Interview de Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche à France-Inter le 13 septembre 2011, sur la rentrée scolaire et universitaire, les conditions d'études et les bourses d'études et le logement étudiant.

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Média : France Inter

Texte intégral


 
 
PATRICK COHEN Bonjour Laurent WAUQUIEZ.
 
LAURENT WAUQUIEZ Bonjour.
 
PATRICK COHEN Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Vous tenez conférence ce matin, sur la rentrée universitaire, on va y venir. Mais d’abord quelques questions sur la crise qui s’aggrave chaque jour : chute des bourses, plongeon des banques, risque de voir la Grèce sauter. Et grand silence au sommet de l’Etat. Il n’y a pas de pilote dans l’avion disait Laurent FABIUS, hier matin. Nicolas SARKOZY n’a rien à dire aux Français ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, mais qu’est-ce que c’est que ce fatras ! Pardonnez-moi sur les réactions, évidemment.
 
PATRICK COHEN Le fatras, quel fatras ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, ce que je veux dire par-là, c’est cette espèce de fatras, autour de cette agitation sur la spéculation. Qu’est-ce qui se passe ? On a besoin à la tête de l’Etat…
 
PATRICK COHEN C’est une agitation qui se produit en ce moment ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Précisément, précisément, je vais essayer d’expliquer simplement les choses.
 
PATRICK COHEN Dites-nous !
 
LAURENT WAUQUIEZ On a une agitation sur les marchés, la moindre déclaration peut être interprétée dans un sens ou dans un autre. On a donc besoin d’un sang froid et d’une détermination. Pas de mot de trop ! Pas de phrase qui ensuite, donne lieu à telle ou telle spéculation sur les marchés. Il y a un cap qui a été fixé, au sommet de l’Etat, lors du sommet du 21 juillet, entre la France et l’Allemagne, qui a permis d’avoir un fonds de stabilisation, qui est un fonds de stabilisation renforcé, qui nous donne toute capacité à intervenir sur les marchés, pour intervenir en solidarité, notamment sur des pays comme la Grèce, ou les autres pays qui sont concernés en même temps, en ce moment par les plans d’ajustement. On fait tout pour défendre notre monnaie commune. Le Premier ministre, hier, est intervenu. François BAROIN a clairement rappelé le cap : surtout pas d’agitation du côté des politiques. C’est la pire des choses à faire en ce moment. On a besoin de calme, on a besoin d’avoir un cap qui tient et on a besoin d’opposer à l’agitation des marchés, une sérénité au niveau du politique. C’est la seule et meilleure chose à faire. On a les outils, maintenant, il ne faut pas se disperser dans des commentaires inutiles.
 
PATRICK COHEN Le déficit de la Grèce s’aggrave, le pays n’a plus de trésorerie, les solutions qui ont été adoptées, ces derniers mois, ne tiennent plus. Est-ce qu’on peut aujourd’hui, sauver l’euro en laissant tomber la Grèce, c’est un scénario qui est évoqué maintenant, publiquement par des hauts responsables européens, Laurent WAUQUIEZ ?
 
LAURENT WAUQUIEZ La seule chose que nous, on a affaire, c’est de défendre notre monnaie commune. La conviction absolue c’est que l’euro est notre meilleure protection pour tous. Donc on a un fonds de stabilisation, il permet d’intervenir sur tous les scénarios possibles. On a aujourd’hui, une capacité à le faire. Pas d’agitation ! Et encore une fois, je vais le dire très simplement, je ne suis pas en charge de ce dossier. Je suis ministre de l’Enseignement supérieur. C’est des sujets qui sont suffisamment graves où une phrase malencontreuse, une expression qui n’est pas bonne, peut aboutir à précipiter une agitation, une peur dans un sens ou dans un autre. Donc on est vraiment face à ce que j’appelle une heure de vérité » pour les politiques pas de commentaire dispersé ou inutile.
 
PATRICK COHEN J’entends bien, et on a bien entendu vos propos millimétrés. Vous parlez de la monnaie commune, de l’euro, de la nécessité de sauver cette zone. Vous n’avez pas prononcé le mot « Grèce » qu’est-ce qu’on fait de la Grèce ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, je l’ai clairement dit ! Et j’ai prononcé le mot « Grèce » pardonnez-moi.
 
PATRICK COHEN Ah ! Bon, il ne m’a pas semblé.
 
LAURENT WAUQUIEZ Si, si…
 
PATRICK COHEN Au tout début oui, mais pas dans la dernière réponse, où je vous parlais de l’idée d’une faillite qui paraît inéluctable de la Grèce ou d’un défaut, en tout cas de ce pays ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, enfin, je l’ai clairement dit, on a un fonds de stabilisation, il permet d’agir dans tous les scénarios sur lesquels on peut être amené à avoir à faire face, c’est tout ! Voilà !
 
PATRICK COHEN Bon ! On y reviendra peut-être Laurent WAUQUIEZ, dans la deuxième partie de cette interview avec les questions des auditeurs, 01.45.24.7000. La rentrée universitaire, elle commence ces jours-ci, avec, c’est une annonce que vous avez faites, il y a quelques semaines, le versement d’un 10ème mois de bourse, mais avec toujours beaucoup de précarité, on l’a entendu dans ce journal. Il y a une étude récente de l’Observatoire de la Vie Etudiante qui montre que la part des étudiants issus des milieux populaires déjà, sous-représentés à l’université a décru encore entre 2006 et 2010. Elle est passée de 35 % à 31 %. Convenez-vous Laurent WAUQUIEZ qu’il y a un problème de mixité sociale encore, dans l’enseignement supérieur ?
 
