Déclaration de Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, sur la recherche dans la filière spatiale, Paris le 23 mars 2011.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Annonce des lauréats de l'Action Espace à Paris le 23 mars 2011

Texte intégral


Mesdames et Messieurs,
Bien qu’il s’agisse d’une activité stratégique, peu de nations maîtrisent, comme la France, l’ensemble des techniques nécessaires à la réalisation des opérations spatiales. Cette position de leader européen fait que notre pays est particulièrement bien placé pour profiter du développement du secteur spatial dont les applications scientifiques et industrielles au bénéfice de nos concitoyens se multiplient. C’est ce que j’ai eu l’occasion de rappeler ce matin lors d’une communication en Conseil des ministres.
Les grands principes de notre stratégie spatiale ont été énoncés par le Président de la République, Nicolas Sarkozy, à Kourou le 11 février 2008 et rappelés lors de sa visite à Vernon le 14 décembre dernier.
Le succès de la filière spatiale française, c’est d’abord celui de ses lanceurs, et donc d’Arianespace.
La situation que nous avions trouvée en 2007 n’était pas florissante. Aujourd’hui, Arianespace est sauvée grâce à la recapitalisation réalisée à la fin de l’année dernière, à la maîtrise de nos coûts de lancement, et au soutien que le Conseil de l’ESA a renouvelé la semaine dernière pour équilibrer durablement son exploitation.
Ce succès de la filière française, il est devenu un succès pour l’Europe toute entière, à travers deux programmes phares : Galileo pour la radionavigation et GMES pour l’environnement et la sécurité. Mais c’est aussi la mise en oeuvre de la nouvelle compétence prévue par le traité de Lisbonne. En effet, dès sa Présidence en 2008, la France n’a eu de cesse de rappeler à ses partenaires européens l’importance d’une gouvernance politique de l’Europe spatiale. Cette nouvelle stratégie européenne, elle a aussi un visage, avec notre base de Kourou qui est désormais le port spatial de l’Europe, et qui proposera d’ici la fin de l’année toute la gamme des lanceurs, qu’ils soient italiens ou russes.
Au-delà de l’Europe, c’est avec l’ensemble de nos partenaires qu’il faut également collaborer, les Etats-Unis mais aussi la Chine et l’Inde… Ainsi, avec les Américains, nous souhaitons lancer un nouveau programme mondial d’exploration spatiale lors de la conférence internationale qui se tiendra à l’automne 2011 en Italie.
La bonne santé de la filière spatiale française tient aussi aux moyens sans précédents apportés par l’Etat depuis 2007.
Nous avons déjà augmenté de 150M€ le budget du CNES, d’Eumetsat et notre contribution à l’ESA, depuis 2007. Aujourd’hui, nous consacrons 500 M€ au secteur spatial grâce au programme d’investissements d’avenir, car, cher René RICOL, nous avons la conviction qu’investir dans le spatial, c’est investir pour l’avenir !
* Le programme lanceur
La moitié de ce budget supplémentaire permettra de préparer le successeur d’Ariane 5. En effet, au-delà des développements à mi-vie d’Ariane 5, absolument nécessaires pour améliorer encore les performances de notre lanceur, il est déjà impératif de se projeter vers un futur plus lointain où nos besoins auront évolué en matière de programmes spatiaux. Compte tenu de l’importance que nous conférons à Ariane, le Président de la République avait lui-même débloqué une première tranche de 82,5M€ pour effectuer les premières études de configuration du futur lanceur lors de son déplacement à Vernon en décembre dernier. Je suis heureuse de voir, qu’en ce moment même, une centaine d’ingénieurs, scientifiques et techniciens travaillent déjà chez Safran sur les premières études en propulsion solide et liquide requises pour ce projet majeur piloté par le CNES. De même, je sais que les équipes d’Astrium sont dès à présent fortement mobilisées sur ce futur lanceur en parallèle du programme Ariane 5-ME.
