Auditions de Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, et de M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement, sur les engagements de la France en matière de programme de stabilité et de croissance, à l'Assemblée nationale le 19 avril 2011.

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Circonstance : Audition sur le projet de programme de stabilité et de croissance, à l'Assemblée nationale le 19 avril 2011

Texte intégral

Mme Christine Lagarde - Nous venons aujourd’hui devant vous grâce aux modifications apportées en vue de rendre plus cohérent le débat au sein des parlements nationaux et des institutions communautaires. Il s’agissait de permettre aux assemblées parlementaires nationales de prendre connaissance de l’ensemble des prévisions, en particulier le cadrage macroéconomique, avant leur transmission aux instances communautaires sous forme de programme de stabilité. C’est une première manifestation du nouveau « semestre européen », instauré dans le cadre de la réforme de la gouvernance économique qui a été portée par la France, et dont le président de la République a souhaité l’application la plus rapide possible.
Le calendrier de travail permet désormais d’établir un diagnostic sur les besoins de coordination en Europe, et d’examiner la façon dont les États membres mettent en œuvre les mesures appropriées. C’est dans ce contexte que le Conseil européen a arrêté, les 24 et 25 mars, des priorités en matière de politique économique. Il a indiqué qu’il fallait «s’attacher, en priorité, à rétablir des situations budgétaires saines, ainsi que la soutenabilité budgétaire». Les deuxième et troisième objectifs, qui ne sont pas moins importants, consistent à «réduire le chômage par des réformes du marché du travail» et à «déployer de nouveaux efforts afin de renforcer la croissance». C’est sur ces trois piliers que le Conseil nous a demandé de préparer des documents budgétaires soumis en premier lieu à votre examen, puis examinés par les instances communautaires.
L’objectif du «semestre européen» est double.
Il consiste, tout d’abord, à organiser un débat sur les programmes de stabilité et de convergence, ainsi que sur les programmes de réformes structurelles. À ce titre, vous avez reçu deux documents : le programme de stabilité de la France 2011-2014, et le programme national de réforme 2011-2014.
Il consiste, ensuite, à développer, avec nos partenaires européens, une vision complète des politiques économiques sous l’angle budgétaire et sous l’angle des réformes structurelles. Leur coordination, leur complémentarité et leur cohérence doivent garantir qu’elles se renforcent mutuellement, au lieu de s’affaiblir. Les performances des uns et des autres seront ainsi améliorées, suivant les trois axes que je viens d’évoquer : la lutte contre le chômage et le renforcement des politiques de l’emploi, le développement de politiques favorables à la croissance, et enfin l’assainissement des finances publiques, considérées d’un point de vue collectif.
Pour ce qui est du cadrage macro-économique, le programme de stabilité que nous vous avons transmis vendredi dernier repose sur des hypothèses légèrement révisées par rapport au programme précédent.
Tout d’abord, la croissance s’est établie à 1,5 % en 2010, comme l’avaient prévu le programme de stabilité de janvier 2010 et le projet de loi de finances. J’observe, par ailleurs, que la croissance est devenue plus autonome : l’investissement privé, reparti à la hausse, et la consommation des ménages, dont nous n’avons pas enregistré de baisse trimestrielle depuis le début de la crise économique, ont progressivement pris le relais des soutiens publics instaurés par le gouvernement, notamment dans le cadre du plan de relance.
Pour l’année 2011, nous maintenons la prévision de croissance à 2 % de PIB, inscrite dans la loi de finances. L’OCDE, qui a révisé ses prévisions la semaine dernière, arrive au même résultat, voire un peu plus, selon son directeur général. Je tiens à votre disposition les prévisions de la Commission, du Fonds monétaire international et du «consensus de place», qui sont légèrement inférieures : entre 1,6 et 1,8 % de PIB.
Nos prévisions tiennent compte des développements défavorables observés au cours des derniers mois, à commencer par la hausse du prix des matières premières, qui nous a conduits à relever notre prévision d’inflation de 1,5 à 1,8 %.
Nous avons également pris en considération le niveau de l’euro, qui s’est réapprécié par rapport à l’ensemble des monnaies, notamment au dollar américain. Cela ne va pas sans conséquence pour les exportations, mais le pouvoir d’achat du site France est «dopé» pour l’acquisition de biens dont le prix est libellé en devises étrangères, en particulier en dollars.
Nous avons pris en compte, par ailleurs, les catastrophes subies par un certain nombre de pays, au premier rang desquels figure le Japon, même si les économistes hésitent encore sur les effets réels et indirects qui affecteront ce pays, les économies proches, et les pays en lien étroit avec lui. La fourchette des estimations va de 1 à 3,5, tant il est difficile de mesurer les effets indirects qui se produiront, et la rapidité avec laquelle les pays liés au Japon sur le plan commercial, voire manufacturier, pourront trouver des sources alternatives.
J’en viens aux bonnes surprises réservées par les derniers mois, en particulier en matière de créations d’emplois, facteur extrêmement important pour le respect de nos objectifs et pour la consommation en général. Au nombre de 125 000 en 2010, les créations d’emplois ont été supérieures à ce que nous avions prévu. La prévision de l’INSEE pour le premier semestre 2011 vient, en outre, d’être revue à la hausse : le nombre des créations d’emplois devrait s’établir à 78 000.
