Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Nous voici au terme de cette conférence dense, brillamment animée par Jean-Louis CAFFIER que je remercie pour son implication dans cette thématique.
Notre matinée a été particulièrement riche et je souhaite vraiment remercier mes collègues ministres, Jean-Louis Borloo pour son intervention tout d'abord, et Martin Hirsch, qui a accepté de jouer le jeu du dialogue et de la confrontation d'idées. Merci également à tous nos intervenants qui ont, chacun, exposé avec clarté et concision leur point de vue. Je voudrais saluer plus particulièrement tous les membres du Comité National de pilotage et des 11 comités de filière qui ont assisté à ces échanges, après avoir nourri de leurs travaux l'essentiel de notre réflexion.
Merci enfin à vous tous d'être venus nombreux, votre présence témoigne de l'importance que vous accordez aux métiers de la croissance verte.
Permettez-moi de saluer tout particulièrement le travail considérable des comités de filière et du comité de pilotage national.
Ce sont 400 personnes, professionnels, partenaires sociaux, élus, représentants associatifs, représentants de l'Etat, qui ont travaillé d'arrache-pied dans la gouvernance à cinq. Ils sont parvenus à faire émerger, à partir de données éparses et pas toujours faciles à rassembler, un constat partagé de la situation de l'emploi sous l'angle de la croissance verte.
La conférence que nous venons de vivre et tout ce que nous avons entendu des uns et des autres nous permet de mesurer le chemin déjà parcouru dans la réflexion et les propositions, depuis le lancement du plan en septembre. Elle permet surtout de mesurer le chemin qui reste à parcourir car ce n'est pas en 5 mois qu'on peut résoudre l'ensemble des difficultés que nous avons identifiées par ce travail de coopération et de concertation.
Nous allons donc poursuivre ce travail. A cet effet, je vais réunir le comité de pilotage national le 23 février prochain.
Permettez-moi, avant de vous présenter ce que seront les grandes lignes du plan de mobilisation, de vous informer que notre démarche s'inscrit dans un cadre plus large de ce que nous appelons la solidarité écologique.
* Au moment où l'ensemble des énergies se conjuguent pour sortir de la crise, au moment où quelques éclaircies apparaissent sur le front du chômage,
* au moment où nous sentons une immense prise de conscience des enjeux de la protection de l'environnement - et c'est heureux car nous sommes entrés dans l'année internationale de la biodiversité,
Pourquoi lancer cette réflexion sur la solidarité écologique ?
Parce que - et Jean-Louis Borloo l'a rappelé dans son propos- le Grenelle de l'environnement porte une exigence de profonde mutation de notre modèle de développement. Nous avons la conviction que nous ne réussirons pas cette mutation de notre société et de notre économie, si nous ne convainquons pas les Français que le développement durable, ce n'est pas vivre moins bien avec moins, mais que c'est au contraire vivre mieux dans notre environnement, vivre mieux dans notre travail, vivre mieux ensemble !!
« Enfant du Grenelle » comme l'a baptisé Jean-Louis mardi dernier, le « Pacte de solidarité écologique » revient aux sources même de la définition du développement durable de Madame Bruntland, c'est « concilier le développement économique, la protection de l'environnement et l'équité sociale ».
Solidarité et écologie constituent alors les deux faces d'un « Pacte de solidarité écologique » que Jean-Louis Borloo et moi souhaitons proposer comme un projet commun de la nouvelle société du développement durable. Une société au service de l'homme et sobre en ressources naturelles.
Et c'est bien d'un nouveau modèle de croissance dont il s'agit car, ne confondons pas sobriété en ressources naturelles et absence de développement !.
La croissance verte, c'est la mutation de notre modèle économique et social qui doit nous conduire vers un modèle de développement qui réponde à ces exigences. Ce n'est pas seulement le cheminement vers une économie décarbonée ou une croissance sobre en énergies fossiles, c'est aussi un nouveau regard à poser sur nos outils actuels de mesure de la richesse nationale et plus largement sur notre façon de concevoir notre développement.
C'est tout le sens du rapport qui a été commandé par le Président de la République à monsieur Stieglitz et qui vise à définir de nouveaux indices qui nous permettraient de mieux mesurer un « bonheur national brut » à la française qui évalue la richesse des nations plus finement que par leur seule production de biens et services.
