Texte intégral
Merci au Président Dominique VERNAY de m'avoir proposé d'intervenir à la mi-temps de votre journée consacrée à l'innovation et à l'Europe des clusters.
Je le remercie d'autant plus qu'il a bien voulu accepté également d'être membre du Comité national des Etats généraux de l'industrie que j'ai installé le 2 novembre dernier et d'être président d'un groupe de travail sur la politique de filières, décloisonnement et partenariats.
Décloisonnement, partenariat, écosystème,...pôle de compétitivité, inter-pôle, internationalisation. Autant de concepts d'ouverture et de travail collaboratif auxquels je crois et que je veux désormais ancrer dans la pratique.
Je sais que cet état d'esprit ne va pas de soit à grande échelle. Je sais le travail, le temps et l'obstination qu'il a fallu pour réussir ce pari au sein des pôles de compétitivité. Un des objectifs des Etats généraux de l'industrie, un de mes objectifs, est de franchir une grande étape supplémentaire : réussir le décloisonnement entre secteurs pour passer à l'écosystème de filières ; réussir le décloisonnement entre les pôles de compétitivité pour accélérer la collaboration inter-pôles. J'y reviendrai.
Paris innovation Tour, c'est plus de mille participants de « l'écosystème européen des clusters » avec des représentants de 70 clusters venus de 20 pays. Vous imaginez la joie qui est la mienne devant cette réussite, car j'ai eu histoire si particulière avec les pôles de compétitivité ! Bravo pour l'organisation de cet événement remarquable.
Les 71 pôles de compétitivité français que j'avais contribué à mettre en place dans une de mes précédentes fonctions et dont je constate avec satisfaction la prospérité 4 ans plus tard, sont devenus des acteurs majeurs de la politique de recherche et de compétitivité de notre pays.
Les résultats en effet sont déjà là. Ils sont incontestables.
* Entre 2006 et 2008, la première phase des pôles a en effet permis de financer plus de 2 700 projets, avec une aide de près de 2 Mdeuros de l'Etat et de ses agences (ANR et OSEO).
* Le fonds unique interministériel a soutenu 719 projets, représentant un montant de 3,8 Mdeuros, financés aux deux tiers par les entreprises.
* Le pôle Systematic pour ne prendre qu'un exemple au hasard bien sûr, a permis à ce jour le développement de 186 projets collaboratifs de R&D représentant un effort de R&D global de près de 900 Meuros et un soutien cumulé de près de 360 Meuros provenant de l'Etat, des agences ANR, EUREKA, FEDER, OSEO et des collectivités territoriales.
Derrière ces chiffres, ce sont autant de parts de marché nouvelles pour nos industries et nos services, autant d'emplois que les pôles ont permis de créer aujourd'hui et plus encore pour l'avenir.
L'évaluation réalisée l'an dernier avait pointé des progrès à effectuer, mais elle avait surtout permis de constater que pour la plupart d'entre eux ont rempli les objectifs qui leur étaient assigné.
En 2009, le gouvernement a décidé d'approfondir sa politique de pôles de compétitivité.
Tout d'abord nous allons labelliser quelques nouveaux pôles, là ou des manques évidents apparaissent : je pense ici aux écotechnologies, et en particulier aux domaines de l'eau et de l'énergie. Un appel à candidatures a ainsi été lancé pour sélectionner ce ou ces pôles d'ici la fin de l'année.
Nous respecterons l'engagement du Président de la République de poursuivre cette politique et de les doter globalement d' 1,5 Mdeuros sur une période de 3 ans dont 600 Meuros sur le fonds unique interministériel et l'équivalent sur l'ANR.
Les 200 Meuros inscrits dans le budget 2010 serviront à deux choses :
- d'abord à permettre l'engagement de nouveaux projets de recherche collaboratifs et leur financement,
- ensuite à financer des services mutualisés pour les acteurs des pôles, à hauteur de 35 Meuros.
