Interview de M. Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche à LCI le 18 octobre 2011, sur la crise économique et financière et la primaire au PS.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : La Chaîne Info

Texte intégral

JULIEN ARNAUD Bonjour monsieur WAUQUIEZ, merci d’être là.
LAURENT WAUQUIEZ Bonjour.
 
JULIEN ARNAUD Bernard SQUARCINI le patron du Renseignement intérieur a été mis en examen, on va commencer par ça, doit-il démissionner d’après vous ?
LAURENT WAUQUIEZ En matière de mise en examen, je trouve que les attitudes politiques sont assez étonnantes.
 
JULIEN ARNAUD C’est le moins que l’on puisse dire oui.
LAURENT WAUQUIEZ Ca me fait penser un peu à la chauve-souris de LA FONTAINE. Quand on a quelqu’un qui est socialiste, on dit regardez ses ailes, c’est un oiseau, il est innocent. Et quand on a quelqu’un qui n’est pas socialiste, on dit : regardez ses poils, c’est une souris, il est coupable.
 
JULIEN ARNAUD C'est-à-dire ?
LAURENT WAUQUIEZ C’est que c’est simple…
 
JULIEN ARNAUD Eclairez-nous sur la métaphore de la chauve-souris.
LAURENT WAUQUIEZ Ce que je veux dire par-là, c’est qu’il est mis en examen, pour l’instant, il y a une présomption d’innocence, c’est sur un sujet très précis, qui n’est pas des écoutes de conversations, mais juste de la provenance d’appels. On attend que la procédure se déroule et à l’issue le gouvernement, décidera, c’est ce qu’à rappeler François FILLON, hier.
 
JULIEN ARNAUD Ça ne perturbe pas son action en tant que patron de la DCRI ?
LAURENT WAUQUIEZ Ca c’est à Claude GUEANT d’en juger, il a apporté la réponse hier.
 
JULIEN ARNAUD Vous pensez que Jean-Noël GUERINI aurait dû démissionner du conseil général des Bouches du Rhône, à cause de ces mises en examen ?
LAURENT WAUQUIEZ Je pense qu’en tout cas, il faut qu’on soit cohérent. On ne peut pas d’un côté dire : DSK innocent, GUERINI innocent, et de l’autre côté, un haut fonctionnaire coupable. Ca, ça ne va pas ?
 
JULIEN ARNAUD Ca veut dire que c’est normal que Jean-Noël GUERINI soit encore à la tête du conseil général des Bouches-du-Rhône ?
LAURENT WAUQUIEZ Ça veut dire qu’en tout cas, il faut qu’on applique la même jurisprudence, voilà, c’est ce que je considère. La jurisprudence, c’est qu’il y a une présomption d’innocence, on essaie de la respecter.
 
JULIEN ARNAUD Parlons de la note française, le AAA est menacé, pour la première fois, Moody’s donne 3 mois à la France pour faire ses preuves, à cause des craintes sur les banques et sur le plan de sauvetage de la Grèce. Est-ce qu’il faut donner un nouveau coup de visse budgétaire d’après-vous ?
LAURENT WAUQUIEZ Non, ce qu’il faut montrer, c’est que tout le travail qu’a fait et que fait Valérie PECRESSE. C’est que quel que soit les scénarios économiques, la France tiendra ses obligations, en terme de déficits et de budget. Ce sujet-là est important, pourquoi ? Il faut bien voir que ce n’est pas un jeu de spéculations financières ou de marchés financiers. C’est un principe de bon sens macro-économique auquel sont rappelé tous les Etats dans la zone Europe. Il y a un moment, où il faut rembourser ses dettes. Dans l’élection présidentielle, ce critère-là pèsera très lourd.
 
