Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
à cet instant il me revient la responsabilité parfaitement illégitime de conclure les travaux de votre 9ème Université de la Défense. Permettez-moi, au nom de la communauté de la Défense tout entière, très largement représentée ici, de remercier ceux qui oint fait leffort, quelles que soient leurs responsabilités professionnelles, leur mandat, leur engagement, de participer à cette réflexion collective, de lenrichir, et ainsi de montrer toute la mobilisation des élites de notre pays sur cette grande fonction régalienne qui est au coeur même de lhistoire de notre pays, la fonction de défense.
Je voudrais saluer naturellement les parlementaires ici présents, le Président du Conseil régional de sa région, et au premier rang de ces parlementaires, saluer naturellement les Présidents Guy TEISSIER et Josselin de ROHAN. Guy TEISSIER me permet, parce quil a parlé avec la compétence et lautorité qui est la sienne, de méloigner de mon propos dorigine. Mais il est là parfaitement légitime tant son implication est grande. Jaurai évidemment un mot très amical pour Josselin de ROHAN. Je voudrais souligner deux caractéristiques assez peu communes dans la vie publique. Ce sont à la fois lindépendance et la loyauté. Lindépendance car il forme son jugement en toute liberté. Et la loyauté car il termine toujours les combats politiques dans le camp dans lequel il les a commencés, ce qui nest pas si fréquent. Jajoute, pour avoir été son lointain successeur au Sénat, quil ne laisse que des amis dans cette assemblée, et que des regrets. Mais c'est son libre choix et c'est, au fond, le trait même de sa personnalité, c'est-à-dire beaucoup de pudeur et beaucoup de dignité.
Je voudrais avoir un mot plus quamical, respectueux, pour la DGA et pour son Délégué général. Mais jen ai dit tellement de bien à Bagneux, à loccasion du 50ème anniversaire, que je ne vois pas la nécessité de le répéter à cette instance. Un mot amical pour son Délégué général parce que nous menons ensemble des réflexions, des actions, des combats, pour défendre notre budget, pour gagner des marchés, pour mobiliser des partenaires. Vous le connaissez mieux que je ne le connais, chaque jour je le découvre et à chaque découverte je lapprécie un peu plus. Je dirai simplement que la DGA est un des éléments de force de notre pays dans cette culture de la Défense.
Jaimerais avoir un mot très amical pour Olivier DARRASON. Cest un homme qui a su choisir. Les électeurs avaient fait de lui un parlementaire et nous avons siégé ensemble à lAssemblée nationale, mais après avoir connu les mêmes débuts professionnels dans le corps préfectoral, il a fait le choix de la liberté, c'est-à-dire le choix de lentreprise. Mais comme c'est un homme passionné, il a décidé dentreprendre. Il aime entreprendre et il aime ce quil entreprend, cest sans doute la raison de son succès et c'est la raison pour laquelle il sagit bien dune 9ème Université qui fédère des énergies et des engagements de toutes origines. Là encore, c'est un service, cher Olivier, que tu rends à notre pays, car la Défense doit être appropriée par tous les Français, quelles que soient leurs convictions, quels que soient leurs engagements, quelles que soient leurs responsabilités. Dune certaine façon, ton travail permet de contribuer à cela. C'est la raison pour laquelle je demanderai que tu tengages personnellement, et en dehors de lentreprise, sur le difficile sujet de la diffusion de la technologie militaire dans les activités civiles.
Je voudrais maintenir revenir à lessentiel de ma conclusion. Trois mots simposent pour cette année 2011 qui nest pas encore totalement achevée, mais qui se présente favorablement. La fierté, la confiance et la vigilance. Et tous ceux qui ont de lintérêt pour la mission Défense doivent réfléchir à ces trois mots. La fierté est évidente parce que là où nos Armées se sont engagées, parmi les neuf champs que vous évoquiez, Amiral, trois dentre eux ont retenu lattention : la Côte dIvoire, la Lybie, lAfghanistan. Dans les trois cas, nos compatriotes peuvent ressentir une fierté davoir une communauté de Défense, des militaires, des aviateurs, des fantassins, des marins, engagés avec pertinence, efficacité, discipline, droiture, sur ces trois théâtres immédiats. Cette fierté, je crois que les soldats lont. Ils peuvent la partager avec les unités et les familles qui les soutiennent. Jévoquais lAfghanistan. Mon Général, avec votre prédécesseur, le Général IRASTORZA, trop souvent nous avons ensemble accompagné des familles lorsque les unités rendaient hommage aux combattants disparus. Je voudrais dire publiquement quaprès avoir parlé avec chacune de ces familles, nous pouvons avoir la fierté davoir des militaires qui savent pourquoi ils servent, qui acceptent leur engagement, et cet engagement est très largement partagé et compris tout autour deux. Cette fierté, je voudrais simplement que nous la partagions et que les Français la partagent. Cest leur Armée, c'est leur pays, c'est leur histoire, cest leurs traditions, cela existe, et cela est fort.
