Interview de M. Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche à RMC le 12 janvier 2012, sur le statut des étudiants étrangers, les jours fériés pour les musulmans et les juifs et le débat sur les heures supplémentaires.

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Texte intégral


 
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Laurent WAUQUIEZ, nous allons parler social, mais un petit mot quand même sur ces petites phrases distribuées ici ou là, Bernard ACCOYER qui estime que si la gauche passe c’est la guerre, Jean- François COPE qui parle de massacre à la tronçonneuse, Nadine MORANO qui dit que HOLLANDE est un homme dangereux. Vous ne pensez pas que les Français méritent mieux que ces discours-là, franchement ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Et vous pourriez en citer tout autant de l’autre côté.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, peut-être, mais peu importe.
 
LAURENT WAUQUIEZ Je vais être assez simple, cette campagne ça peut être une belle campagne, on a des vrais sujets, la politique familiale, comment est-ce qu’on protège mieux notre emploi, quel avenir pour l’Europe, qu’est-ce qu’on fait sur l’euro, qu’est-ce qu’on fait sur l’immigration, il y a des vrais beaux sujets. Moi ce que j’espère c’est que ça va être une belle campagne, concrète, précise.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais vous déplorez ce genre de propos ou pas ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, en tout cas…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous me dites que vous ne déplorez pas ces propos, moi je ne comprends plus là, Laurent WAUQUIEZ.
 
LAURENT WAUQUIEZ On va prendre un point précis. ACCOYER, on dit, holà là, ACCOYER a dit « si la gauche passe c’est la guerre », il n’a pas dit ça du tout, d’ailleurs à votre micro vous l’avez souligné, sur les ondes de RMC. Donc juste, moi ce qui m’intéresse, je crois que c’est votre cas aussi, c’est on parle du concret et on essaie d’avoir une campagne de fond.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Il n’a pas dit la gauche c’est la guerre, il a dit si le président de la République – il n’a pas parlé de président de la République – mais il a dit si les idées défendues par le président de la République ne passent pas, c’est la guerre. C’est à peu près ce qu’il a dit.
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, surtout ce qu’il a dit c’est, attention, ça va être une campagne présidentielle avec des très gros enjeux.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Et Nadine MORANO qui dit « HOLLANDE est un homme dangereux », c’est un homme dangereux HOLLANDE ou pas ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Ce qui me gêne surtout, et là ça rejoint votre préoccupation, c’est que personne ne sait ce qu’il veut.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Non, mais, est-ce que c’est un homme dangereux ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Quelqu’un qui vient aux présidentielles, et qui veut faire voter les Français dans le brouillard, c’est dangereux, oui.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Donc c’est un homme dangereux ?
 
LAURENT WAUQUIEZ C’est dangereux d’avoir une approche dans laquelle, sur votre programme on ne sait pas ce que vous faites…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Donc vous considérez qu’il est dangereux pour la France ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Je considère que, aujourd’hui, son approche est une approche qui est dangereuse dans des présidentielles, voilà, mais que après il peut la clarifier, c’est tout. Moi ce qui ne m’intéresse pas… je ne suis pas sur les attaques personnelles, sur les petites phrases, ce qui m’intéresse c’est le concret, et je pense que c’est ça dont on va parler.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors, on va parler de cela. Les élus belges, députés et sénateurs, vous connaissez bien la Belgique, Laurent WAUQUIEZ, les élus belges, députés et sénateurs, baissent leur salaire de 5%. Et nous ? Est-ce que c’est une bonne idée ça ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Alors, nous, qu’est-ce qu’on a fait ? On a fait quelque chose. Il y a eu une décision qui a été prise de geler tous les salaires, des ministres et des membres du gouvernement, en disant dans cette période, tant qu’on n’est pas revenu…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Parce que vous êtes fonctionnaires finalement, c’est normal, tous les fonctionnaires voient leur traitement gelé.
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui, mais enfin, la différence aussi, et c’est là où votre point de comparaison est intéressant, c’est que quel est l’objectif qu’a été celui du président ? Eviter qu’on ait à baisser les salaires, éviter qu’on ait à taper sur les salaires…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais pourquoi ne pas baisser ? Les élus belges donnent l’exemple.
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN 5%, c’est symbolique, ce n’est pas ça qui va changer les finances du pays, mais pourquoi ne pas faire la même chose en France ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Réponse très précise, en Belgique ils baissent les salaires des fonctionnaires, en Espagne ils baissent les salaires des fonctionnaires, les élus font donc comme tout le monde, et ce qui me semble…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, et en Belgique ils alignent les retraites des élus sur le secteur public, ce qui n’est pas fait en France, totalement.
 
LAURENT WAUQUIEZ Il y a eu énormément…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Pas totalement.
 
LAURENT WAUQUIEZ Mais, de toute façon, je vais vous dire, moi je n’ai pas d’état d’âme là-dessus, c'est-à-dire que je considère qu’un élu doit montrer l’exemple. En tant qu’élu local, par exemple, j’ai supprimé la voiture de fonction du maire, la mienne, j’ai supprimé les dépenses de représentations, j’ai supprimé les frais qui étaient les frais de restaurant, donc je considère qu’un élu doit montrer l’exemple, je n’ai aucune état d’âme sur ce sujet.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous êtes prêt à baisser votre salaire de 5% s’il le faut.
 
