Voeux de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre des affaires étrangères et européennes, aux agents du ministère, Paris le 17 janvier 2011.

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Circonstance : Présentation des voeux de Michèle Alliot-Marie aux agents du ministère des affaires étrangères et européennes, à Paris le 17 janvier 2011

Texte intégral

Je vous remercie, Monsieur le Secrétaire Général, de vos voeux. Je vous adresse, en mon nom personnel et au nom d'Henri de Raincourt et de Laurent Wauquiez mes meilleurs voeux pour l'année 2011.
Des voeux de bonheur. Des voeux de réussite personnelle et professionnelle.
J'ai la conviction ancienne et profonde que l'avenir de la France passe par le Quai d'Orsay.
Parce que notre ministère est en charge de la politique internationale, et que la dimension internationale s'impose sur tous les sujets, parce qu'il contribue à la présence et de l'image de la France en Europe et dans le monde, et par là à l'influence de notre pays et de nos entreprises, parce qu'il est le mieux à même de comprendre les complexités d'un monde en perpétuel mouvement, le ministère des affaires étrangères et européennes doit savoir anticiper les enjeux de notre avenir collectif.
Pour cela, il doit en permanence s'adapter, se moderniser.
Notre diplomatie s'inscrit dans le temps court des crises et des urgences.
La France est mobilisée pour la libération de nos otages et pour répondre à la persistance de la menace qui pèse sur nos compatriotes dans certaines régions du globe.
Mes pensées vont aux familles de Vincent Delory et Antoine de Léocour, victimes d'un terrorisme aveugle et inhumain.
Nous n'oublions pas les otages français détenus au Sahel, en Afghanistan, en Somalie. Nous n'oublions pas Gilad Shalit. Tout sera fait pour obtenir leur libération.
Notre diplomatie s'inscrit dans le moyen terme, celui de la présidence française du G8 et du G20 bien sûr qui exigera l'engagement de chacune et chacun.
Celui de la relance nécessaire du processus de paix au Proche-Orient, de la préparation de la conférence sur le climat, en Afrique du Sud, du suivi des 22 consultations électorales qui se tiendront sur le continent africain.
Notre diplomatie s'inscrit aussi dans le temps long qui dessine les perspectives d'un monde nouveau.
Sur tous les continents, s'affirment des pôles démographiques, économiques, technologiques de l'ordre d'un milliard d'habitants.
La mondialisation transforme les enjeux des politiques nationales.
Compétition économique internationalisée, porteuse de nouveaux marchés mais aussi de nouveaux concurrents.
Criminalité sans frontière, qu'il s'agisse des trafics de drogue, des trafics d'armes, du crime organisé, du terrorisme, de la cybercriminalité.
Conflits en germe pour la maîtrise de l'eau, de terres cultivables et des ressources énergétiques, dus à l'accroissement de la population.
Mesdames et Messieurs,
Préparer notre diplomatie au temps long est notre mission la plus difficile.
Elle suppose la volonté de se projeter au-delà des écueils du présent. Elle exige la définition d'un cap.
Mon ambition est de préparer notre ministère aux défis du temps long. Pour cela, ma stratégie est de conforter les fondamentaux de notre puissance (I), mettre en place un pôle d'expertise au bénéfice de chacun (II). Il nous revient de les mettre en oeuvre, dans le cadre d'une vision globale et stratégique.), et au service de la politique d'influence de la France (III).
I. Conforter les fondamentaux de notre puissance est notre première priorité.
A) Nos valeurs sont plus que jamais d'actualité.
Sur tous les continents, la France porte les valeurs de la démocratie, de la tolérance, des droits de l'homme, du respect de l'autre, des libertés, y compris la liberté religieuse.
Nous sommes engagés pour le dialogue des peuples, des religions et des cultures. C'est l'un des objectifs de mon déplacement au Proche-Orient en fin de semaine.
B) Notre réseau diplomatique est notre premier atout.
1) Deuxième réseau diplomatique au monde, il a, plus que jamais, une vocation universelle.
Elle suppose la réponse à certaines questions :
- comment garantir notre capacité à faire face aux besoins de nos concitoyens ?
- comment assurer l'analyse la plus pertinente des évolutions d'une zone stratégique ?
- comment anticiper les opportunités économiques ?
2) Notre place dans les organisations internationales doit être confortée.
La réforme du Conseil de sécurité de l'ONU, pour une meilleure représentation des équilibres mondiaux, demeure l'une de nos priorités.
Nous devons faire valoir nos talents. La présence française à la tête du département des opérations de maintien de la paix de l'ONU en est une illustration.
Vous pouvez être assurés de ma volonté de la maintenir.
C) Notre engagement européen nous aide à relever les défis.
1) L'Europe est un soutien et un support de la voix de la France dans le monde.
Une Europe politique. Une Europe protectrice pour nos concitoyens. Une Europe offensive à l'égard de nos partenaires stratégiques.
En 2011, vous donnerez corps au principe de réciprocité, qu'il s'agisse des taux de change, des marchés publics, des accords commerciaux, de la propriété intellectuelle.
Au sein du Service européen d'action extérieure, vous porterez l'influence de l'Union en soutenant nos meilleurs candidats.
Face aux grandes crises, vous affirmerez le rôle de l'Union européenne comme acteur global, comme promoteur de stratégies politiques et financières, comme amplificateur de notre influence.