A ces sommes, s'ajouteront bien évidemment les contributions des collectivités territoriales qui jouent également un rôle essentiel dans le soutien de la dynamique des pôles.
Je profite de cette tribune pour évoquer la consommation des crédits qui a pu faire l'objet d'interrogations. Il est évident que nous ne manquons pas de projets de qualité qui nous sont soumis par les pôles. Cela nous conduit à une sélectivité importante dans le cadre de l'enveloppe budgétaire allouée à cette politique. Mais, je tiens à le rappeler clairement ici, nous consommons chaque année l'intégralité des autorisations d'engagements
Nous sommes également très attentifs à développer la dimension internationale des pôles et la politique inter-clusters qui fait naturellement partie de vos débats.
* Le gouvernement a lancé un appel à projets, clos le 18 septembre, destiné à la mise en place d'"Ambassadeurs des pôles ". Ces « ambassadeurs » doivent permettre l'échange d'un membre de la gouvernance d'un pôle français avec celui d'un "cluster" étranger. Nous voulons faire bénéficier de cette formule nouvelle prioritairement les secteurs industriels stratégiques définis dans le cadre du contrat de performance signé en 2009 entre les pôles de compétitivité, l'État et les collectivités territoriales.
* La politique des pôles de compétitivité s'inscrit d'ailleurs dans la lignée de la stratégie de Lisbonne, dont l'objectif est de faire de l'Union européenne « l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde ».
* C'est en effet par la connaissance que l'Europe et la France pourront conserver leur place de première puissance industrielle mondiale et d'acteur économique de tout premier plan, face aux Etats-Unis.
* La place des pôles de compétitivité est ainsi centrale au coeur de la stratégie d'innovation européenne et devrait occuper une place importante dans le futur plan européen de l'innovation que la Commission européenne doit présenter au printemps 2010.
* L'idée est que les pôles contribuent à la constitution de champions européens pour l'avenir, dans le cadre de la politique industrielle nationale et européenne, dans des secteurs considérés comme stratégiques ou prioritaires.
La France dispose de 2 pôles dits mondiaux et 10 à vocation mondiale. Dans une économie globalisée mais en crise, les pôles de compétitivité constituent plus que jamais un atout clef permettant de soutenir l'innovation et les transferts technologiques, d'améliorer la compétitivité et la croissance pour créer des emplois.
L'internationalisation des pôles de compétitivité est aujourd'hui une des priorités des contrats de performance des pôles et de leur feuille de route stratégique. La nécessité de déterminer des zones et des pays cibles est apparue comme un élément structurant pour l'ensemble des acteurs des pôles qui peuvent trouver un intérêt très concret pour nouer et développer des partenariats technologiques, industriels et commerciaux avec des partenaires étrangers.
Le Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi a lancé un certain nombre d'initiatives pour traiter ces enjeux.
* La mise en place une boîte à outils permettant aux pôles de compétitivité et à leurs membres de mettre en oeuvre leurs priorités à l'international et de renforcer également leur visibilité et leur attractivité.
* La signature d'une convention de partenariat avec Ubifrance le 13 janvier dernier a permis en 2009 à plus de 350 participants dont près de deux cents PME d'aller ensemble sur des marchés prioritaires pour renforcer leurs partenariats technologiques. Le fait de se déplacer conjointement comme les 8 pôles santé/biotechnologies lors de grands événements internationaux (je pense notamment aux salons BIO aux Etats-Unis, au Japon ou ailleurs), ou comme les pôles automobiles / transports lorsqu'ils se déplacent à 5 pôles avec une vingtaine d'entreprises aux Etats-Unis, en Allemagne ou en Inde, par exemple, sont des éléments fondamentaux d'une démarche cohérente à l'étranger.
* De nouveaux secteurs seront visés l'année prochaine : les pôles de l'industrie agroalimentaire ou encore de la mécanique seront aidés dans cette démarche structurante et collective.