* Les 3 programmes satellitaires innovants
L’autre moitié des 500M€ est consacrée à 3 projets satellitaires innovants. Nous avons fait le choix de procéder à un appel à candidatures et nous avons recueilli 6 projets. Bénéficiant de l’expertise du CNES et de son conseil scientifique, et des autres ministères, en particulier de la DGA, nous avons ainsi sélectionné les 3 projets qui vous seront présentés ce matin. Cependant, je dois d’abord souligner la qualité de l’ensemble des projets présentés, c’est pourquoi, mon ministère et le Commissariat général à l’investissement, avec l’appui du CNES, regarderont comment l’ensemble de ces 6 projets pourront être soutenus, notamment sur leurs parties les plus innovantes.
Les 3 programmes satellitaires retenus permettront de renforcer la compétitivité de notre offre satellitaire institutionnelle et commerciale avec de nouvelles plateformes, de développer nos connaissances scientifiques et de nouvelles applications notamment en matière environnementale, et de renforcer nos collaborations internationales.
Ainsi, le satellite SWOT est un programme scientifique majeur du CNES en collaboration avec la NASA. Il permettra de mesurer les hauteurs d’eaux des océans, mais aussi des grands fleuves, des lacs et des zones inondées grâce à une rupture technologique majeure d’interférométrie à large fauchée. Mais outre l’indéniable apport scientifique de ce satellite, il s’agit là d’un programme majeur pour notre société car, nous le savons, la ressource en eau et sa gestion seront de plus en plus au coeur de nos préoccupations. Les données hydrologiques fournies par ce satellite seront aussi utiles à de nombreuses activités à forts enjeux économiques, telles la navigation fluviale, la pêche, ou encore l’exploration pétrolière. Avec de tels bénéfices, il est naturel que nous investissions 170M€ aujourd’hui.
Bénéficiant de 40M€, le projet Myriade Evolutions permettra au CNES et à notre industrie de proposer une nouvelle génération de plateformes de microsatellites essentielles au déploiement de nos futures missions institutionnelles. Avec une telle plateforme générique, fiable, compacte et peu coûteuse, nous garantissons à nos scientifiques de pouvoir réaliser des missions ambitieuses dans les années à venir. La première mission qui bénéficiera de cette plateforme est tout à fait symbolique, car il s’agit de MERLIN, la première mission satellitaire bilatérale franco-allemande. Il s’agira d’une première mondiale permettant de mesurer les flux de méthane dans l’atmosphère, qui est un puissant gaz à effet de serre.
Le projet Satellites du futur permettra de faire collaborer l’ensemble de la filière satellitaire française pour la réalisation d’une nouvelle génération de plateformes de satellites de télécommunications. 42,5M€ sont attribués pour ce projet piloté par Astrium et Thales Alenia Space. Avec un gain de compétitivité attendu de l’ordre de 30%, ces satellites permettront de renforcer la part de marché de l’industrie française dans ce domaine. Avec toujours plus de nouvelles applications, les satellites de télécommunication contribuent à de nombreuses politiques publiques, que ce soit en matière de sécurité ou de réduction de la fracture numérique.
* Elaboration d’un document de référence
Vous l’aurez compris, Mesdames et Messieurs, tous ces très beaux projets sont bien au coeur de notre politique spatiale et permettront d’accélérer sa mise oeuvre au moment où de nombreuses opportunités s’offrent à nous, notamment en matière de collaborations internationales.
Dans ce contexte, d’autres pays, comme l’Allemagne, l’Italie ou le Japon, se sont dotés d’un document de référence rappelant les grandes lignes de leur stratégie spatiale à moyen et long terme et en font un marqueur de leur engagement dans le domaine spatial.
C’est pourquoi, le Président de la République et le Premier ministre, m’ont confiée ce matin en Conseil des Ministres la rédaction d’un tel document en associant les ministères concernés. Mon ministère vous consultera donc prochainement, chers acteurs publics et privés du secteur spatial français, en vue de préparer ce document, qui sera finalisé d’ici septembre prochain.
Je vous remercie.
Source http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr, le 24 mars 2011