Puisque beaucoup dentre vous ici sont des industriels, lorsque nous parcourrons dans lavenir, et peut-être à Dubaï Airshow, des marchés, des rencontres, des séminaires, des colloques, des meetings pour défendre notre savoir-faire industriel, nous le ferons avec la fierté davoir des équipements qui valent tous les autres et qui, le plus souvent, valent mieux que les autres. Je voudrais évoquer une dernière fierté, celle davoir des mécanismes de décision pertinents. Pour avoir vécu de lintérieur trois de ces théâtres, dont un est dénoué, lautre en cours de dénouement, et dont le troisième se prolonge dans des conditions que Josselin de ROHAN a rappelées et que je partage totalement, cest la fierté dêtre un pays qui sait prendre des décisions, ce qui na pas toujours été le cas parmi nos partenaires. Cest un élément de force. Et cette fierté, il faut la partager parce que la culture du dénigrement et lautodérision deviennent dans notre pays parfaitement insupportables. Ceux qui ne font pas leffort de réfléchir, ceux qui ne font pas leffort dapprofondir, se contentent de ricaner, et ils le font parfois avec une présence médiatique qui devient insupportable pour ceux de nos compatriotes qui exercent avec passion leur mandat et qui ont vraiment le sentiment que ceux qui y croient sont nécessairement tirés vers le bas.
Deuxième mot : confiance. La confiance, je pourrais vous la proposer parce que nous sommes une majorité responsable, parce que nous avons la volonté de défendre notre pays, parce que nous votons les budgets. C'est dans mon rôle de militant politique, car un ministre est un homme politique, mais je voudrais aller au-delà et vous dire que cette confiance est beaucoup plus solide. Certes, nous avons la confiance fondée sur une boussole pour reprendre la formule de Guy TEISSIER qui est le Livre blanc. Cette confiance est partagée parce que ce Livre blanc est un travail collectif, et Monsieur le Secrétaire général a évoqué les conditions dans lesquelles il préparait la réactualisation. La première condition dune confiance dans un effort durable de Défense, ce sont des convictions intellectuelles au début était le Verbe partagées par le plus grand nombre, bien au-delà dune majorité, celle à laquelle jappartiens, partagées par ceux qui ont la passion de leur pays, qui lisent les cartes et savent que les cartes ne changeront pas au lendemain de lélection présidentielle. Même si parfois on aimerait que le monde tourne autour de notre nombril, il savère que cela nest pas vrai. Ces cartes sont communes à lopposition et à la majorité. Avant que nous reconstruisions le Livre blanc, il faut que la préparation de cette réactualisation soit la plus partagée possible, car la confiance repose sur une culture des questions de Défense. Jappartiens dailleurs, cher Josselin, à la première promotion de lENA qui avait introduit une option « Défense » dans lenseignement. Il a fallu attendre 1973, cela nexistait pas auparavant, mais il est vrai que les générations précédentes avaient souvent défendu leur pays larme à la main et navaient peut-être pas besoin dun enseignement théorique puisquelles avaient connu la pratique.
La confiance procède donc de cette boussole, de la mise en oeuvre dune loi de programmation, et dune culture industrielle. Le Président GALLOIS a très bien parlé au nom de lensemble des industriels. Les industriels français ont une particularité vis-à-vis du ministère de la Défense, c'est quils savent à la fois défendre chacun de leurs intérêts, mais porter une parole commune pour que notre pays sintéresse à ce quils savent faire. Vous avez évoqué deux idées, qui sont des idées durables, à caractère dual, et la construction européenne. Je ny reviendrai pas car je me sens totalement incapable dépuiser le sujet brièvement. Je voudrais simplement dire que lexistence même dune université de la Défense et le fait que des présidents de sociétés importantes, qui représentent par leur activité des milliers de salariés, des investissements considérables, et une présence mondiale, acceptent de passer quarante-huit heures dun emploi du temps lourd, à réfléchir avec des officiers régionaux, des officiers supérieurs, des universitaires, des techniciens, des diplomates, montre bien que lon peut avoir confiance dans lengagement de nos industriels dans des centres qui peuvent être multinationaux, plus profondément enracinés dans leur seul marché national, mais qui sont en tout état de cause des membres à part entière de la communauté de Défense, c'est-à-dire des gens qui veulent apporter des solutions au pays pour lequel ils travaillent. Nous navons pas devant nous des fournisseurs, mais des partenaires, et nous essayons de conduire avec eux des relations de partenariat.
Vous avez évoqué, par exemple, le soutien des capacités de recherche. Une loi de programmation oscille évidemment du choix capacitaire au choix dinnovation sur des projets nouveaux. Nous avons fait clairement le choix capacitaire dans cette loi de programmation. Cependant, nous ne voulons pas abandonner ce qui nous permettra de déclencher dautres options, dautant plus que chemin faisant, comme la guerre est dialectique et pas tout à fait prévisible, il faut réorganiser nos programmes darmement à telle ou telle occasion car les retours dexpérience du terrain nous demandent de nouveaux armements ou des armements adaptés que nous navions peut-être pas imaginés.