* D'autres outils seront mises en place en faveur des pôles et de leurs acteurs en 2010, notamment sur le développement et l'accompagnement des PME pour la création de partenariats sur le champ géographique de l'Union européenne.
Vous le savez, je veux aller plus loin sur le décloisonnement et l'internationalisation. Il faut changer notre approche de la politique industrielle : il faut passer d'une « politique par secteur » à une « politique d'écosystème autour de grands projets ».
Un exemple très parlant, le projet « automobile verte », car c'est le projet porteur de croissance et d'emploi des 30 prochaines années dans l'automobile. C'est l'ensemble des secteurs concernés qui doivent être mobilisés : la métallurgie, la plasturgie, la mécanique, la chimie, les nouveaux matériaux, le textile technique, l'énergie... du plus petit des sous-traitants à la multinationale.
La France ne peut pas être la meilleure partout. La « logique projet » veut aussi que l'on mette fin au saupoudrage pour miser d'abord
- sur les secteurs et segments sur lesquels nous avons aujourd'hui des avantages comparatifs sur nos compétiteurs ;
- ou sur les secteurs d'avenir sur lesquels nous avons les atouts pour réussir.
C'est là qu'il faut concentrer les investissements et les efforts. Car c'est là que résident la croissance et l'emploi durables. Les pôles de compétitivité peuvent être les fers de lance de ce décloisonnement.
Dans ce contexte la coordination et les rapprochements entre les pôles est particulièrement nécessaire. Elle contribue à
* Améliorer le nombre et la qualité des projets de R&D en évitant les redondances.
* Renforcer l'attractivité du territoire et le rayonnement des membres des pôles.
* Compléter la chaîne de valeur des entreprises des pôles.
Aujourd'hui, plusieurs initiatives prenant des formes diverses existent. Elles s'ancrent toutes dans la durée mais varient sur leurs formes. La coordination, voire la « fédération » de pôles existants s'opère d'ailleurs en vue d'un développement international des pôles, sur le modèle du « Lifescience corridor » (entre les pôles Alsace Biovalley, Lyon Biopôle et Cancer-Bio-Santé) dans les biotechnologies et du « French food cluster » (entre les pôles Agrimip Innovation, Valorial et Vitagora) dans l'agroalimentaire voire de l'aéronautique (pôles Aerospace Valley, Pegase et Astech).
Mais ces initiatives pour importantes qu'elles soient sont insuffisamment nombreuses et ne vont pas suffisamment loin.
Pour avoir des pôles plus efficaces et plus compétitifs, nous devons donc concentrer nos forces. Il faut encourager à chaque fois que cela a du sens les formes de rapprochements les plus adaptées. Je fais des propositions concrètes ici.
Je propose de plus de créer un label « Inter-pôle » permettant de fédérer et de rassembler les compétences de pôles qui le souhaitent. travaillant sur les mêmes thèmes ou à l'intersection de mêmes thèmes dans une même région.
Il faudrait bien sûr veiller à ne pas créer de nouvelles structures ingérables. L'inter-pôle doit être fondé sur des actions concrètes reprises dans une charte de coopération : feuilles de route stratégiques communes, présentation de candidatures communes et colabellisées par les pôles concernés aux appels à projet FUI, élaboration de stratégies et de projets communs en matière de plates-formes d'innovation qui seraient ainsi ouvertes à un plus grand nombre d'entreprises et de PME,...
L'inter-pôle devrait être incarné par un homme. Il pourrait être le représentant de l'un des pôles qui le composent, à l'image de ce qui existe au Club des pôles de compétitivité mondiaux.
L'inter-pôle se reposerait clairement sur les moyens des pôles qui le composent. Cela signifie qu'aucun moyen supplémentaire de financement ne serait nécessaire.
Pas de structure juridique d'animation, ni de personnel permanent en propre.
Il pourrait bien sûr bénéficier, via les pôles qui le composent, d'un soutien de l'Etat aux actions collectives et mutualisées au bénéfice des entreprises.