C'est donc avec toutes ces réflexions en toile de fond que nous nous sommes engagés dans une démarche pour le développement des métiers de la croissance verte, dans cette société dans laquelle il reste évidemment central de créer des richesses, de la croissance et des emplois.
La France a pris toute la mesure de ces enjeux au travers du Grenelle de l'Environnement et des 450 milliards d'euros d'investissements qu'il induit.
Parce que l'emploi est la première préoccupation de nos concitoyens, mais aussi parce que des ressources humaines bien formées et en nombre suffisant constituent une condition à l'atteinte des objectifs du Grenelle, il allait de soi que c'est par là que nous devions commencer.
C'est pourquoi le plan des métiers constitue le premier pilier du projet de Pacte de solidarité écologique auquel je travaille à la demande de Jean-Louis Borloo.
Un engagement résolu de l'Etat, des partenaires sociaux et des collectivités locales est nécessaire afin de « mettre en place un véritable Plan Marshall de la formation aux compétences vertes », selon la formule employé par le COE. C'est à ce défi que le plan de mobilisation sur les métiers de la croissance verte s'emploie à répondre. Je tiens à saluer Marie-Claire Carrère-Gée, présidente du Conseil d'orientation pour l'emploi et les membres du Conseil pour le travail de qualité et le rapport qui a été rendu public en ce début de semaine.
Je voudrais également rappeler rapidement comment nous avons travaillé car cela a son importance. Nous avons repris la méthode des Grenelle installant le principe d'une gouvernance à 5 et construit un Comité national de pilotage réunissant partenaires sociaux, élus, entreprises, ONG et représentants de l'Etat. Ce comité s'est réuni 3 fois ; il a validé les axes de travail et effectué la synthèse des 11 comités de filière. qui ont travaillé de manière très concrète et pragmatique, afin d'identifier dans leur filière respective les besoins en emplois et en formation suscités par la croissance verte.
Forts de ce matériau, nous avons construit le plan en étant mus par trois convictions :
Première conviction : la croissance verte est porteuse de création d'emplois à condition qu'on se donne les moyens pour former et adapter les compétences.
Deuxième conviction : la croissance verte doit permettre, dans un contexte tendu de concurrence internationale, de favoriser la compétitivité des entreprises tout en étant préoccupés par les questions de solidarité.
Troisième conviction : tout se joue avec les acteurs de terrain dont beaucoup se sont déjà engagés dans des démarches de valorisation des emplois de la croissance verte.
C'est sur ces convictions que nous avons bâti un plan en trois axes :
- tout d'abord construire une stratégie nationale
- ensuite accompagner la mobilisation des filières
- enfin assurer le développement territorial des métiers.
I. Quelle est la stratégie nationale que nous entendons mettre en oeuvre ?
Il faut mieux connaître ces métiers, mieux organiser l'orientation des actifs vers ces métiers et en tirer les conséquences sur l'appareil de formation.
Les comités de filières estiment que la croissance verte va impacter près de 12 millions d'actifs, soit un Français sur deux et que l'on peut s'attendre à la création de plus de 600 000 emplois d'ici 2020. Nous en avons fait le constat qui converge notamment avec le rapport du Conseil d'orientation pour l'emploi, l'étude du Conseil d'analyse stratégique et dans une large mesure, avec les premières conclusions des études des cabinets Syndex et Alpha. Ce constat, c'est celui d'une progression du nombre d'emplois grâce à la croissance verte pour un certain nombre de filières. J'en citerai quatre exemples : nous attendons 225 000 nouveaux emplois dans les industries électriques, 200 000 dans les énergies renouvelables, 67 000 pour la réalisation de nouvelles infrastructures - la création notamment des nouvelles lignes à grande vitesse -, entre 39 et 43 000 dans le secteur de l'eau.
Et pour toutes, il y aura au minimum un maintien de l'emploi : ce sera le cas notamment dans les secteurs du bâtiment, de l'automobile et de la chimie verte. Je crois que ce premier constat est important car pour la première fois une évolution économique majeure ne devrait pas se traduire par des restrictions d'emploi. Dans la période de crise que nous traversons, c'est un message d'espoir en particulier pour tous nos jeunes.
Il est donc important de mieux identifier ces métiers, de connaître plus précisément leur nombre et de pouvoir définir en vis à vis quelles compétences et quel niveau de qualification seront nécessaires pour occuper ces emplois.