Les enquêtes de conjoncture, en particulier celles qui sont réalisées auprès des chefs d’entreprise, se sont aussi améliorées plus vigoureusement que prévu, tant pour la production actuelle que pour celle des mois à venir. Les derniers chiffres que nous avons reçus ce matin, en particulier le Purchasing Manager Index - PMI - pour l’ensemble des dix-sept pays de la zone euro, laissent penser que la croissance devrait être robuste au premier semestre. Comme je l’ai déjà indiqué, l’OCDE a révisé à 2 % de PIB sa prévision de croissance pour l’année 2011.
Un troisième facteur positif est la consommation des ménages, bien orientée pour le premier trimestre 2011 malgré la diminution, puis l’extinction de la «prime à la casse», qui a largement soutenu le secteur automobile à la fin de l’année 2009 et au début de l’année 2010.
Nous estimons que ces différents facteurs, négatifs comme positifs, devraient se compenser en matière de croissance. C’est pourquoi je maintiens à 2 % notre prévision de croissance pour 2011.
L’activité devrait s’accélérer cette année grâce à quatre moteurs principaux. Nous prévoyons tout d’abord que les exportations, qui ont été dynamiques au cours de la période récente, puisque leur rythme de croissance a été équivalent à celui des exportations allemandes pendant les six derniers mois, continueront d’évoluer de la même façon.
Les chefs d’entreprise du secteur manufacturier prévoient une hausse de 14 % de leurs investissements en valeur, et un fort rebond des permis de construire, qui est un bon indicateur pour anticiper l’évolution du BTP, est également constaté : l’investissement résidentiel devrait donc être bien orienté dans les mois à venir. Un troisième facteur de nature à encourager l’activité en 2011 est le cycle des stocks : les entreprises françaises n’ont que très faiblement reconstitué leurs stocks pendant l’année 2010, contrairement aux entreprises de certains de nos voisins, notamment l’Allemagne.
Enfin, les créations d’emploi devraient soutenir les revenus d’activité des ménages, et donc la consommation. Comme je l’ai indiqué, l’INSEE a révisé sa prévision concernant les créations d’emploi pour le premier semestre.
Dans l’ensemble, le paysage devrait être assez positif en 2011, même si certains facteurs pèsent négativement sur nos prévisions.
Pour 2012, nous prévoyons une croissance de 2,25 % : l’activité devrait s’accélérer légèrement grâce à la dynamique de l’investissement et à la poursuite de l’amélioration du marché du travail, qui soutiendra, une fois encore, le revenu des ménages et réduira l’épargne de précaution au profit de la consommation. Les réformes structurelles entreprises depuis 2008 - le crédit d’impôt recherche, les investissements d’avenir, le remplacement de la taxe professionnelle par la contribution économique territoriale, qui engagera mieux les entreprises à investir, mais aussi la réforme des retraites - devraient progressivement améliorer la compétitivité de la France et sa croissance potentielle. Il devrait en résulter une accélération de la croissance en 2013 et 2014 : celle-ci s’établirait alors à 2,5 %.
Mais les incertitudes pesant sur l’environnement international nous incitent à retenir, pour 2012, une prévision de croissance légèrement plus prudente qu’auparavant : nous la ramenons de 2,5 à 2,25 %. Le prix du pétrole étant très supérieur à ce que nous avions prévu, nous portons de 78 à 100 dollars par baril le niveau sur lequel nous tablons. Les crises de la dette souveraine, que nous n’avions pas anticipées au début de l’année 2010, vont en outre conduire à un effort de consolidation budgétaire dans un certain nombre de pays de la zone euro, ce qui aura un effet presque mécanique sur leur commerce extérieur.
Cela étant, la France reste déterminée à respecter la trajectoire qu’elle s’est fixée dans la loi de programmation des finances publiques. Nous ferons même un peu mieux que prévu. En 2010, le déficit public a, en effet, été moins lourd que nous ne le pensions : estimé dans un premier temps à 8,5 % du PIB, il a ensuite été réévalué à 8,2 %, puis à 7,7 %, et il s’est finalement établi à 7 % en exécution. Cela nous permet de revoir à la baisse notre cible de déficit pour l’année 2011 - elle est de 5,7 %, contre 6 % dans le programme de stabilité initial. Je laisserai à François Baroin le soin de détailler la trajectoire de déficit, mais je veux rappeler l’engagement ferme du gouvernement de la respecter, quelles que soient les circonstances économiques. Nous prendrons toutes les mesures nécessaires, compte tenu de la conjoncture, pour «rester dans les clous». Nous réduirons ainsi le déficit public à 5,7 % en 2011, puis nous le porterons successivement à 4,6 %, à 3 %, et enfin à 2 % du PIB.
Au total, le programme de stabilité prévoit un ajustement structurel supérieur à 4 points de PIB pour la période 2010-2013, conformément à la recommandation formulée par le Conseil ECOFIN.
Je réitère l’attachement du gouvernement à faire porter l’essentiel de l’effort de consolidation budgétaire sur la maîtrise des dépenses. C’est un choix indispensable compte tenu du niveau toujours élevé des prélèvements obligatoires dans notre pays : ils atteignent 42,2 % de PIB en 2010.
