Texte intégral
Mon Général,
Monsieur le Directeur,
Mesdames et Messieurs les Officiers généraux,
Mesdames et Messieurs les Officiers,
Mesdames et Messieurs les Professeurs et Enseignants-chercheurs,
Mesdames et Messieurs,
Préparer l'avenir de notre Défense, c'est l'objectif que le Président de la République nous a fixés. Et nous nous en donnons aujourd'hui les moyens.
La Loi de Programmation Militaire consacre un effort substantiel de la Nation pour sa Défense, avec plus de 100 Mds d'euros destinés à l'équipement de nos forces. Ces moyens financiers et techniques nous permettront de poursuivre la réorganisation de nos capacités opérationnelles. Mais cet effort ne serait pas complet s'il ne s'accompagnait pas aussi d'un travail conceptuel pour adapter en permanence notre outil militaire aux nouvelles réalités stratégiques.
Nous avons désormais les moyens de nos ambitions.
Le Livre Blanc a mis en valeur la nécessité de développer notre capacité d'analyse. Nous renforçons la fonction « connaissance et anticipation » qui est une des conditions de notre autonomie. Nous avons aussi le devoir de répondre aux «nouveaux défis posés à la pensée stratégique ». Aujourd'hui, l'inauguration de l'Institut de Recherche Stratégique de l'Ecole Militaire, dont j'ai souhaité la création, symbolise cette nouvelle priorité accordée à la prospective et à l'analyse stratégique.
L'IRSEM viendra compléter les outils que nous avons récemment mis en oeuvre : je pense à la rénovation de l'Enseignement militaire supérieur, à la création du pôle prospective de la DAS, à l'intégration du CHEAr dans l'IHEDN et à la création de l'INHES - J (Institut National des Hautes Etudes de Sécurité - Justice), dont le Premier Ministre inaugurera les premières sessions ce vendredi.
En présentant son rapport sur l'Afghanistan, le Général Mac Crystal a placé son propos dans la filiation des théories de David Galula, un militaire français, qui, comme vous le savez, a fait toute sa carrière de chercheur aux Etats-Unis. C'est symptomatique de la qualité des chercheurs français, mais aussi de leur difficulté à trouver toute leur place dans notre pays. La France doit tirer partie de ses ressources intellectuelles pour exercer pleinement son « soft power », proposer les concepts qui nourrissent le débat international et préparer l'action militaire et politique.
J'entends parfois certains se demander où sont les Castex, les Baufre, les Poirier, les Aron, les Gallois d'aujourd'hui. Et bien, ils sont là. Et ils sont même parfois à l'oeuvre sur le terrain.
Je pense notamment au Colonel Durieux, qui commande en Afghanistan le BATFRA Surobi - que j'ai visité récemment -, et qui vient de publier un remarquable travail sur Clausewitz. Voilà un symbole parfait de l'alliance entre l'opérationnel et la réflexion.
La pensée stratégique française ne manque pas, elle manque de visibilité.
Elle manque d'audience.
Elle manque de reconnaissance.
Je veux que les Galula d'aujourd'hui trouvent leur place dans notre pays et qu'ils sachent se faire entendre des décideurs politiques, militaires et économiques. Il en va de l'avenir même de toute grande puissance qui entend conserver une place dans les choix de demain.
Pour rendre audible la pensée stratégique française, l'IRSEM a un rôle central à jouer. En réunissant les équipes du CHEAR, du CEREM, du C2SD, et du CEHD, l'IRSEM atteint une taille critique qui donne plus de poids à la recherche en matière de Défense. Cette fusion permet aussi une mutualisation des savoirs : les spécialistes des sciences humaines et des sciences dures, - je pense notamment aux techniques de l'armement - peuvent y travailler ensemble. Les tables-rondes qui vous réuniront demain en sont l'illustration.
L'IRSEM sera au carrefour du monde de la recherche et du monde de la décision, entre le monde civil et le monde militaire, le savoir des spécialistes et les interrogations du débat public. Cette ouverture est symbolisée par le nouveau Centre de Documentation de l'Ecole Militaire (CDEM) que je vais inaugurer tout à l'heure. Là encore, c'est un lieu qui a été pensé comme un creuset pour les chercheurs, les étudiants, les journalistes.
Cette pensée ouverte doit aussi trouver son audience. Aujourd'hui, quand un chercheur publie dans The Lancet ou Foreign Affairs, c'est une consécration et le gage d'une visibilité mondiale. En France, nous avons actuellement des centaines de revues spécialisées dans ce domaine et quasiment aucune accessible en anglais ! Cette question du rayonnement a été évoquée hier par le SEDAC. Et nous mettrons en oeuvre des solutions dans les prochains mois. Il est notamment urgent que l'IRSEM lance des Paris Papers, et développe ses partenariats avec les institutions étrangères de premier plan : le King's College à Londres, l'IRRI à Bruxelles, le Cemiss à Rome, la Rand à Sacramento, la NDU à Washington, le MGIMO à Moscou et d'autres, en Asie notamment.
