Déclaration de M. Eric Besson, ministre de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique, sur la nécessité d'une prospective technologique pour promouvoir la compétitivité économique, Paris le 15 mars 2011.

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Circonstance : Remise du rapport "Technologies clé 2015" produit par une groupe de plus de 250 experts, à Paris le 15 mars 2011

Texte intégral

M. le Député, Bernard CARAYON,
M. le Commissaire général à l’investissement, René RICOL,
M. l’Ambassadeur de l’industrie, Yvon JACOB
MM. les médiateurs du crédit et de la sous-traitance, Gérard RAMEIX et Jean-Claude VOLOT
M. le Directeur général du Fond stratégique d’investissement, Jean-Yves GILET,
M. le Directeur adjoint de l’Agence nationale de la recherche, Philippe FREYSSINET
Mesdames et Messieurs les membres de la conférence nationale de l’industrie (CNI),
Mesdames et Messieurs les Vice-présidents des comités stratégiques de filière,
Mesdames et Messieurs les Présidents et Directeurs généraux de pôle de compétitivité,
Madame, Monsieur,
La forte affluence que je constate ce matin en témoigne : Technologies Clés 2015 est une étude très attendue.
Une étude attendue car elle fait appel à des compétences pluridisciplinaires : de janvier à octobre 2010, ce sont plus de 250 experts, industriels et chercheurs, en lien avec les ministères et organismes publics concernés, qui ont travaillé ensemble à cette étude. Un tel travail de mise en commun des connaissances et des compétences est assez rare pour être souligné.
Je tiens d’ailleurs à remercier le Comité stratégique ayant supervisé cette étude, notamment son président, Denis RANQUE ainsi que l’ensemble des experts mobilisés pour leur contribution à la réussite de cet exercice. Un mot spécial pour l’administration de Bercy, la DGCIS, qui a coordonné ce travail lourd.
Une étude attendue ensuite par son objet : identifier les principales technologies d’avenir et les marchés stratégiques pour l’industrie française à horizon 2015.
Mais avant de vous dire justement (i) quelles sont ces technologies clés et (ii) comment cette étude peut servir de base à l’action publique, permettez-moi tout d’abord de vous dire à quel point cet exercice de prospective me parait primordial pour l’action publique.
1) Technologies clés 2015 : la confirmation que la prospective technologique est indispensable
Comme vous le savez, nous avons beaucoup fait ces dernières années pour promouvoir la compétitivité de notre industrie.
- la politique des pôles de compétitivité, initiée en 2004, a permis de financer près de 6 Mds€ de projet de R&D collaboratifs ;
- la politique de filières, avec la création de la CNI et de 12 Comités stratégiques de filière, a pour objectif de renforcer la cohésion et la compétitivité de notre industrie, secteur par secteur ;
- les 35 Mds€ des investissements d’avenir, dont 18Mds€ orientés vers l’industrie, pour soutenir les projets et technologies les plus innovants.
Nous avons donc des outils pour promouvoir la compétitivité de nos industries. Mais encore faut-il savoir quelles sont les grandes orientations à prendre. Le monde bouge. Les parts de marché se gagnent et se défont au gré des ruptures technologiques et des innovations. Il faut pouvoir, en permanence, être en avance d’une idée, d’une technologie, d’une innovation, et procéder en amont aux bons choix.
La prospective technologique constitue un outil indispensable pour guider l’action de l’Etat. Je le dis d’autant plus volontiers que je suis un partisan résolu de la prospective, ayant occupé mes premières responsabilités ministérielles dans ce domaine.
J’avais alors observé que les pays qui avaient su réformer en faveur d’une plus grande compétitivité, comme les Pays-Bas, le Canada, ou encore le Danemark étaient ceux qui investissaient le plus dans la réflexion prospective.
J’avais d’ailleurs lancé dans ce cadre France 2025, un exercice de prospective unique par la diversité des sujets traités et des acteurs impliqués - avec notamment près de 350 personnes mobilisées pendant un an.
J’ai donc été particulièrement ravi à mon arrivée au Ministère de l’industrie, quand la DGCIS m’a indiqué qu’une étude de prospective technologique était sur le point d’être finalisée. Il faut pouvoir réhabiliter le temps long face à l’immédiateté de l’actualité, et ce, a fortiori lorsqu’on investit des moyens financiers importants en matière de politique industrielle.
J’en viens maintenant aux conclusions que nous pouvons tirer de cette étude Technologies clés 2015.
2) Technologies clés 2015 : 85 technologies clés identifiées dans 7 secteurs d’avenir
L’étude Technologies clés identifie 85 technologies clés dans 7 secteurs d’avenir que sont la chimie, les technologies de l’information et la communication, l’environnement, l’énergie, les transports, le bâtiment, et un secteur large recouvrant la santé, l’agriculture et l’agro-alimentaire.
Je ne reviendrai pas sur le détail de ces 85 technologies clés, abondamment détaillées dans le rapport qui vous sera remis à l’issue de cette présentation. Denis Ranque, la DGCIS et moi-même sommes à votre disposition pour commenter certains points que vous souhaiteriez approfondir.
Je voudrais surtout attirer votre attention sur deux constats à l’issue de la lecture de ce rapport.
Le premier est que 75% des technologies clés repérées il y a cinq ans sont présentes dans cette nouvelle édition, ce qui confirme la pertinence des analyses menées précédemment, et le fait que collectivement, nous ne nous étions pas trompés.
On constate ainsi que les technologies de l’information et de la communication (la nanoélectronique, le logiciel embarqué, le cloud computing), et les technologies du vivant (ingénierie du système immunitaire), continuent d’occuper une place majeure dans l’étude Technologies clés 2015, tout comme cela était déjà le cas dans l’étude Technologies clés 2010. Cette nouvelle édition met par en ailleurs en avant l’importance croissante des technologies de l’énergie, dans les domaines traditionnels (nucléaire, pétrolier) comme celui des énergies renouvelables (photovoltaïque, éolien, hydraulique).
