Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Cet exercice de prévision du passage de lhiver en électricité revêt une importance toute particulière cette année dans le contexte que vous connaissez darrêt de huit réacteurs nucléaires en Allemagne.
Je note que les prévisions de RTE sont a priori plutôt rassurantes mais je relève plusieurs points de vigilance.
1. Le premier point de vigilance bien entendu, cest la situation en Allemagne.
Le Gouvernement français na certainement pas à commenter la décision souveraine de lAllemagne. Mais il est de notre devoir danticiper ses conséquences pour la France. Car ces conséquences sont dores-et-déjà sensibles. Sur les neuf premiers mois de lannée, nos exportations délectricité vers lAllemagne ont augmenté de 11% par rapport à la même période en 2010, et nos importations ont baissé de 50%. Notre solde est exportateur de plus de 3000 Gigawattheures alors quil était importateur lan dernier dautant.
Je retiens de létude que vient de présenter Dominique MAILLARD que limpact de la fermeture des réacteurs allemands sur la sécurité électrique de la France cet hiver est réel, même sil faut le relativiser.
Le principal risque, ce nest pas la pénurie de moyens de production, puisquil existe des réserves en France et Europe, jy reviendrai. Le risque, cest de ne pas pouvoir acheminer cette électricité là où elle sera nécessaire.
La fermeture de huit réacteurs en Allemagne implique des transferts massifs délectricité du nord vers le sud du pays. Et donc un risque de congestion du réseau électrique allemand. Ces limites du réseau allemand ne sont pas théoriques. Elles ont déjà conduit, selon la fédération allemande de lénergie éolienne, à près de 110 jours darrêts forcés déoliennes sur lannée 2010.
En cas de grand froid et donc de forte tension sur le réseau allemand, la France sera exposée à une perte de capacité dimport depuis lAllemagne. En temps normal, la France peut importer 3000 mégawatts grâce à ses interconnexions avec lAllemagne. En cas de grand froid, la France perdrait jusquà 2000 mégawatts. Cette perte serait certes compensée pour moitié par une croissance des importations depuis la Belgique mais elle contribue très clairement à réduire notre sécurité électrique.
Au-delà, le risque de congestion du réseau allemand en cas de grand froid pourrait se traduire par des situations de tension très basse sur le réseau de grand transport allemand, susceptibles de sétendre au réseau français, a minima sur sa partie Est. Cela pourrait se traduire par un « écroulement de tension », pouvant lui-même conduire à un black-out de grande ampleur.
Nous devrons donc être très vigilants pour prévenir ce type de difficulté extrême, et la coordination entre gestionnaires de réseaux sera déterminante.
2. Le deuxième point de vigilance, ce sont les zones de plus grande fragilité du réseau.
Lapprovisionnement électrique de la région Bretagne, tout dabord, est et reste le premier point de fragilité du territoire. Ce constat, renouvelé, souligne une fois de plus lurgence dune solution garantissant la sécurité de lapprovisionnement électrique des Bretons. Cest la raison pour laquelle le Gouvernement sest impliqué dans la mise en oeuvre dun pacte électrique breton reposant sur le développement des énergies renouvelables, de lefficacité énergétique, le renforcement du réseau de transport délectricité et la construction dune centrale à cycle combiné gaz qui contribuera à la couverture des pics de consommation. Le succès de lensemble de ces volets, dans un calendrier rapide, est une priorité du Gouvernement.
Par ailleurs, la région PACA reste aussi une préoccupation forte du Gouvernement. RTE a renforcé lartère actuelle de 400 000 volts entre 2007 et 2010 et nous mettrons en service à horizon de 2015 un « filet de sécurité » à 225 000 volts.
3. En revanche, et cest important, la France ne devrait pas souffrir de pénurie de production électrique.
La première raison, cest que nous avons fortement renforcé le parc de production électrique depuis un an. RTE peut ainsi tabler sur 1600 mégawatts de plus en moyenne. Ces nouvelles capacités correspondent au développement de léolien soutenu par le Gouvernement. Cest aussi et surtout la construction de nouvelles centrales à cycle combiné gaz dans notre pays, à savoir les centrales de Bayet dans lAllier et Montoir-de-Bretagne en Loire-Atlantique.
