Texte intégral
Nous voici déjà parvenus au terme de ce 3e débat interrégional.
Comme pour les deux premiers et comme, dailleurs, pour lensemble des débats interdépartementaux qui se sont déjà tenus, force est de constater la qualité des échanges.
Le choix des intervenants, tous particulièrement compétents, ny est évidemment pas étranger, tout comme lhabileté dAnne Chevrel, que je remercie davoir animé le débat.
Mais jy vois aussi le signe dun engagement fort, dune volonté indéfectible : améliorer, encore et toujours, laccueil et laccompagnement des personnes âgées, pour le bien-être de nos aînés, mais aussi pour la grandeur de notre société.
Car et cela, jai coutume de le dire souvent , cest bien de la façon dont notre société considère les plus vulnérables de nos concitoyens quelle tire tout à la fois sa force et sa splendeur.
De ce point de vue, vos réflexions sont primordiales, dans la mesure où elles nous aident à définir notre projet commun, notre projet de société.
La présence du Premier Ministre en ouverture du débat dit assez la valeur de ces réflexions.
Certaines orientations font consensus, dautres révèlent des points de vue différents. Cependant, cest dabord au débat, dynamique et constructif, que je veux rendre hommage, car je mesure son importance dans une société qui a tout à gagner à réinterroger sans cesse ses valeurs et ses pratiques.
Comment prendre en charge les personnes âgées dépendantes ? Quelles solutions doivent être développées ? Comment repenser la cohérence et laccessibilité de loffre de services proposée aux usagers, en établissements et à domicile ?
Ces questions sont déterminantes, et je vous remercie davoir bien voulu y répondre.
Je veux dabord madresser à vous, chère Evelyne Ratte, ainsi quà tous les membres de votre groupe de travail.
Depuis linstallation de votre groupe en février dernier, jai pu observer votre remarquable et précieuse implication sur ces questions. Vous êtes ainsi parvenus à établir un état des lieux précis de loffre dhébergement en établissement et du secteur de laide et des soins à domicile. Ce diagnostic était évidemment indispensable.
Dans un second temps, vos réunions régulières vous ont permis de formuler des propositions, qui me seront rendues dans quelques jours.
Mes remerciements sadressent ensuite au panel de citoyens, qui a su sapproprier un sujet complexe et parfois technique. Je ne doute pas que les discussions approfondies auxquelles nous venons dassister ont permis à lensemble du public de mieux comprendre les enjeux majeurs du sujet qui nous occupe.
Je voudrais, en proposant une synthèse de ce débat, parvenir à en restituer la richesse.
Alors, que retenir de ces nombreux échanges ?
1er constat : le maintien à domicile est une aspiration massive et légitime de nos aînés. Létude qualitative réalisée par TNS Sofres à loccasion de ce débat le montre une nouvelle fois.
Faciliter le maintien à domicile paraît donc primordial.
Pour cela, il est important de garantir des services de qualité, de proximité et accessibles ; dadapter le logement et de promouvoir les technologies et services de la santé et de lautonomie ; ou encore de favoriser une meilleure coordination des intervenants et un meilleur accompagnement des aidants.
Cependant, nous le savons bien, le maintien à domicile a ses limites. Les risques de maltraitance ou daccidents domestiques, ainsi que les difficultés daccessibilité de lenvironnement urbain ou le manque de services de proximité, ne doivent pas être ignorés.
En outre, dans certains cas, létat de santé physique ou mental, combiné à labsence de lentourage familial, ne permet tout simplement plus le maintien à domicile.
Dès lors, loffre en établissements est-elle satisfaisante ? Doit-elle évoluer, et comment ?
Cest là le 2e constat que nous pouvons faire : loffre en établissement dhébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) est satisfaisante, à la fois en qualité et en quantité - sous réserve dajustements territoriaux.
Nous devons néanmoins consolider cette offre existante en poursuivant leffort de médicalisation des établissements et, au-delà, en engageant un chantier de rénovation important pour certains dentre eux.
Nous devons également diversifier la palette des solutions proposées, en développant des structures de répit pour les aidants et, pour les personnes faiblement dépendantes, des structures intermédiaires entre, dun côté, le domicile et, de lautre, les EHPAD très médicalisés.
Jai pris connaissance en Allemagne dexpériences très intéressantes dappartements regroupés autour de services communs et dun accueil de jour. Dautres formules sont vraisemblablement à développer, comme laccueil familial ou le béguinage, par exemple.
Ces structures intermédiaires ont lavantage doffrir un hébergement sécurisé et adapté, tout en proposant une aide à la vie quotidienne et en préservant le lien social. Elles recueillent dailleurs lintérêt de la plupart des personnes interrogées par TNS Sofres.
Le 3e constat concerne le reste à charge, qui représente en moyenne 1 468 par mois. Il est, en effet, difficilement supportable pour la plupart de nos concitoyens, en particulier pour les familles issues des classes moyennes à revenu modeste. Nous apporterons des réponses, dès cette année, à cette difficulté, pour une meilleure solvabilisation de la dépense dhébergement.
