Texte intégral
R. Sicard.- Bonjour N. Morano.
Bonjour.
Avant de parler des mesures que le gouvernement va prendre en faveur de lapprentissage, je voudrais quon revienne sur laugmentation du prix du gaz - et là, je madresse à lancienne ministre de la famille. Le gaz va augmenter de 5 % au 1er avril ; au même moment on a appris quau mois de janvier 10 % des Français ont eu du mal à se chauffer. Est-ce quil ne faut pas adapter ces prix par exemple en baissant la fiscalité sur le gaz ?
Alors, comme vous le savez, dans notre pays il y a un tarif social du gaz et par rapport à cette augmentation, rappelez-vous, on avait annoncé - javais entendu dans les médias 20 %, elle sera se 5 %. Cest une augmentation mécanique mais il va y avoir des aides pour aider les familles les plus modestes. Avec ce tarif social, nous allons laugmenter de 20 %, cest-à-dire quun ménage de quatre personnes avec des revenus modestes, éligible au tarif social du gaz, laide pourra passer de 118 euros à 142 euros annuels daide en moyenne. Donc nous augmentons de 20 % cette aide au tarif social. Jajoute que parce quil faut aussi avoir des appareils qui sont en bon état de fonctionnement pour moins consommer, eh bien il y aura une prime à la casse pour les chaudières qui sera de 250 euros. Il faut aussi renouveler là léquipement des ménages et donc nous allons faire un effort sur ce sujet.
Mais baisser la fiscalité, il nen est pas question.
Mais pour linstant, nous ne sommes pas sur ce dispositif ; nous sommes vraiment sur une aide ciblée aux familles qui en ont le plus besoin et encore une fois, le gouvernement va faire un effort envers ces familles.
Sur lapprentissage, le gouvernement a donc décidé de mettre le paquet. Le chômage des jeunes, cest un des gros problèmes. 24 % des jeunes sont au chômage en France. Quest-ce que lapprentissage peut apporter pour ces jeunes ?
Cest un des leviers puissants pour entrer sur le marché de lemploi. Regardez en Allemagne : deux tiers des jeunes sont formés par lalternance, seulement un tiers chez nous en France. Donc le président de la République a annoncé des mesures massives daide, à la fois de simplification pour les entreprises. Nous allons mettre en place un portefeuille - pardon ! Un portail de lalternance qui pourra...
Sur Internet.
Sur Internet, qui permettra aux jeunes de pouvoir avoir toutes les informations nécessaires pour entrer en communication avec les entreprises et pour les entreprises de pouvoir remplir en direct en ligne leur contrat dapprentissage. Nous allons mettre aussi des dispositifs daide en termes de charges sociales - le 0 charges - pour les entreprises de moins de 250 salariés, pour vraiment les inciter à avoir recours à lalternance. Nous allons aussi simplifier, je dirais, ce quon appelle la surtaxe dans notre pays parce que vous savez que les entreprises de plus de 250 salariés ont lobligation davoir 3 % dapprentis dans leur entreprise, sinon elles payent une surtaxe.
Donc il va y avoir un bonus malus ; cest ça lidée ?
Voilà, exactement. Nous allons passer ce quota à 4 % mais en contrepartie, nous allons améliorer le dispositif de la surtaxe, cest-à-dire que toutes celles qui feront des efforts auront une surtaxe calculée en fonction des efforts quelles feront. Donc ça cest important, cest des mesures dincitation. Cest des mesures aussi de simplification parce que pour être maître dapprentissage par exemple, il faut cinq ans dexpérience. Nous allons passer cette mesure à trois ans - trois ans pour être maître dapprentissage - et là je m rends tout à lheure à Woippy, à linvitation du député-maire F. Grosdidier...
Dans lest de la France.
Dans une entreprise en Moselle, une miroiterie, Jean Talmon (phon), petite entreprise, moins de 250 salariés, qui est déjà à 5 % dapprentis dans son entreprise et donc qui va pouvoir bénéficier des mesures 0 charges dès lors quelle va avoir recours à un nouvel apprenti. Donc ce sont des mesures très incitatives pour elle et vous savez, cest vraiment quelque chose dimportant parce que ce levier de lapprentissage va permettre aussi de casser dans nos têtes ces vieilles idées reçues quil nous faut 80 % dune classe dâge au bac alors quil nous faut 100 % de jeunes...
Cest une idée qui na plus de valeur selon vous ?
Non, mais je ne tiendrai pas le discours inverse qui consiste à dire aux jeunes « ne passez pas votre bac ». Je pense quil faut 100 % de jeunes formés dans notre pays. Je pense quon a trop souvent méprisé aussi lintelligence de la main. Je pense quil faut revaloriser tous ces métiers.