Dans cet esprit, la création d'une Association des Etudes de Défense et de Stratégie est une initiative tout à fait porteuse. Nous devons aussi réfléchir à la création d'une enceinte de réflexion, sur le modèle du Wilton Park britannique.
Tous ces outils permettront de valoriser nos ressources intellectuelles dans le domaine des études stratégiques. Mais nous devons aussi créer les conditions d'un renouveau.
C'est pourquoi je veux que nous développions les liens entre les Universités et la Défense. Le Ministère de la Défense finance déjà chaque année une cinquantaine de thèses. Mais plus de la moitié de ces jeunes docteurs iront travailler en Amérique du Nord ou chez nos voisins européens. C'est à nous de savoir les retenir ou de leur donner envie de revenir en France. Nous devons aussi savoir accueillir des thésards et des post-doc étrangers.
Je souhaite donc faire de l'IRSEM le pilier d'une école doctorale de dimension européenne, consacrée à l'étude des conflits et des relations internationales. C'est un projet ambitieux. Avec votre concours à tous - et particulièrement avec le Professeur Charillon et son équipe - , j'aurai à coeur de le mener à son terme. Il viendra parachever la construction de ce nouveau pôle universitaire de la recherche stratégique que l'Ecole Militaire accueille désormais.
Mesdames et Messieurs,
en 1927, le Maréchal Liautey écrivait : « Celui qui n'est que militaire est un mauvais militaire ; celui qui n'est qu'un professeur est un mauvais professeur ; celui qui n'est qu'un industriel est un mauvais industriel. L'homme complet, celui qui veut remplir sa pleine destinée et être digne de mener des hommes, être un chef en un mot, celui-là doit avoir ses lanternes ouvertes sur tout ce qui fait l'honneur de l'humanité. »
Ces « paroles d'action » n'ont rien perdu de leur actualité : face à l'incertitude du monde qui nous entoure, pour prendre une décision éclairée, dans le domaine militaire comme dans le domaine civil, nous avons aujourd'hui besoin d'une recherche qui sache décloisonner les savoirs, proposer une analyse sans tabou, et construire une vision d'avenir. Une vision qui est aussi européenne : nous devons lancer une réflexion prospective qui sache renouer avec l'élan des Schuman et des Monnet, tout en inscrivant l'Europe dans son nouvel environnement stratégique.
Telle est l'ambition de ces nouveaux outils que nous mettons en oeuvre : ils sont le fer de lance d'un véritable renouveau de la pensée stratégique française.
Je vous remercie.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 13 octobre 2009
Monsieur le Directeur,
Mesdames et Messieurs les Officiers généraux,
Mesdames et Messieurs les Officiers,
Mesdames et Messieurs les Professeurs et Enseignants-chercheurs,
Mesdames et Messieurs,
Préparer l'avenir de notre Défense, c'est l'objectif que le Président de la République nous a fixés. Et nous nous en donnons aujourd'hui les moyens.
La Loi de Programmation Militaire consacre un effort substantiel de la Nation pour sa Défense, avec plus de 100 Mds d'euros destinés à l'équipement de nos forces. Ces moyens financiers et techniques nous permettront de poursuivre la réorganisation de nos capacités opérationnelles. Mais cet effort ne serait pas complet s'il ne s'accompagnait pas aussi d'un travail conceptuel pour adapter en permanence notre outil militaire aux nouvelles réalités stratégiques.
Nous avons désormais les moyens de nos ambitions.
Le Livre Blanc a mis en valeur la nécessité de développer notre capacité d'analyse. Nous renforçons la fonction « connaissance et anticipation » qui est une des conditions de notre autonomie. Nous avons aussi le devoir de répondre aux «nouveaux défis posés à la pensée stratégique ». Aujourd'hui, l'inauguration de l'Institut de Recherche Stratégique de l'Ecole Militaire, dont j'ai souhaité la création, symbolise cette nouvelle priorité accordée à la prospective et à l'analyse stratégique.
L'IRSEM viendra compléter les outils que nous avons récemment mis en oeuvre : je pense à la rénovation de l'Enseignement militaire supérieur, à la création du pôle prospective de la DAS, à l'intégration du CHEAr dans l'IHEDN et à la création de l'INHES - J (Institut National des Hautes Etudes de Sécurité - Justice), dont le Premier Ministre inaugurera les premières sessions ce vendredi.
En présentant son rapport sur l'Afghanistan, le Général Mac Crystal a placé son propos dans la filiation des théories de David Galula, un militaire français, qui, comme vous le savez, a fait toute sa carrière de chercheur aux Etats-Unis. C'est symptomatique de la qualité des chercheurs français, mais aussi de leur difficulté à trouver toute leur place dans notre pays. La France doit tirer partie de ses ressources intellectuelles pour exercer pleinement son « soft power », proposer les concepts qui nourrissent le débat international et préparer l'action militaire et politique.
J'entends parfois certains se demander où sont les Castex, les Baufre, les Poirier, les Aron, les Gallois d'aujourd'hui. Et bien, ils sont là. Et ils sont même parfois à l'oeuvre sur le terrain.
