Texte intégral
Le 8 février dernier, au Conseil économique, social et environnemental, (CESE), le Président de la République ouvrait le grand débat national sur la dépendance.
Aujourdhui, ce débat existe et nous mobilise.
Avec Marie-Anne Montchamp, nous avons reçu les principaux responsables politiques et syndicaux, ainsi que les représentants des principales associations du secteur médico-social, les associations familiales, les associations dusagers, les représentants des cultes et des grandes familles de pensée, les experts et les professionnels de la prise en charge des personnes dépendantes.
Le 2 février dernier, nous avons installé, avec Philippe Richert, quatre groupes de travail thématiques qui regroupent des élus, des experts, les représentants des grandes centrales syndicales, des représentants des usagers, les principales associations du secteur et des professionnels.
Ces groupes sont animés par les quatre personnalités présentes à mes côtés aujourdhui : Annick Morel, Evelyne Ratte, Jean-Michel Charpin et Bertrand Fragonard.
Les comptes-rendus des travaux de ces groupes seront mis en ligne au fil de leau. Certains le sont déjà.
Leurs propositions seront dévoilées dès le mois de juin.
Dores et déjà, jai voulu dresser ce matin un bilan détape pour voir où nous en sommes. Jy reviendrai dans un instant.
Désormais, avec le lancement des débats en région, cest une nouvelle phase qui souvre (I).
Dans quelques jours et jusquau mois de juin, se tiendront les débats interdépartementaux en région. Le premier dentre eux aura lieu le 18 avril dans les Pays-de-la-Loire, à Angers.
Auront lieu également 4 colloques interrégionaux reprenant les thématiques des groupes de travail : Nantes le 9 mai, Bordeaux le 31 mai, Marseille le 14 juin et Strasbourg le 20 juin.
Une large place sera laissée aux citoyens.
Je lai dit, un site Internet dédié au débat national a également été lancé (www.dependance.gouv.fr). Visiblement, au regard des nombreuses contributions postées, ce chantier de réforme intéresse les Français.
Au-delà des témoignages personnels et des multiples propositions, je note surtout que laccent est mis sur une plus grande reconnaissance du rôle des aidants.
Cest précisément pour rencontrer directement les familles concernées quavec Marie-Anne Montchamp nous participerons à tous les débats en région.
Dautres membres du Gouvernement seront présents, par exemple Nora Berra ou Maurice Leroy.
Je pense aussi à Philippe Richert qui, en tant que ministre chargé des collectivités territoriales, a toute la légitimité pour participer pleinement à ce débat.
A lissue de cette grande consultation et à partir de lensemble de ces travaux, je remettrai une synthèse au Président de la République.
Cette synthèse pourrait sinspirer en partie des bonnes pratiques de nos voisins. Le conseil danalyse stratégique a dailleurs été missionné spécifiquement sur ce sujet.
Moi-même, je me suis rendue dans plusieurs pays. En Suède par exemple, jai rencontré la secrétaire dEtat en charge des personnes âgées, et jai pu discuter, avec les représentants des communes et des régions, de la gouvernance très décentralisée de la dépendance, couplée à un financement assuré, à titre principal, par les communes.
Jen ai retiré une conviction forte : cest une gouvernance de proximité qui favorisera une meilleure efficience dans la gestion des systèmes sociaux.
Je me suis également rendue en Allemagne, car les Allemands réfléchissent à des alternatives à la branche dépendance quils ont mise en place. Ils ont en effet été obligés de réévaluer la contribution sur les salaires et les retraites qui la financent en partie.
Je voudrais revenir à présent sur létat davancement des travaux des quatre groupes.
Alors, à quels constats ont-ils abouti à ce stade, sachant, bien sûr, que les travaux vont se poursuivre jusquen juin ?
Le premier groupe animé par Annick Morel vise à apprécier létat de lopinion sur la dépendance et le regard porté sur le vieillissement.
Il a permis de souligner à quel point les termes de « vieillissement » et de « dépendance » sont trop souvent perçus de manière négative.
Parler de la dépendance, cest aussi, dans une approche globale, envisager, de façon positive, la place des personnes âgées dans notre société et notre conception du vieillissement.
Cela signifie, par exemple, prendre en compte tout lenvironnement dans lequel les personnes âgées évoluent pour modifier notre société : logement, mobilier urbain, transports, commerces, etc. Comment donner une place aux personnes âgées si tout ce qui les entoure est inadapté ?