Enfin, lhomme politique que je suis, qui a, hélas, trente-trois ans de vie parlementaire derrière lui, a observé comment cela marchait ailleurs. Je trouve que nous pouvons avoir confiance dans notre système de décision. A un moment, je me suis posé la question de savoir si un ministre de la Défense était vraiment utile dans notre pays. Nous avons une ligne hiérarchique simple. Un Président de la République dont la Constitution fait le Chef des Armées, et dont le caractère en fait le Chef des Armées et qui, par conséquent, assume ses responsabilités avec un Chef dEtat-major. Nous avons donc une filière hiérarchique tout à fait claire. Et vous avez un ministère qui existait avant moi et qui existera après moi, cest normal, c'est la loi du genre, nous sommes des passagers, vous êtes des permanents. Le risque, c'est que pour que la chaîne verticale fonctionne, il faut une grande solidarité de la chaîne horizontale, c'est-à-dire du Chef dEtat-major, de ses chefs dEtat-major darmes, du DGA, du SGA. Tout cela fonctionne très bien en horizontal et de temps en temps, on associe le ministre auquel on demande de signer en comité ministériel des décisions qui ont été tellement mûrement réfléchies et préparées quil est bon de sa part daccompagner un mouvement issu du ministère tout entier. Cest donc un rôle qui me permet de venir aux colloques. Parce que je sais tout, mais jai du temps.
Je voudrais dire à nos compatriotes que nous avons un système constitutionnel extrêmement pertinent parce que, en effet, la conduite de la Défense de notre pays demande une décision unique. Quelquun disait que pour prendre une décision il faut un chiffre pair, et trois c'est déjà beaucoup. Nous avons donc un système qui fonctionne parce que le Président est le Chef des Armées et parce que les Armées sont au service dun projet national densemble, et un projet qui se construit dans une politique intérieure totalement maîtrisée par celui qui en a la responsabilité dans les institutions de la Vème République, le Président de la République. Et nous avons la fierté, le Ministre dEtat Alain Juppé, et moi-même, dêtre ces partenaires politiques directs, associés directement à lensemble des décisions et qui ont pour rôle de faire en sorte que tous les rouages fonctionnent et que la ligne de commandement ne soit jamais paralysée.
Dautres pays nont pas eu cette chance, et lorsquil a fallu engager en quelques heures leurs forces ou simplement leur participation à des décisions quils ne pouvaient pas attendre, on doit reconnaître que les institutions de la Vème République ont limmense mérite de donner à notre pays la réactivité, et cest un très bon sujet de confiance qui marque une différence et sur lequel il conviendrait de réfléchir lorsque lon parle de défense plus collective. Fierté, que je souhaite partagée par nos compatriotes. Confiance, car il y a des éléments stables qui font que ce qui marche en Défense nest pas le fait du hasard, mais le fait dune culture partagée, appropriée par des milieux différents, consolidée par des institutions construites, et dont je constate dailleurs quelles nont jamais été démenties par les différents présidents.
Vigilance enfin, parce que vous connaissez les contraintes et je naurai pas loutrecuidance de vous les rappeler. Je suis quand même poussé en avant par lensemble de cette ligne pour aller défendre des arbitrages budgétaires. Jai oublié un homme très important qui assure la cohérence budgétaire, cest le Premier ministre, et lorsquon prépare le budget, il faut bien que celui de la Défense ne soit pas trop étrillé dans une période sous contrainte. La première vigilance, c'est que nous, ministère de la Défense, nous avons à respecter nos engagements pour obtenir que ceux qui ont été pris par la collectivité à notre endroit le soient tout autant. C'est la raison pour laquelle jai repris le dossier 2009-2015 lancé par mon prédécesseur Hervé Morin et que je le mets en oeuvre, y compris dans ses aspects qui méritent parfois dêtre expliqués plus longuement, comme les bases de défense ; y compris dans sa dimension RGTP qui a le don dirriter tous les hauts fonctionnaires, mais qui est la contrepartie normale de leffort que la collectivité consent à la mission Défense. Nous devons nous remettre en cause, nous nous remettons en cause. Vigilance pour obtenir les crédits que nous avons obtenus de façon constante et avec le coup de pouce conjoncturel de lannée 2009. Nous sommes dans lépure de la loi de programmation, il y a une inquiétude permanente, il y a des schémas angoissants permanents, mais nous avons aujourd'hui surmonté les obstacles, y compris au début de lété lorsque les perspectives de la crise pouvaient conduire à se demander ce qui se passera en 2014. En 2014, il y aura une majorité et elle décidera. Mais en 2011, en 2012 et en 2013, nous avons les moyens de faire en sorte que les recettes exceptionnelles soient au rendez-vous. Dun côté, on met en oeuvre, et de lautre on obtient. C'est une sorte darrangement gagnant/gagnant.
Cette Université dété est consacrée à la DGA. Plutôt que de parler de laviation ou de la marine, je parle donc de larmement. La contrepartie de cet effort, cest que les objectifs capacitaires fonctionnent. Le Président de la République sest personnellement impliqué, après la tragédie dOuzbin, pour veiller à ce que nos combattants aient les meilleurs outils. Vous serez, jimagine, à Fougères pour voir lusine où se met en place le système Félin. Cest une révolution que nous envient les armées européennes et qui tient la dragée haute aux autres systèmes. Sur le combat dinfanterie, que ce soit le VBCI, le VAB Top, le Caesar, ou que ce soit le véhicule douverture ditinéraire, nous sommes au rendez-vous de la modernité, avec cette obligation permanente de sadapter. Sur la marine, qui sera peut-être votre thème lan prochain, il y a ce formidable rendez-vous, compte tenu de lespace stratégique que représentent les océans et de lavance technologique que nous a donné notre maîtrise du sujet à partir dexpériences exceptionnelles. La montée en puissance du Charles de Gaulle ne s'est pas faite en six mois, mais dix mois dopérations continues dans locéan Indien et en Libye ont apporté la démonstration que le matériel fonctionnait et quil était un véritable porte-avions au service de notre ambition, avec la capacité dentrer en premier de lArmée française sur un théâtre lorsque la demande est faite.
