Interview de M. Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche à France 2 le 26 août 2011, sur les coûts de la rentrée scolaire et universitaire et le montant des bourses d'études pour l'année 2011.

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Média : France 2

Texte intégral


 
 
 
ROLAND SICARD Bonjour Laurent WAUQUIEZ.
 
LAURENT WAUQUIEZ Bonjour.
 
ROLAND SICARD On a beaucoup parlé en début de semaine de l’augmentation du coût de la rentrée universitaire, plus 4 % selon les syndicats. Est-ce que l’annonce que vous faites ce matin, c'est-à-dire un 10ème mois de bourse pour les étudiants, c’est vitre réponse à cette polémique ?
 
LAURENT WAUQUIEZ C’est incontestablement une réponse, et puis surtout c’est une réponse dans les faits. C’était un engagement du président de la République, une de mes priorités, c’est l’amélioration des conditions d’études, et pour les boursiers, c’est un vrai changement. On avait 9 mois de bourse, au moment où, à la rentrée notamment en septembre les étudiants avaient leurs principaux frais à sortir, nous, on n’était pas présents, maintenant avec les dix mois de bourse, on pourra couvrir et aider beaucoup mieux nos étudiants.
 
ROLAND SICARD Mais est-ce que ça compense vraiment l’augmentation du coût de la rentrée ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Vous savez au total sur quatre ans, il y a un énorme effort qui a été fait pour les boursiers. Les montants des bourses ont été augmentés de 16 %, beaucoup plus que l’inflation ou l’augmentation du coût de la vie. On a à peu près 120 000 familles en plus qui sont aidées par le biais des bourses qu’il y a quatre ans, donc cette année, cette rentrée universitaire, on n’aura jamais eu autant d’étudiants qui ont été accompagnés par un dispositif de bourse beaucoup plus efficace.
 
ROLAND SICARD La mesure de cette année, elle va coûter combien ?
 
LAURENT WAUQUIEZ C’est une mesure qui coûte au total 160 millions d’euros, mais 80 millions d’euros sur l’année universitaire 2011/2012.
 
ROLAND SICARD Est-ce que ça a été difficile à obtenir compte tenu du climat de rigueur qui règne au gouvernement ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui, ce n’était pas un choix facile.
 
ROLAND SICARD Est-ce qu’il y a eu une vraie bagarre avec François BAROIN par exemple ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Ce n’était pas facile, il a fallu se battre pour expliquer l’importance de cette mesure, mais je crois aussi qu’il y a un signe politique qui est très fort. Ce ne sont pas les enfants des classes moyennes qui seront les victimes de la gestion rigoureuse des finances. On fait une gestion rigoureuse des finances, on lutte contre les déficits publics, mais en même temps quand il s’agit de dépenses d’avenir, quand il s’agit de situations humaines, quand il s’agit de nos étudiants, on est capable d’investir et de continuer à mettre les sommes dont on a besoin. Et je crois que c’est bien ça, ce n’est pas d’austérité aveugle, c’est une gestion rigoureuse qui est capable d’investir là où on en a besoin.
 
ROLAND SICARD On parlait tout à l’heure de ce que coûte l’université, est-ce qu’il n’y a pas certaines universités notamment les plus prestigieuses qui vont un petit fort, qui pratiquent des droits trop élevés ?
 
LAURENT WAUQUIEZ J’y ai passé une partie de l’été pour lutter contre ce qu’on appelle les frais d’inscription illégaux. Il y a des règles en France, notamment les frais d’inscription obligatoires, par exemple en licence, c’est 177 euros. Mesurons la différence par rapport à nos voisins, vous allez en Angleterre, de 4 000 à 10 000 euros, vous allez en Espagne, vous allez en Italie, c’est aux alentours de 1 000 euros. Chez nous les frais d’inscription, les seuls qui sont obligatoires, c’est 177 euros. Mais il faut lutter…
 
ROLAND SICARD Mais il y a certaines facs qui vont beaucoup plus loin, il faut le reconnaître.
 
