Texte intégral
J.-P. Elkabbach.-ous participiez hier soir à une réunion spéciale à l'Elysée sur les moyens de lutter contre le terrorisme. Quel est aujourd'hui le niveau de menace terroriste sur l'Europe et surtout sur nous, les Français, et la France ?
A l'évidence, la menace est réelle, deux éléments nous le rappellent : il y a cette histoire bien connue de ce jeune Nigérian, le 25 décembre, qui a tenté un attentat, heureusement qui a échoué, en se rendant aux Etats- Unis ; et puis, sur notre territoire, la menace aussi existe. Je vous rappelle que le 8 octobre dernier, nous avons interpellé un individu dans l'Isère, dont l'objectif était clairement d'organiser un acte terroriste sur notre territoire. Donc, ça signifie que, si la menace est réelle, notre vigilance doit être permanent.
D'où vient la menace ?
Il y a trois types de menace terroriste sur notre territoire : il y en a deux qui sont moins connues, ce sont les menaces kurdes, les menaces de l'ETA, et surtout la menace d'extrémistes islamiques.
Qu'est-ce qui a été décidé ou mis en route quand vous vous êtes réunis, tous les spécialistes de la défense et de la sécurité, hier à l'Elysée, avec le président de la République ?
D'abord, de confirmer le niveau du plan Vigipirate, il y a plusieurs niveaux, là on est au niveau rouge, c'est-à-dire, que nous mobilisons des forces importantes aujourd'hui, notamment dans le secteur du transport aérien, qui est certainement le plus sensible, nous avons 3.800 fonctionnaires de la Police aux frontières qui sont mobilisés et un peu plus de 1.000 gendarmes, 1019, très exactement.
Et ça marche entre eux ou c'est comme aux Etats-Unis où les services de renseignement sont défaillants ?
Bien sûr, ça fonctionne, ça fonctionne très bien. Depuis le 25 décembre, j'ai aussi décidé des mesures, des mesures qui ont été immédiatement d'ailleurs appliquées, comme par exemple, le renforcement des patrouilles dans les zones aéroportuaires. Ca signifie très concrètement que, aujourd'hui, 100 % des passagers qui se rendent aux Etats-Unis à partir d'un aéroport français, c'est-à-dire, Paris, Orly, et notamment Nice, 100 % des passagers qui se rendent aux Etats-Unis font l'objet d'une fouille systématique. Je me suis d'ailleurs rendu sur place à Charles-de-Gaulle, le 30 décembre, pour mesurer l'application de ces mesures. Ca signifie qu'on a un objectif simple, notre objectif est clair, c'est de faire des aéroports français les plus sûrs d'Europe.
Est-ce que vous allez tester vous aussi les scanners, les "body scanners" que B. Obama vient d'installer partout ou veut installer partout ?
Il y a plusieurs initiatives qui doivent être engagées. D'abord, il faut à l'évidence élargir le nombre des pays à risque ; aujourd'hui, il y en a sept, il faut que sans doute on monte entre 20 et 30. Pour vous donner des exemples - on ne va pas donner toute la liste, bien sûr - mais ça concerne le Yémen, l'Afghanistan, l'Iran, le Pakistan, le Mali. Cela ne signifie pas que ces gouvernements cautionnent le terrorisme, mais parfois qu'ils n'ont pas les moyens de lutter contre le terrorisme, comme par exemple au Mali. Ensuite, il faut recueillir le plus grand nombre d'informations possible au moment de l'embarquement. Et j'ai décidé qu'à compter du 1er janvier, les compagnies qui ne donneraient pas la liste de leurs passagers avec les éléments seraient sanctionnées financièrement.
Dès la réservation ?
Non, à ce stade. C'est au moment de l'embarquement. Les compagnies sont assujetties à une amende de 50.000 euros, et je veillerai à ce que cette amende soit pleinement recouvrée, c'est une question de sécurité importante. Et puis il y a une troisième mesure, effectivement, c'est sans doute d'avancer vers la possibilité d'obtenir des renseignements dès la réservation. Cela signifie qu'il faut qu'il y ait une initiative européenne, c'est une présidence espagnole en ce moment, nous allons travailler ensemble avec les Espagnols pour faire progresser cela parce que c'est une condition de l'efficacité. Mais techniquement, vous avez raison, il y a des mesures qui peuvent être prises. Il y a ce qu'on appelle les scanners corporels. C'est ce qui est tenté, par exemple à Amsterdam, les Anglais y réfléchissent. Il y a aussi d'autres pistes.