Je constate surtout que, contrairement aux discours de tous les « déclinologues », la France est bien positionnée sur un nombre important de technologies clés.
La France se situe dans le « peloton de tête » pour 2/3 des technologies clés et se positionne comme leader ou co-leader pour 20% d’entre elles.
Sur un plan sectoriel, la France occupe des positions majeures dans trois domaines : environnement, TIC et chimie, matériaux & procédés. Dans le domaine des technologies de l’énergie, des transports, du bâtiment, de la santé et de l’agroalimentaire, la France se situe également en bonne position.
Cette étude est donc utile, puisqu’elle permet notamment de rappeler que la France a d’indéniables atouts. C’est à nous ensuite de capitaliser sur ces atouts. Car faire de la prospective, c’est bien, mais en tirer des conséquences concrètes, c’est mieux encore, et l’objectif même de la prospective.
3. L’utilité de Technologies Clés 2015 : diffuser la connaissance et orienter l’action publique
3.1 Un enjeu de diffusion vers le tissu économique
Nous le savons tous, la recherche et l’innovation ne sont utiles que si elles se diffusent au reste de l’économie. En ce sens, l’étude Technologies clés me parait primordiale pour diffuser les connaissances scientifiques vers deux types de publics : les jeunes et les PME.
Les jeunes tout d’abord. Dans un contexte de désaffection pour les filières scientifiques, Technologies Clés 2015 est l’un des rares outils existants portant à la connaissance du grand public les technologies appelées à transformer leur quotidien.
En mettant à l’honneur l’innovation technologique, cette étude contribue à véhiculer une image positive et moderne de l’industrie, tournée vers les hautes technologies. On ne rappelle jamais assez que le secteur industriel contribue à 80% des dépenses privées de R&D.
Par ailleurs, comme vous le savez, dans quelques semaines (4 au 10 avril), aura lieu la première semaine de l’industrie, un temps fort destiné à revaloriser l’image de l’industrie. J’ai demandé à ce que l’étude Technologies clés soit diffusée à cette occasion lors des plus de 650 manifestations organisées dans toute la France lors de la Semaine de l’industrie.
Autre public particulièrement concerné par cette étude : les PME. Les entreprises qui souhaitent élaborer leur stratégie de R&D ou engager une démarche d’innovation pourront trouver des éclairages utiles sur les applications et les enjeux technologiques. Ces entreprises pourront également mieux anticiper sur les produits dérivés qui seront issus de ces technologies clés, et qui constitueront de nouveaux débouchés.
Je demanderai aux DIRECCTE de relayer le plus largement possible les résultats de l'étude tant auprès des acteurs de l'innovation en région qu'auprès des entreprises innovantes ; les correspondants PME des DIRECCTE auront là une excellente opportunité de sensibiliser les entreprises au potentiel des technologies-clés.
3-2 Une mobilisation des différents dispositifs de soutien à l’innovation en direction des technologies clés
Au-delà de la diffusion, cette étude sur les Technologies clés 2015 doit servir de grille de lecture à l’ensemble des décideurs publics, dont plusieurs sont présents aujourd’hui.
Je pense tout naturellement aux investissements d’avenir. Je sais, cher René RICOL, que vous avez d’ores et déjà fait beaucoup en matière de diffusion de l’innovation.
Je pense par exemple aux SATT, les sociétés d’accélération du transfert de technologies, qui sont dotées de 900 M€ dans le cadre des investissements d’avenir pour aider à financer et accompagner des projets en phase de maturation.
De manière plus générale, les investissements d’avenir, dont vous avez la responsabilité, ont un rôle essentiel dans le développement des technologies clés. Je pense par exemple aux appels à projets sur le « cloud computing », ou encore aux appels à manifestations d’intérêt sur les « biocarburants avancés » ou les « bâtiments et ilots à énergie positive et à bas contenu carbone ». Autant d’exemples centrés sur les technologies clés et où j’espère que l’étude Technologies clés servira de grille d’analyse.
Le FSI ensuite, cher Jean-Yves GILET, qui, je le sais, conduit des études stratégiques sur les différents secteurs d’activité. Là aussi, l’étude Technologies clés pourra être un complément aux propres études de veille stratégique que vous menez en interne.
L’Agence Nationale de la Recherche également, où je constate avec satisfaction que la programmation triennale de l’ANR pour la période 2011-2013 intègre d’ores et déjà les analyses et résultats de Technologies Clés 2015
Je souhaite également que les pôles de compétitivité prennent appui sur Technologies-clés 2015 pour renforcer, dans leurs feuilles de routes stratégiques, l'approche croisée entre les marchés et les technologies. L’objectif est de déployer davantage les technologies développées par un pôle sur de nouveaux marchés.
Enfin, je demande aux 12 Comités stratégiques de filières de s’appuyer sur les analyses et les recommandations de Technologies Clés 2015, pour approfondir le diagnostic se rapportant à leur industrie, et définir, avec l’ensemble des acteurs, un plan de développement technologique, dans le cadre de la feuille de route stratégique préparé par chaque comité.
Voilà en quelques mots ce que je tenais à vous dire. Diffusion large et systématique de l’étude Technologies clés 2015, mobilisation des dispositifs de soutien à l’innovation autour des technologies clés, transfert accéléré de technologies vers l’industrie…. Si ces objectifs sont atteints, Technologies clés 2015 aura rempli tous ses objectifs !
Je vous souhaite une excellente lecture de cette étude et vous remercie de votre attention.
Source http://www.minefe.gouv.fr, le 16 mars 2011