Texte intégral
Monsieur le Doyen,
Monsieur le Maire,
Monsieur le Préfet,
Mesdames et Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs les Directeurs,
Mesdames et Messieurs les Professeurs,
Mesdames, Messieurs,
Je me réjouis tout particulièrement d'être parmi vous pour inaugurer l'unité INSERM U 558, dont une partie des travaux concerneront plus particulièrement une préoccupation qui me tient à cur et de longue date, les effets du vieillissement.
A l'heure où des évolutions majeures se produisent, suscitant de nombreuses interrogations, un besoin fort de connaissances nouvelles se fait sentir, et vos travaux sont très attendus.
Vous le savez, nos sociétés occidentales vivent une véritable révolution démographique, avec une augmentation croissante de la part des personnes les plus âgées dans la population : on vit de plus en plus longtemps, de plus en plus en plus nombreux et dans vingt ans, près de 30 % de la population française aura plus de 60 ans. Et d'ailleurs, qui peut soutenir aujourd'hui qu'à 60 ans , on est vieux ?
Une mutation culturelle est en cours, dont on appréhende encore insuffisamment les enjeux aussi bien pour chaque individu, que pour notre société : quelles seront les répercussions du vieillissement dans nos représentations, nos mentalités, nos modes de vie, de transport, nos liens familiaux ? Désormais les relations entre générations ne s'appréhendent plus seulement dans la famille, mais intéressent la collectivité, les politiques publiques.
Aujourd'hui, collectivement, sommes-nous prêts à ces bouleversements ? A nos yeux, la vieillesse est largement marquée par des critères d'utilité sociale liés à la place du travail salarié, et l'idée de vieillesse évoque des notions d'incapacité, de maladie, de deuil ; une étude datant du milieu des années quatre vingt-dix effectuée par une sociologue, Cornelia Hummel, faisait apparaître que la personne âgée, ce n'est jamais soi, c'est quelqu'un d'autre, marqué par le déclin physique, plus âgé, etcPour cette chercheuse, cela rappelle " la représentation sociale de la folie ou du handicap, c'est à dire de l'altérité on se défendrait de la vieillesse en la rejetant hors des frontières de notre identité alors qu'on est tous potentiellement vieux et que notre société est pleine de vieux ".
Nous avons encore du chemin à parcourir pour faire évoluer attitudes, stéréotypes, et parfois fausses croyances.
Je suis convaincue qu'il nous faut aujourd'hui uvrer à changer le regard sur l'âge et le vieillissement et c'est dans cette voie que j'engage mon action, pour une politique du " bien vieillir ". Nous devons respecter tous les temps de la vie et respecter dans chaque période le rapport au temps qui convient. C'est maintenant un enjeu fort pour nos démocraties : permettre à chaque citoyen quel que soit son âge de trouver sa place et de la faire progresser de façon positive. Le vieillissement de la population renforce cet enjeu.
Comment assurer le bien être physique et psychique à un âge avancé ? Comment affronter sereinement la perspective de la mort et des deuils ? Ces questions nous interrogent tous, individus, citoyens engagés dans des mouvements associatifs, professionnels, responsables politiques.
Pour ma part, j'ai la conviction que bien vieillir c'est d'abord prévenir le vieillissement pathologique ; le phénomène du vieillissement se trouve au centre d'une problématique où se mêlent biologique, médical, psychologique, économique, sociologique, culturel. Tous les travaux de recherche que vous mènerez dans votre unité intéressent à des degrés divers, même indirectement, la qualité de vie des personnes âgées. Mais j'attends tout particulièrement l'éclairage qu'apporteront vos études sur les aspects épidémiologiques et sociologiques pour mettre en perspective les interrelations entre les champs d'analyse.
Bien vieillir, c'est aussi pouvoir choisir où l'on vit, en particulier lorsqu'on commence à perdre son autonomie ; face à des risques qui nous concernent tous, le projet de loi sur l'allocation personnalisée d'autonomie voté en première lecture à l'Assemblée Nationale a l'ambition d'affirmer un droit universel, en créant un droit à une aide personnalisée pour permettre à chaque personne âgée de choisir de vieillir chez elle dans des conditions dignes. Cette loi introduit d'ailleurs un changement de perspective majeur en raisonnant dans la perspective de l'autonomie et non plus dans celle de la dépendance. Pour donner toute son effectivité à cette loi, je m'attacherai à développer la qualité des aides tant à domicile qu'en institution, en cherchant à répondre au plus près aux besoins propres de chaque personne.