C'est pourquoi nous avons retenu l'idée de constituer un observatoire national des métiers de la croissance verte. Celui-ci sera placé sous l'autorité du Ministre d'Etat et aura vocation à conduire des études prospectives et à travailler en lien avec les observatoires existants dans les branches professionnelles ou en région.
Chacun s'accorde également à reconnaître que, si la croissance verte ne créera que peu de métiers vraiment nouveaux, par contre elle implique la transformation et la valorisation de très nombreux métiers existants. Cela va nécessiter de faire évoluer de manière conséquente la définition et même pour certains, la dénomination de certains métiers, de créer un répertoire unique des compétences et des certifications des métiers de la croissance verte. Pour certains d'entre eux, il faudra également opérer « un renversement d'image » car les métiers, par exemple du recyclage ou de la déconstruction automobile, assimilés à l'heure actuelle à des métiers « vieux » et peu valorisants vont connaître un nouvel essor avec le besoin que nous aurons de recycler de manière systématique toutes les matières premières. Cela demandera d'inventer de nouveaux processus, de la recherche et de la créativité.
Cela nous amènera à des actions de promotion, de sensibilisation et d'information en direction à la fois du grand public, mais aussi des prescripteurs de l'orientation et des professionnels. Le service public d'orientation devra prendre en compte, comme l'a précisé Martin Hirsch tout à l'heure, ces nouveaux métiers.
Ensuite, évidemment il ne suffit pas d'identifier de nouveaux besoins : encore faut-il que notre dispositif de formation se mette en mouvement. Il doit le faire à deux niveaux :
* au niveau de la formation initiale, nous travaillons en lien avec Luc Châtel pour adapter les programmes et les diplômes aux nouvelles réalités des métiers, à développer des socles communs de compétences pour les métiers qui seront appelés à travailler ensemble. Par exemple, lors d'une visite de terrain avec les professionnels, il m'a été souligné que le manque de référentiel de qualification était un obstacle à l'embauche de salariés par les entreprises pour la pose de panneaux photovoltaïques. Dès la prochaine rentrée scolaire, l'éducation nationale proposera une mention complémentaire « technicien en énergies renouvelables » au bac pro électrotechnique et énergétique.
Dans l'enseignement supérieur, Valérie Pécresse souhaite que les exigences du développement durable soient intégrées dans les critères d'habilitation des formations supérieures.
* Au niveau de la formation continue, il faut à la fois introduire des modules généraux de sensibilisation au développement durable dans toutes les formations et parallèlement compléter par des modules spécifiques des formations généralistes (je pense en particulier aux métiers du bâtiment par exemple) pour leur donner la spécialisation nécessaire pour exercer un métier « verdi ».
Nous proposons également de donner de la visibilité aux organismes de formation qui intègrent dans leurs programmes et leurs pratiques le développement durable par la création d'un label.
II. Deuxième axe, comment accompagner la mobilisation des filières ?
Le plan de mobilisation des filières et des territoires, a vocation à accompagner les entreprises et les salariés dans leur effort de valorisation des compétences et de promotion sociale dans des emplois de qualité. Je suis convaincue, comme vous, qu'il faut engager un vaste plan d'adaptation des compétences associant les entreprises, les branches professionnelles et naturellement l'Etat. C'est un plan qui doit être ciblé sur des formations précises et faire appel à des méthodes innovantes comme par exemple l'e-learning. C'est pourquoi une des prochaines missions des comités de filière sera de bâtir des plans d'action pour le développement des emplois et des compétences. Nous en parlerons le 23 février prochain.
Avec Jean-Louis BORLOO, nous avons demandé que 100 Meuros du grand emprunt soient consacrés à adapter dans un temps restreint les compétences de main d'oeuvre aux mutations technologiques liées à la croissance verte.
D'ores et déjà, pour le bâtiment, je puis vous annoncer la prorogation jusqu'en 2012, du financement du Feebat (fonds des économies d'énergie dans le bâtiment) grâce aux produits des certificats d'économie d'énergie. Nous comptons mobiliser ainsi 55 Meuros qui permettront de former 120 000 personnes.