Nous avons à surveiller lensemble de la mise en oeuvre de ces programmes, mais nous avons cette vigilance avec les industriels. Avec eux, que pouvons-nous dire de plus ? En effet, Monsieur le Président GALLOIS, parlant non pas au nom de votre entreprise, mais au nom des industriels, nous avons le devoir dêtre Européens. Et lEurope, il faut savoir de temps en temps la provoquer. Je considère que les accords de Lancaster House sont une forme polie de mise en responsabilité de ceux qui hésitent encore à engager un effort de défense. Jai beaucoup aimé votre observation sur le petit nombre de grands pays. Les uns préfèrent les Polonais aux Espagnols, les autres préfèrent les Espagnols aux Polonais, mais du moment que les deux payent, on pourra toujours sentendre. Ce qui est certain, c'est quil y a quatre premiers qui doivent représenter ensemble sans doute 70 ou 75% de leffort de Défense : lItalie, lAllemagne, lAngleterre, et la France. Vous les industriels, rendez nous service, aimez-vous les uns les autres, de la façon la plus intelligente qui soit. Je sais bien que les coopérations internationales ont donné parfois dans le passé des souvenirs extraordinairement cuisants. Croyez-vous dailleurs que les coopérations à lintérieur des directions dune même entreprise naboutissent pas parfois à des produits invendables ? C'est la même chose. Donc, nous avons ces difficultés inhérentes à toute coopération. Si nous voulons exister face aux Etats-Unis dAmérique, qui restent un partenaire tellement puissant quil oublie parfois de considérer ses voisins immédiats, faisons en sorte que les tailles soient plus proportionnées, et pour cela acceptons la complexité de ces coopérations multinationales européennes à partir dun petit nombre de pays responsables.
Ce ne sera pas toujours linéaire. Certaines coopérations sont allées jusquau bout, certains en doutaient, et vous avez rappelé, Président GALLOIS, quau final le résultat est là. Parfois, on sefforce de faire quelque chose et le résultat amène à repartir sur dautres bases. Mais limportant est quil y ait un lien de confiance entre la communauté de Défense et le monde industriel, que nous nous parlions. Et je voudrais remercier la presse professionnelle, celle qui fait leffort de simpliquer sur les sujets. Car je puis vous dire que nous vivons, les industriels et les ministères, sous des regards particulièrement attentifs, qui ne sont pas nécessairement malveillants, mais qui ont le devoir de poser la question : et si le roi nétait pas nu par hasard ? Ces questions ne sont pas sans importance et nous les acceptons. La transparence, ce nest pas simplement pour les autres. Et si la Défense veut être forte, elle doit être partagée. Mais pour quelle soit partagée, il faut accepter le débat, nourrir les échanges, et faire en sorte que cette culture de Défense ne repose pas simplement sur les souvenirs des grands anciens.
En tant que Ministre de la Défense, jai plaisir à massocier à tout ce qui est hommage et tradition, car je suis persuadé que chacun dentre nous, quand nous faisons notre métier au quotidien, et quand nous pensons à lavenir, nous le faisons souvent avec des références issues du passé, lorsque celui-ci nous paraît exemplaire de courage, de raisonnements ouverts. Quest-ce qui est extraordinaire dans lappel du 18 juin, indépendamment des conséquences qui ont permis à la France dêtre assise à la table de la capitulation allemande ? Cest davoir eu une vision plus large et de penser que le rapport des forces inéluctablement basculerait. Je suis persuadé que chacun dentre nous avons nos références. Cela sappelle la culture. Et lorsque lon doute, on choisit plutôt des comportements exemplaires. Cela sappelle la tradition. Mais faisons en sorte que cette culture et cette tradition soient en permanence enrichies. Alors, elles seront enrichies par les retours dexpérience : la Côte dIvoire, la Libye, au quotidien lAfghanistan. Il faut accepter les retours dexpérience, y compris les moins agréables. Car si nous navons pas cette lecture critique de ce que nous sommes et de ce que nous faisons, nous risquons dêtre prisonniers dimages dEpinal qui ne sont pas nécessairement des vérités historiques. Et le rôle dune Université de la Défense, c'est certes de rendre hommage aux parcours, mais den comprendre le cheminement, davoir la culture du retour dexpérience, de globaliser notre réflexion, déchapper aux conflits politiques immédiats, qui sont parfaitement légitimes mais qui parfois nous enferment et nous interdisent de voir plus loin, et de faire en sorte que durablement la culture de la Défense en France soit profondément enracinée pour que notre pays reste sur ce terrain exemplaire en Europe et dans le monde.