Sur le plan juridique, la labellisation en tant qu'inter-pôles ne consisterait donc pas en une labellisation en tant que pôle de compétitivité, avec les conséquences qui y sont attachées (définition d'un zonage, mise en place d'une structure de gouvernance ...).
Il faut encourager les adossements de pôle à pôle pour les pôles ayant du mal à atteindre seul la taille critique mais dont le thème est comparable ou fortement complémentaire d'un pôle plus puissant mais dont le territoire n'est pas le même.
L'adossement ne crée pas un nouveau pôle de compétitivité. Il permet
* Un élargissement des thèmes du pôle intégrateur, une actualisation de sa feuille de route stratégique et de son contrat de performances pour prendre en compte les problématiques du pôle intégré.
* L'intégration de nouveaux membres au pôle.
* Une extension du territoire et de la zone de R&D du pôle qui ouvre le bénéfice des exonérations fiscales et surtout d'un taux bonifié d'aides aux PME.
* Lorsque l'adossement concerne un projet géographiquement éloigné (notamment cas des DOM), on peut imaginer la mise en place d'une structure d'animation locale « rattachée » à la structure d'animation du pôle intégrateur.
* Il faut de plus travailler à un dispositif financier incitatif où les projets qui associeront les pôles qui travaillent sur les mêmes secteurs doivent pouvoir bénéficier d'une bonification des aides.
Enfin, pour concentrer nos forces, il faut également créer des champions internationaux.
La France lors de sa présidence de l'Union européenne, a encouragé la constitution de pôles de compétitivité de classe mondiale et la mise en oeuvre de coopérations au plan international. Alors faisons-le!
Je souhaite que la France puisse lancer 5 clusters de classe mondiale à partir des pôles de compétitivité existants sur des filières en essor, en attirant et concentrant sur un même territoire les acteurs clefs (PME, recherche, université) pour en faire de véritables campus de l'innovation, à l'image ceux existants aux Etats-Unis, au Japon, en Corée ou même en Suède.
C'est une proposition que je fais dans le cadre du grand Emprunt et dans le cadre des Etats généraux de l'industrie.
Cela pourrait se compléter par des infrastructures structurantes et partagées comme de très grandes plateformes d'innovation où recherche public et privée travaillent au quotidien côte à côte.
Dans les filières où l'industrie française dispose d'avantages comparatifs à renforcer pour rester ou devenir leaders (aérospatial, nanoélectronique, biotechnologies, nouveaux matériaux, technologies de communication, ...), une politique de cluster permettra de
- développer l'avance technologique dans ces secteurs.
- développer un écosystème de nature à démultiplier les efforts publics de soutien à l'innovation.
Ainsi, ces véritables « campus » auraient pour ambition de rassembler :
* Les meilleures compétences en matière d'enseignement supérieur et de recherche publique. La localisation de centres de recherche et d'organismes de formation supérieure (écoles spécialisées...) constituerait un élément central de ces campus. Cette démarche s'inscrirait dans la logique de ce qu'a déjà entrepris le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche ;
* Les meilleures infrastructures d'échanges entre les acteurs de la recherche publique et ceux des entreprises pour développer la valorisation de la recherche publique et les démarches collaboratives : plateformes technologiques, living labs... En particulier, les sociétés de valorisation que le Président de la République a décidé de créer trouveraient toute leur place dans ce cadre ;
* Les meilleures infrastructures d'accompagnement à la création d'entreprises innovantes : incubateurs, pépinières, hôtels d'entreprises...
* Les meilleures infrastructures de « service » aux membres du campus : centres de conférence, showroom, liaison à très haut débit...
Cela permettrait de dynamiser l'innovation pour la ville de demain qui est, je crois, le sujet de votre table ronde.
Voilà en substance, mesdames et messieurs, ma contribution à vos débats et à vos actions. Je vous souhaite une très bonne continuation pour cette journée de travail et de réflexion.