LAURENT WAUQUIEZ Mais, par exemple, en tant qu’élu local, il y a une demande qui nous a été faites, c’est, eh bien écoutez, vous êtes membre du gouvernement, vous êtes élu local, vous allez faire un effort, et donc on a baissé la rémunération de l’élu local.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Justement, le président de la République a appelé les élus locaux à faire des efforts, quelle sorte d’efforts ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Je suis très préoccupé sur ce sujet. Pourquoi ? Les impôts locaux tapent en priorité sur les classes moyennes. Or, qu’est-ce qu’on voit, notamment dans les régions gérées, parce qu’il y a quand même… il faut que chacun assume ses responsabilités, notamment par les socialistes, il y a eu au cours des dernières années une augmentation des impôts de plus de 60%, 60% d’explosion des impôts, et je crois que là-dessus on a un sens des responsabilités collectif à avoir. Dérive des dépenses, ça se traduit, à un moment ou à un autre, par des impôts locaux qui tapent sur les classes moyennes. Et je crois qu’il y a un appel, qui d’ailleurs de ce point de vue, vous l’évoquiez, peu être un appel collectif, qui dépasse la gauche et la droite, au sens des responsabilités. François HOLLANDE, à mon avis, doit prendre un engagement au nom des élus socialistes sur ce sujet…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Lequel ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Qui est un engagement de non-augmentation des impôts et de…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous appelez François HOLLANDE à ne pas, à demander aux élus socialistes de ne pas augmenter les impôts locaux ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui, parce qu’il ne peut pas y avoir un discours à Paris et un autre discours chez soi. Prenons un cas précis. François HOLLANDE est président du Conseil Général de Corrèze, en Corrèze, depuis 2008, les dépenses ont augmenté de 30%, la dette de 40%, et cette année il augmente les impôts fonciers de 10%, alors qu’en 2008 il avait dit « promesse, je n’augmenterai pas les impôts. » C’est cette spirale-là qu’il faut casser. Et donc je crois que de ce point de vue il y a un sens des responsabilités de l’ensemble des élus locaux qu’on doit avoir, qui d’ailleurs dépasse les questions de gauche et de droite, et où je crois qu’il faut que les élus socialistes responsables de Conseils Régionaux, responsables de collectivités locales, participent aussi à ce sens des responsabilités collectif.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Bien, deux autres questions, sur les étudiants étrangers, sur la dernière proposition d’Eva JOLY concernant les jours féries pour les juifs et les musulmans, ensuite je parlerai social avec vous, et notamment temps de travail, parce que ce sera l’un des grands débats du sommet social de la semaine prochaine. Laurent WAUQUIEZ, première chose, les étudiants étrangers, qui obtiennent leur diplôme en France, et qui trouvent leur premier emploi dans une entreprise française, pourront-ils tous rester en France ? Je vous pose bien la question, pourront-ils tous rester en France ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Alors tous, non. Pourquoi.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Pourquoi ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui, la France veut maîtriser sa politique d’immigration, non, la France ne ferme pas sa porte aux étudiants étrangers.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous fermez la porte à certains étudiants étrangers.
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, mais, on va être simple.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Allez-y, allez-y, quel va être le texte qui sera présenté aujourd’hui officiellement ? Révélation sur RMC/ BFM TV ce matin, quel sera ce texte ?
 
LAURENT WAUQUIEZ D’abord, premièrement, le texte, le nouveau texte sur les étudiants étrangers sera adopté aujourd’hui. C’est un texte, et je me suis beaucoup battu pour, qui est très favorable aux étudiants étrangers, et notamment master et doctorat, qui ont étudié en France, pour qu’ils puissent ensuite travailler en France. Le texte prend en compte, et c’était important pour moi, les remontées de terrain qui nous ont été faites, notamment par les présidents d’université, les responsables de grandes écoles, parce qu’on avait eu un premier texte, qui a soulevé des vraies difficultés…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous avez commis une bourde quoi, une erreur…
 
LAURENT WAUQUIEZ Quand on fait des difficultés il faut savoir les reconnaître et les corriger.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Disons les choses.
 