La maîtrise du volet «dépenses» repose, en particulier, sur le respect de la double norme inscrite dans la loi de programmation des finances publiques. Je laisse, là encore, à François Baroin le soin d’en présenter les détails, mais je tiens d’ores et déjà à dire que nous avons respecté, pour la première fois, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM. Nous partenaires européens l’ont observé avec attention. Nous avons à cœur de continuer sur la même voie, car chacun sait à quel point le volume des dépenses sociales pèse sur les finances publiques.
La réforme des retraites, adoptée en 2010, contribuera aussi à la maîtrise des dépenses. Du fait de sa montée en charge rapide, elle aura un double effet : une réduction des déficits, ainsi qu’une augmentation de la croissance. Cette réforme aura un impact sur le déficit public à hauteur de 0,5 point de PIB dès 2013.
Nous poursuivrons, en outre, l’effort de réduction des niches fiscales et sociales conformément au rythme prévu par la loi de programmation des finances publiques : un plancher de 11 milliards d’euros en 2011, puis de 3 milliards d’euros par an. Nous supprimerons prioritairement les niches les moins efficaces sur le plan socio-économique, en évitant toute hausse générale des impôts.
J’en viens aux recettes, qui seront spontanément soutenues par le rebond de l’activité. Ce sera d’autant plus vrai que la solidité du système bancaire français et le niveau relativement bas de l’endettement des ménages permettent d’envisager une reprise plus dynamique que chez certains de nos partenaires, contraints de procéder à des restructurations et à des recapitalisations importantes dans le secteur bancaire, lesquelles conduiront à une ponction sur les moyens disponibles. Les recettes publiques reviendront progressivement à la normale, après la très forte baisse observée en 2009, et elles devraient spontanément progresser un peu plus vite que l’activité économique : le programme de stabilité prévoit une élasticité moyenne des prélèvements obligatoires par rapport au PIB légèrement supérieure à l’unité pour la période 2011-2014. Je reviendrai plus tard sur les raisons qui nous conduisent à retenir ce chiffre.
Le respect de notre trajectoire des finances publiques, auquel nous allons nous astreindre aujourd’hui comme demain, permettra de commencer à inverser la trajectoire de la dette publique à partir de 2013 : en 2011 et 2012, la dette publique française augmentera encore en valeur absolue ; sa réduction sera d’autant plus rapide, par la suite, que le déficit se contractera. Cela suppose de respecter l’ensemble des politiques publiques que nous engageons aujourd’hui et que nous envisageons pour l’avenir.
Ce programme de stabilité est commandé par une double logique : renforcer notre stratégie de consolidation budgétaire, et ménager des marges d’investissement importantes, consacrées à des mesures améliorant la compétitivité de notre pays, telles que les investissements stratégiques d’avenir, axés sur des secteurs où le retour sur investissement est plus long.
M. François Baroin - C’est la première fois que le Parlement peut accompagner, à ce stade de l’année, les engagements de la France auprès de ses partenaires européens, sur la base des travaux du gouvernement. C’est une étape importante, après l’avancée significative qu’a constituée, au mois de juillet dernier, la correction apportée dans le cadre de la question grecque et de la crise européenne en général - il était important que la représentation nationale bénéficie du même niveau d’information que l’exécutif pour les perspectives des finances publiques, notamment en matière de dette, d’activité économique et d’évolution du coût de la vie. Il s’agit d’une évolution irréversible, qui me paraît aller dans le bon sens.
L’amélioration du déficit public enregistrée en 2010 montre, par ailleurs, que les efforts entrepris par le gouvernement portent leurs fruits. Alors que nous avions prévu un déficit de 8,5 % à l’origine, nous sommes passés au-dessous de 8 %, et nous sommes arrivés à 7 % en fin d’année. Ce résultat positif, qui a été salué par la Commission européenne, nous permet d’avancer plus vite que prévu dans la réalisation de notre objectif intangible de réduction du déficit public.
Alors que la loi de finances pour 2010 prévoyait un taux de dette publique égal à 82,9 % de PIB, nous n’avons pas dépassé 81,7 %. Ce bon résultat est la conséquence de la reprise de l’économie et de l’emploi, plus dynamique que nous ne l’avions envisagé, et du coût moins élevé que prévu de la réforme de la taxe professionnelle en 2010. C’est aussi le fruit d’un effort collectif réalisé par l’ensemble des acteurs de la dépense - la «colonne vertébrale» de nos discussions budgétaires. Nous avons, en effet, agi sur l’ensemble des sources de dépenses publiques : celles de l’État, celles des collectivités territoriales et celles de la sécurité sociale.
En 2010, nous avons ainsi tenu notre engagement de maîtrise des dépenses de l’État, en respectant strictement le plafond autorisé et la norme de dépense, construite sur la base d’une progression limitée à l’inflation - c’est ce qu’on appelle le «zéro volume». Notre premier devoir, et la première règle en matière budgétaire, étaient de ne pas dépenser un euro de plus que le montant autorisé par le Parlement. Le contrat est rempli. C’est un acte important dans notre nouvelle trajectoire de maîtrise des dépenses publiques et dans la définition d’une nouvelle approche. J’observe, en particulier, que le plafond de dépenses n’a pas été révisé à la hausse, alors que l’inflation s’est élevée à 1,5 %, et non à 1,2 % comme nous l’avions prévu. Il en est résulté une moindre dépense d’environ 1 milliard d’euros, ce qui n’est pas neutre dans l’équation générale.