Source http://www.minefe.gouv.fr, le 2 décembre 2009
Je le remercie d'autant plus qu'il a bien voulu accepté également d'être membre du Comité national des Etats généraux de l'industrie que j'ai installé le 2 novembre dernier et d'être président d'un groupe de travail sur la politique de filières, décloisonnement et partenariats.
Décloisonnement, partenariat, écosystème,...pôle de compétitivité, inter-pôle, internationalisation. Autant de concepts d'ouverture et de travail collaboratif auxquels je crois et que je veux désormais ancrer dans la pratique.
Je sais que cet état d'esprit ne va pas de soit à grande échelle. Je sais le travail, le temps et l'obstination qu'il a fallu pour réussir ce pari au sein des pôles de compétitivité. Un des objectifs des Etats généraux de l'industrie, un de mes objectifs, est de franchir une grande étape supplémentaire : réussir le décloisonnement entre secteurs pour passer à l'écosystème de filières ; réussir le décloisonnement entre les pôles de compétitivité pour accélérer la collaboration inter-pôles. J'y reviendrai.
Paris innovation Tour, c'est plus de mille participants de « l'écosystème européen des clusters » avec des représentants de 70 clusters venus de 20 pays. Vous imaginez la joie qui est la mienne devant cette réussite, car j'ai eu histoire si particulière avec les pôles de compétitivité ! Bravo pour l'organisation de cet événement remarquable.
Les 71 pôles de compétitivité français que j'avais contribué à mettre en place dans une de mes précédentes fonctions et dont je constate avec satisfaction la prospérité 4 ans plus tard, sont devenus des acteurs majeurs de la politique de recherche et de compétitivité de notre pays.
Les résultats en effet sont déjà là. Ils sont incontestables.
* Entre 2006 et 2008, la première phase des pôles a en effet permis de financer plus de 2 700 projets, avec une aide de près de 2 Mdeuros de l'Etat et de ses agences (ANR et OSEO).
* Le fonds unique interministériel a soutenu 719 projets, représentant un montant de 3,8 Mdeuros, financés aux deux tiers par les entreprises.
* Le pôle Systematic pour ne prendre qu'un exemple au hasard bien sûr, a permis à ce jour le développement de 186 projets collaboratifs de R&D représentant un effort de R&D global de près de 900 Meuros et un soutien cumulé de près de 360 Meuros provenant de l'Etat, des agences ANR, EUREKA, FEDER, OSEO et des collectivités territoriales.
Derrière ces chiffres, ce sont autant de parts de marché nouvelles pour nos industries et nos services, autant d'emplois que les pôles ont permis de créer aujourd'hui et plus encore pour l'avenir.
L'évaluation réalisée l'an dernier avait pointé des progrès à effectuer, mais elle avait surtout permis de constater que pour la plupart d'entre eux ont rempli les objectifs qui leur étaient assigné.
En 2009, le gouvernement a décidé d'approfondir sa politique de pôles de compétitivité.
Tout d'abord nous allons labelliser quelques nouveaux pôles, là ou des manques évidents apparaissent : je pense ici aux écotechnologies, et en particulier aux domaines de l'eau et de l'énergie. Un appel à candidatures a ainsi été lancé pour sélectionner ce ou ces pôles d'ici la fin de l'année.
Nous respecterons l'engagement du Président de la République de poursuivre cette politique et de les doter globalement d' 1,5 Mdeuros sur une période de 3 ans dont 600 Meuros sur le fonds unique interministériel et l'équivalent sur l'ANR.
Les 200 Meuros inscrits dans le budget 2010 serviront à deux choses :
- d'abord à permettre l'engagement de nouveaux projets de recherche collaboratifs et leur financement,
- ensuite à financer des services mutualisés pour les acteurs des pôles, à hauteur de 35 Meuros.
A ces sommes, s'ajouteront bien évidemment les contributions des collectivités territoriales qui jouent également un rôle essentiel dans le soutien de la dynamique des pôles.