LAURENT WAUQUIEZ L’amélioration des conditions d’études et donc la mixité sociale et l’ascenseur social, c’est ma priorité. Vous l’avez rappelé, ça a été le premier dossier que j’ai ouvert en arrivant à l’enseignement supérieur, et notamment le 10ème mois de bourse. Il faut être très précis, un des points qui est un des points de difficultés qu’on a, c’est notamment comment mieux accompagner les enfants des classes moyennes modestes ? Parce que le principal de la difficulté, il est surtout sur ceux qui sont légèrement au-dessus des seuils de bourse. Qui n’ont pas pour autant des gros revenus, vous pouvez avoir, par exemple dans un département comme le mien, un couple, dans lequel on est tous les deux au SMIC, et on peut se retrouver au-dessus des seuils de bourse, avec son enfant qui va étudier à Lyon, avec des coûts importants, et qui pour autant…
 
PATRICK COHEN Et qui ne peut pas se loger notamment.
 
LAURENT WAUQUIEZ Sont, au-dessus des seuils. Donc qu’est-ce qu’on essaie de faire ? Première chose, d’abord, ce 10ème mois de bourse. Deuxième chose, quel est le principal poste de dépenses ? Le logement. C’est là où nos étudiants ont les principales difficultés, avec derrière aussi, une question d’équité républicaine. Vous habitez au coeur de Paris ou au coeur de Lyon, plus facile d’étudier en ayant vos parents, en restant chez vos parents. En revanche, vous devez quitter votre famille pour aller étudier, les coûts explosent. Ce qu’on essaie de faire là-dessus, de mettre en place un fonds national qui nous permette d’accompagner les étudiants, en prenant en charge, leur caution, et leur mois de garantie pour abaisser les coûts. Et puis par ailleurs ce que je veux faire, c’est enclencher un travail de lutte contre les surloyers pour les mini surfaces. Parce que là, c’est les étudiants qui sont les principales victimes.
 
PATRICK COHEN Sur le premier dispositif, que vous venez de citer, il est en expérimentation à cette rentrée ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Exactement ! On l’a lancé sur deux Académies, deux grosses Académies : Lille et Lyon, l’objectif est…
 
PATRICK COHEN Et pas Paris ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, pour être très simple pourquoi ? Parce que pour expérimenter, il faut que l’on soit une taille où on a le temps d’ajuster et de voir les choses. Donc on a pris deux grosses Académies, pas de facilité, Lille et Lyon, ça fait partie des plus grosses académies en France. Mais pas Paris, effectivement, ce que j’espère en revanche, c’est que l’on pourra l’étendre très rapidement l’objectif, c’est de le faire en 2012. En tout cas, je le dis bien, ma priorité c’est l’amélioration des conditions de l’étude et une de mes obsessions, je crois que c’est quelque chose sur lequel vous revenez souvent, au micro de FRANCE INTER. Une société dans laquelle il n’y a plus d’ascenseur social, c’est une société qui meurt et qui dépérit.
 
PATRICK COHEN Les logements étudiants, il y a un coup d’accélérateur qui est donné, Laurent WAUQUIEZ ? On a très en retard, sur le plan Anciaux qui devait permettre de livrer quelque 70 000 chambres en 5ou 6 ans ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, on n’est pas en retard !
 
PATRICK COHEN Si on est à 44 000.
 
LAURENT WAUQUIEZ On est à 42 000, pour être très précis et le plan Anciaux finit en 2015.
 
PATRICK COHEN D’accord !
 
LAURENT WAUQUIEZ Voilà ! Donc on n’est pas en retard. Bah ! Vous me posez une question précise, je vous réponds précisément.
 
PATRICK COHEN Moi aussi, je suis précis.
 
LAURENT WAUQUIEZ Sur le logement, là-dessus, pour être aussi très précis, cette année, on n’aura jamais autant construit de logement. 6000 supplémentaires, en moyenne, on rénove chaque année, 7000 logements supplémentaires. La semaine dernière par exemple, je suis allé sur deux résidences, une à Aix-en-Provence, une à Lyon qui sont des résidences qui ont été réhabilitées. Donc on essaie de rattraper notre retard, et ce dossier-là, comme les autres d’ailleurs, c’est le dossier d’un enseignement supérieur qui change. En gros, depuis 4 ans, on n’a jamais autant investi sur ce secteur. Donc ça bouge et ça bouge d’ailleurs aussi, grâce à nos enseignants, parce que c’est aussi la mobilisation des professeurs à l’université, c’est la mobilisation des enseignants chercheurs, c’est la mobilisation des équipes qui s’occupent des étudiants. Donc on a clairement une université qui change, et on commence à récupérer les fruits de ces 4 ans d’efforts.
 
PATRICK COHEN Laurent WAUQUIEZ, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, invité de FRANCE INTER.
 
Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 13 septembre 2011