Les scanners, on va les essayer ?
Le président de la République a souhaité qu'il y ait un groupe qui se mette au travail, qui dans un délai très rapproché, moins d'un mois, fasse des propositions. Je vous dis très clairement, il y a, d'un côté, les scanners corporels qui permettent de voir effectivement beaucoup de choses, il y a aussi des appareils qui détectent les traces de poudre et d'explosifs, et puis il y a les chiens qui sont très efficaces, j'ai pu d'ailleurs aussi constater cette efficacité lorsque je me suis rendu à Charles de Gaulle.
Et dans quels délais vous voulez appliquer tout ça ?
Un certain nombre est déjà engagé, la plupart de ces mesures sont déjà engagées. Concernant les mesures techniques, scanners corporels ou détecteurs de traces d'explosifs, ça sera tranché dans moins d'un mois. Il y a aussi un élément très important, c'est la qualité des services de renseignement, puisque le Renseignement est un élément essentiel de la lutte contre le terrorisme.
Et contre qui l'Europe est-elle aujourd'hui en guerre ?
Mais l'Europe n'est pas en guerre, mais elle est vigilante parce que la menace, encore une fois, est bien réelle.
Hier, le président de la République a demandé aussi à tous ses ministres de travailler dur, de faire preuve d'audace et de prendre des risques. En 2010, le ministre de l'Intérieur, B. Hortefeux, demande-t-il aux policiers d'être encore plus sévères, plus performants ? Est-ce que vous voulez aggraver l'obsession de la politique du chiffre ?
D'abord, je ne pratique pas la politique du chiffre, je revendique en revanche autre chose. Je revendique la culture du résultat, et je l'assume d'ailleurs totalement.
Ca revient au même.
Non, pas du tout. Je l'assume totalement, parce que ma mission, fixée par le président de la République avec le Premier, elle est très simple, c'est : de préserver la tranquillité de nos concitoyens et d'assurer leur sécurité.
Donc, les policiers ont la pression de leurs chefs, la hiérarchie subit la pression de B. Hortefeux, qui est lui-même sous la pression du président de la République ? C'est sans fin ! Et on arrive à un point, c'est que les gens sont mécontents et les policiers sont mal vus, et même impopulaires !
Je suis en total désaccord avec ce que vous venez de dire...
C'est normal étant donné votre fonction.
...au contraire, les forces de sécurité, l'immense majorité de nos concitoyens comprennent la mission qui est la leur, qui est une mission essentielle à la cohésion de notre société. Quand vous dires "on travaille sous pression", mais bien sûr qu'on travaille sous pression, on travaille tous sous pression. Vous ne travaillez pas sous pression, vous ? ! On est tous sous pression ! Sous pression, pourquoi ? Pour obtenir les objectifs qui nous sont fixés. Ca signifie... Moi j'ai un objectif simple, c'est de lutter contre la délinquance. Est-ce qu'aujourd'hui tout est réglé ? A l'évidence non. Est-ce que ça s'améliore ? A l'évidence, oui.
On va prendre des exemples tout à l'heure. Mais on voit, c'est vrai, que les policiers sont parfois mal considérés, et pourtant ils prennent des risques, au péril de leur vie, on a vu ce brigadier de police tué en mission dont les obsèques ont lieu d'ailleurs, précisément ce matin.
Oui, d'ailleurs en quittant les studios d'Europe 1, je me rends à ces obsèques, je suis d'ailleurs allé voir la famille il y a quelques jours, j'ai vu ses collègues. Et je vous le dis, je suis un peu surpris, parce que, quand il y a une attaque, un fourgon, quelque chose de cette nature, on en fait des pages et des pages, et souvent des grands sujets. Quand un policier est tué, assassiné dans l'exercice des ses fonctions, comme ça a été le cas pour ce brigadier major, point. Qui a été de fait bloqué par des cinglés qui cambriolaient une maison, ils étaient venus interrompre ce cambriolage, ils l'ont projeté contre la paroi d'un parking, ils l'ont écrasé ! Il agonisé pendant trois jours. J'ai trouvé franchement qu'on en avait assez peu parlé, ça faisait une demi ligne dans les journaux, une demi phrase dans les radios ! Effectivement, j'aimerais que l'émotion soit davantage partagée.
Est-ce qu'on peut gérer la police ou une administration comme une entreprise privée ? Des primes, des récompenses, pour ceux qui sanctionnent le plus ?
Là aussi, la situation est très simple : quand on travaille, quand on assume sa mission, quand on obtient des résultats, il est normal qu'on soit récompensé et stimulé.