L’effort réalisé en 2010 se traduit aussi par une meilleure maîtrise des dépenses sociales, notamment celles de l’assurance maladie : pour la première fois depuis 1997, l’ONDAM a été respecté. Il s’élève à 2,9 % en 2011, contre 3 % en 2010.
J’ajoute que les collectivités territoriales ont participé à l’effort global via une modération de leurs investissements.
La poursuite de notre stratégie, fondée sur la combinaison d’une maîtrise stricte et durable de la dépense publique et de réformes porteuses de croissance, est au cœur de ce programme de stabilité. Le gouvernement est déterminé à être au rendez-vous des engagements pris dans la loi de programmation des finances publiques : notre objectif est de ramener le déficit public en deçà de 3 % en 2013. Nous reviendrons ainsi au niveau enregistré avant la crise.
Face à l’amnésie individuelle et collective encouragée par certains acteurs, sans doute pour favoriser leurs projets politiques, lesquels risquent de se résumer à de simples bouts de papier agrémentés d’une simple signature, je crois utile de rappeler que nous avons subi une crise mondiale. Elle a conduit à un effondrement des recettes dans notre pays, comme partout dans le monde. Nous avons adopté des mesures d’accompagnement pour arrêter l’hémorragie et pour parer au plus pressé, ainsi que des mesures de protection des investissements d’avenir, dans le cadre du grand emprunt. Nos «amortisseurs» sociaux ont, par ailleurs, fonctionné. Nous avons donc subi une récession moins forte que la plupart des autres pays de l’Union européenne, et nous sommes sortis plus vite de la crise économique. La réduction actuelle de nos déficits correspond au plan de marche que nous nous sommes fixé. Je rappelle ces différents éléments pour ceux qui les auraient oubliés, qui voudraient les oublier, ou qui voudraient faire croire qu’ils n’ont pas existé.
Nous gérons la sortie de la crise économique et sociale, qui laisse des cicatrices pour le moment, et nous continuons d’affronter la crise budgétaire. C’est le sens de ce pacte de stabilité.
Compte tenu du niveau de déficit public, moins important que prévu en 2010, et du sérieux avec lequel nous avons préparé, avec vous, les textes financiers pour 2011, nous sommes en mesure de réviser favorablement les prévisions pour cette année. Nous nous sommes ainsi fixé un objectif de 5,7 % de déficit public, et nous pouvons dès maintenant annoncer que nous serons au-dessous du seuil de 6 % initialement prévu.
Nous n’avons pas répercuté l’ensemble des 0,7 point de PIB car une partie de cette amélioration est liée à des effets non reconductibles les années suivantes, en particulier la révision du coût de la réforme de la taxe professionnelle.
Pour l’année 2012, nous avons souhaité maintenir l’objectif de déficit public à 4,6 % de la richesse nationale. Les bons résultats obtenus en matière de réduction des déficits nous permettent d’éviter de prendre des mesures complémentaires pour compenser la légère diminution - de 2,5 à 2,25 % - de la prévision de croissance figurant dans le programme de stabilité.
Nous tiendrons nos engagements année après année mais nous ne voulons pas accélérer le rythme de réduction des déficits publics : l’effort demandé aux Français est important et le gouvernement, dont la priorité est de préserver l’activité économique, ne souhaite pas prendre le risque de casser une croissance encore convalescente par des mesures trop nombreuses et trop douloureuses, de même qu’il souhaite continuer à la protéger les publics les plus fragiles au moyen de différents dispositifs sociaux et fiscaux. Nous conservons la ligne fixée dans la loi de programmation des finances publiques.
Le projet de loi de finances pour 2012, en particulier, sera construit dans le respect du budget triennal 2011-2013, lequel contribue de manière décisive au redressement des finances publiques puisque son élaboration respecte la double norme de dépenses fixée par un article dédié de la loi de programmation : d’une part, une stabilisation en euros courants - le «zéro valeur» - des crédits budgétaires et des prélèvements sur recettes au profit de l’Union européenne et des collectivités locales, hors charge de la dette et pensions des fonctionnaires de l’État ; d’autre part, le maintien de l’augmentation annuelle des crédits - sur le périmètre de la norme élargie - à un niveau inférieur ou égal à celui de l’inflation.
Le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite sera poursuivi en 2012. Cela se traduira par la suppression d’environ 30 000 emplois à temps plein. L’objectif triennal de réduction des dépenses de fonctionnement et d’intervention de 10 % sur trois ans impliquera une diminution de 2,5 % en 2012 après une baisse de 5 % en 2011. Nous ne nous détournons pas de la trajectoire inscrite dans la loi de programmation.