Source http://www.universite-defense.org, le 27 septembre 2011
à cet instant il me revient la responsabilité parfaitement illégitime de conclure les travaux de votre 9ème Université de la Défense. Permettez-moi, au nom de la communauté de la Défense tout entière, très largement représentée ici, de remercier ceux qui oint fait leffort, quelles que soient leurs responsabilités professionnelles, leur mandat, leur engagement, de participer à cette réflexion collective, de lenrichir, et ainsi de montrer toute la mobilisation des élites de notre pays sur cette grande fonction régalienne qui est au coeur même de lhistoire de notre pays, la fonction de défense.
Je voudrais saluer naturellement les parlementaires ici présents, le Président du Conseil régional de sa région, et au premier rang de ces parlementaires, saluer naturellement les Présidents Guy TEISSIER et Josselin de ROHAN. Guy TEISSIER me permet, parce quil a parlé avec la compétence et lautorité qui est la sienne, de méloigner de mon propos dorigine. Mais il est là parfaitement légitime tant son implication est grande. Jaurai évidemment un mot très amical pour Josselin de ROHAN. Je voudrais souligner deux caractéristiques assez peu communes dans la vie publique. Ce sont à la fois lindépendance et la loyauté. Lindépendance car il forme son jugement en toute liberté. Et la loyauté car il termine toujours les combats politiques dans le camp dans lequel il les a commencés, ce qui nest pas si fréquent. Jajoute, pour avoir été son lointain successeur au Sénat, quil ne laisse que des amis dans cette assemblée, et que des regrets. Mais c'est son libre choix et c'est, au fond, le trait même de sa personnalité, c'est-à-dire beaucoup de pudeur et beaucoup de dignité.
Je voudrais avoir un mot plus quamical, respectueux, pour la DGA et pour son Délégué général. Mais jen ai dit tellement de bien à Bagneux, à loccasion du 50ème anniversaire, que je ne vois pas la nécessité de le répéter à cette instance. Un mot amical pour son Délégué général parce que nous menons ensemble des réflexions, des actions, des combats, pour défendre notre budget, pour gagner des marchés, pour mobiliser des partenaires. Vous le connaissez mieux que je ne le connais, chaque jour je le découvre et à chaque découverte je lapprécie un peu plus. Je dirai simplement que la DGA est un des éléments de force de notre pays dans cette culture de la Défense.
Jaimerais avoir un mot très amical pour Olivier DARRASON. Cest un homme qui a su choisir. Les électeurs avaient fait de lui un parlementaire et nous avons siégé ensemble à lAssemblée nationale, mais après avoir connu les mêmes débuts professionnels dans le corps préfectoral, il a fait le choix de la liberté, c'est-à-dire le choix de lentreprise. Mais comme c'est un homme passionné, il a décidé dentreprendre. Il aime entreprendre et il aime ce quil entreprend, cest sans doute la raison de son succès et c'est la raison pour laquelle il sagit bien dune 9ème Université qui fédère des énergies et des engagements de toutes origines. Là encore, c'est un service, cher Olivier, que tu rends à notre pays, car la Défense doit être appropriée par tous les Français, quelles que soient leurs convictions, quels que soient leurs engagements, quelles que soient leurs responsabilités. Dune certaine façon, ton travail permet de contribuer à cela. C'est la raison pour laquelle je demanderai que tu tengages personnellement, et en dehors de lentreprise, sur le difficile sujet de la diffusion de la technologie militaire dans les activités civiles.
Je voudrais maintenir revenir à lessentiel de ma conclusion. Trois mots simposent pour cette année 2011 qui nest pas encore totalement achevée, mais qui se présente favorablement. La fierté, la confiance et la vigilance. Et tous ceux qui ont de lintérêt pour la mission Défense doivent réfléchir à ces trois mots. La fierté est évidente parce que là où nos Armées se sont engagées, parmi les neuf champs que vous évoquiez, Amiral, trois dentre eux ont retenu lattention : la Côte dIvoire, la Lybie, lAfghanistan. Dans les trois cas, nos compatriotes peuvent ressentir une fierté davoir une communauté de Défense, des militaires, des aviateurs, des fantassins, des marins, engagés avec pertinence, efficacité, discipline, droiture, sur ces trois théâtres immédiats. Cette fierté, je crois que les soldats lont. Ils peuvent la partager avec les unités et les familles qui les soutiennent. Jévoquais lAfghanistan. Mon Général, avec votre prédécesseur, le Général IRASTORZA, trop souvent nous avons ensemble accompagné des familles lorsque les unités rendaient hommage aux combattants disparus. Je voudrais dire publiquement quaprès avoir parlé avec chacune de ces familles, nous pouvons avoir la fierté davoir des militaires qui savent pourquoi ils servent, qui acceptent leur engagement, et cet engagement est très largement partagé et compris tout autour deux. Cette fierté, je voudrais simplement que nous la partagions et que les Français la partagent. Cest leur Armée, c'est leur pays, c'est leur histoire, cest leurs traditions, cela existe, et cela est fort.