Alors, on prend deux exemples : à Cassis, un fourgon de transport de fonds a été attaqué de façon spectaculaire. D'abord, est-ce que vous savez qui sont les auteurs, où ils sont, est-ce qu'ils proviennent de la région PACA, de la région parisienne, M. Le ministre de l'Intérieur ?
Les attaques de fourgons, c'est une autre forme de délinquance, cela relève du grand banditisme. Et ce type d'attaque d'ailleurs est en très forte diminution. On en parle, c'est à juste titre. Mais il faut savoir que dans les années 2000, ça tournait en moyenne autour d'une vingtaine, il y en avait 24 en 2000, il y en a eu 2 l'année dernière.
Pardon, simple précision : un commando organisé, cagoulé, armé, des professionnels qui barbent la police ?
Sur l'origine, c'est essentiellement de la région parisienne, du Nord ou de Provence-Alpes-Côte d'Azur. Souvent - cela dit, je ne sais pas concernant cette affaire strictement, mais globalement - souvent, ils bénéficient d'informations provenant d'agents de la société de convoyeurs ou d'anciens agents de sociétés de convoyeurs, et généralement, ils sont très bien armés.
C'est le cas, là ?
En tout cas, bien équipés et bien armés, oui.
Ce sont des Français ?
C'est trop tôt pour le dire...
Et vous ne pouvez pas réduire les trafics d'armes, ou en tout cas débusquer les trafiquants d'armes ?
On a engagé une action très importante dans ce domaine. Effectivement, il y a un problème de trafic d'armes ; aujourd'hui, les armes proviennent dans leur grande majorité de différentes zones : ça vient des pays de l'Est, ça vient des Balkans, ça vient de l'ex- Yougoslavie, ça provient aussi de cambriolages, et d'ailleurs de collectionneurs. La législation dans notre pays est aujourd'hui trop complexe. Très rapidement, il y a huit catégories d'armes, ça signifie très concrètement que pour les honnêtes gens, les chasseurs, ça c'est très tatillon et totalement inefficace pour les trafiquants, il faut donc bouger les choses. Il y a plusieurs possibilités, notamment en appliquant....
Il y a les attaques à l'explosif de bureaux de Poste et de distributeurs de billets de banque qui se multiplient surtout dans le 9-3, en plein jour, il paraît que c'est une tendance nouvelle. Que faites-vous contre cette bande ou ces bandes différentes ?
Concernant l'attaque de la Banque Postale, c'est un autre type de délinquance, qui s'apparente en réalité à la délinquance de proximité, avec d'ailleurs un professionnalisme qui est assez limité. D'ailleurs, dans cette affaire, des billets ont été déchiquetés, on sent que ce ne sont pas des professionnels. L'enquête est confiée aujourd'hui à la Préfecture de police ; dans le cadre du fourgon, c'est la police judiciaire. Là, dans cette affaire en région parisienne, c'est la Préfecture de police, et d'ailleurs il y a eu hier soir une réunion entre les responsables de La Poste et la Préfecture de police pour déterminer à la fois les initiatives pour prévenir, et en même temps pour interpeller.
Ce n'est pas le signe de l'échec de la politique actuelle de la Ville ?
Non, non, non. Encore une fois, sur les résultats de la délinquance, les résultats étaient mauvais en début d'année, ils se sont enrayés au mois de septembre, inversés au mois d'octobre. C'est donc un signe...
Vous allez faire mieux que Sarkozy ? En tout cas, je m'inspire de son action...
Dernière question, est-ce que cela aiderait le ministre de l'Intérieur qu'il y ait aujourd'hui une loi sur la burqa ?
Moi je me suis exprimé devant la mission parlementaire. Il y a plusieurs pistes : il y a la possibilité d'une résolution - c'est une nouvelle disposition de la Constitution, qui rappelle des principes - ; il peut y avoir aussi une loi pour définir les modalités techniques d'intervention.
Vous avez vu que les socialistes ne sont pas favorables à une loi qui interdit le port du voile intégral ?
Oui. Il y a une mission, présidée d'ailleurs par un député communiste, dont le rapporteur est un député UMP. Ils doivent rendre leurs conclusions au mois de janvier.
C'est vrai que les socialistes vont rafler toutes les régions ? Là, j'ai le ministre de l'Intérieur, je ne peux pas m'empêcher de poser la question ?