Les gisements d'emplois de la croissance verte doivent constituer une opportunité pour l'accès des publics les plus en difficulté sur le marché du travail. Je dois remercier Claude Alphandéry, à qui j'ai confié une mission de réflexion sur ce sujet. Pour cela, il faut organiser des parcours d'accès à l'emploi vers des secteurs en développement qui permettent d'alterner des périodes de travail et de formation dans un cadre adapté. A cet effet, nous allons soutenir l'orientation des structures d'insertion par l'activité économique vers les activités liées à la croissance verte, comme le recyclage ou la gestion de la biodiversité et mobiliser les contrats aidés prévoyant une période en entreprise.
III. Troisième axe, quelle dynamique pour les territoires
Nous ne réussirons la mobilisation nécessaire que dans le cadre d'un partenariat avec les acteurs de terrain. Les compétences des collectivités territoriales, et spécialement des Régions dans le développement économique et la formation professionnelle en font des acteurs de premier niveau du développement des emplois de la croissance verte.
Pour l'avoir expérimenté en matière de développement des métiers du médico-social, je sais que ce partenariat peut se construire et qu'il est efficace et fécond.
Tout d'abord, nous allons proposer aux régions qui en ont l'initiative, qu'un volet lié aux formations du développement durable soit intégré dans les contrats de plans régionaux de développement de la formation, issus de la loi sur la formation professionnelle tout au long de la vie du 24 novembre derniers.
Par ailleurs l'Etat proposera aux régions volontaires, dans le cadre d'un appel à projets, d'associer leurs efforts pour mieux mobiliser les territoires et articuler démarche nationale et démarche locale.
Des conventions pourront être conclues entre l'Etat et les régions et le cas échéant, avec les branches professionnelles. II leur sera proposé deux boîtes à outils : une boîte à outils commune comprenant des mesures identifiées et une boîte à outils offrant des possibilités d'expérimentation de projets innovants.
La boîte à outils commune comprendra notamment un fonds d'appui à la mobilisation régionale en cofinancement, une fonction observatoire régional des métiers de la croissance verte adossée aux observatoires régionaux de l'emploi et de la formation, un diagnostic régional des emplois de la croissance verte en lien avec les maisons de l'emploi et un centre de ressources régional pour les professionnels sur les métiers de la croissance verte animé par des « conseillers grenelle pro ». L'ADEME amplifiera le développement de ces conseillers en contribuant à leur prise en charge à hauteur de 14 Meuros.
En complément, lorsque des projets innovants seront identifiés, et s'ils s'intègrent dans la démarche, ils pourront être cofinancés par le fond d'appui. Je mentionnerai à titre d'illustration : la refonte des formations des professionnels participant à une même chaîne de production; la réalisation de télé-centres dédiés au télétravail ou le développement d'actions de sensibilisation transversales associant donneurs d'ordre, entreprises et formateurs.
La démarche sera mise en oeuvre sur la base d'un cahier des charges visant notamment à favoriser les projets en direction des populations des quartiers sensibles et prenant en compte l'insertion par l'activité économique, tant des personnes handicapées que des personnes éloignées de l'emploi. Une attention soutenue sera portée aux projets proposés par les départements d'outre-mer.
Pour ce volet, nous avons, avec Jean-Louis, demandé de pouvoir mobiliser 200 millions d'euros au titre du grand emprunt.
En conclusion, il me semble que si chacun d'entre vous sort de cette conférence avec la volonté de contribuer à cet élan de la croissance verte et de participer activement à cette mobilisation dans son champ d'activité, alors le résultat que nous recherchons aura été atteint. Les périodes de grande mutation sont des périodes d'incertitude et de doute, mais ce sont aussi, pour qui sait les saisir, des moments où se présentent les plus belles opportunités.
Et voilà les quatre messages que je voudrais porter auprès du monde économique, auprès des familles, des jeunes, des salariés et des personnes en recherche d'emplois.
# Le développement durable doit être un facteur de croissance créatrice d'emplois ;
# Le développement durable doit être un facteur de promotion sociale pour les salariés
# Le développement durable doit être un facteur de qualité de travail
# Il doit aussi être un facteur d'insertion pour les personnes éloignées de l'emploi.
Tout ce que nous avons entendus ce matin nous prouve que c'est possible, que cette nouvelle société, une société sobre en ressources naturelles et au service de l'homme, est à portée de main.
A nous collectivement de savoir saisir cette opportunité unique pour que réussisse la France et tous les français.
Je vous remercie.
Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 28 janvier 2010
Nous voici au terme de cette conférence dense, brillamment animée par Jean-Louis CAFFIER que je remercie pour son implication dans cette thématique.
Notre matinée a été particulièrement riche et je souhaite vraiment remercier mes collègues ministres, Jean-Louis Borloo pour son intervention tout d'abord, et Martin Hirsch, qui a accepté de jouer le jeu du dialogue et de la confrontation d'idées. Merci également à tous nos intervenants qui ont, chacun, exposé avec clarté et concision leur point de vue. Je voudrais saluer plus particulièrement tous les membres du Comité National de pilotage et des 11 comités de filière qui ont assisté à ces échanges, après avoir nourri de leurs travaux l'essentiel de notre réflexion.
Merci enfin à vous tous d'être venus nombreux, votre présence témoigne de l'importance que vous accordez aux métiers de la croissance verte.
Permettez-moi de saluer tout particulièrement le travail considérable des comités de filière et du comité de pilotage national.
Ce sont 400 personnes, professionnels, partenaires sociaux, élus, représentants associatifs, représentants de l'Etat, qui ont travaillé d'arrache-pied dans la gouvernance à cinq. Ils sont parvenus à faire émerger, à partir de données éparses et pas toujours faciles à rassembler, un constat partagé de la situation de l'emploi sous l'angle de la croissance verte.
La conférence que nous venons de vivre et tout ce que nous avons entendu des uns et des autres nous permet de mesurer le chemin déjà parcouru dans la réflexion et les propositions, depuis le lancement du plan en septembre. Elle permet surtout de mesurer le chemin qui reste à parcourir car ce n'est pas en 5 mois qu'on peut résoudre l'ensemble des difficultés que nous avons identifiées par ce travail de coopération et de concertation.
Nous allons donc poursuivre ce travail. A cet effet, je vais réunir le comité de pilotage national le 23 février prochain.
Permettez-moi, avant de vous présenter ce que seront les grandes lignes du plan de mobilisation, de vous informer que notre démarche s'inscrit dans un cadre plus large de ce que nous appelons la solidarité écologique.
* Au moment où l'ensemble des énergies se conjuguent pour sortir de la crise, au moment où quelques éclaircies apparaissent sur le front du chômage,
* au moment où nous sentons une immense prise de conscience des enjeux de la protection de l'environnement - et c'est heureux car nous sommes entrés dans l'année internationale de la biodiversité,
Pourquoi lancer cette réflexion sur la solidarité écologique ?
Parce que - et Jean-Louis Borloo l'a rappelé dans son propos- le Grenelle de l'environnement porte une exigence de profonde mutation de notre modèle de développement. Nous avons la conviction que nous ne réussirons pas cette mutation de notre société et de notre économie, si nous ne convainquons pas les Français que le développement durable, ce n'est pas vivre moins bien avec moins, mais que c'est au contraire vivre mieux dans notre environnement, vivre mieux dans notre travail, vivre mieux ensemble !!
« Enfant du Grenelle » comme l'a baptisé Jean-Louis mardi dernier, le « Pacte de solidarité écologique » revient aux sources même de la définition du développement durable de Madame Bruntland, c'est « concilier le développement économique, la protection de l'environnement et l'équité sociale ».
Solidarité et écologie constituent alors les deux faces d'un « Pacte de solidarité écologique » que Jean-Louis Borloo et moi souhaitons proposer comme un projet commun de la nouvelle société du développement durable. Une société au service de l'homme et sobre en ressources naturelles.
Et c'est bien d'un nouveau modèle de croissance dont il s'agit car, ne confondons pas sobriété en ressources naturelles et absence de développement !.
La croissance verte, c'est la mutation de notre modèle économique et social qui doit nous conduire vers un modèle de développement qui réponde à ces exigences. Ce n'est pas seulement le cheminement vers une économie décarbonée ou une croissance sobre en énergies fossiles, c'est aussi un nouveau regard à poser sur nos outils actuels de mesure de la richesse nationale et plus largement sur notre façon de concevoir notre développement.
C'est tout le sens du rapport qui a été commandé par le Président de la République à monsieur Stieglitz et qui vise à définir de nouveaux indices qui nous permettraient de mieux mesurer un « bonheur national brut » à la française qui évalue la richesse des nations plus finement que par leur seule production de biens et services.
