Interview de M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'Etat à l'emploi, à "Canal plus" le 31 août 2010, sur la politique de sécurité du gouvernement, notamment les mesures à l'encontre des Roms et les réactions qu'elle suscite y compris dans l'équipe gouvernementale.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : Canal Plus

Texte intégral

C. Roux.- Bonjour, L. Wauquiez, secrétaire d'Etat à l'Emploi, mais aujourd'hui, nous vous recevons en tant que conseiller politique de l'UMP, en charge du projet pour 2012. C'est-à-dire que vous allez commencer à réfléchir, pour élaborer un projet avec N. Kosciusko-Morizet pour l'UMP en 2012. Et il va y avoir des difficultés, on l'a vu, puisque la majorité ne cesse de se diviser sur un des thèmes phares, notamment la sécurité. On va faire un petit résumé pour les gens qui nous regardent ce matin. On a un Premier ministre qui a pris ses distances, le ministre des Affaires étrangères qui a hésité à démissionner. Et puis, on a un ministre de la Défense, qui, lui, critique une politique de sécurité, qui s'appuie sur le seul volet répressif. On a une question à vous poser, ce matin, L. Wauquiez, est-ce que la sécurité n'est pas devenue un boulet, pour l'UMP ?
 
Non, sur le sujet de la sécurité, il y a une unité d'action totale du Gouvernement. Je crois juste qu'il y a une petite volonté d'exploiter chaque phrase pour en faire un sujet de prise de distance ou de polémique. Fillon, F. Fillon hier, qu'est-ce qu'il a dit ? Il a dit, il n'y a pas de feuille de papier entre moi et le président de la République sur le sujet, et j'appuie totalement, sur le fond, l'action qui est faite par B. Hortefeux.
 
Il n'a dit que ça ?
 
C'est exactement les termes qu'il a employés, sur le fait de dire...
 
Il n'a pas dit qu'il n'aurait pas utilisé ces propos quant au discours de Grenoble ? Il n'a pas dit, par exemple : il y a eu dans mon camp un certain nombre de propos que je n'ai pas accepté durant l'été... ?
 
...Qui ne portaient pas sur l'action du Gouvernement. Sur l'action du gouvernement, F. Fillon a dit : c'est évidemment l'action de mon gouvernement, et sur le fond je la soutiens totalement. Pour le reste, s'agissant de B. Kouchner et d'H. Morin, d'abord, un, il y a tout un volet diplomatique d'action sur le sujet des Roms, et notamment de coopération avec la Roumanie, qui est conduit par B. Kouchner. Donc on a, là encore, une unité d'action du gouvernement. Et puis, par ailleurs...
 
B. Kouchner a hésité à démissionner, il s'est posé la question...
 
Il a employé chaque terme, il a dit que la polémique ne lui avait pas plu. Quand il a dit "la polémique", il disait quoi ? Il disait : cet espèce d'affrontement qu'on a eu pendant l'été, avec un concours de phrases maximalistes d'un côté et surtout de l'autre, avec des invocations dans tous les sens des grands principes de la République, etc., il a dit que ce type de débat le mettait mal à l'aise.
 
On en finit avec H. Morin, ministre de la Défense ; vous allez dire également qu'il n'a rien dit, que tout va bien ?
 
Ce n'est pas ça. Mais j'étais en Conseil des ministres la semaine dernière, le sujet a été évoqué, tous les ministres étaient autour de la table, il n'y a pas eu de prise de distance de l'un ou de l'autre. Donc il y a une cohésion gouvernementale autour de ce sujet, et pour une raison toute simple, c'est que, de quoi il s'agit ? Il s'agit juste de l'application des lois de la République. Juste ça. Et je voudrais... Enfin, je ne sais pas si vous avez suivi l'affaire de Lille, qui est quand même un truc assez intéressant. M. Aubry a en réalité demandé, sur sa propre commune, une expulsion de Roms, c'était avant, apparemment, la polémique - avant ou après à la limite, ça n'a pas beaucoup d'importance. Elle a un de ses élus qui est venu, hier, expliquer qu'en fait, ça il l'avait demandé (inaud.) la polémique, avant que les journalistes s'intéressent à ce sujet. Mais que maintenant, il y avait la polémique, bien sûr, il ne le demanderait plus. Mais c'est vraiment, c'est une politique de tartufe ce truc ! C'est-à-dire que le Parti socialiste nous explique : moi, quand les journalistes ne s'y intéressaient pas, on demandait, nous élus locaux, des expulsions, mais maintenant que les journalistes s'y intéressent, là, maintenant, on ne demande plus d'expulsion.
 