Les socialistes font preuve d'une arrogance hallucinante. Ils ont déjà 20 régions sur 22. Ils veulent la totalité. C'est une curieuse conception de l'équilibre de la vie démocratique.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 21 janvier 2010
A l'évidence, la menace est réelle, deux éléments nous le rappellent : il y a cette histoire bien connue de ce jeune Nigérian, le 25 décembre, qui a tenté un attentat, heureusement qui a échoué, en se rendant aux Etats- Unis ; et puis, sur notre territoire, la menace aussi existe. Je vous rappelle que le 8 octobre dernier, nous avons interpellé un individu dans l'Isère, dont l'objectif était clairement d'organiser un acte terroriste sur notre territoire. Donc, ça signifie que, si la menace est réelle, notre vigilance doit être permanent.
D'où vient la menace ?
Il y a trois types de menace terroriste sur notre territoire : il y en a deux qui sont moins connues, ce sont les menaces kurdes, les menaces de l'ETA, et surtout la menace d'extrémistes islamiques.
Qu'est-ce qui a été décidé ou mis en route quand vous vous êtes réunis, tous les spécialistes de la défense et de la sécurité, hier à l'Elysée, avec le président de la République ?
D'abord, de confirmer le niveau du plan Vigipirate, il y a plusieurs niveaux, là on est au niveau rouge, c'est-à-dire, que nous mobilisons des forces importantes aujourd'hui, notamment dans le secteur du transport aérien, qui est certainement le plus sensible, nous avons 3.800 fonctionnaires de la Police aux frontières qui sont mobilisés et un peu plus de 1.000 gendarmes, 1019, très exactement.
Et ça marche entre eux ou c'est comme aux Etats-Unis où les services de renseignement sont défaillants ?
Bien sûr, ça fonctionne, ça fonctionne très bien. Depuis le 25 décembre, j'ai aussi décidé des mesures, des mesures qui ont été immédiatement d'ailleurs appliquées, comme par exemple, le renforcement des patrouilles dans les zones aéroportuaires. Ca signifie très concrètement que, aujourd'hui, 100 % des passagers qui se rendent aux Etats-Unis à partir d'un aéroport français, c'est-à-dire, Paris, Orly, et notamment Nice, 100 % des passagers qui se rendent aux Etats-Unis font l'objet d'une fouille systématique. Je me suis d'ailleurs rendu sur place à Charles-de-Gaulle, le 30 décembre, pour mesurer l'application de ces mesures. Ca signifie qu'on a un objectif simple, notre objectif est clair, c'est de faire des aéroports français les plus sûrs d'Europe.
Est-ce que vous allez tester vous aussi les scanners, les "body scanners" que B. Obama vient d'installer partout ou veut installer partout ?
Il y a plusieurs initiatives qui doivent être engagées. D'abord, il faut à l'évidence élargir le nombre des pays à risque ; aujourd'hui, il y en a sept, il faut que sans doute on monte entre 20 et 30. Pour vous donner des exemples - on ne va pas donner toute la liste, bien sûr - mais ça concerne le Yémen, l'Afghanistan, l'Iran, le Pakistan, le Mali. Cela ne signifie pas que ces gouvernements cautionnent le terrorisme, mais parfois qu'ils n'ont pas les moyens de lutter contre le terrorisme, comme par exemple au Mali. Ensuite, il faut recueillir le plus grand nombre d'informations possible au moment de l'embarquement. Et j'ai décidé qu'à compter du 1er janvier, les compagnies qui ne donneraient pas la liste de leurs passagers avec les éléments seraient sanctionnées financièrement.
Dès la réservation ?
Non, à ce stade. C'est au moment de l'embarquement. Les compagnies sont assujetties à une amende de 50.000 euros, et je veillerai à ce que cette amende soit pleinement recouvrée, c'est une question de sécurité importante. Et puis il y a une troisième mesure, effectivement, c'est sans doute d'avancer vers la possibilité d'obtenir des renseignements dès la réservation. Cela signifie qu'il faut qu'il y ait une initiative européenne, c'est une présidence espagnole en ce moment, nous allons travailler ensemble avec les Espagnols pour faire progresser cela parce que c'est une condition de l'efficacité. Mais techniquement, vous avez raison, il y a des mesures qui peuvent être prises. Il y a ce qu'on appelle les scanners corporels. C'est ce qui est tenté, par exemple à Amsterdam, les Anglais y réfléchissent. Il y a aussi d'autres pistes.
Les scanners, on va les essayer ?