C'est donc avec toutes ces réflexions en toile de fond que nous nous sommes engagés dans une démarche pour le développement des métiers de la croissance verte, dans cette société dans laquelle il reste évidemment central de créer des richesses, de la croissance et des emplois.
La France a pris toute la mesure de ces enjeux au travers du Grenelle de l'Environnement et des 450 milliards d'euros d'investissements qu'il induit.
Parce que l'emploi est la première préoccupation de nos concitoyens, mais aussi parce que des ressources humaines bien formées et en nombre suffisant constituent une condition à l'atteinte des objectifs du Grenelle, il allait de soi que c'est par là que nous devions commencer.
C'est pourquoi le plan des métiers constitue le premier pilier du projet de Pacte de solidarité écologique auquel je travaille à la demande de Jean-Louis Borloo.
Un engagement résolu de l'Etat, des partenaires sociaux et des collectivités locales est nécessaire afin de « mettre en place un véritable Plan Marshall de la formation aux compétences vertes », selon la formule employé par le COE. C'est à ce défi que le plan de mobilisation sur les métiers de la croissance verte s'emploie à répondre. Je tiens à saluer Marie-Claire Carrère-Gée, présidente du Conseil d'orientation pour l'emploi et les membres du Conseil pour le travail de qualité et le rapport qui a été rendu public en ce début de semaine.
Je voudrais également rappeler rapidement comment nous avons travaillé car cela a son importance. Nous avons repris la méthode des Grenelle installant le principe d'une gouvernance à 5 et construit un Comité national de pilotage réunissant partenaires sociaux, élus, entreprises, ONG et représentants de l'Etat. Ce comité s'est réuni 3 fois ; il a validé les axes de travail et effectué la synthèse des 11 comités de filière. qui ont travaillé de manière très concrète et pragmatique, afin d'identifier dans leur filière respective les besoins en emplois et en formation suscités par la croissance verte.
Forts de ce matériau, nous avons construit le plan en étant mus par trois convictions :
Première conviction : la croissance verte est porteuse de création d'emplois à condition qu'on se donne les moyens pour former et adapter les compétences.
Deuxième conviction : la croissance verte doit permettre, dans un contexte tendu de concurrence internationale, de favoriser la compétitivité des entreprises tout en étant préoccupés par les questions de solidarité.
Troisième conviction : tout se joue avec les acteurs de terrain dont beaucoup se sont déjà engagés dans des démarches de valorisation des emplois de la croissance verte.
C'est sur ces convictions que nous avons bâti un plan en trois axes :
- tout d'abord construire une stratégie nationale
- ensuite accompagner la mobilisation des filières
- enfin assurer le développement territorial des métiers.
I. Quelle est la stratégie nationale que nous entendons mettre en oeuvre ?
Il faut mieux connaître ces métiers, mieux organiser l'orientation des actifs vers ces métiers et en tirer les conséquences sur l'appareil de formation.
Les comités de filières estiment que la croissance verte va impacter près de 12 millions d'actifs, soit un Français sur deux et que l'on peut s'attendre à la création de plus de 600 000 emplois d'ici 2020. Nous en avons fait le constat qui converge notamment avec le rapport du Conseil d'orientation pour l'emploi, l'étude du Conseil d'analyse stratégique et dans une large mesure, avec les premières conclusions des études des cabinets Syndex et Alpha. Ce constat, c'est celui d'une progression du nombre d'emplois grâce à la croissance verte pour un certain nombre de filières. J'en citerai quatre exemples : nous attendons 225 000 nouveaux emplois dans les industries électriques, 200 000 dans les énergies renouvelables, 67 000 pour la réalisation de nouvelles infrastructures - la création notamment des nouvelles lignes à grande vitesse -, entre 39 et 43 000 dans le secteur de l'eau.
Et pour toutes, il y aura au minimum un maintien de l'emploi : ce sera le cas notamment dans les secteurs du bâtiment, de l'automobile et de la chimie verte. Je crois que ce premier constat est important car pour la première fois une évolution économique majeure ne devrait pas se traduire par des restrictions d'emploi. Dans la période de crise que nous traversons, c'est un message d'espoir en particulier pour tous nos jeunes.
Il est donc important de mieux identifier ces métiers, de connaître plus précisément leur nombre et de pouvoir définir en vis à vis quelles compétences et quel niveau de qualification seront nécessaires pour occuper ces emplois.