Alors vous êtes en charge du projet...
 
Non, mais...
 
...PS ou du projet UMP ? Du projet UMP, alors on y va !
 
Vous m'avez posée une question, vous m'avez posée une question. Je trouve que la sécurité et ce sujet des Roms...
 
Non, mais restons sur le terrain des idées, si vous le voulez bien. Alors, à propos de J.-P. Raffarin, parce qu'à l'UMP, pour le coup, vous ne pouvez pas reconnaître le contraire, il y a eu des divergences, au creux de l'été sur la sécurité. J.-P. Raffarin a dit : la sécurité est devenue la monoculture de l'UMP. Il a parlé de "dérive droitière". Comment, dans le projet, vous allez mettre tout ce petit monde d'accord ?
 
Alors juste, sur cette question, on en a parlé, hier, donc on a fait une journée entière de réflexions là-dessus, où chacun a exprimé ses positions. Ce qui est notre position, c'est que la sécurité est une de nos priorités majeures. Juste l'application des lois de la République et on ne lâchera pas là-dessus.
 
Pour 2012, ce sera une priorité dans le programme de l'UMP ?
 
Mais c'est une évidence ! Parce que tout simplement pour vous, pour chacun de nos compatriotes, la sécurité est une priorité. Mais à côté de ça, il y a une deuxième pilier de priorité, qui est tout ce qui est l'économie et l'emploi. Je suis bien placé pour le dire, c'est mon domaine de responsabilité. L'emploi, ça a été, c'est, ça restera une des principales priorités politiques de notre famille. On a des propositions, qu'on va avancer notamment sur tout ce qui est emploi des jeunes, insertion, formation, sur lesquelles on sera aussi. Mais je voudrais juste rebondir, pardonnez-moi, et aller jusqu'au bout, sur cette question du PS. Je fais une demande solennelle très claire, de la part du Parti socialiste, c'est quelle est leur position sur le sujet des Roms ? Est-ce que ce qu'il demande, c'est le maintien des occupations illégales de terrain partout en France ? Est-ce que ce qu'il demande, c'est la non application des lois de la République, notamment sur l'immigration, faisant que quand on est en France depuis plus de trois mois, on doit soit avoir un travail, soit avoir des ressources pour rester sur le territoire français. Et j'aimerais bien que le PS clarifie sa position. Parce que, aujourd'hui, c'est un jeu de tartufe. Je pense qu'on a besoin que, eux, clarifient leur position. Et qu'on ne soit pas juste...
 
Est-ce qu'il y a besoin de clarifier la position de l'UMP en matière de sécurité ? Oui ? Non ? Est-ce qu'il y a eu des dérives ? Est-ce qu'il faut recadrer le discours ? Non ?
 
Non, non.
 
Tout va bien ?
 
Ce que je... Enfin, ce qui, moi, me choque - et je suis plutôt d'une sensibilité, au sein de ma famille politique, qui est centriste et droite sociale -, ce qui me choque, c'est quand on dit que la sécurité, c'est un thème droitier. La sécurité, ce n'est pas un thème droitier, c'est un thème qui vous concerne, qui nous concerne.
 
Un sujet qui sera certainement dans votre travail d'étude avec N. Kosciusko-Morizet pour le programme de 2012.
 
Oui.
 
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 6 septembre 2010