Le président de la République a souhaité qu'il y ait un groupe qui se mette au travail, qui dans un délai très rapproché, moins d'un mois, fasse des propositions. Je vous dis très clairement, il y a, d'un côté, les scanners corporels qui permettent de voir effectivement beaucoup de choses, il y a aussi des appareils qui détectent les traces de poudre et d'explosifs, et puis il y a les chiens qui sont très efficaces, j'ai pu d'ailleurs aussi constater cette efficacité lorsque je me suis rendu à Charles de Gaulle.
Et dans quels délais vous voulez appliquer tout ça ?
Un certain nombre est déjà engagé, la plupart de ces mesures sont déjà engagées. Concernant les mesures techniques, scanners corporels ou détecteurs de traces d'explosifs, ça sera tranché dans moins d'un mois. Il y a aussi un élément très important, c'est la qualité des services de renseignement, puisque le Renseignement est un élément essentiel de la lutte contre le terrorisme.
Et contre qui l'Europe est-elle aujourd'hui en guerre ?
Mais l'Europe n'est pas en guerre, mais elle est vigilante parce que la menace, encore une fois, est bien réelle.
Hier, le président de la République a demandé aussi à tous ses ministres de travailler dur, de faire preuve d'audace et de prendre des risques. En 2010, le ministre de l'Intérieur, B. Hortefeux, demande-t-il aux policiers d'être encore plus sévères, plus performants ? Est-ce que vous voulez aggraver l'obsession de la politique du chiffre ?
D'abord, je ne pratique pas la politique du chiffre, je revendique en revanche autre chose. Je revendique la culture du résultat, et je l'assume d'ailleurs totalement.
Ca revient au même.
Non, pas du tout. Je l'assume totalement, parce que ma mission, fixée par le président de la République avec le Premier, elle est très simple, c'est : de préserver la tranquillité de nos concitoyens et d'assurer leur sécurité.
Donc, les policiers ont la pression de leurs chefs, la hiérarchie subit la pression de B. Hortefeux, qui est lui-même sous la pression du président de la République ? C'est sans fin ! Et on arrive à un point, c'est que les gens sont mécontents et les policiers sont mal vus, et même impopulaires !
Je suis en total désaccord avec ce que vous venez de dire...
C'est normal étant donné votre fonction.
...au contraire, les forces de sécurité, l'immense majorité de nos concitoyens comprennent la mission qui est la leur, qui est une mission essentielle à la cohésion de notre société. Quand vous dires "on travaille sous pression", mais bien sûr qu'on travaille sous pression, on travaille tous sous pression. Vous ne travaillez pas sous pression, vous ? ! On est tous sous pression ! Sous pression, pourquoi ? Pour obtenir les objectifs qui nous sont fixés. Ca signifie... Moi j'ai un objectif simple, c'est de lutter contre la délinquance. Est-ce qu'aujourd'hui tout est réglé ? A l'évidence non. Est-ce que ça s'améliore ? A l'évidence, oui.
On va prendre des exemples tout à l'heure. Mais on voit, c'est vrai, que les policiers sont parfois mal considérés, et pourtant ils prennent des risques, au péril de leur vie, on a vu ce brigadier de police tué en mission dont les obsèques ont lieu d'ailleurs, précisément ce matin.
Oui, d'ailleurs en quittant les studios d'Europe 1, je me rends à ces obsèques, je suis d'ailleurs allé voir la famille il y a quelques jours, j'ai vu ses collègues. Et je vous le dis, je suis un peu surpris, parce que, quand il y a une attaque, un fourgon, quelque chose de cette nature, on en fait des pages et des pages, et souvent des grands sujets. Quand un policier est tué, assassiné dans l'exercice des ses fonctions, comme ça a été le cas pour ce brigadier major, point. Qui a été de fait bloqué par des cinglés qui cambriolaient une maison, ils étaient venus interrompre ce cambriolage, ils l'ont projeté contre la paroi d'un parking, ils l'ont écrasé ! Il agonisé pendant trois jours. J'ai trouvé franchement qu'on en avait assez peu parlé, ça faisait une demi ligne dans les journaux, une demi phrase dans les radios ! Effectivement, j'aimerais que l'émotion soit davantage partagée.
Est-ce qu'on peut gérer la police ou une administration comme une entreprise privée ? Des primes, des récompenses, pour ceux qui sanctionnent le plus ?
Là aussi, la situation est très simple : quand on travaille, quand on assume sa mission, quand on obtient des résultats, il est normal qu'on soit récompensé et stimulé.