L’ensemble des concours de l’État aux collectivités locales sera stabilisé en valeur comme en 2011, à l’exception du fonds de compensation de la TVA de façon à préserver la dynamique propre des investissements des collectivités. Les dépenses des autres administrations de sécurité sociale seront également contenues, en lien avec la montée en charge progressive de la réforme des retraites. Corrigée des revalorisations, la tendance des prestations vieillesse marquera une décélération dans les prochaines années, avec une augmentation de 1,8 % en moyenne annuelle pour la période 2012-2014, contre 2,8 % en 2010 et 2011.
Sans entrer dans le détail du volet recettes du programme de stabilité, je rappelle quelques engagements fermes du gouvernement : il n’y aura pas d’augmentation généralisée des impôts ; la réforme de la fiscalité du patrimoine sera neutre pour les recettes fiscales de l’État sur l’ensemble de la période, la hausse des recettes résultant essentiellement de la reprise de l’activité et de la réduction, à hauteur de 3 milliards d’euros, des dispositifs dérogatoires.
Le programme de stabilité de la France s’inscrit dans le prolongement de l’action déjà engagée en faveur de la maîtrise des finances publiques pour un retour rapide à l’équilibre de nos comptes. Il s’agit d’un objectif inédit, qui nécessite de poursuivre un effort collectif important, mais aussi d’un objectif réaliste, puisque nous récoltons déjà les premiers fruits de cet effort. Le projet visant à inscrire dans la Constitution des règles de maîtrise des déficits s’inscrit dans cette démarche de long terme visant à garantir notre modèle social et notre souveraineté nationale aux générations suivantes.
Mme Christine Lagarde - Dans la période de reprise, nous observons une élasticité de l’ordre de 1,4 point, donc plus forte que la moyenne. Le rattrapage spontané en matière de recettes étant plus rapide que ce que nous avions anticipé, nous avons choisi de retenir pour 2011-2014 une prévision certes prudente, mais conforme aux taux d’élasticité constatés sur une période longue.
S’agissant des engagements que la France a pris au titre des différents plans de soutien soumis à la Commission européenne et au Conseil, examinés par la BCE et négociés en accord avec le Fonds monétaire international - FMI -.
Les prêts consentis à la Grèce sont des prêts intergouvernementaux, puisque, à l’époque, le Fonds européen de stabilité financière n’avait pas été constitué. Sur le montant total de 110 milliards d’euros de prêts, la France s’est engagée à hauteur de 17 milliards, dont 9 ont été décaissés à ce jour. Pour la Grèce comme pour l’Irlande, les gouvernements emprunteurs ou bénéficiaires de garanties ont souscrit des conditionnalités dont la «troïka» - la Commission européenne, la Banque centrale européenne, la BCE, et le FMI - examine le respect sur place et sur pièces avant de déclencher ou non le décaissement de la tranche suivante.
En ce qui concerne l’Irlande, le plan mis en place au mois de novembre atteint un total de 85 milliards d’euros, dont une partie est couverte par l’Irlande elle-même puisque ce pays a, en quelque sorte, mis en gage l’équivalent de notre fonds de réserve des retraites, à concurrence de 17 milliards d’euros. La garantie de la France est engagée pour 5,4 milliards d’euros via le Fonds européen de stabilité financière. Je rappelle que le plan est consacré, pour une partie, à la recapitalisation des banques qui ont été largement nationalisées par l’État irlandais.
Je ne puis indiquer de montant précis concernant le Portugal. À l’heure où nous parlons, les services du Fonds monétaire international, de la Commission européenne et de la Banque centrale européennes ont engagé des discussions à Lisbonne avec les autorités gouvernementales et les forces d’opposition portugaises, ainsi qu’avec le Trésor et les organismes de statistiques de ce pays, pour vérifier la situation précise, les besoins de financement, la soutenabilité de la dette, et pour examiner quel sera le montant du soutien envisagé. Nous espérons, comme pour l’Irlande, un dispositif faisant intervenir l’Europe à 75 % et le FMI à 25 %.
Dans tous ces plans, la France est le deuxième contributeur, après l’Allemagne et avant l’Italie, sa part s’élevant à 20 % environ.
Les restructurations de dettes que vous évoquez ne sont ni envisagées, ni envisageables, ni donc à l’ordre du jour. Ce qui est à l’étude, en particulier avec le gouvernement grec, est un meilleur ciblage de certains programmes, notamment le programme de privatisations dont le Premier ministre, M. Papandréou, a annoncé qu’il discuterait les détails devant le Parlement dès la semaine prochaine.
Si j’ai choisi de vous répondre en priorité sur ce point, c’est qu’il me paraît fondamental pour les chiffres, les engagements et les réformes envisagés dans le programme de stabilisation. Nous sommes dans une situation où les dettes souveraines sont examinées de manière individuelle sans aucune forme de préjugé ou de discrimination. On l’a encore vu hier lorsque Standard & Poors a révisé la perspective envisagée à l’égard des Etats-Unis : toutes les dettes, toutes les politiques budgétaires, toutes les politiques monétaires et toutes les politiques de réformes structurelles sont examinées avec la plus grande attention. La dette de chacun de nos pays doit être refinancée et nous devons pouvoir faire appel aux marchés dans les meilleures conditions. La France, de même que six autres pays de l’Union européenne, bénéficie de la note «triple A» avec perspectives stables. Il faut impérativement défendre cet état de fait et écarter toute question, tout doute sur la réalité de notre engagement collectif. Même si cela peut paraître naïf, je pense qu’il faut savoir oublier les lignes partisanes le temps de cet exercice de salubrité.