Lhypothèse de RTE sappuie aussi sur une bonne disponibilité des centrales de pointe et dextrême-pointe, quil sagisse notamment des cogénérations et des diesels. Je tiens à souligner que cette disponibilité dépendra cependant de la transition que nous pourrons assurer vers le marché de capacité qui sera mis en place en France en 2015 en application de la loi NOME.
La seconde raison pour laquelle nous ne devrions pas souffrir de pénurie de capacités électriques, cest que des surcapacités existent ailleurs en Europe. Mais je tiens à souligner ce que cela veut dire. Moins de production nucléaire en Allemagne, cela conduira à mobiliser davantage les centrales à charbon de lest de lEurope. LEurope paiera donc globalement son électricité plus chère cet hiver et émettra davantage de gaz à effet de serre.
Lheure est aujourdhui à lanalyse des conséquences précises à tirer des prévisions de RTE. Je réunirai le 21 novembre prochain la cellule de veille que jai créée au printemps dernier sur lapprovisionnement électrique de la France. Jy examinerai en détail avec les acteurs du secteur électrique leurs prévisions relatives au passage de lhiver, tout particulièrement au regard des points de vigilance que je viens de souligner.
Cette réunion sera également loccasion de faire un point davancement des réflexions relatives à la mise en oeuvre du marché de capacité électrique. Et jannoncerai alors les décisions du Gouvernement en termes de transition vers ce marché de capacité, afin de pérenniser les moyens électriques de pointe nécessaires à notre sécurité.
Par ailleurs, le 20 septembre en Pologne, j'avais proposé à l'ensemble des ministres européens de créer un groupe européen de coordination des politiques énergétiques, afin d'approfondir les échanges sur les politiques nationales, et une cellule de veille hivernale, pour anticiper et réagir a toute difficulté d'approvisionnement. Ces propositions se concrétisent. La cellule hivernale est dès à présent opérationnelle au niveau de linstance réunissant tous les gestionnaires de réseau européens. Le groupe de coordination des politiques tiendra quant à lui sa première réunion le 1er décembre.
Source http://www.economie.gouv.fr, le 15 novembre 2011
Cet exercice de prévision du passage de lhiver en électricité revêt une importance toute particulière cette année dans le contexte que vous connaissez darrêt de huit réacteurs nucléaires en Allemagne.
Je note que les prévisions de RTE sont a priori plutôt rassurantes mais je relève plusieurs points de vigilance.
1. Le premier point de vigilance bien entendu, cest la situation en Allemagne.
Le Gouvernement français na certainement pas à commenter la décision souveraine de lAllemagne. Mais il est de notre devoir danticiper ses conséquences pour la France. Car ces conséquences sont dores-et-déjà sensibles. Sur les neuf premiers mois de lannée, nos exportations délectricité vers lAllemagne ont augmenté de 11% par rapport à la même période en 2010, et nos importations ont baissé de 50%. Notre solde est exportateur de plus de 3000 Gigawattheures alors quil était importateur lan dernier dautant.
Je retiens de létude que vient de présenter Dominique MAILLARD que limpact de la fermeture des réacteurs allemands sur la sécurité électrique de la France cet hiver est réel, même sil faut le relativiser.
Le principal risque, ce nest pas la pénurie de moyens de production, puisquil existe des réserves en France et Europe, jy reviendrai. Le risque, cest de ne pas pouvoir acheminer cette électricité là où elle sera nécessaire.
La fermeture de huit réacteurs en Allemagne implique des transferts massifs délectricité du nord vers le sud du pays. Et donc un risque de congestion du réseau électrique allemand. Ces limites du réseau allemand ne sont pas théoriques. Elles ont déjà conduit, selon la fédération allemande de lénergie éolienne, à près de 110 jours darrêts forcés déoliennes sur lannée 2010.
En cas de grand froid et donc de forte tension sur le réseau allemand, la France sera exposée à une perte de capacité dimport depuis lAllemagne. En temps normal, la France peut importer 3000 mégawatts grâce à ses interconnexions avec lAllemagne. En cas de grand froid, la France perdrait jusquà 2000 mégawatts. Cette perte serait certes compensée pour moitié par une croissance des importations depuis la Belgique mais elle contribue très clairement à réduire notre sécurité électrique.