C'est pourquoi nous avons retenu l'idée de constituer un observatoire national des métiers de la croissance verte. Celui-ci sera placé sous l'autorité du Ministre d'Etat et aura vocation à conduire des études prospectives et à travailler en lien avec les observatoires existants dans les branches professionnelles ou en région.
Chacun s'accorde également à reconnaître que, si la croissance verte ne créera que peu de métiers vraiment nouveaux, par contre elle implique la transformation et la valorisation de très nombreux métiers existants. Cela va nécessiter de faire évoluer de manière conséquente la définition et même pour certains, la dénomination de certains métiers, de créer un répertoire unique des compétences et des certifications des métiers de la croissance verte. Pour certains d'entre eux, il faudra également opérer « un renversement d'image » car les métiers, par exemple du recyclage ou de la déconstruction automobile, assimilés à l'heure actuelle à des métiers « vieux » et peu valorisants vont connaître un nouvel essor avec le besoin que nous aurons de recycler de manière systématique toutes les matières premières. Cela demandera d'inventer de nouveaux processus, de la recherche et de la créativité.
Cela nous amènera à des actions de promotion, de sensibilisation et d'information en direction à la fois du grand public, mais aussi des prescripteurs de l'orientation et des professionnels. Le service public d'orientation devra prendre en compte, comme l'a précisé Martin Hirsch tout à l'heure, ces nouveaux métiers.
Ensuite, évidemment il ne suffit pas d'identifier de nouveaux besoins : encore faut-il que notre dispositif de formation se mette en mouvement. Il doit le faire à deux niveaux :
* au niveau de la formation initiale, nous travaillons en lien avec Luc Châtel pour adapter les programmes et les diplômes aux nouvelles réalités des métiers, à développer des socles communs de compétences pour les métiers qui seront appelés à travailler ensemble. Par exemple, lors d'une visite de terrain avec les professionnels, il m'a été souligné que le manque de référentiel de qualification était un obstacle à l'embauche de salariés par les entreprises pour la pose de panneaux photovoltaïques. Dès la prochaine rentrée scolaire, l'éducation nationale proposera une mention complémentaire « technicien en énergies renouvelables » au bac pro électrotechnique et énergétique.
Dans l'enseignement supérieur, Valérie Pécresse souhaite que les exigences du développement durable soient intégrées dans les critères d'habilitation des formations supérieures.
* Au niveau de la formation continue, il faut à la fois introduire des modules généraux de sensibilisation au développement durable dans toutes les formations et parallèlement compléter par des modules spécifiques des formations généralistes (je pense en particulier aux métiers du bâtiment par exemple) pour leur donner la spécialisation nécessaire pour exercer un métier « verdi ».
Nous proposons également de donner de la visibilité aux organismes de formation qui intègrent dans leurs programmes et leurs pratiques le développement durable par la création d'un label.
II. Deuxième axe, comment accompagner la mobilisation des filières ?
Le plan de mobilisation des filières et des territoires, a vocation à accompagner les entreprises et les salariés dans leur effort de valorisation des compétences et de promotion sociale dans des emplois de qualité. Je suis convaincue, comme vous, qu'il faut engager un vaste plan d'adaptation des compétences associant les entreprises, les branches professionnelles et naturellement l'Etat. C'est un plan qui doit être ciblé sur des formations précises et faire appel à des méthodes innovantes comme par exemple l'e-learning. C'est pourquoi une des prochaines missions des comités de filière sera de bâtir des plans d'action pour le développement des emplois et des compétences. Nous en parlerons le 23 février prochain.
Avec Jean-Louis BORLOO, nous avons demandé que 100 Meuros du grand emprunt soient consacrés à adapter dans un temps restreint les compétences de main d'oeuvre aux mutations technologiques liées à la croissance verte.
D'ores et déjà, pour le bâtiment, je puis vous annoncer la prorogation jusqu'en 2012, du financement du Feebat (fonds des économies d'énergie dans le bâtiment) grâce aux produits des certificats d'économie d'énergie. Nous comptons mobiliser ainsi 55 Meuros qui permettront de former 120 000 personnes.
