert. Et ça, je pense que ça montre, j'allais dire une évolution de l'électorat de gauche. Il y a une déception vis-à-vis du Parti socialiste, qui est immense.
C. Roux : Ça veut dire que la candidate C. Duflot en Ile-de-France, ne vous inquiète pas plus que ça ?
Je pense qu'elle doit d'abord inquiéter celui contre lequel elle se présente au premier tour, c'est-à-dire J.-P. Huchon.
C. Roux : C'est votre adversaire la plus dangereuse ou pas ?
Je pense que nous n'avons pas tout à fait la même conception de l'écologie que les Verts. Et je crois que c'est important de le dire. Pourquoi ? Parce que j'allais dire, les premiers écologistes de France, ils sont au Gouvernement. C'est nous qui avons fait le Grenelle de l'Environnement. C'est nous qui lançons le programme de voiture électrique, avec J.-L. Borloo aujourd'hui. C'est nous qui avons créé une fondation de coopération sur la biodiversité, qui allons faire venir, j'espère en France, le GIEC de la biodiversité, après le GIEC pour le climat. Donc nous sommes dans l'action et dans l'action, j'allais dire écologique. Mais en revanche, c'est une écologie positive que nous portons, une écologie qui croît dans le progrès. Pas une écologie de la décroissance, ou une écologie qui revient aux couches lavables...
C. Roux : C'est un peu ce que vous dit C. Boutin, quand elle dit : avec la politique du Gouvernement, l'électorat de droite ne sait plus où il en est. C'est l'électorat de droite qui se dit : tiens, on fait la politique des Verts, peut-être qu'il vaut mieux voter pour les Verts ?
Non, je ne crois pas que ce soit ça que veuille dire C. Boutin, parce que je la connais bien. Et je sais qu'elle a une vraie sensibilité écologique, puisque nous sommes toutes les deux élues du Sud Yvelines, d'une région qui est rurale, qui a une nature exceptionnelle et je peux vous dire qu'elle a pris des positions qui sont très écologiques.
C. Roux : Mais la taxe carbone a été mal vécue par une certaine partie de votre électorat ?
Cette question, la taxe carbone... évidemment ça ne fait jamais plaisir, quand on dit qu'on va payer un nouvel impôt. Mais elle est fondamentale. Elle est structurante, parce qu'on va faire évoluer la fiscalité, pour changer les comportements des Français. Mais là encore, la taxe carbone avec les Verts, c'est 32 euros, donc c'est trois fois plus qu'avec l'UMP.
C. Roux : Sur la stratégie elle-même de l'UMP, on entend certains dire : c'est la limite de la stratégie du parti unique de l'UMP, est-ce que ça c'est un élément qui vous inquiète à la veille des régionales ?
Je ne suis pas d'accord avec ça. Je pense que ce qui est important, pour un gouvernement qui fait des réformes très dures - et j'en sais quelque chose, puisque 2 ans et demi maintenant, je travaille sur la réforme de l'université, qui est une réforme qu'on aurait dû faire depuis 25 ans - quand on fait une réforme comme ça, très difficile, qui se heurte à toutes sortes de craintes et aussi, il faut bien le dire, de conservatismes, il faut avoir un parti très fort, très large, qui va du centre gauche jusqu'à la droite classique et qui soutient. Et donc la stratégie du parti à 30 % ou à 35 %, qui est vraiment en soutien de la politique du Gouvernement, je crois, malheureusement que c'est une clé pour réussir les réformes. Si on ne l'a pas, à ce moment-là, si on a un émiettement, on ne pourra pas faire ces réformes. On n'aura pas le socle solide...
C. Roux : Alors vous allez être déçue parce que vous avez un petit message, ce matin, d'un de vos petits camarades du Gouvernement, H. Morin, qui est aussi le patron du Nouveau centre et il soutient une liste Nouveau centre en Ile-de-France. Une liste qui serait conduite par A. Santini. C'est une bonne nouvelle, ça, pour la candidate UMP ?
Je ne crois pas qu'H. Morin soit aussi clair dans cet article, parce qu'il dit : « si nous faisions une liste »...
C. Roux : « Je soutiens totalement A. Santini dans sa démarche ».
Il soutient A. Santini, mais il soutient...
C. Roux : Dans sa démarche, qui elle est de faire une liste autonome aux régionales...
Ce n'est pas si clair, parce que lui, il dit : « si on fait une liste »...
C. Roux : On va dire que c'est clair.
Disons que c'est clair...
C. Roux : Est-ce que ce serait une bonne nouvelle pour vous ou pas, ou est-ce que c'est un problème, pour la candidate UMP ?
Je pense, vraiment, que si l'objectif - et c'est ce que dit H. Morin, aussi dans cet article, c'est pour ça que je vous dis, que ce n'est pas si clair - si l'objectif du Nouveau centre, c'est avec la majorité présidentielle de gagner des régions, je le dis, la seule stratégie, la seule bonne, c'est celle du président de la République...
C. Roux : On ne peut pas imaginer que sa stratégie soit de perdre des régions ?
Eh bien, si c'est de faire gagner des régions à la majorité présidentielle, à ce moment-là, ça veut dire qu'il faut faire l'union et ça veut dire qu'il fait l'union...
??
C. Roux : Qu'est-ce que ça veut dire clairement, ce que vous êtes en train de nous dire, parce que...
Ca veut dire que la clé pour gagner, c'est des listes de rassemblement les plus larges possibles dès le premier tour. C'est donner l'élan dès le premier tour, et surtout donner le sentiment d'une unité très forte. J'ai fait la campagne de 2004 avec J.-F. Copé, vous le savez, il y avait déjà A. Santini contre J.-F. Copé. Nous avons perdu beaucoup de voix, parce qu'au premier tour, quand on fait deux listes, eh bien, on se divise, on...