Au-delà, le risque de congestion du réseau allemand en cas de grand froid pourrait se traduire par des situations de tension très basse sur le réseau de grand transport allemand, susceptibles de sétendre au réseau français, a minima sur sa partie Est. Cela pourrait se traduire par un « écroulement de tension », pouvant lui-même conduire à un black-out de grande ampleur.
Nous devrons donc être très vigilants pour prévenir ce type de difficulté extrême, et la coordination entre gestionnaires de réseaux sera déterminante.
2. Le deuxième point de vigilance, ce sont les zones de plus grande fragilité du réseau.
Lapprovisionnement électrique de la région Bretagne, tout dabord, est et reste le premier point de fragilité du territoire. Ce constat, renouvelé, souligne une fois de plus lurgence dune solution garantissant la sécurité de lapprovisionnement électrique des Bretons. Cest la raison pour laquelle le Gouvernement sest impliqué dans la mise en oeuvre dun pacte électrique breton reposant sur le développement des énergies renouvelables, de lefficacité énergétique, le renforcement du réseau de transport délectricité et la construction dune centrale à cycle combiné gaz qui contribuera à la couverture des pics de consommation. Le succès de lensemble de ces volets, dans un calendrier rapide, est une priorité du Gouvernement.
Par ailleurs, la région PACA reste aussi une préoccupation forte du Gouvernement. RTE a renforcé lartère actuelle de 400 000 volts entre 2007 et 2010 et nous mettrons en service à horizon de 2015 un « filet de sécurité » à 225 000 volts.
3. En revanche, et cest important, la France ne devrait pas souffrir de pénurie de production électrique.
La première raison, cest que nous avons fortement renforcé le parc de production électrique depuis un an. RTE peut ainsi tabler sur 1600 mégawatts de plus en moyenne. Ces nouvelles capacités correspondent au développement de léolien soutenu par le Gouvernement. Cest aussi et surtout la construction de nouvelles centrales à cycle combiné gaz dans notre pays, à savoir les centrales de Bayet dans lAllier et Montoir-de-Bretagne en Loire-Atlantique.
Lhypothèse de RTE sappuie aussi sur une bonne disponibilité des centrales de pointe et dextrême-pointe, quil sagisse notamment des cogénérations et des diesels. Je tiens à souligner que cette disponibilité dépendra cependant de la transition que nous pourrons assurer vers le marché de capacité qui sera mis en place en France en 2015 en application de la loi NOME.
La seconde raison pour laquelle nous ne devrions pas souffrir de pénurie de capacités électriques, cest que des surcapacités existent ailleurs en Europe. Mais je tiens à souligner ce que cela veut dire. Moins de production nucléaire en Allemagne, cela conduira à mobiliser davantage les centrales à charbon de lest de lEurope. LEurope paiera donc globalement son électricité plus chère cet hiver et émettra davantage de gaz à effet de serre.
Lheure est aujourdhui à lanalyse des conséquences précises à tirer des prévisions de RTE. Je réunirai le 21 novembre prochain la cellule de veille que jai créée au printemps dernier sur lapprovisionnement électrique de la France. Jy examinerai en détail avec les acteurs du secteur électrique leurs prévisions relatives au passage de lhiver, tout particulièrement au regard des points de vigilance que je viens de souligner.
Cette réunion sera également loccasion de faire un point davancement des réflexions relatives à la mise en oeuvre du marché de capacité électrique. Et jannoncerai alors les décisions du Gouvernement en termes de transition vers ce marché de capacité, afin de pérenniser les moyens électriques de pointe nécessaires à notre sécurité.
Par ailleurs, le 20 septembre en Pologne, j'avais proposé à l'ensemble des ministres européens de créer un groupe européen de coordination des politiques énergétiques, afin d'approfondir les échanges sur les politiques nationales, et une cellule de veille hivernale, pour anticiper et réagir a toute difficulté d'approvisionnement. Ces propositions se concrétisent. La cellule hivernale est dès à présent opérationnelle au niveau de linstance réunissant tous les gestionnaires de réseau européens. Le groupe de coordination des politiques tiendra quant à lui sa première réunion le 1er décembre.
Source http://www.economie.gouv.fr, le 15 novembre 2011