Alors, on prend deux exemples : à Cassis, un fourgon de transport de fonds a été attaqué de façon spectaculaire. D'abord, est-ce que vous savez qui sont les auteurs, où ils sont, est-ce qu'ils proviennent de la région PACA, de la région parisienne, M. Le ministre de l'Intérieur ?
Les attaques de fourgons, c'est une autre forme de délinquance, cela relève du grand banditisme. Et ce type d'attaque d'ailleurs est en très forte diminution. On en parle, c'est à juste titre. Mais il faut savoir que dans les années 2000, ça tournait en moyenne autour d'une vingtaine, il y en avait 24 en 2000, il y en a eu 2 l'année dernière.
Pardon, simple précision : un commando organisé, cagoulé, armé, des professionnels qui barbent la police ?
Sur l'origine, c'est essentiellement de la région parisienne, du Nord ou de Provence-Alpes-Côte d'Azur. Souvent - cela dit, je ne sais pas concernant cette affaire strictement, mais globalement - souvent, ils bénéficient d'informations provenant d'agents de la société de convoyeurs ou d'anciens agents de sociétés de convoyeurs, et généralement, ils sont très bien armés.
C'est le cas, là ?
En tout cas, bien équipés et bien armés, oui.
Ce sont des Français ?
C'est trop tôt pour le dire...
Et vous ne pouvez pas réduire les trafics d'armes, ou en tout cas débusquer les trafiquants d'armes ?
On a engagé une action très importante dans ce domaine. Effectivement, il y a un problème de trafic d'armes ; aujourd'hui, les armes proviennent dans leur grande majorité de différentes zones : ça vient des pays de l'Est, ça vient des Balkans, ça vient de l'ex- Yougoslavie, ça provient aussi de cambriolages, et d'ailleurs de collectionneurs. La législation dans notre pays est aujourd'hui trop complexe. Très rapidement, il y a huit catégories d'armes, ça signifie très concrètement que pour les honnêtes gens, les chasseurs, ça c'est très tatillon et totalement inefficace pour les trafiquants, il faut donc bouger les choses. Il y a plusieurs possibilités, notamment en appliquant....
Il y a les attaques à l'explosif de bureaux de Poste et de distributeurs de billets de banque qui se multiplient surtout dans le 9-3, en plein jour, il paraît que c'est une tendance nouvelle. Que faites-vous contre cette bande ou ces bandes différentes ?
Concernant l'attaque de la Banque Postale, c'est un autre type de délinquance, qui s'apparente en réalité à la délinquance de proximité, avec d'ailleurs un professionnalisme qui est assez limité. D'ailleurs, dans cette affaire, des billets ont été déchiquetés, on sent que ce ne sont pas des professionnels. L'enquête est confiée aujourd'hui à la Préfecture de police ; dans le cadre du fourgon, c'est la police judiciaire. Là, dans cette affaire en région parisienne, c'est la Préfecture de police, et d'ailleurs il y a eu hier soir une réunion entre les responsables de La Poste et la Préfecture de police pour déterminer à la fois les initiatives pour prévenir, et en même temps pour interpeller.
Ce n'est pas le signe de l'échec de la politique actuelle de la Ville ?
Non, non, non. Encore une fois, sur les résultats de la délinquance, les résultats étaient mauvais en début d'année, ils se sont enrayés au mois de septembre, inversés au mois d'octobre. C'est donc un signe...
Vous allez faire mieux que Sarkozy ? En tout cas, je m'inspire de son action...
Dernière question, est-ce que cela aiderait le ministre de l'Intérieur qu'il y ait aujourd'hui une loi sur la burqa ?
Moi je me suis exprimé devant la mission parlementaire. Il y a plusieurs pistes : il y a la possibilité d'une résolution - c'est une nouvelle disposition de la Constitution, qui rappelle des principes - ; il peut y avoir aussi une loi pour définir les modalités techniques d'intervention.
Vous avez vu que les socialistes ne sont pas favorables à une loi qui interdit le port du voile intégral ?
Oui. Il y a une mission, présidée d'ailleurs par un député communiste, dont le rapporteur est un député UMP. Ils doivent rendre leurs conclusions au mois de janvier.
C'est vrai que les socialistes vont rafler toutes les régions ? Là, j'ai le ministre de l'Intérieur, je ne peux pas m'empêcher de poser la question ?
Les socialistes font preuve d'une arrogance hallucinante. Ils ont déjà 20 régions sur 22. Ils veulent la totalité. C'est une curieuse conception de l'équilibre de la vie démocratique.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 21 janvier 2010