Ce sujet sera évidemment évoqué dans une semaine à Strasbourg, lors du dernier débat interrégional consacré à la « Stratégie pour la couverture de la dépendance des personnes âgées ».
4e constat : il nous faut structurer le dispositif autour dun objectif prioritaire : la coordination.
Chacun le sait, notre système de prise en charge est encore trop cloisonné. Cloisonnement, tout dabord, entre le secteur sanitaire et les établissements ou services médico-sociaux ; cloisonnement, ensuite, entre le domicile et la prise en charge en établissement
Nous devons améliorer la coordination autour de la personne, mieux articuler les secteurs ambulatoire, hospitalier et médico-social et encourager les décloisonnements. Les EHPAD pourraient par exemple devenir les pivots de laccompagnement à domicile. Il nous faut, en outre, porter une attention particulière à ce moment clé que constitue la sortie de lhôpital.
A domicile, une meilleure articulation des intervenants entre eux est essentielle. Songeons que, parfois, ce sont 20 personnes différentes qui se succèdent au domicile dune personne âgée !
Ce que je retiens du débat, cest aussi quil faut mettre fin au parcours du combattant des familles et améliorer linformation.
Jai souhaité, vous le savez, que nous mettions en place des indicateurs de qualité dans les EHPAD. De tels dispositifs existent déjà dans dautres pays, notamment en Suède, où je me suis rendue et où jai pu observer ce qui se faisait : des indicateurs de satisfaction, dencadrement pas nécessairement médical , de consommation de médicaments ou encore de gestion de la douleur.
Les travaux ont déjà démarré. Ces indicateurs seront prêts en 2012.
Enfin, je voudrais dire quelques mots sur une exigence incontournable : favoriser une culture de la bientraitance.
Des progrès indéniables ont été accomplis dans le domaine de la lutte contre les maltraitances :
mise en place (en 2000) dun dispositif dalerte avec centralisation et traitement rapide de linformation et intervention rapide des services de lEtat en cas durgence ;
mise en place (en 2008) dun numéro vert 39 77, afin de faciliter le signalement des faits de maltraitance ;
renforcement des contrôles opérés par les agences régionales de santé au sein des établissements sociaux et médico-sociaux : 4 000 inspections (dont 45% dans les établissements hébergeant des personnes âgées) à réaliser sur 5 ans.
En outre, depuis sa création en 2003, le Comité national de vigilance contre la maltraitance des personnes âgées élargi, en 2007, aux adultes handicapés est chargé de définir les outils pour la mise en uvre de la politique nationale.
2 guides de gestion des risques de maltraitance lun destiné aux établissements dhébergement, lautre aux services daide à domicile ont ainsi été réalisés.
Laccompagnement des EHPAD dans une dynamique de bientraitance seffectue également par le biais de la formation : la formation bientraitance a, par exemple, été généralisée sur la base des outils Mobiqual, dans le cadre dune convention avec la Caisse nationale de solidarité pour lautonomie (CNSA).
Par ailleurs, lAgence nationale de lévaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ANESM) a diffusé dans les EHPAD, en 2009, un outil dauto-évaluation de la bientraitance, à partir de sa recommandation sur la même thématique.
Mais le plus souvent, les phénomènes de maltraitance ont lieu au domicile des personnes âgées.
Lenjeu du débat est de fournir des pistes, par exemple prévenir les actes de maltraitance par : un accompagnement renforcé des aidants, parfois isolés et épuisés ; des visites plus fréquentes des équipes médico-sociales à domicile ; le développement du recours à des tiers de confiance (notaires, gestionnaires de biens agréés, avocats ) pour éviter les phénomènes de captation.
Ce qui est certain, cest que le professionnalisme de celles et ceux qui ont choisi de soccuper des personnes âgées est déterminant.
Encourager les jeunes générations à aller vers les métiers orientés vers les personnes âgées : cest aussi lun des enjeux de la réforme, par le biais, peut-être, de lélaboration dun plan métier.
Ce débat interrégional touche à sa fin, mais cest aussi, plus largement, le grand débat national qui est sur le point de se terminer.
Cette semaine se tiendront les deux derniers débats interdépartementaux, ceux du Limousin et de la région PACA. Mercredi, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) rendra son avis.
Le tout dernier débat, le dernier débat interrégional, se tiendra à Strasbourg le 20 juin et les rapporteurs des 4 groupes de travail me remettront leurs propositions le 21.
Je remettrai moi-même, à lété, une synthèse générale au Président de la République.
Cest avec beaucoup de confiance que je me prépare à aborder ces échéances finales, convaincue de notre capacité à faire face au défi de lallongement de lespérance de vie et de laugmentation des situations de dépendance.
Sil faut bien se garder de confondre vieillissement et dépendance, lun et lautre doivent être envisagés avec lucidité et responsabilité. Je suis heureuse de pouvoir le faire avec vous.
Source http://www.dependance.gouv.fr, le 15 juin 2011