Puisque beaucoup dentre vous ici sont des industriels, lorsque nous parcourrons dans lavenir, et peut-être à Dubaï Airshow, des marchés, des rencontres, des séminaires, des colloques, des meetings pour défendre notre savoir-faire industriel, nous le ferons avec la fierté davoir des équipements qui valent tous les autres et qui, le plus souvent, valent mieux que les autres. Je voudrais évoquer une dernière fierté, celle davoir des mécanismes de décision pertinents. Pour avoir vécu de lintérieur trois de ces théâtres, dont un est dénoué, lautre en cours de dénouement, et dont le troisième se prolonge dans des conditions que Josselin de ROHAN a rappelées et que je partage totalement, cest la fierté dêtre un pays qui sait prendre des décisions, ce qui na pas toujours été le cas parmi nos partenaires. Cest un élément de force. Et cette fierté, il faut la partager parce que la culture du dénigrement et lautodérision deviennent dans notre pays parfaitement insupportables. Ceux qui ne font pas leffort de réfléchir, ceux qui ne font pas leffort dapprofondir, se contentent de ricaner, et ils le font parfois avec une présence médiatique qui devient insupportable pour ceux de nos compatriotes qui exercent avec passion leur mandat et qui ont vraiment le sentiment que ceux qui y croient sont nécessairement tirés vers le bas.
Deuxième mot : confiance. La confiance, je pourrais vous la proposer parce que nous sommes une majorité responsable, parce que nous avons la volonté de défendre notre pays, parce que nous votons les budgets. C'est dans mon rôle de militant politique, car un ministre est un homme politique, mais je voudrais aller au-delà et vous dire que cette confiance est beaucoup plus solide. Certes, nous avons la confiance fondée sur une boussole pour reprendre la formule de Guy TEISSIER qui est le Livre blanc. Cette confiance est partagée parce que ce Livre blanc est un travail collectif, et Monsieur le Secrétaire général a évoqué les conditions dans lesquelles il préparait la réactualisation. La première condition dune confiance dans un effort durable de Défense, ce sont des convictions intellectuelles au début était le Verbe partagées par le plus grand nombre, bien au-delà dune majorité, celle à laquelle jappartiens, partagées par ceux qui ont la passion de leur pays, qui lisent les cartes et savent que les cartes ne changeront pas au lendemain de lélection présidentielle. Même si parfois on aimerait que le monde tourne autour de notre nombril, il savère que cela nest pas vrai. Ces cartes sont communes à lopposition et à la majorité. Avant que nous reconstruisions le Livre blanc, il faut que la préparation de cette réactualisation soit la plus partagée possible, car la confiance repose sur une culture des questions de Défense. Jappartiens dailleurs, cher Josselin, à la première promotion de lENA qui avait introduit une option « Défense » dans lenseignement. Il a fallu attendre 1973, cela nexistait pas auparavant, mais il est vrai que les générations précédentes avaient souvent défendu leur pays larme à la main et navaient peut-être pas besoin dun enseignement théorique puisquelles avaient connu la pratique.
La confiance procède donc de cette boussole, de la mise en oeuvre dune loi de programmation, et dune culture industrielle. Le Président GALLOIS a très bien parlé au nom de lensemble des industriels. Les industriels français ont une particularité vis-à-vis du ministère de la Défense, c'est quils savent à la fois défendre chacun de leurs intérêts, mais porter une parole commune pour que notre pays sintéresse à ce quils savent faire. Vous avez évoqué deux idées, qui sont des idées durables, à caractère dual, et la construction européenne. Je ny reviendrai pas car je me sens totalement incapable dépuiser le sujet brièvement. Je voudrais simplement dire que lexistence même dune université de la Défense et le fait que des présidents de sociétés importantes, qui représentent par leur activité des milliers de salariés, des investissements considérables, et une présence mondiale, acceptent de passer quarante-huit heures dun emploi du temps lourd, à réfléchir avec des officiers régionaux, des officiers supérieurs, des universitaires, des techniciens, des diplomates, montre bien que lon peut avoir confiance dans lengagement de nos industriels dans des centres qui peuvent être multinationaux, plus profondément enracinés dans leur seul marché national, mais qui sont en tout état de cause des membres à part entière de la communauté de Défense, c'est-à-dire des gens qui veulent apporter des solutions au pays pour lequel ils travaillent. Nous navons pas devant nous des fournisseurs, mais des partenaires, et nous essayons de conduire avec eux des relations de partenariat.
Vous avez évoqué, par exemple, le soutien des capacités de recherche. Une loi de programmation oscille évidemment du choix capacitaire au choix dinnovation sur des projets nouveaux. Nous avons fait clairement le choix capacitaire dans cette loi de programmation. Cependant, nous ne voulons pas abandonner ce qui nous permettra de déclencher dautres options, dautant plus que chemin faisant, comme la guerre est dialectique et pas tout à fait prévisible, il faut réorganiser nos programmes darmement à telle ou telle occasion car les retours dexpérience du terrain nous demandent de nouveaux armements ou des armements adaptés que nous navions peut-être pas imaginés.