Je profite de cette tribune pour évoquer la consommation des crédits qui a pu faire l'objet d'interrogations. Il est évident que nous ne manquons pas de projets de qualité qui nous sont soumis par les pôles. Cela nous conduit à une sélectivité importante dans le cadre de l'enveloppe budgétaire allouée à cette politique. Mais, je tiens à le rappeler clairement ici, nous consommons chaque année l'intégralité des autorisations d'engagements
Nous sommes également très attentifs à développer la dimension internationale des pôles et la politique inter-clusters qui fait naturellement partie de vos débats.
* Le gouvernement a lancé un appel à projets, clos le 18 septembre, destiné à la mise en place d'"Ambassadeurs des pôles ". Ces « ambassadeurs » doivent permettre l'échange d'un membre de la gouvernance d'un pôle français avec celui d'un "cluster" étranger. Nous voulons faire bénéficier de cette formule nouvelle prioritairement les secteurs industriels stratégiques définis dans le cadre du contrat de performance signé en 2009 entre les pôles de compétitivité, l'État et les collectivités territoriales.
* La politique des pôles de compétitivité s'inscrit d'ailleurs dans la lignée de la stratégie de Lisbonne, dont l'objectif est de faire de l'Union européenne « l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde ».
* C'est en effet par la connaissance que l'Europe et la France pourront conserver leur place de première puissance industrielle mondiale et d'acteur économique de tout premier plan, face aux Etats-Unis.
* La place des pôles de compétitivité est ainsi centrale au coeur de la stratégie d'innovation européenne et devrait occuper une place importante dans le futur plan européen de l'innovation que la Commission européenne doit présenter au printemps 2010.
* L'idée est que les pôles contribuent à la constitution de champions européens pour l'avenir, dans le cadre de la politique industrielle nationale et européenne, dans des secteurs considérés comme stratégiques ou prioritaires.
La France dispose de 2 pôles dits mondiaux et 10 à vocation mondiale. Dans une économie globalisée mais en crise, les pôles de compétitivité constituent plus que jamais un atout clef permettant de soutenir l'innovation et les transferts technologiques, d'améliorer la compétitivité et la croissance pour créer des emplois.
L'internationalisation des pôles de compétitivité est aujourd'hui une des priorités des contrats de performance des pôles et de leur feuille de route stratégique. La nécessité de déterminer des zones et des pays cibles est apparue comme un élément structurant pour l'ensemble des acteurs des pôles qui peuvent trouver un intérêt très concret pour nouer et développer des partenariats technologiques, industriels et commerciaux avec des partenaires étrangers.
Le Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi a lancé un certain nombre d'initiatives pour traiter ces enjeux.
* La mise en place une boîte à outils permettant aux pôles de compétitivité et à leurs membres de mettre en oeuvre leurs priorités à l'international et de renforcer également leur visibilité et leur attractivité.
* La signature d'une convention de partenariat avec Ubifrance le 13 janvier dernier a permis en 2009 à plus de 350 participants dont près de deux cents PME d'aller ensemble sur des marchés prioritaires pour renforcer leurs partenariats technologiques. Le fait de se déplacer conjointement comme les 8 pôles santé/biotechnologies lors de grands événements internationaux (je pense notamment aux salons BIO aux Etats-Unis, au Japon ou ailleurs), ou comme les pôles automobiles / transports lorsqu'ils se déplacent à 5 pôles avec une vingtaine d'entreprises aux Etats-Unis, en Allemagne ou en Inde, par exemple, sont des éléments fondamentaux d'une démarche cohérente à l'étranger.
* De nouveaux secteurs seront visés l'année prochaine : les pôles de l'industrie agroalimentaire ou encore de la mécanique seront aidés dans cette démarche structurante et collective.
* D'autres outils seront mises en place en faveur des pôles et de leurs acteurs en 2010, notamment sur le développement et l'accompagnement des PME pour la création de partenariats sur le champ géographique de l'Union européenne.