Je pense notamment au Colonel Durieux, qui commande en Afghanistan le BATFRA Surobi - que j'ai visité récemment -, et qui vient de publier un remarquable travail sur Clausewitz. Voilà un symbole parfait de l'alliance entre l'opérationnel et la réflexion.
La pensée stratégique française ne manque pas, elle manque de visibilité.
Elle manque d'audience.
Elle manque de reconnaissance.
Je veux que les Galula d'aujourd'hui trouvent leur place dans notre pays et qu'ils sachent se faire entendre des décideurs politiques, militaires et économiques. Il en va de l'avenir même de toute grande puissance qui entend conserver une place dans les choix de demain.
Pour rendre audible la pensée stratégique française, l'IRSEM a un rôle central à jouer. En réunissant les équipes du CHEAR, du CEREM, du C2SD, et du CEHD, l'IRSEM atteint une taille critique qui donne plus de poids à la recherche en matière de Défense. Cette fusion permet aussi une mutualisation des savoirs : les spécialistes des sciences humaines et des sciences dures, - je pense notamment aux techniques de l'armement - peuvent y travailler ensemble. Les tables-rondes qui vous réuniront demain en sont l'illustration.
L'IRSEM sera au carrefour du monde de la recherche et du monde de la décision, entre le monde civil et le monde militaire, le savoir des spécialistes et les interrogations du débat public. Cette ouverture est symbolisée par le nouveau Centre de Documentation de l'Ecole Militaire (CDEM) que je vais inaugurer tout à l'heure. Là encore, c'est un lieu qui a été pensé comme un creuset pour les chercheurs, les étudiants, les journalistes.
Cette pensée ouverte doit aussi trouver son audience. Aujourd'hui, quand un chercheur publie dans The Lancet ou Foreign Affairs, c'est une consécration et le gage d'une visibilité mondiale. En France, nous avons actuellement des centaines de revues spécialisées dans ce domaine et quasiment aucune accessible en anglais ! Cette question du rayonnement a été évoquée hier par le SEDAC. Et nous mettrons en oeuvre des solutions dans les prochains mois. Il est notamment urgent que l'IRSEM lance des Paris Papers, et développe ses partenariats avec les institutions étrangères de premier plan : le King's College à Londres, l'IRRI à Bruxelles, le Cemiss à Rome, la Rand à Sacramento, la NDU à Washington, le MGIMO à Moscou et d'autres, en Asie notamment.
Dans cet esprit, la création d'une Association des Etudes de Défense et de Stratégie est une initiative tout à fait porteuse. Nous devons aussi réfléchir à la création d'une enceinte de réflexion, sur le modèle du Wilton Park britannique.
Tous ces outils permettront de valoriser nos ressources intellectuelles dans le domaine des études stratégiques. Mais nous devons aussi créer les conditions d'un renouveau.
C'est pourquoi je veux que nous développions les liens entre les Universités et la Défense. Le Ministère de la Défense finance déjà chaque année une cinquantaine de thèses. Mais plus de la moitié de ces jeunes docteurs iront travailler en Amérique du Nord ou chez nos voisins européens. C'est à nous de savoir les retenir ou de leur donner envie de revenir en France. Nous devons aussi savoir accueillir des thésards et des post-doc étrangers.
Je souhaite donc faire de l'IRSEM le pilier d'une école doctorale de dimension européenne, consacrée à l'étude des conflits et des relations internationales. C'est un projet ambitieux. Avec votre concours à tous - et particulièrement avec le Professeur Charillon et son équipe - , j'aurai à coeur de le mener à son terme. Il viendra parachever la construction de ce nouveau pôle universitaire de la recherche stratégique que l'Ecole Militaire accueille désormais.
Mesdames et Messieurs,
en 1927, le Maréchal Liautey écrivait : « Celui qui n'est que militaire est un mauvais militaire ; celui qui n'est qu'un professeur est un mauvais professeur ; celui qui n'est qu'un industriel est un mauvais industriel. L'homme complet, celui qui veut remplir sa pleine destinée et être digne de mener des hommes, être un chef en un mot, celui-là doit avoir ses lanternes ouvertes sur tout ce qui fait l'honneur de l'humanité. »
Ces « paroles d'action » n'ont rien perdu de leur actualité : face à l'incertitude du monde qui nous entoure, pour prendre une décision éclairée, dans le domaine militaire comme dans le domaine civil, nous avons aujourd'hui besoin d'une recherche qui sache décloisonner les savoirs, proposer une analyse sans tabou, et construire une vision d'avenir. Une vision qui est aussi européenne : nous devons lancer une réflexion prospective qui sache renouer avec l'élan des Schuman et des Monnet, tout en inscrivant l'Europe dans son nouvel environnement stratégique.
Telle est l'ambition de ces nouveaux outils que nous mettons en oeuvre : ils sont le fer de lance d'un véritable renouveau de la pensée stratégique française.
Je vous remercie.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 13 octobre 2009