Etre à l'écoute des nouvelles aspirations, concrétiser des solutions, faire émerger un nouveau regard sur le vieillissement, tel est le chemin que je m'engage à poursuivre.
Je suis certaine que la recherche par les connaissances nouvelles et les progrès techniques auxquels elle contribue, est une aide essentielle pour tous les décideurs.
Mais, et je le regrette, alors que la recherche intéresse aussi bien les professionnels, les usagers que les pouvoirs publics, elle reste souvent insuffisamment valorisée et méconnue ; je formule le souhait que se développe un nouvel état d'esprit, fait de plus de transparence et d'information, permettant ainsi de préciser les attentes que l'on peut avoir vis à vis de la recherche, de décloisonner les champs, d'en expliciter les retombées, de mieux informer les citoyens. En tant que Ministre, j'agirai pour mettre en uvre les institutions et les procédures qui, au plan national, régional ou local, faciliteront une meilleure appropriation de la recherche par la société toute entière, contribuant ainsi à faire bouger le regard sur l'âge.
Je partage là un des souhaits exprimés par votre Directeur Général, Christian Bréchot, qui considère comme essentiels les efforts de valorisation de la recherche et a rappelé que " la vocation de l'INSERM est une recherche axée sur le patient, puis l'utilisation des données obtenues pour la prévention et le traitement des maladies ", affirmant ainsi avec force que la personne est au centre des préoccupations de la recherche.
Simone de Beauvoir, il y a près de 40 ans, nous mettait en garde : " Si l'adulte refuse au vieillard toute possibilité de communication en privant de sens ses paroles, ses gestes, ses appels, celui-ci s'enferme en lui-même, il désapprend le langage, il glisse hors de l'espèce humaine. " Ce devoir d'humanité auquel nous confronte la vieillesse, je suis convaincue que vos recherches nous permettront de mieux l'exercer. Je sais que cette préoccupation sera la vôtre, vous qui par vos thèmes de travail allez travailler dans la multidisciplinarité, avec des professionnels de divers horizons, et sur des problématiques nouvelles.
Je terminerai en exprimant au Docteur Grandjean, au Professeur Grand et à toutes les personnes qui vont les accompagner au sein des différentes équipes, mes vux les plus chaleureux de réussite, souhaitant être personnellement informée de l'avancée de vos travaux.
(source http://www.social.gouv.fr, le 14 mai 2001)
Monsieur le Maire,
Monsieur le Préfet,
Mesdames et Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs les Directeurs,
Mesdames et Messieurs les Professeurs,
Mesdames, Messieurs,
Je me réjouis tout particulièrement d'être parmi vous pour inaugurer l'unité INSERM U 558, dont une partie des travaux concerneront plus particulièrement une préoccupation qui me tient à cur et de longue date, les effets du vieillissement.
A l'heure où des évolutions majeures se produisent, suscitant de nombreuses interrogations, un besoin fort de connaissances nouvelles se fait sentir, et vos travaux sont très attendus.
Vous le savez, nos sociétés occidentales vivent une véritable révolution démographique, avec une augmentation croissante de la part des personnes les plus âgées dans la population : on vit de plus en plus longtemps, de plus en plus en plus nombreux et dans vingt ans, près de 30 % de la population française aura plus de 60 ans. Et d'ailleurs, qui peut soutenir aujourd'hui qu'à 60 ans , on est vieux ?
Une mutation culturelle est en cours, dont on appréhende encore insuffisamment les enjeux aussi bien pour chaque individu, que pour notre société : quelles seront les répercussions du vieillissement dans nos représentations, nos mentalités, nos modes de vie, de transport, nos liens familiaux ? Désormais les relations entre générations ne s'appréhendent plus seulement dans la famille, mais intéressent la collectivité, les politiques publiques.
Aujourd'hui, collectivement, sommes-nous prêts à ces bouleversements ? A nos yeux, la vieillesse est largement marquée par des critères d'utilité sociale liés à la place du travail salarié, et l'idée de vieillesse évoque des notions d'incapacité, de maladie, de deuil ; une étude datant du milieu des années quatre vingt-dix effectuée par une sociologue, Cornelia Hummel, faisait apparaître que la personne âgée, ce n'est jamais soi, c'est quelqu'un d'autre, marqué par le déclin physique, plus âgé, etcPour cette chercheuse, cela rappelle " la représentation sociale de la folie ou du handicap, c'est à dire de l'altérité on se défendrait de la vieillesse en la rejetant hors des frontières de notre identité alors qu'on est tous potentiellement vieux et que notre société est pleine de vieux ".
Nous avons encore du chemin à parcourir pour faire évoluer attitudes, stéréotypes, et parfois fausses croyances.
