Déclaration de M. Henri de Raincourt, ministre de la coopération, sur les efforts de la France en faveur de l'action humanitaire, à Paris le 16 novembre 2011.

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Circonstance : Ouverture de la Conférence nationale humanitaire, à Paris le 16 novembre 2011

Texte intégral

Madame le Commissaire,
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
Je suis particulièrement heureux de vous accueillir pour cette semaine de la solidarité internationale au ministère des Affaires étrangères et européennes sur le site de la Convention. Je voudrais également en notre nom à tous accueillir Madame la Commissaire Georgieva, que je remercie chaleureusement d’avoir accepté de participer à cette journée.
Votre réunion d’aujourd’hui - exclusivement consacrée à l’action humanitaire - est une première.
Le dialogue entre l’État et les représentants de la société civile n’est pas totalement nouveau. Le gouvernement considère que c’est une dimension essentielle de notre action extérieure et de notre engagement solidaire.
J’en veux pour preuve l’implication personnelle et sans relâche du président de la République qui, dans le cadre de la Présidence française du G20, a tenu à placer les questions du développement humain au centre des discussions. L’échange, conduit personnellement par le président de la République, et à plusieurs reprises au cours des derniers mois, a permis à la fois d’informer les ONG et de prendre en compte nombre de leurs propositions.
L’un des exemples les plus emblématiques concerne la taxation des transactions financières. Ce point est aux marges de notre sujet d’aujourd’hui. Je ne le développerai pas mais j’y vois une illustration claire de cette alliance entre le pouvoir politique et la société civile pour relever ensemble des défis mondiaux. Sachez que la France ira de l’avant, sans tarder, afin de mettre en œuvre ce nouvel instrument dont une partie devrait contribuer à financer le développement.
L’action humanitaire s’inscrit dans une logique similaire : l’enjeu est global, la réponse doit être concertée et faire jouer la complémentarité de l’État et des ONG.
La dimension humanitaire de l’action extérieure de la France fait partie de notre patrimoine diplomatique et politique. Vous êtes les porteurs de cette préoccupation, traduisant en cela les attentes de nos concitoyens.
Elle procède, entre autres, de cet esprit qui jadis anima Henri Dunant, citoyen suisse, qui fut le créateur de la Croix Rouge en 1859. Ce fondement universaliste est incontestablement l’une des spécificités de notre politique étrangère. L’actualité sans cesse nous en rappelle l’exigence et aussi la pertinence.
Je pense à «l’obligation de protéger» qui mobilise la communauté internationale. Je rappellerai que, lors de la première guerre mondiale, les civils représentaient 10% des pertes humaines. Aujourd’hui, ils constituent la majorité des victimes de conflits. Cette réalité impose un nouveau défi pour l’action humanitaire.
Dans d’autres domaines tels que les catastrophes naturelles, les grandes pandémies ou la famine les situations de crise commandent aussi de réunir les efforts publics et non-gouvernementaux. Nous devons agir de tout notre poids commun pour être efficaces et fidèles à nos principes. La crise alimentaire qui frappe à nouveau tragiquement la Corne de l’Afrique montre l’importance primordiale face à ce fléau de l’action des ONG, en lien avec l’appui des États, de l’Union européenne et des agences multilatérales.
C’est sur ces problématiques que nous porterons notre réflexion commune aujourd’hui.
Le rapport de MM Alain Boinet et Benoît Miribel, élaboré à la demande de Bernard Kouchner, alors ministre des Affaires étrangères, fait apparaitre les contraintes auxquelles l’action humanitaire doit faire face. La conférence d’aujourd’hui doit poser les bases d’une réflexion commune pour répondre à ces défis : les problèmes de financement, les difficultés d’accès aux victimes, et d’une manière plus générale la question des rapports avec la puissance publique. Ce rapport fait des propositions qui visent, de façon pragmatique et progressive, à résoudre ces contraintes et à renforcer la confiance et la coopération entre les acteurs.
Je ne doute pas qu’Alain Juppé, qui viendra clore cette conférence avec vous, retiendra un certain nombre de propositions afin notamment d’accroitre l’impact de l’action humanitaire.
Cette action devra de plus en plus tisser des liens entre l’urgence, qui par nature gère le provisoire, et l’aide au développement qui s’inscrit dans la durée. L’un des enjeux est aussi d’assurer un continuum entre le temps court, celui des secours, et le temps long de la reconstruction.
Nous l’avons vu par exemple en Haïti. Lors du séisme de 2010, la communauté internationale s’est immédiatement mobilisée. Le gouvernement français y a aussi pris sa part. La société civile a su répondre avec générosité et intelligence. La présence sur le terrain de nos volontaires de la solidarité internationale aux côtés de représentants des ONG a donné, si besoin était, une claire démonstration de ce qu’est l’action humanitaire.
La France entend poursuivre ses efforts pour faire en sorte que 2% de son aide publique au développement soit effectivement mise en œuvre par les ONG.
Nous progressons dans ce sens. Nous avons décidé par exemple de consacrer 5% des 360 millions d’euros de notre contribution au Fonds mondial SIDA à des actions d’appui menées par les ONG et les divers de la société civile.
Enfin, pour aller encore dans le même sens, j’ai demandé que l’on réserve environ 10 millions d’euros - sur les 40 millions de crédits annuels de ce ministère gérés par l’AFD - afin de soutenir des initiatives dans les pays du «printemps arabe». La dimension humanitaire en sera une composante essentielle.
La nécessité d’unir nos efforts et nos moyens est au cœur de notre démarche. Elle trouve son prolongement naturel dans le consensus humanitaire européen adopté en décembre 2007. Celui-ci définit des principes communs ainsi qu’un cadre de mise en œuvre de l’aide en lien avec les autres acteurs, principalement les Nations unies.
Ce cadre couvre un champ vaste, allant du changement climatique aux actions pour le droit international humanitaire. Il est adossé sur les moyens financiers conséquents d’ECHO, qui représentent près d’un milliard d’euros par an.
Nous sommes donc heureux de votre présence Madame la Commissaire Georgieva et je vous renouvelle mes remerciements. Je pense que vous allez nous présenter ce cadre européen et la concertation approfondie qu’il requiert entre les États membres, afin de mieux articuler les rôles de chacun.
C’est sur ce terrain de l’action humanitaire qu’il nous revient aujourd’hui de donner corps et sens à la solidarité internationale. Un engagement résolu de tous, fait parfois de gestes simples, pourra sauver des vies, en forgeant dans le même temps la citoyenneté universelle, corolaire indispensable à la mondialisation.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 novembre 2011