Le passage de la prévision de déficit de 7,7 % à la réalisation à 7 % tient pour partie, comme le relève le rapporteur général, à l’amélioration du solde pour la partie collectivités locales ainsi qu’à des résultats bien orientés en matière de sécurité sociale. Nous avons en effet intégré en structure la tendance observée en matière de droits de mutation, qui devrait se poursuivre même si elle ne sera pas aussi spectaculaire qu’en 2010. Par ailleurs, nous sommes à mi-mandat municipal, si bien qu’un rebond des investissements est probable. Cela étant, le remboursement anticipé du FCTVA a déjà «boosté» une partie de ces investissements en multipliant par deux, en moyenne, les budgets de travaux publics, voirie et autres. On peut donc penser qu’en 2014 - à la fois date butoir du programme de stabilité et année de fin de mandat municipal - nous respecterons l’équilibre général.
Le gel des dotations de l’État, qui est une mesure courageuse et nécessaire, est aussi une occasion pour chacun de réfléchir à une nouvelle approche de la fiscalité locale et de la problématique de l’investissement - et surtout de la maîtrise dans la durée de la charge qu’il induit. Nous considérons que nous avons des raisons solides pour inscrire deux ou trois de ces paramètres dans la loi de programmation des finances publiques.
Concernant le recyclage des excédents et les mesures complémentaires à prendre pour tenir nos objectifs. Il faut noter que ces bonnes nouvelles auraient pu nous orienter vers une forme de facilité - mais totalement hors du temps, comme on le voit avec le Portugal, voire avec la notation de la dette américaine. Bref, nous aurions pu nous dire que nous étions déjà au rendez-vous. Mais il faut au contraire conserver la plus grande détermination à inscrire dans la durée ces mesures de maîtrise de la dépense. La grande nouveauté du budget que vous avez voté, et le gouvernement vous en est chaque jour plus reconnaissant, c’est la conjonction de mesures sur la gestion et la maîtrise des dépenses.
Cela ne souffre aucun relâchement. Certes, nous sommes en avance sur le plan de marche, mais le niveau du déficit reste considérable et il n’y a pas une journée à perdre pour revenir aux critères des traités que la France a signés. Le rendez-vous est en 2013. C’est pour cela qu’il ne peut pas y avoir de débat sur les éléments de base qui doivent permettre d’atteindre ces objectifs, allant du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite aux niches fiscales. C’est pour cela que nous ne nous éloignerons pas de la loi de programmation des finances publiques, dont nous pensons qu’elle constitue un juste équilibre entre la réduction du déficit et le soutien à notre activité économique et à notre compétitivité.
Cela me conduit aux recettes pour 2012 : la marche à franchir sera un peu moins haute que prévu, grâce à l’amélioration de 0,7 % de PIB du déficit. En réalité, nous passerons en gros à un effort de 22 milliards d’euros à produire, largement nourri par l’augmentation des recettes liée à l’activité économique.
Concernant les niches fiscales, nous en restons donc à 3 milliards d’euros : nous n’avons pas d’autre mesure à ce stade, mais je suis à votre disposition pour en parler. Nous ne toucherons pas non plus à la norme de progression des dépenses en valeur de l’État hors dettes et pensions, et cela malgré l’inflation. C’est essentiel.
Quant aux diverses annonces qui tournent autour de l’emploi, l’ensemble des dépenses nécessaires, soit 500 millions d’euros, sont gagées par des annulations de crédits ou des économies sur les autres ministères. Le même raisonnement est valable pour les opérations extérieures.
Pour ce qui est des -5 % en 2011 et -2,5 % en 2012 et 2013, il n’y a pas lieu de revoir le calendrier. Il est exigeant, un tel effort n’a jamais été fait, mais nous devons le faire. Il en va tout simplement de la crédibilité de la parole française et de la solidité de notre reprise économique. Il s’agit aussi d’inscrire un nouveau regard, une nouvelle approche dans la durée. Cette réforme de notre loi fondamentale sur l’équilibre des finances publiques est un élément constitutif de la solidité de la parole française vis-à-vis de ses partenaires.
Enfin, je confirme que la suppression du bouclier fiscal, qui aura pour effet collatéral la modification en profondeur et l’allégement de l’ISF, sera neutre pour les finances publiques. C’était l’une des contraintes de la réforme. Vous en connaîtrez toutes les modalités techniques dès que nous la présenterons au Conseil des ministres, le 11 mai, et vous verrez qu’elle est financée par ceux-là mêmes qui sont actuellement assujettis à l’ISF. Il n’y a de cadeau pour personne.
Nous avons exporté plusieurs mesures pour répondre à la crise. Qu’il s’agisse de la médiation du crédit, de la Société de prises de participation de l’État, de la Société du financement de l’économie française, du Fonds stratégique d’investissement ou de la prime à la casse, tous ces éléments ont été repris par plusieurs de nos partenaires. Je l’ai encore entendu dire à Washington il y a quarante-huit heures : parce qu’elle a su réagir, la France a pu bien résister à une crise financière et économique historique.