Vous le savez, je veux aller plus loin sur le décloisonnement et l'internationalisation. Il faut changer notre approche de la politique industrielle : il faut passer d'une « politique par secteur » à une « politique d'écosystème autour de grands projets ».
Un exemple très parlant, le projet « automobile verte », car c'est le projet porteur de croissance et d'emploi des 30 prochaines années dans l'automobile. C'est l'ensemble des secteurs concernés qui doivent être mobilisés : la métallurgie, la plasturgie, la mécanique, la chimie, les nouveaux matériaux, le textile technique, l'énergie... du plus petit des sous-traitants à la multinationale.
La France ne peut pas être la meilleure partout. La « logique projet » veut aussi que l'on mette fin au saupoudrage pour miser d'abord
- sur les secteurs et segments sur lesquels nous avons aujourd'hui des avantages comparatifs sur nos compétiteurs ;
- ou sur les secteurs d'avenir sur lesquels nous avons les atouts pour réussir.
C'est là qu'il faut concentrer les investissements et les efforts. Car c'est là que résident la croissance et l'emploi durables. Les pôles de compétitivité peuvent être les fers de lance de ce décloisonnement.
Dans ce contexte la coordination et les rapprochements entre les pôles est particulièrement nécessaire. Elle contribue à
* Améliorer le nombre et la qualité des projets de R&D en évitant les redondances.
* Renforcer l'attractivité du territoire et le rayonnement des membres des pôles.
* Compléter la chaîne de valeur des entreprises des pôles.
Aujourd'hui, plusieurs initiatives prenant des formes diverses existent. Elles s'ancrent toutes dans la durée mais varient sur leurs formes. La coordination, voire la « fédération » de pôles existants s'opère d'ailleurs en vue d'un développement international des pôles, sur le modèle du « Lifescience corridor » (entre les pôles Alsace Biovalley, Lyon Biopôle et Cancer-Bio-Santé) dans les biotechnologies et du « French food cluster » (entre les pôles Agrimip Innovation, Valorial et Vitagora) dans l'agroalimentaire voire de l'aéronautique (pôles Aerospace Valley, Pegase et Astech).
Mais ces initiatives pour importantes qu'elles soient sont insuffisamment nombreuses et ne vont pas suffisamment loin.
Pour avoir des pôles plus efficaces et plus compétitifs, nous devons donc concentrer nos forces. Il faut encourager à chaque fois que cela a du sens les formes de rapprochements les plus adaptées. Je fais des propositions concrètes ici.
Je propose de plus de créer un label « Inter-pôle » permettant de fédérer et de rassembler les compétences de pôles qui le souhaitent. travaillant sur les mêmes thèmes ou à l'intersection de mêmes thèmes dans une même région.
Il faudrait bien sûr veiller à ne pas créer de nouvelles structures ingérables. L'inter-pôle doit être fondé sur des actions concrètes reprises dans une charte de coopération : feuilles de route stratégiques communes, présentation de candidatures communes et colabellisées par les pôles concernés aux appels à projet FUI, élaboration de stratégies et de projets communs en matière de plates-formes d'innovation qui seraient ainsi ouvertes à un plus grand nombre d'entreprises et de PME,...
L'inter-pôle devrait être incarné par un homme. Il pourrait être le représentant de l'un des pôles qui le composent, à l'image de ce qui existe au Club des pôles de compétitivité mondiaux.
L'inter-pôle se reposerait clairement sur les moyens des pôles qui le composent. Cela signifie qu'aucun moyen supplémentaire de financement ne serait nécessaire.
Pas de structure juridique d'animation, ni de personnel permanent en propre.
Il pourrait bien sûr bénéficier, via les pôles qui le composent, d'un soutien de l'Etat aux actions collectives et mutualisées au bénéfice des entreprises.