2) La relance de la défense européenne est indispensable à la puissance européenne.
Le sommet franco-britannique de novembre, celui de l'OTAN à Lisbonne marquent de nouvelles étapes. La lettre «Weimar» à Catherine Ashton fixe de nouvelles perspectives.
La France a toujours été un moteur de l'Europe de la Défense. Elle doit plus que jamais la promouvoir.
Il vous revient de convaincre nos partenaires européens pour aboutir à des résultats d'ici la fin 2011.
Mesdames et Messieurs,
Notre stratégie s'appuie sur les fondements de notre présence à l'étranger.
Elle se nourrit d'une approche lucide des réalités de la diplomatie.
Aujourd'hui, les acteurs de relations internationales se multiplient et se diversifient.
Pour autant, on ne s'improvise pas diplomate. Dans un contexte concurrentiel, nous devons imposer l'excellence de notre diplomatie.
II. Notre ministère doit s'affirmer comme un pôle d'expertise et d'aide à la décision au service de la Nation.
Je veux donner aux diplomates les moyens d'affirmer leurs compétences, leur talent, leur savoir-faire.
A) Je veux renforcer nos capacités d'anticipation et de prospective.
La prise en compte du temps long suppose :
- une approche à 15-20 ans de l'ensemble des enjeux de la présence française dans le monde ;
- une réflexion prospective en liaison avec l'action et les besoins opérationnels de notre diplomatie.
J'ai demandé que chaque plan d'action d'ambassade prévoie explicitement cette dimension prospective.
Il revient aux directions géographiques d'en effectuer la synthèse.
Je souhaite que la direction de la prospective me présente à la fin de ce trimestre sa réflexion sur les enjeux transversaux et les questions globales.
B) Je veux valoriser les talents au sein et au-delà du ministère.
1) Nous devons soutenir l'action des diplomates par des moyens adaptés.
Je n'entends pas laisser des intérêts comptables l'emporter sur l'intérêt de la France et son influence.
Je n'ai pas le dogme de l'uniformisation. Chaque mission est différente et nécessite des moyens réellement adaptés.
Je lance donc cette semaine un audit sur nos postes diplomatiques à l'étranger.
2) Dynamiser la formation et la carrière des agents du ministère est une autre piste de travail.
Nous avons tout à gagner à nous ouvrir aux autres acteurs des relations internationales.
Je veux faciliter pour les fonctionnaires du Quai des détachements auprès des entreprises et des collectivités.
Ce sera un enrichissement pour nous, une ouverture à des préoccupations nouvelles, mais aussi un atout pour ces nouveaux acteurs des relations internationales.
Nous devons instaurer un dialogue permanent et structuré avec les acteurs de la vie sociale.
Je veux ouvrir un cycle de formation permanente pour les diplomates, aux chefs d'entreprise, aux membres des autres administrations, aux journalistes, aux collectivités locales.
Il favorisera une meilleure connaissance des enjeux de la diplomatie et des liens renforcés entre les diplomates et les autres acteurs de la société.
Mesdames et Messieurs,
III. L'adaptation de nos pratiques et de nos méthodes se place au service d'un objectif essentiel : développer une politique d'influence moderne, assumée, appuyée sur tous les canaux de notre présence.
A) Les Français à l'étranger d'abord.
Notre devoir est de les soutenir lorsqu'ils en ont besoin, y compris dans des situations très concrètes.
L'élection des députés des Français de l'étranger renforcera leur place dans la communauté nationale.
La mise en place des listes électorales et la modernisation du vote à distance sont nos objectifs.
B) Contribuer au développement de nos entreprises relève de nos missions.
Nous ne partons pas de rien, mais nous pouvons faire mieux et davantage.
1) Notre politique de développement doit concilier nos efforts de solidarité et la défense de nos intérêts économiques. La solidarité n'implique pas la naïveté.
2) Nous devons apporter nos connaissances et nos savoir-faire aux entreprises, notamment aux PME.
Je souhaite que les PME disposent d'interlocuteurs disponibles, à leur écoute au sein du ministère, en centrale comme dans les ambassades et consulats.
J'attends très rapidement des propositions de la direction générale de la Mondialisation sur ce point.
Pour aider les entreprises dans leur développement international, des réunions thématiques devront être organisées avec les acteurs économiques, sur les difficultés concrètes auxquelles ils peuvent être confrontés.
C) Conforter la Francophonie et la diplomatie culturelle est une troisième exigence.
1) La France est forte de ses solidarités francophones.
L'année 2011 confirmera la dimension politique de la Francophonie.
La Journée de la Francophonie devra l'illustrer avec inventivité.
2) La diplomatie culturelle sera redynamisée.
Des outils ont été créés. Il nous revient de les mettre en oeuvre, dans le cadre d'une vision globale et stratégique.
L'Institut Français sera doté des moyens nécessaires à son action, en cohérence avec notre stratégie en matière de diplomatie culturelle.
Le contrat d'objectifs et de moyens en précisera les modalités.
Mesdames et Messieurs,
Nous avons du travail devant nous.
L'actualité internationale dicte nos urgences.
L'intérêt de la France fixe notre cap.
Je sais pouvoir compter sur votre énergie, votre professionnalisme et votre loyauté.
Vous pouvez compter sur ma détermination, au service de la France, dans le respect de ses engagements, de ses valeurs, et de sa grandeur.
Je vous remercie.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 janvier 2011