Il a également été évoqué l’écart existant entre l’objectif de déficit de la loi TEPA et le début de la crise. Vous ne pouvez oublier que la loi TEPA a été votée le 4 août 2007 et que la crise a également débuté, avec la fermeture, par la BNP, des premiers fonds, dès le mois d’août 2007, et non le 15 septembre 2008, lorsque Lehman Brothers s’est écroulé.
En ce qui concerne le solde structurel, je rappellerai que le chiffre de 5,1 % intègre l’impact du plan de relance, lequel était nécessaire pour permettre à la croissance française de redémarrer. Nous assumons notre politique en la matière : nous avons souhaité soutenir l’activité en pratiquant une politique de l’offre à travers le crédit d’impôt recherche, la réforme de la taxe professionnelle et des mesures de relance à long terme, qui sont déterminantes pour améliorer la compétitivité, alors que les mesures à court terme ont une efficacité réduite.
S’agissant des prélèvements obligatoires, ni François Baroin ni moi-même ne nous cachons derrière les chiffres. Le pourcentage de ces prélèvements augmente légèrement entre 2007 et 2012, et nous n’en rougissons pas. Les paramètres macroéconomiques ont changé, affectant un programme qui aurait été sans aucun doute différent si la crise n’avait pas eu lieu. Je le répète : la politique économique que nous avons conduite de 2008 à 2010 n’aurait pas été la même si nous n’avions pas dû affronter cette crise.
Il a été déclaré que notre prévision de croissance de 2,5 % est irréaliste, alors que nous trouvons le même chiffre dans les documents du parti socialiste ! Sans doute sera-t-il évoqué un programme économique différent du nôtre, fondé sur l’amélioration de la demande par le biais des 300 000 emplois jeunes. Nous pensons qu’il est nécessaire de prendre des mesures visant à favoriser l’emploi, afin de lutter contre le chômage, de préserver la cohésion sociale et de soutenir la consommation. En revanche, nous refusons le biais des emplois aidés dans le secteur non marchand. Nous souhaitons favoriser des politiques d’emploi durable et de formation professionnelle permettant de ramener les Français vers le secteur marchand.
Nous comparerons nos méthodes et les Français jugeront.
Il ne nous paraît pas déraisonnable de prévoir 0,4 point au titre de la reconstitution des stocks par les entreprises françaises, du fait que cette reconstitution a été, jusqu’à présent, très faible.
Nous avons effectivement prévu que le commerce extérieur continuerait de peser sur la croissance, en y contribuant négativement pour 0,1 point, au lieu de 0,4 observé précédemment, parce que, vous le savez comme nous, l’amélioration du commerce extérieur dépend des gains de compétitivité réalisés par les entreprises à l’interne. Or les réformes engagées depuis presque quatre ans vont commencer de produire leurs effets.
Si les deux premiers mois de l’année ont été mauvais, c’est notamment en raison du renchérissement du coût de la matière première, notamment pétrolière. De plus, il y a eu peu d’exportations d’aéronefs, en l’occurrence de livraisons d’Airbus à partir du territoire français.
Le solde agro-alimentaire et vinicole est quant à lui en voie d’amélioration, alors qu’il s’était sensiblement détérioré les derniers trimestres. Ce secteur est tiré par le commerce international, l’essentiel de la demande venant de la zone Asie-Pacifique. Il en est de même du solde automobile, qui reste toutefois négatif.
Pour ce qui touche à la formation brute de capital fixe, durant trois ans, la chute a été constante. C’est pourquoi il nous a semblé légitime de fixer un chiffre nettement plus élevé, assis à la fois sur cette baisse brutale subie par les entreprises françaises les trois dernières années et sur le fait que l’ensemble des indices manufacturiers et des services sont positifs, ce qui nous conduit à penser que les entreprises veulent investir.
À productivité stable, nous avons également prévu une augmentation de la quantité des emplois et une propension à la consommation plutôt qu’à l’épargne, légèrement supérieure au chiffre enregistré jusqu’à présent - un des plus élevés de l’Union européenne.
Le taux des émissions à taux fixe tourne autour de 2,85 %. Prévoir 3,3 % pour 2011 et 3,5 %, puis 3,6 % pour les années suivantes, c’est-à-dire une légère augmentation, inférieure à la moyenne observée depuis la création de la Banque centrale européenne et de la zone euro, ne nous paraît par déraisonnable. Ce taux est calculé à la fois sur le coût actuel des emprunts à taux fixe, du taux moyen observé sur les dix dernières années et des indications de politique monétaire subtilement fournies par la BCE, selon lesquelles l’augmentation récente du taux d’intérêt n’était pas vouée à se répéter. Mais je reconnais que prévoir un taux d’intérêt pour l’année 2013 relève de l’art de la prévision plutôt que du souci de précision.
S’agissant de la réduction des déficits, prévoir deux tiers de réduction des dépenses et un tiers d’augmentation des recettes me paraît procéder d’un bon équilibre.