LAURENT WAUQUIEZ C’est pour ça que l’on doit être très attentif, et on a échangé avec les présidents d’université, qui nous ont beaucoup aidés pendant cette période pour faire baisser et lutter contre ce qu’on appelle les frais d’inscription illégaux.
 
ROLAND SICARD Est-ce qu’il y aura des sanctions ?
 
LAURENT WAUQUIEZ C’est très clair, un ministre qui n’appliquerait pas la loi, je pense qu’il ne ferait pas son travail. Donc on est bien au clair, aucun, je n’accepterais aucun frais d’inscription obligatoire illégal.
 
ROLAND SICARD Vous faisiez des comparaisons avec les facs à l’étranger, il y a une autre comparaison qui existe, c’est celle du classement de Shanghai, qui classe les universités du monde, les universités françaises sont mal classées, elles sont en queue de peloton. Comment on explique ça ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Alors on l’explique parce qu’on avait pris du retard. On n’avait pas fait les bonnes réformes. On progresse, par exemple il y a trois ans, on avait seulement six universités qui étaient dans le Top 200, aujourd'hui on est passé à 8.
 
ROLAND SICARD Ca reste faible.
 
LAURENT WAUQUIEZ Ca reste faible et ce n’est pas au niveau auquel j’attends l’enseignement supérieur et la recherche. Ce qu’il faut bien voir, c’est qu’on a fait toutes les réformes, qui vont nous permettre maintenant de donner un vrai coup d’accélérateur à l’excellence de notre enseignement supérieur, on n’en a pas encore récolté les fruits. Et ce qui est intéressant, c’est que sur ce classement, Shanghai a évalué l’impact des réformes qu’on a faites. Et ça peut nous faire gagner de 40 à 50 places. C'est-à-dire que le fait d’avoir fait ces réformes, de changer progressivement le visage de notre université, ça peut nous faire gagner dans la compétition mondiale 4à à 50 places.
 
ROLAND SICARD A quelle échéance ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Ca va dépendre de la rapidité avec laquelle nos universités se rassemblent, en fait en gros on est un peu dispersé avec un puzzle qui était beaucoup trop dispersé. Nos universités se mettent ensemble, donc le plus rapidement elles se mettent ensemble, le plus rapidement elles font leurs pôles universitaires, le plus vite on gagnera ces places.
 
ROLAND SICARD Sur un autre sujet, hier on a eu les chiffres du chômage, des chiffres qui sont mauvais, est-ce que finalement ça ne montre pas que la politique économique du gouvernement est en échec ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Vous savez on le voit sur l’ensemble de l’Europe aujourd'hui, on le voit aux Etats-Unis, on le voit à l’échelle du globe avec une situation économique qui est très difficile. Xavier BERTRAND se bat, il se bat avec beaucoup de courage, il était, je crois d’ailleurs sur votre plateau hier. Je vais essayer aussi au niveau de l’enseignement supérieur d’améliorer les choses. Par exemple en licence, ce qu’on voit, c’est que des étudiants qui en licence ont eu un contact avec le monde professionnel, des vrais stages, pas les stages bidons, pas les stages pause café où l’étudiant est instrumentalisé, à la sortie, trouve un emploi beaucoup plus facilement. Donc je crois que si on veut lutter contre l’emploi, (sic) contre le chômage, c’est sur l’ensemble des compartiments qu’on doit avancer pour l’emploi.
 