Les gisements d'emplois de la croissance verte doivent constituer une opportunité pour l'accès des publics les plus en difficulté sur le marché du travail. Je dois remercier Claude Alphandéry, à qui j'ai confié une mission de réflexion sur ce sujet. Pour cela, il faut organiser des parcours d'accès à l'emploi vers des secteurs en développement qui permettent d'alterner des périodes de travail et de formation dans un cadre adapté. A cet effet, nous allons soutenir l'orientation des structures d'insertion par l'activité économique vers les activités liées à la croissance verte, comme le recyclage ou la gestion de la biodiversité et mobiliser les contrats aidés prévoyant une période en entreprise.
III. Troisième axe, quelle dynamique pour les territoires
Nous ne réussirons la mobilisation nécessaire que dans le cadre d'un partenariat avec les acteurs de terrain. Les compétences des collectivités territoriales, et spécialement des Régions dans le développement économique et la formation professionnelle en font des acteurs de premier niveau du développement des emplois de la croissance verte.
Pour l'avoir expérimenté en matière de développement des métiers du médico-social, je sais que ce partenariat peut se construire et qu'il est efficace et fécond.
Tout d'abord, nous allons proposer aux régions qui en ont l'initiative, qu'un volet lié aux formations du développement durable soit intégré dans les contrats de plans régionaux de développement de la formation, issus de la loi sur la formation professionnelle tout au long de la vie du 24 novembre derniers.
Par ailleurs l'Etat proposera aux régions volontaires, dans le cadre d'un appel à projets, d'associer leurs efforts pour mieux mobiliser les territoires et articuler démarche nationale et démarche locale.
Des conventions pourront être conclues entre l'Etat et les régions et le cas échéant, avec les branches professionnelles. II leur sera proposé deux boîtes à outils : une boîte à outils commune comprenant des mesures identifiées et une boîte à outils offrant des possibilités d'expérimentation de projets innovants.
La boîte à outils commune comprendra notamment un fonds d'appui à la mobilisation régionale en cofinancement, une fonction observatoire régional des métiers de la croissance verte adossée aux observatoires régionaux de l'emploi et de la formation, un diagnostic régional des emplois de la croissance verte en lien avec les maisons de l'emploi et un centre de ressources régional pour les professionnels sur les métiers de la croissance verte animé par des « conseillers grenelle pro ». L'ADEME amplifiera le développement de ces conseillers en contribuant à leur prise en charge à hauteur de 14 Meuros.
En complément, lorsque des projets innovants seront identifiés, et s'ils s'intègrent dans la démarche, ils pourront être cofinancés par le fond d'appui. Je mentionnerai à titre d'illustration : la refonte des formations des professionnels participant à une même chaîne de production; la réalisation de télé-centres dédiés au télétravail ou le développement d'actions de sensibilisation transversales associant donneurs d'ordre, entreprises et formateurs.
La démarche sera mise en oeuvre sur la base d'un cahier des charges visant notamment à favoriser les projets en direction des populations des quartiers sensibles et prenant en compte l'insertion par l'activité économique, tant des personnes handicapées que des personnes éloignées de l'emploi. Une attention soutenue sera portée aux projets proposés par les départements d'outre-mer.
Pour ce volet, nous avons, avec Jean-Louis, demandé de pouvoir mobiliser 200 millions d'euros au titre du grand emprunt.
En conclusion, il me semble que si chacun d'entre vous sort de cette conférence avec la volonté de contribuer à cet élan de la croissance verte et de participer activement à cette mobilisation dans son champ d'activité, alors le résultat que nous recherchons aura été atteint. Les périodes de grande mutation sont des périodes d'incertitude et de doute, mais ce sont aussi, pour qui sait les saisir, des moments où se présentent les plus belles opportunités.
Et voilà les quatre messages que je voudrais porter auprès du monde économique, auprès des familles, des jeunes, des salariés et des personnes en recherche d'emplois.
# Le développement durable doit être un facteur de croissance créatrice d'emplois ;
# Le développement durable doit être un facteur de promotion sociale pour les salariés
# Le développement durable doit être un facteur de qualité de travail
# Il doit aussi être un facteur d'insertion pour les personnes éloignées de l'emploi.
Tout ce que nous avons entendus ce matin nous prouve que c'est possible, que cette nouvelle société, une société sobre en ressources naturelles et au service de l'homme, est à portée de main.
A nous collectivement de savoir saisir cette opportunité unique pour que réussisse la France et tous les français.
Je vous remercie.
Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 28 janvier 2010