Je proposerai à François Baroin de joindre au document que nous soumettrons à nos partenaires européens et à la Commission de Bruxelles un procès-verbal récapitulatif des observations consignées en séance publique à l’occasion du débat consacré au semestre européen.
M. François Baroin - Il me paraît également très positif d’intégrer les éléments du débat qui permettront d’éclairer la Commission européenne et nos partenaires sur les positions réelles de chaque formation politique française, étant entendu que la majorité ne manquera pas d’accompagner le gouvernement dans sa démarche de réduction des déficits.
Il est trop tôt pour documenter les niches fiscales. Je ne suis pas un doctrinaire, vous le savez. Serons-nous prêts pour le projet de loi de finances pour 2012 ou faudra-t-il attendre le début de la nouvelle législature ? Il me paraît plus pertinent, dans le cadre de la convergence avec l’Allemagne et d’une réforme fiscale de plus grande envergure, d’attendre le début de la prochaine législature pour débattre de ce qui relève d’une niche fiscale, c’est-à-dire d’une mesure fiscale dérogatoire au droit commun, et de ce qui relève des modalités de calcul de l’impôt sur le revenu, qui additionnent également des mesures dérogatoires au droit commun, mais sous une autre classification, échappant au débat budgétaire.
S’agissant des modalités de calcul de la réforme de l’ISF, je vous donne rendez-vous au conseil des ministres du 11 mai. Vous avez donné un exemple : je tiens à rappeler que, si l’équilibre financier de la réforme repose sur les successions, ne seront concernés que les 3 % d’entre elles qui ne sont pas couvertes par la loi TEPA.
Le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite permet de réaliser une économie brute de quelque 900 millions d’euros par an.
Quant au gel du point d’indice des fonctionnaires, que j’ai annoncé ce matin aux organisations syndicales, en compagnie de Georges Tron, je rappelle qu’un point équivaut à peu près à 900 millions d’euros pour la fonction publique d’État, et à un peu plus d’un milliard d’euros pour les collectivités locales. La réunion de ce matin, qui a duré une heure et demie, a été de grande qualité, et elle s’est tenue dans le plus grand respect des uns et des autres. Nous avons d’ailleurs conclu, il y a trois semaines, un accord sur la lutte contre la précarité dans la fonction publique, qui a été signé par six syndicats, dont la CGT. Chacun sait pourtant que son habitude n’est pas de soutenir l’action ou les propositions du gouvernement. Le dialogue social ne s’arrête pas à la problématique de la progression du point d’indice !
Par ailleurs, cette progression représente moins de 25 % de l’évolution du pouvoir d’achat des fonctionnaires, qui a augmenté de 3,5 % l’an dernier, et devrait progresser de 3,2 % en 2011. Cette évolution sera donc supérieure à celle du coût de la vie grâce aux mesures relatives au glissement vieillesse-technicité - GVT - et à la garantie indemnitaire du pouvoir d’achat. C’est un domaine dans lequel nous avons beaucoup progressé.
En ce qui concerne les perspectives budgétaires européennes, je rappellerai, sous le contrôle de Christine Lagarde, dont je salue l’implication personnelle et la force de conviction, que la France a obtenu gain de cause. La hausse du budget européen devrait se limiter à 2,9 %, alors que le point de départ des discussions, fixé par la Commission, était une augmentation de 6 %. Tant que nous resterons dans une logique de réduction des déficits en France, comme ailleurs, nous souhaitons que le même esprit de responsabilité anime toutes les institutions, qu’elles soient nationales ou européennes.
L’ONDAM sera effectivement réduit de 0,1 point, mais il reste une marge de discussion, tant pour la définition de l’objectif lui-même que pour les modalités du comité d’alerte.
Mme Christine Lagarde - Nous sommes en présence d’un risque d’inflation par les coûts importés. Il est perceptible partout, et la Banque centrale européenne y est très attentive. Pour autant, l’inflation sous-jacente n’est pas du tout alarmante : elle est parfaitement maîtrisée. En théorie, il n’y a pas d’effet de second tour si l’on reste très attentif à cette inflation sous-jacente. Nous surveillons très attentivement les évolutions. Si l’inflation importée devait persister longtemps, il y aurait des risques sérieux d’inflation de second tour. Nous devons éviter ces risques afin d’atteindre notre objectif de stabilité des prix, propice à un climat de croissance.
Sur la poursuite de la hausse du coût des matières premières, je peux indiquer qu’une augmentation de 20 dollars du prix du baril de pétrole aurait un impact d’environ 0,1 point, selon nos modélisations. Nous devons donc rester extrêmement attentifs.
Le montant que nous avons retenu - 101 dollars - peut paraître très conservateur, mais je tiens à rappeler que c’est une estimation moyenne : nous avons déjà vu le prix du pétrole augmenter massivement et diminuer tout aussi brutalement. On observe aujourd’hui des réajustements quasi-automatiques, qui résultent de la rencontre de l’offre et de la demande, mais aussi des anticipations d’augmentation du prix, lesquelles conduisent en fait à une diminution de la demande. Des producteurs saoudiens ont ainsi constaté que leurs réserves, d’environ 3,5 millions de barils, n’ont pas été utilisées : du fait des inquiétudes liées à l’augmentation du prix, la demande s’est ajustée.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 22 avril 2011