Enfin, lhomme politique que je suis, qui a, hélas, trente-trois ans de vie parlementaire derrière lui, a observé comment cela marchait ailleurs. Je trouve que nous pouvons avoir confiance dans notre système de décision. A un moment, je me suis posé la question de savoir si un ministre de la Défense était vraiment utile dans notre pays. Nous avons une ligne hiérarchique simple. Un Président de la République dont la Constitution fait le Chef des Armées, et dont le caractère en fait le Chef des Armées et qui, par conséquent, assume ses responsabilités avec un Chef dEtat-major. Nous avons donc une filière hiérarchique tout à fait claire. Et vous avez un ministère qui existait avant moi et qui existera après moi, cest normal, c'est la loi du genre, nous sommes des passagers, vous êtes des permanents. Le risque, c'est que pour que la chaîne verticale fonctionne, il faut une grande solidarité de la chaîne horizontale, c'est-à-dire du Chef dEtat-major, de ses chefs dEtat-major darmes, du DGA, du SGA. Tout cela fonctionne très bien en horizontal et de temps en temps, on associe le ministre auquel on demande de signer en comité ministériel des décisions qui ont été tellement mûrement réfléchies et préparées quil est bon de sa part daccompagner un mouvement issu du ministère tout entier. Cest donc un rôle qui me permet de venir aux colloques. Parce que je sais tout, mais jai du temps.
Je voudrais dire à nos compatriotes que nous avons un système constitutionnel extrêmement pertinent parce que, en effet, la conduite de la Défense de notre pays demande une décision unique. Quelquun disait que pour prendre une décision il faut un chiffre pair, et trois c'est déjà beaucoup. Nous avons donc un système qui fonctionne parce que le Président est le Chef des Armées et parce que les Armées sont au service dun projet national densemble, et un projet qui se construit dans une politique intérieure totalement maîtrisée par celui qui en a la responsabilité dans les institutions de la Vème République, le Président de la République. Et nous avons la fierté, le Ministre dEtat Alain Juppé, et moi-même, dêtre ces partenaires politiques directs, associés directement à lensemble des décisions et qui ont pour rôle de faire en sorte que tous les rouages fonctionnent et que la ligne de commandement ne soit jamais paralysée.
Dautres pays nont pas eu cette chance, et lorsquil a fallu engager en quelques heures leurs forces ou simplement leur participation à des décisions quils ne pouvaient pas attendre, on doit reconnaître que les institutions de la Vème République ont limmense mérite de donner à notre pays la réactivité, et cest un très bon sujet de confiance qui marque une différence et sur lequel il conviendrait de réfléchir lorsque lon parle de défense plus collective. Fierté, que je souhaite partagée par nos compatriotes. Confiance, car il y a des éléments stables qui font que ce qui marche en Défense nest pas le fait du hasard, mais le fait dune culture partagée, appropriée par des milieux différents, consolidée par des institutions construites, et dont je constate dailleurs quelles nont jamais été démenties par les différents présidents.
Vigilance enfin, parce que vous connaissez les contraintes et je naurai pas loutrecuidance de vous les rappeler. Je suis quand même poussé en avant par lensemble de cette ligne pour aller défendre des arbitrages budgétaires. Jai oublié un homme très important qui assure la cohérence budgétaire, cest le Premier ministre, et lorsquon prépare le budget, il faut bien que celui de la Défense ne soit pas trop étrillé dans une période sous contrainte. La première vigilance, c'est que nous, ministère de la Défense, nous avons à respecter nos engagements pour obtenir que ceux qui ont été pris par la collectivité à notre endroit le soient tout autant. C'est la raison pour laquelle jai repris le dossier 2009-2015 lancé par mon prédécesseur Hervé Morin et que je le mets en oeuvre, y compris dans ses aspects qui méritent parfois dêtre expliqués plus longuement, comme les bases de défense ; y compris dans sa dimension RGTP qui a le don dirriter tous les hauts fonctionnaires, mais qui est la contrepartie normale de leffort que la collectivité consent à la mission Défense. Nous devons nous remettre en cause, nous nous remettons en cause. Vigilance pour obtenir les crédits que nous avons obtenus de façon constante et avec le coup de pouce conjoncturel de lannée 2009. Nous sommes dans lépure de la loi de programmation, il y a une inquiétude permanente, il y a des schémas angoissants permanents, mais nous avons aujourd'hui surmonté les obstacles, y compris au début de lété lorsque les perspectives de la crise pouvaient conduire à se demander ce qui se passera en 2014. En 2014, il y aura une majorité et elle décidera. Mais en 2011, en 2012 et en 2013, nous avons les moyens de faire en sorte que les recettes exceptionnelles soient au rendez-vous. Dun côté, on met en oeuvre, et de lautre on obtient. C'est une sorte darrangement gagnant/gagnant.
Cette Université dété est consacrée à la DGA. Plutôt que de parler de laviation ou de la marine, je parle donc de larmement. La contrepartie de cet effort, cest que les objectifs capacitaires fonctionnent. Le Président de la République sest personnellement impliqué, après la tragédie dOuzbin, pour veiller à ce que nos combattants aient les meilleurs outils. Vous serez, jimagine, à Fougères pour voir lusine où se met en place le système Félin. Cest une révolution que nous envient les armées européennes et qui tient la dragée haute aux autres systèmes. Sur le combat dinfanterie, que ce soit le VBCI, le VAB Top, le Caesar, ou que ce soit le véhicule douverture ditinéraire, nous sommes au rendez-vous de la modernité, avec cette obligation permanente de sadapter. Sur la marine, qui sera peut-être votre thème lan prochain, il y a ce formidable rendez-vous, compte tenu de lespace stratégique que représentent les océans et de lavance technologique que nous a donné notre maîtrise du sujet à partir dexpériences exceptionnelles. La montée en puissance du Charles de Gaulle ne s'est pas faite en six mois, mais dix mois dopérations continues dans locéan Indien et en Libye ont apporté la démonstration que le matériel fonctionnait et quil était un véritable porte-avions au service de notre ambition, avec la capacité dentrer en premier de lArmée française sur un théâtre lorsque la demande est faite.