Sur le plan juridique, la labellisation en tant qu'inter-pôles ne consisterait donc pas en une labellisation en tant que pôle de compétitivité, avec les conséquences qui y sont attachées (définition d'un zonage, mise en place d'une structure de gouvernance ...).
Il faut encourager les adossements de pôle à pôle pour les pôles ayant du mal à atteindre seul la taille critique mais dont le thème est comparable ou fortement complémentaire d'un pôle plus puissant mais dont le territoire n'est pas le même.
L'adossement ne crée pas un nouveau pôle de compétitivité. Il permet
* Un élargissement des thèmes du pôle intégrateur, une actualisation de sa feuille de route stratégique et de son contrat de performances pour prendre en compte les problématiques du pôle intégré.
* L'intégration de nouveaux membres au pôle.
* Une extension du territoire et de la zone de R&D du pôle qui ouvre le bénéfice des exonérations fiscales et surtout d'un taux bonifié d'aides aux PME.
* Lorsque l'adossement concerne un projet géographiquement éloigné (notamment cas des DOM), on peut imaginer la mise en place d'une structure d'animation locale « rattachée » à la structure d'animation du pôle intégrateur.
* Il faut de plus travailler à un dispositif financier incitatif où les projets qui associeront les pôles qui travaillent sur les mêmes secteurs doivent pouvoir bénéficier d'une bonification des aides.
Enfin, pour concentrer nos forces, il faut également créer des champions internationaux.
La France lors de sa présidence de l'Union européenne, a encouragé la constitution de pôles de compétitivité de classe mondiale et la mise en oeuvre de coopérations au plan international. Alors faisons-le!
Je souhaite que la France puisse lancer 5 clusters de classe mondiale à partir des pôles de compétitivité existants sur des filières en essor, en attirant et concentrant sur un même territoire les acteurs clefs (PME, recherche, université) pour en faire de véritables campus de l'innovation, à l'image ceux existants aux Etats-Unis, au Japon, en Corée ou même en Suède.
C'est une proposition que je fais dans le cadre du grand Emprunt et dans le cadre des Etats généraux de l'industrie.
Cela pourrait se compléter par des infrastructures structurantes et partagées comme de très grandes plateformes d'innovation où recherche public et privée travaillent au quotidien côte à côte.
Dans les filières où l'industrie française dispose d'avantages comparatifs à renforcer pour rester ou devenir leaders (aérospatial, nanoélectronique, biotechnologies, nouveaux matériaux, technologies de communication, ...), une politique de cluster permettra de
- développer l'avance technologique dans ces secteurs.
- développer un écosystème de nature à démultiplier les efforts publics de soutien à l'innovation.
Ainsi, ces véritables « campus » auraient pour ambition de rassembler :
* Les meilleures compétences en matière d'enseignement supérieur et de recherche publique. La localisation de centres de recherche et d'organismes de formation supérieure (écoles spécialisées...) constituerait un élément central de ces campus. Cette démarche s'inscrirait dans la logique de ce qu'a déjà entrepris le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche ;
* Les meilleures infrastructures d'échanges entre les acteurs de la recherche publique et ceux des entreprises pour développer la valorisation de la recherche publique et les démarches collaboratives : plateformes technologiques, living labs... En particulier, les sociétés de valorisation que le Président de la République a décidé de créer trouveraient toute leur place dans ce cadre ;
* Les meilleures infrastructures d'accompagnement à la création d'entreprises innovantes : incubateurs, pépinières, hôtels d'entreprises...
* Les meilleures infrastructures de « service » aux membres du campus : centres de conférence, showroom, liaison à très haut débit...
Cela permettrait de dynamiser l'innovation pour la ville de demain qui est, je crois, le sujet de votre table ronde.
Voilà en substance, mesdames et messieurs, ma contribution à vos débats et à vos actions. Je vous souhaite une très bonne continuation pour cette journée de travail et de réflexion.
Source http://www.minefe.gouv.fr, le 2 décembre 2009