Je suis convaincue qu'il nous faut aujourd'hui uvrer à changer le regard sur l'âge et le vieillissement et c'est dans cette voie que j'engage mon action, pour une politique du " bien vieillir ". Nous devons respecter tous les temps de la vie et respecter dans chaque période le rapport au temps qui convient. C'est maintenant un enjeu fort pour nos démocraties : permettre à chaque citoyen quel que soit son âge de trouver sa place et de la faire progresser de façon positive. Le vieillissement de la population renforce cet enjeu.
Comment assurer le bien être physique et psychique à un âge avancé ? Comment affronter sereinement la perspective de la mort et des deuils ? Ces questions nous interrogent tous, individus, citoyens engagés dans des mouvements associatifs, professionnels, responsables politiques.
Pour ma part, j'ai la conviction que bien vieillir c'est d'abord prévenir le vieillissement pathologique ; le phénomène du vieillissement se trouve au centre d'une problématique où se mêlent biologique, médical, psychologique, économique, sociologique, culturel. Tous les travaux de recherche que vous mènerez dans votre unité intéressent à des degrés divers, même indirectement, la qualité de vie des personnes âgées. Mais j'attends tout particulièrement l'éclairage qu'apporteront vos études sur les aspects épidémiologiques et sociologiques pour mettre en perspective les interrelations entre les champs d'analyse.
Bien vieillir, c'est aussi pouvoir choisir où l'on vit, en particulier lorsqu'on commence à perdre son autonomie ; face à des risques qui nous concernent tous, le projet de loi sur l'allocation personnalisée d'autonomie voté en première lecture à l'Assemblée Nationale a l'ambition d'affirmer un droit universel, en créant un droit à une aide personnalisée pour permettre à chaque personne âgée de choisir de vieillir chez elle dans des conditions dignes. Cette loi introduit d'ailleurs un changement de perspective majeur en raisonnant dans la perspective de l'autonomie et non plus dans celle de la dépendance. Pour donner toute son effectivité à cette loi, je m'attacherai à développer la qualité des aides tant à domicile qu'en institution, en cherchant à répondre au plus près aux besoins propres de chaque personne.
Etre à l'écoute des nouvelles aspirations, concrétiser des solutions, faire émerger un nouveau regard sur le vieillissement, tel est le chemin que je m'engage à poursuivre.
Je suis certaine que la recherche par les connaissances nouvelles et les progrès techniques auxquels elle contribue, est une aide essentielle pour tous les décideurs.
Mais, et je le regrette, alors que la recherche intéresse aussi bien les professionnels, les usagers que les pouvoirs publics, elle reste souvent insuffisamment valorisée et méconnue ; je formule le souhait que se développe un nouvel état d'esprit, fait de plus de transparence et d'information, permettant ainsi de préciser les attentes que l'on peut avoir vis à vis de la recherche, de décloisonner les champs, d'en expliciter les retombées, de mieux informer les citoyens. En tant que Ministre, j'agirai pour mettre en uvre les institutions et les procédures qui, au plan national, régional ou local, faciliteront une meilleure appropriation de la recherche par la société toute entière, contribuant ainsi à faire bouger le regard sur l'âge.
Je partage là un des souhaits exprimés par votre Directeur Général, Christian Bréchot, qui considère comme essentiels les efforts de valorisation de la recherche et a rappelé que " la vocation de l'INSERM est une recherche axée sur le patient, puis l'utilisation des données obtenues pour la prévention et le traitement des maladies ", affirmant ainsi avec force que la personne est au centre des préoccupations de la recherche.
Simone de Beauvoir, il y a près de 40 ans, nous mettait en garde : " Si l'adulte refuse au vieillard toute possibilité de communication en privant de sens ses paroles, ses gestes, ses appels, celui-ci s'enferme en lui-même, il désapprend le langage, il glisse hors de l'espèce humaine. " Ce devoir d'humanité auquel nous confronte la vieillesse, je suis convaincue que vos recherches nous permettront de mieux l'exercer. Je sais que cette préoccupation sera la vôtre, vous qui par vos thèmes de travail allez travailler dans la multidisciplinarité, avec des professionnels de divers horizons, et sur des problématiques nouvelles.
Je terminerai en exprimant au Docteur Grandjean, au Professeur Grand et à toutes les personnes qui vont les accompagner au sein des différentes équipes, mes vux les plus chaleureux de réussite, souhaitant être personnellement informée de l'avancée de vos travaux.
(source http://www.social.gouv.fr, le 14 mai 2001)