ROLAND SICARD Alors il y a quelques mois vous aviez fait un vrai scandale en disant qu’il fallait que les allocataires du RSA travaillent gratuitement quelques jours par moi. Est-ce que vous êtes toujours sur cette ligne ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Ma ligne, elle est simple, c’est qu’une bonne politique sociale, c’est une politique sociale qui mise sur l’emploi le plus vite possible. Une mauvaise politique sociale, c’est quelqu’un qui… c’est une politique qui laisse les gens enfermés dans le même emploi sans leur proposer quelque chose. Donc je reste convaincu que de propose le plus vite à quelqu’un qui est en minima sociaux ne serait-ce que quelques heures d’activités pour se remettre sur le chemin de l???emploi, c’est une bonne solution.
 
ROLAND SICARD Gratuitement ou pas ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Les propositions qui ont été faites, c’est que ce soit rémunéré, pour moi ce qui compte, ce n’est pas gratuit ou rémunéré, ce qui compte c’est que très vote quelqu’un, on ne le laisse pas en situation de non emploi. Et qu’on propose le plus vite possible ne serait-ce que quelques heures d’activités pour se remettre sur le chemin de l’emploi.
 
ROLAND SICARD Il y a eu plusieurs mesures qui sont intervenues avec le plan de rigueur, est-ce que finalement un des engagements de Nicolas SARKOZY qui était « travailler plus pour gagner plus », c’est encore crédible ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Vous le savez, j’appartiens dans ma famille politique à un courant qui est celui de la droite sociale. Mon obsession, c’est comment est-ce qu’on protège les classes moyennes dans cette période ? Alors qu’est-ce que je regarde sur le plan qui a été adopté ? Aucune augmentation de l’impôt sur le revenu. Aucune augmentation de la CSG sur les retraites. Aucune augmentation de la CSG ou de la CRDS sur les revenus du travail. Donc c’est un plan qui n’a pas cédé aux facilités anciennes qui consistaient pour aller chercher de l’argent à augmenter les taxes et les impôts sur les classes moyennes. Je pense que ça, c’était le plus important.
 
ROLAND SICARD Mais est-ce que vous pensez que les Français, eux, croient encore que ce slogan, « travailler plus pour gagner plus » c’est vrai ? Est-ce que les Français croient que Nicolas SARKOZY est le président du pouvoir d’achat ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Je pense surtout que ce que les Français ont quand même compris, c’est qu’entre l’élection et le moment où on est aujourd'hui il y a une crise qui a traversé le paysage mondial et qui a beaucoup changé la donne. Et dans un cas comme ça, un politique responsable, c’est quelqu’un qui est capable de répondre à l’ampleur de cette crise. Et ce sera à mon avis, un des enjeux majeurs de 2012, qui est une vraie heure de vérité pour tous les politiques. Est-ce qu’on est capable collectivement de faire face à cette crise ou non ? Et ça, ça ne supporte pas l’amateurisme, les politiques père Noël qui continuent à promettre des augmentations de déficits publics dans tous les sens.
 
ROLAND SICARD Vous parlez des socialistes ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui, enfin soyons clairs, sur la règle d’or, pourquoi les socialistes sont si mal à l’aise sur la règle d’or ? Moi, ce qui me semble c’est quoi ? C’est que ce n’est pas la règle d’or qui les gène, c’est qu’en réalité ce que la règle d’or souligne, c’est que l’ensemble du programme socialiste n’est plus en phase avec le contexte actuel. C’est un programme qui est conçu sur de la dépense publique massive, qui est conçu sur des déficits, et qui est donc totalement contradictoire avec une gestion saine de nos finances. Enfin voila les socialistes vont faire leur université d’été à la Rochelle, je fais vraiment un appel très solennel pour que collectivement, ils sortent de cette espèce de concurrence au triple A de l’irresponsabilité dans laquelle ils semblent en ce moment enfermés, et qu’ils puissent changer leur comportement et dire oui, on a besoin maintenant de cette règle d’or, oui il y a une crise, il faut qu’on s’y adapte nous aussi et mettre l’intérêt du pays avant l’intérêt de leur parti. Et je crois que c’est y compris dans leur intérêt.
 
ROLAND SICARD Merci.
 
Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 8 septembre 2011