Cela signifie également prévenir les situations de perte dautonomie en se dotant des outils adaptés.
Le groupe a également montré à quel point lamélioration de la coordination de la prise en charge autour de la personne âgée dépendante et son inscription dans un parcours cohérent et adapté devait constituer un axe central de réflexion pour lavenir. Enfin, la situation des aidants et lamélioration de leur accompagnement ont été largement évoquées.
Animé par Jean-Michel Charpin, le deuxième groupe sest chargé dévaluer la réalité et lampleur du phénomène de la dépendance et den estimer le coût macro-économique.
Même si toutes les hypothèses nont pas encore été validées et si plusieurs scenarios sont à létude, le constat est là : nous devrons faire face à un nombre croissant de personnes dépendantes, dans une proportion plus importante que ce que les dernières projections de 2005 laissaient entendre.
Ainsi, le groupe fonde ses travaux sur une hypothèse denviron 1 400 000 personnes dépendantes à lhorizon 2020, selon un scenario médian.
Le troisième groupe, celui dEvelyne Ratte, porte sur l « Accueil et [l]accompagnement des personnes âgées ». Il doit repenser la cohérence et laccessibilité de loffre de services proposée aux usagers, en établissements et à domicile, pour les personnes âgées dépendantes et leurs familles.
Le groupe a confirmé la préférence de nos concitoyens pour le maintien à domicile. En conséquence, il semblerait que le nombre actuel de places en EHPAD soit satisfaisant, sous réserve dune meilleure répartition sur le territoire.
Enfin, le groupe a discuté de lintérêt de développer, pour les personnes faiblement dépendantes, des formes daccueil intermédiaires entre, dun côté, le domicile et, de lautre, les maisons de retraite de plus en plus médicalisées.
Le quatrième et dernier groupe, animé par Bertrand Fragonard, consacre ses travaux à la gouvernance et aux modes de prise en charge de la perte dautonomie. Il a notamment vocation à établir un état des lieux et à proposer les évolutions possibles de la répartition de la charge financière liée à la dépendance.
Ce groupe a dressé un premier constat significatif : tandis que la couverture de la dépendance au sens strict est en très grande partie assurée par des sources dorigine publique, ce sont au contraire des dépenses privées qui couvrent la plus grande partie de lhébergement. Cela signifie des restes à charge élevés pour les personnes qui vivent dans des établissements médico-sociaux.
Lensemble de ces travaux va se poursuivre et toutes les pistes doivent rester ouvertes, sans parti pris, ni idéologie.
Pour terminer mon propos, je souhaiterais indiquer quelques éléments de cadrage sur la question du financement, de la gouvernance et des personnes faiblement dépendantes.
Le Président de la République a tout dabord écarté lidée dalourdir le coût du travail pour financer la dépendance, ainsi que celle daugmenter la dette en reportant le financement sur les générations futures.
Il ressort ensuite des consultations que jai menées, un consensus en faveur du maintien dun large socle de solidarité nationale.
Ce socle solidaire sélève aujourdhui à 25 milliards deuros. Il ne diminuera pas.
En outre, quelle que soit la solution retenue, nous devrons proposer un mode de gouvernance fondé sur un paritarisme renouvelé, associant lensemble des acteurs.
Le Président de la République la en effet rappelé : les partenaires sociaux devront être étroitement associés au pilotage, à la surveillance et au contrôle du système de prise en charge de la dépendance, quel quil soit. Il faudra naturellement y associer dautres acteurs.
Enfin, en ce qui concerne les personnes faiblement dépendantes, cest-à-dire les bénéficiaires classés en GIR 4, je note que personne aujourdhui ne propose de les exclure du bénéfice de lAPA.
Cette prise en charge procède en effet dune logique de prévention quil est indispensable de conserver.
Les premiers travaux des groupes de travail lont bien montré : pour lheure, nous ne pouvons nous prévaloir daucune certitude et la question de la dépendance ne trouvera pas de réponse unique.
Nous devrons y apporter des solutions multiples, individualisées et adaptées, allant de ladaptation de nos villes pour mieux accueillir les personnes âgées à laccompagnement de nos aidants.
Source http://www.dependance.gouv.fr, le 18 avril 2011