C. Roux : Donc vous leur dites : pas de liste autonome du Nouveau Centre ?
Je leur dis que la main est tendue, la porte est ouverte pour faire une liste de rassemblement, dès le premier tour, ensemble et que moi, je mettrai toute mon énergie dans la balance pour réussir cette union. Mais sur nos idées évidemment !
M. Biraben : On passe au Budget ? C. Roux : Le budget ! Alors vous êtes bien lotie, vous avez un budget en hausse de 2,7 % ; aucun poste supprimé dans la recherche. Est-ce que avec ces 1,8 milliards, je crois, de plus, est-ce que vous avez prévu de construire de nouveaux logements étudiants ?
D'abord, il faut dire que c'est le budget des engagements tenus, pour la troisième année consécutive, pour l'université et la recherche. C'est du jamais vu, je le dis, parce que 5,3 % d'augmentation des moyens pour l'université et la recherche en période de crise, ça veut dire que nous faisons de la recherche et de l'université des tremplins pour l'après crise, et c'est un budget en plus qui est particulièrement fort, puisque c'est un budget qui s'adresse d'abord aux personnels, aux enseignants chercheurs, aux personnels de l'université et de la recherche qui vont avoir des revalorisations de carrière très conséquentes, et je crois que c'est important. Parce que vous savez qu'ils ont tendance à s'enfuir ou à être un peu...
C. Roux : Ou à manifester.
Ce n'est pas seulement ça, à considérer qu'ils n'ont pas la reconnaissance sociale du pays, qui leur est dû, et voilà. Ce budget, c'est celui de la revalorisation des personnels.
C. Roux : Sur la question du logement étudiant, parce que dans les mesures annoncées par le chef de l'Etat, hier, on apprend que les apprentis vont avoir accès au logement étudiant, entre autres. Alors comment ça va être géré...
Sur le logement étudiant, c'est simple, nous avons une action tous azimuts et extrêmement volontariste depuis trois ans. Vous savez qu'il y a eu, il y a trois ans, un rapport qui disait qu'on manquait cruellement de logement étudiant.
C. Roux : C'est toujours le cas ?
Notamment dans le parc social, 150 000 logements en moins. Bien sûr, c'est toujours le cas, mais ce que nous avons fait, c'est que nous avons fait une accélération sans précédent des livraisons de logements étudiants, depuis trois rentrées, je travaille là-dessus. Cette année, on a livré 12 000 chambres, 12 000 chambres. C'est les objectifs d'Anciaux. L'année prochaine aussi, nous allons construire 5 000 nouvelles chambres l'année prochaine. C'est du jamais vu, là encore. Alors...
C. Roux : Ce ne sera pas suffisant, mais bon !
Mais ce n'est jamais suffisant, mais simplement en terme d'accroissement de l'effort, c'est ce qui nous a été demandé par le rapport Anciaux. Maintenant, il faut le poursuivre sur 10 ans. 10 ans d'effort !
M. Biraben : On passe au « j'aime, j'aime pas » si vous le vouliez bien, V. Pécresse. Vous allez nous dire si vous aimez ou si vous n'aimez pas C. Blanc, qui s'oppose au Premier ministre à propos du Grand Paris ?
Je crois que sur cette affaire, de Grand Paris, il y avait deux options. Il y avait une option plus étatiste, avec l'Etat qui dirigeait vraiment le processus. Et puis, il y avait une option avec plus de dialogue et d'association des collectivités locales. Le Premier ministre a tranché pour la deuxième option et je crois que c'est un arbitrage du Premier ministre, un bon arbitrage du Premier ministre.
M. Biraben : Donc il a tort de s'opposer tout simplement ?
Je crois que c'est un arbitrage rendu.
M. Biraben : Donc il a tort. C. Roux : Sur la forme, vous êtes la ligne : « un ministre ça ferme sa gueule ou ça démissionne », selon la formule consacrée ?
En tout cas, je m'applique cette règle.
C. Roux : J'aime, j'aime pas, un ministre qui porte plainte, contre un sketch... M. Biraben : De Canal+. C. Roux : Vous êtes au courant ?
Ah ! Non.
. Roux : E. Besson qui porte plainte contre...
Comme je n'ai pas vu le sketch, c'est un petit peu difficile. Disons que...
M. Biraben : C'est un peu compliqué, c'est à propos de la « Jungle » de Sangatte (sic). Une équipe de Canal+ s'est fait passée, en même temps pour des policiers et en même temps pour des Afghans, et en demandant aux gens d'adopter des Afghans.
Ecoutez ! Sur le principe, je ne sais pas, je n'ai pas vu le sketch, alors... je ne sais pas si le sketch dérape ou pas. Là, incompétence.
C. Roux : J'aime, j'aime pas l'avis de D. Besnehard sur votre campagne ?
Qu'est-ce qu'il a dit ?
C. Roux : Ce n'est pas sympa !
M. Biraben : Il dit que lors du lancement de la campagne, comparer à vous, Ségolène c'était Sarah Bernhardt.
Ah ! C'est possible, moi, je ne fais pas de cinéma, ni de théâtre. Je suis profondément sincère.
M. Biraben : Ceci expliquant cela. Merci beaucoup, V. Pécresse d'avoir été avec nous.
Merci.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 1er octobre 2009