Nous avons à surveiller lensemble de la mise en oeuvre de ces programmes, mais nous avons cette vigilance avec les industriels. Avec eux, que pouvons-nous dire de plus ? En effet, Monsieur le Président GALLOIS, parlant non pas au nom de votre entreprise, mais au nom des industriels, nous avons le devoir dêtre Européens. Et lEurope, il faut savoir de temps en temps la provoquer. Je considère que les accords de Lancaster House sont une forme polie de mise en responsabilité de ceux qui hésitent encore à engager un effort de défense. Jai beaucoup aimé votre observation sur le petit nombre de grands pays. Les uns préfèrent les Polonais aux Espagnols, les autres préfèrent les Espagnols aux Polonais, mais du moment que les deux payent, on pourra toujours sentendre. Ce qui est certain, c'est quil y a quatre premiers qui doivent représenter ensemble sans doute 70 ou 75% de leffort de Défense : lItalie, lAllemagne, lAngleterre, et la France. Vous les industriels, rendez nous service, aimez-vous les uns les autres, de la façon la plus intelligente qui soit. Je sais bien que les coopérations internationales ont donné parfois dans le passé des souvenirs extraordinairement cuisants. Croyez-vous dailleurs que les coopérations à lintérieur des directions dune même entreprise naboutissent pas parfois à des produits invendables ? C'est la même chose. Donc, nous avons ces difficultés inhérentes à toute coopération. Si nous voulons exister face aux Etats-Unis dAmérique, qui restent un partenaire tellement puissant quil oublie parfois de considérer ses voisins immédiats, faisons en sorte que les tailles soient plus proportionnées, et pour cela acceptons la complexité de ces coopérations multinationales européennes à partir dun petit nombre de pays responsables.
Ce ne sera pas toujours linéaire. Certaines coopérations sont allées jusquau bout, certains en doutaient, et vous avez rappelé, Président GALLOIS, quau final le résultat est là. Parfois, on sefforce de faire quelque chose et le résultat amène à repartir sur dautres bases. Mais limportant est quil y ait un lien de confiance entre la communauté de Défense et le monde industriel, que nous nous parlions. Et je voudrais remercier la presse professionnelle, celle qui fait leffort de simpliquer sur les sujets. Car je puis vous dire que nous vivons, les industriels et les ministères, sous des regards particulièrement attentifs, qui ne sont pas nécessairement malveillants, mais qui ont le devoir de poser la question : et si le roi nétait pas nu par hasard ? Ces questions ne sont pas sans importance et nous les acceptons. La transparence, ce nest pas simplement pour les autres. Et si la Défense veut être forte, elle doit être partagée. Mais pour quelle soit partagée, il faut accepter le débat, nourrir les échanges, et faire en sorte que cette culture de Défense ne repose pas simplement sur les souvenirs des grands anciens.
En tant que Ministre de la Défense, jai plaisir à massocier à tout ce qui est hommage et tradition, car je suis persuadé que chacun dentre nous, quand nous faisons notre métier au quotidien, et quand nous pensons à lavenir, nous le faisons souvent avec des références issues du passé, lorsque celui-ci nous paraît exemplaire de courage, de raisonnements ouverts. Quest-ce qui est extraordinaire dans lappel du 18 juin, indépendamment des conséquences qui ont permis à la France dêtre assise à la table de la capitulation allemande ? Cest davoir eu une vision plus large et de penser que le rapport des forces inéluctablement basculerait. Je suis persuadé que chacun dentre nous avons nos références. Cela sappelle la culture. Et lorsque lon doute, on choisit plutôt des comportements exemplaires. Cela sappelle la tradition. Mais faisons en sorte que cette culture et cette tradition soient en permanence enrichies. Alors, elles seront enrichies par les retours dexpérience : la Côte dIvoire, la Libye, au quotidien lAfghanistan. Il faut accepter les retours dexpérience, y compris les moins agréables. Car si nous navons pas cette lecture critique de ce que nous sommes et de ce que nous faisons, nous risquons dêtre prisonniers dimages dEpinal qui ne sont pas nécessairement des vérités historiques. Et le rôle dune Université de la Défense, c'est certes de rendre hommage aux parcours, mais den comprendre le cheminement, davoir la culture du retour dexpérience, de globaliser notre réflexion, déchapper aux conflits politiques immédiats, qui sont parfaitement légitimes mais qui parfois nous enferment et nous interdisent de voir plus loin, et de faire en sorte que durablement la culture de la Défense en France soit profondément enracinée pour que notre pays reste sur ce terrain exemplaire en Europe et dans le monde.
Source http://www.universite-defense.org, le 27 septembre 2011