JULIEN ARNAUD Mais Moody’s a l’air de dire que pour l’instant, la France ne fait pas assez ?
LAURENT WAUQUIEZ Non, ce que dit Moody’s, c’est que vous rentrez dans une période de débat budgétaire, on est dans une zone, on regarde ce qui se passe en terme de croissance, on veut vérifier, que vous êtes bien très exigeant sur la gestion de votre déficit. Voilà, mais juste un point là-dessus, ce qu’il y a de très clair, c’est qu’on ne peut plus tirer sur la ficelle du déficit. Ca laisse deux choix, mais ça laisse deux choix politiques, le premier c’est d’augmenter les impôts. C’est clairement le choix fait par le PS. Le deuxième, c’est d’essayer de baisser les dépenses…
 
JULIEN ARNAUD C’est celui du gouvernement aussi ? Dans le plan de 11 milliards, c’est majoritairement des hausses d’impôts ?
LAURENT WAUQUIEZ Aucune hausse d’impôt sur les impôts sur le revenu, aucune hausse de CSG, aucune hausse de CRDS, on n’est pas sur ce type de hausse-là.
 
JULIEN ARNAUD Raboter les niches fiscales, c’est une autre façon d’augmenter les impôts, mais bon, peu importe !
LAURENT WAUQUIEZ Il y en a des beaucoup plus douloureuses.
 
JULIEN ARNAUD Ah ! Oui, d’accord !
LAURENT WAUQUIEZ Et je voudrais là-dessus, bien poser les questions, notamment sur les différentes alternatives qui vont s’ouvrir. Clairement au niveau du Parti socialiste, se prépare une saignée fiscale. C’est un sujet sur lequel j’aimerai bien que le Parti socialiste clarifie rapidement les choses. Dans leur programme, est proposée la fusion de l’IR avec la CSG. Quand je regarde ça, je vois qu’un couple avec 3 enfants, par exemple qui auraient deux revenus modestes, entre 2000 et 3000 euros, payerait avec la proposition socialiste à la fin de l’année 3000 euros de plus, 122 % d’augmentation. Alors je pose la simplement et je crois que le Parti socialiste doit le clarifier rapidement avec François HOLLANDE. Est-ce que oui ou non, dans leur programme, il y a cette augmentation de près de 3000 euros de l’impôt sur le revenu, sur des ménages qui ne gagnent pas des 1000 et des 100, on est sur des échelles de revenus, qui sont entre 2000 à 3000 euros et je crois que c’est très important, pour l’éclairage du débat public que ce soit apporté. Moi, ce que j’y vois c’est une saignée fiscale sur les classes moyennes, sur les classes modestes, si c’est ça que le PS appelle les riches, on se prépare, dans ce programme des lendemains qui déchantent.
 
JULIEN ARNAUD Alors justement, sur l’argumentation antisocialiste, il y a une convention cet après-midi. Il y a également, raconte LE PARISIEN, ce matin, une colère de Nicolas SARKOZY sur la façon dont l’UMP gère le côté anti-primaire. Quoi ! Il dit le président de l’UMP n’a pas su contrer le pilonnage médiatique. Est-ce que vous êtes d’accord avec cette sentence ?
LAURENT WAUQUIEZ Je vais vous dire, surtout ce qu’il faut, c’est ne soyons pas primaires dans le côté anti-primaire. Pour moi, ce n’est pas un jeu de tête d’affiche, ce n’est pas un jeu, d’essayer de faire de la démolition des primaires ou de ceci, cela. Il y a une seule question de fond, qui est celle que j’illustrais tout à l’heure, avec cette question fiscale, c’est les propositions. Une élection présidentielle, c’est un véritable choix, très important pour les Français. La dernière fois, qu’ils ont voté socialiste, ils ont eu les 35 heures, vrai choix derrière qui se paie en terme d’emploi, en terme de modèle de société. Donc regardons ce qui est proposé. Je pose les questions simplement. Le PS propose un impôt écologique, est-ce que c’est ce que veulent les Français ? Le PS propose un RSA pour les jeunes sans conditions, est-ce que c’est ce que veulent les Français ? Le PS propose le vote des étrangers aux élections municipales, est-ce que c’est ce que veulent les Français ?
 