Justement, ça cest une question importante parce que lapprentissage na pas toujours une très bonne image.
Oui.
Souvent les familles préfèrent que leurs enfants suivent des filières traditionnelles.
Oui.
Quest-ce que vous pouvez faire justement pour changer cette image ?
Nous ferons dune part des campagnes de communication à destination des jeunes et des familles. Jai aussi constitué un club de porte-parole dapprentissage de toutes ces personnalités qui ont réussi. Je pense à F. Provost, je pense aussi à M. Roth qui est grand chef cuisinier au Ritz. Je pense à R. Mahler qui a été le président dAlstom. Toutes ces personnalités ont commencé par lapprentissage, sont devenues chefs dentreprise. Parce quil ne faut pas oublier quon peut commencer par un CAP en apprentissage mais on peut après gravir tous les échelons, même devenir ingénieur, ouvrir son entreprise et donc cest gage de réussite aussi et cest gage de facilité dentrée sur le marché de lemploi.
Ça va coûter combien à lÉtat ?
Nous allons investir là massivement, investir massivement 500 millions deuros avec le grand emprunt parce que nous allons moderniser nos CFA, nous allons en créer dautres et nous allons créer 15 000 places dhébergement pour les apprentis parce que nous nen avons pas suffisamment sur le territoire.
Ils vont gagner combien, ces apprentis ?
Les apprentis sont déjà rémunérés en fonction de leur âge, en moyenne jusquà 800-900 euros, et nous allons leur permettre davoir le même statut que les étudiants. Alors ils ont leur salaire puisquils ont un contrat de travail - ils sont en contrat dapprentissage ou en contrat de professionnalisation - eh bien nous leur permettrons davoir accès au Crous comme les étudiants, davoir des tarifs pour entrer dans les milieux culturels, davoir accès moins cher aux transports et ils auront le même statut que les étudiants et pour nous cest très important parce que cest aussi une démarche de valorisation.
Cest une forme demploi aidé et la droite a souvent été hostile aux emplois aidés.
Non, alors là non.
Elle a changé davis ?
Non, ne dites pas que cest une forme demploi aidé. Cest, je dirais, un - comment dirais-je ? - une forme dapprentissage par le travail. Cest ce quon appelle en Allemagne la formation duale, donc lentreprise...
On donne de largent aux entreprises, on exonère de charges : dune certaine façon, cest des emplois aidés.
Oui mais là on aide, on incite. Noubliez pas aussi que nous sommes en période de crise économique et financière, donc nous devons actionner tous les leviers pour permettre aux jeunes de rentrer dans ces formations parce que cest important. Vous savez, en moyenne un jeune qui est passé par lapprentissage a 70 % de chances de rentrer sur le marché de lemploi quelques mois après sa sortie de formation et ça, cest important de le dire aux familles.
Sur le plan politique, lUMP est très divisée sur le débat sur lislam. Est-ce que le président de la République a eu raison de lancer ce débat à ce moment-là ?
Mais ce nest pas un débat sur lislam. Nous nallons pas faire un débat non plus sur la religion catholique ni sur la religion juive. En revanche, il se pose une vraie question : cest comment exercer son culte en respectant nos règles de la République ?
Il y a une loi qui existe, celle de 1905.
Oui, il y a la loi sur la laïcité.
Il faut la changer ?
Il faut réfléchir sil y a besoin dadaptation ou pas. Cest dailleurs pour ça que nous lançons un débat. Si je vous répondais ce matin, ça voudrait dire que ce nest même pas la peine douvrir un débat. Donc il y a la loi sur la laïcité ; regardons comment elle est compatible avec lexercice des cultes. Il nest pas normal et je le dis, il nest pas même acceptable davoir des prières dans la rue, donc nous devons remédier à cette situation, et à partir de ce moment-là posons la question de lexercice des cultes et du respect de nos règles républicaines dans notre pays.
Mais par exemple C. Estrosi disait que ce débat tombait mal au moment où se développent toutes les révolutions dans le monde arabe. Vous navez pas cet avis ?
Non, je crois quau contraire, à partir du moment où nous portons sur la place publique un débat sur lequel il est normal de réfléchir, sans stigmatiser - au contraire, parce que nous avons le devoir de les protéger. Vous savez, 99 % de ceux qui pratiquent la religion musulmane sont parfaitement intégrés dans la société et quelques-uns qui exacerbent par leur fanatisme la pratique de leur culte eh bien nuisent à tous ceux qui sont parfaitement intégrés. Et nous, nous ne voulons pas que ces quelques personnes puissent porter atteinte à ceux qui vivent correctement dans notre pays.
Source : Premier ministre, Service dInformation du Gouvernement, le 3 mars 2011