JULIEN ARNAUD Jusqu’à maintenant, l’UMP était trop primaire dans son anti-primairisme ?
LAURENT WAUQUIEZ Ce que je souhaite, en tout cas, c’est qu’on soit concentré sur une seule chose : le fond. Et sans caricaturer…
 
JULIEN ARNAUD Ce qui n’était pas le cas jusque-là ?
LAURENT WAUQUIEZ C'est-à-dire que ce sont des vraies propositions, et il y a des vraies alternatives, et c’est évidemment possible pour un parti politique de proposer cela.
 
JULIEN ARNAUD Mais jusque-là, on n’était pas assez sur le fond ?
LAURENT WAUQUIEZ Vous savez, c’est un peu, quand les Français, regarde aujourd’hui la publicité, ils ont appris à se méfier. Ils ont appris à retourner le produit, regarder la composition, et de regarder le prix. Au niveau des élections présidentielles, ce n’est pas le packaging moderne de savoir si on a fait une primaire ou pas une primaire qui compte, c’est vous retournez l’étiquette et vous regardez qu’est-ce qu’on vous propose au fond. Parce que les choix ont un vrai impact.
 
JULIEN ARNAUD Et quand on retourne l’étiquette de la politique, il y a aussi pas mal de querelles intestines par exemple entre François FILLON et entre Jean- François COPE. Est-ce que cette guéguerre, ça brouille aujourd’hui le message de la droite et ça perturbe la préparation du rendez-vous de 2012 ?
LAURENT WAUQUIEZ Je ne pense pas. Enfin, en tout cas, il y a un seul impératif, c’est d’être tout le monde sur une ligne, d’avoir une élection présidentielle, qui soit faite sur la clarté.
 
JULIEN ARNAUD C’est le cas aujourd’hui ?
LAURENT WAUQUIEZ Oui, je pense qu’aujourd’hui, il y a maintenant, un vrai ordre de bataille qui a été construit, sur lesquels les gens sont en ligne, sur lequel vous avez un François FILLON, qui travaille évidemment avec Jean- François COPE, un parti qui doit assumer son travail de répondre sur le fond au Parti socialiste. Voilà, c’est notre seul travail maintenant. Mais je le dis bien, ce sera une des élections présidentielles les plus politiques des 20 dernières années. Avec 2 vrais choix lourds de société. Je ne veux pas que ce soit fait à l’aveugle. Et en tout cas, moi, ce que sera ma boussole et mon fil rouge, dans cette campagne, c’est de mettre systématiquement le débat sur le fond. Les vraies propositions que les Français vont devoir arbitrer.
 
JULIEN ARNAUD Vous pourriez être candidat, vous, à une primaire en 2017 ?
LAURENT WAUQUIEZ (rires) Vous faites une proposition qui est extrêmement attractive ! Parce que grosso modo ce que vous êtes en train de me proposer, c’est d’être pendant deux mois, sur les télés, les radios non stop, sans aucun contradicteur, enfin c’est le rêve de tout homme politique ! Je vais être un tout petit peu plus sérieux, enfin 2017, ce n’est pas l’horizon. Il y a 2012 et même avant 2012, la priorité, c’est d’abord la gestion de la crise. Voilà !
 
JULIEN ARNAUD Jean-François COPE, il pense trop à 2017, lui, d’après vous ?
LAURENT WAUQUIEZ Là encore, vous venez de m’allumer une petite lampe rouge, juste avant, qu’il n’y ait pas de division. Vous comprendrez que je ne tombe pas dedans.
 
JULIEN ARNAUD Est-ce qu’il y a une division avec Claude GUEANT, sur la circulaire qui pose des problèmes pour les jeunes diplômés à travailler en France ? Est-ce que vous souhaitez que l’application de cette circulaire soit moins restrictive ?
LAURENT WAUQUIEZ C’est Claude GUEANT, comme moi, souhaitons que l’application de cette circulaire n’aboutisse pas à opposer un niet à tous les étudiants étrangers qui veulent continuer à travailler en France. On a exactement la même position et on défend la même approche.

 Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 21 octobre 2011