LAURENT WAUQUIEZ C’est ce qu’on fait, et aujourd’hui ce texte, pour moi…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors que dit le texte, le nouveau texte ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Ce texte tourne la page des malentendus, il rappelle trois choses. D’abord, un, la France veut continuer à attirer des étudiants étrangers, master, doctorat, parce qu’ensuite ce sont des ambassadeurs à vie pour notre pays…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Ça veut dire que, je vous arrête là, sur ce premier point, tous les étudiants qui obtiennent un master ou un doctorat en France, auront la possibilité de travailler en France pour une entreprise française ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Ça veut dire que cette possibilité leur est offerte, et qu’il y a, dans le texte, une procédure qui est une procédure spécifique, pour des étudiants étrangers niveau notamment master, doctorat, et qui ensuite veulent travailler en France, avec une procédure qui leur permet de le faire.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Aucun d’entre eux ne sera renvoyé dans son pays s’il a trouvé du travail en France ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Ça n’a pas de sens, monsieur BOURDIN, de dire ça.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Ah bon ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Pourquoi.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Pourquoi quoi ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Je vais prendre un cas précis. Un étudiant qu’on a formé, par exemple en ingénieur informatique, et qui est en master…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Il trouve du travail dans une entreprise française…
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui, il trouve du travail par exemple, ou il part dans une entreprise française sur un job qui est tout à fait autre que celui pour lequel on l’a formé, ça, ça ne nous intéresse pas. Un étudiant qui par exemple a fait un master en mathématiques et qui est embauché comme serveur chez McDonald’s, ça non, ça ce n’est pas les choses qu’on veut valider. Nous ce qu’on veut valider, si on a investi pour la formation d’un étudiant étranger, derrière il peut être un ambassadeur à vie pour notre pays, on lui donne la possibilité de travailler ensuite en France quand c’est par rapport à sa formation.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Que dit encore le texte ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Et puis la troisième chose que fait le texte, c’est qu’il corrige les difficultés et les erreurs qu’on a pu faire, et donc de dire, les cas, qui ont été des cas où on a refusé à des étudiants, par exemple un polytechnicien brésilien auquel on a refusé de pouvoir travailler chez L’OREAL, ou chez EADS, eh bien il a la possibilité de refaire une demande pour qu’on puisse corriger les choses.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN De revenir en France.
 
LAURENT WAUQUIEZ Voilà. Donc c’est un texte qui permet de soulever et de lever les malentendus. Attention, pas d’ambiguïté, et je le dis bien, la France veut maîtriser sa politique d’immigration, mais s’agissant d’étudiants étrangers qui peuvent être des ambassadeurs pour notre pays, on veut continuer à les accueillir.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Laurent WAUQUIEZ, autre question d’actualité, Eva JOLY a parlé hier de proposer un jour férié aux juifs et aux musulmans, en fait d’élargir le débat et de proposer à chaque citoyen français un jour férié à la carte en fonction de sa religion. Alors, je suis chrétien, je demande tel jour férié, je suis musulman tel jour férié, juif tel jour férié, qu’en pensez-vous ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Je vais être très…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN C’était une proposition de la Commission STASI ! Mise en place par Jacques CHIRAC en 2003.
 
LAURENT WAUQUIEZ Bien sûr. Je vais être très clair et très direct. D’abord, un, est-ce que le premier problème de ce pays en ce moment c’est de décliner des jours fériés à la carte ? on a un problème d’emploi, on a un problème de compétitivité, on a un problème de dépense publique, on a un problème d’impôts locaux sur les classes moyennes, et les propositions qui viennent des Verts et de la gauche c’est de dire on va vous mettre des jours fériés à la carte ?
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Attendez, parce que Jean-Marc AYRAULT était sur la même position que vous tout à l’heure sur RMC.
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui, mais c’est…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Il disait exactement la même chose.
 
LAURENT WAUQUIEZ C’est bien pour ça que j’ai dit les Verts. Donc est-ce que la première priorité de notre pays c’est de décliner des jours fériés à la carte ? Première question. La deuxième question, et je l’assume, ça va peut-être… j’ai été amené à le dire et y compris avec vous, notre pays a des racines qui sont des racines chrétiennes, chacun doit pouvoir y trouver sa place. Chaque religion…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Donc des jours fériés pour les chrétiens, oui, des jours fériés pour les juifs et les musulmans non.
 
LAURENT WAUQUIEZ Ce n’est pas ça que je dis. Non, mais je vais aller jusqu’au bout. La seule chose c’est que, par exemple, on a Noël, est-ce que sous prétexte que Noël n’est pas dans toutes les religions, on va dire maintenant, pour fâcher personne, on enlève Noël ?
 
JEAN-JACQUES BOURDIN On a le 15 août aussi, on a l’Ascension…
 
LAURENT WAUQUIEZ Voilà, vous exprimez ma position, je considère qu’on a une tradition, on a une histoire, on ne va pas gommer notre histoire.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Donc les juifs et les musulmans n’ont pas le droit à un jour férié ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Ce n’est pas du tout ce que je dis. Si par exemple je prends le sujet des juifs, moi je suis très attentif, notamment dans mon ministère, pour faire en sorte que les dates d’examens puissent être respectueuses par rapport aux juifs qui veulent exercer leur religion, très attentif à ce que ça puisse être respectueux par rapport à des étudiants musulmans et qu’on puisse le concilier, mais le seul point c’est que la tolérance dans ce pays ne se construit pas sur la négation de ce qu’est notre histoire. On a une histoire, qui est une histoire chrétienne, qui a abouti à un certain nombre de jours fériés dans notre calendrier, qui sont des jours fériés marqués par cette histoire du christianisme, ça n’empêche pas d’avoir le plus grand respect pour toutes les religions, et je ne crois pas qu’il faut commencer à dire on va oublier Noël, on va oublier le 15 août, on va oublier tout ça, pour surtout ne plus fâcher personne. Ça, moi ce n’est pas ma vision de la laïcité, et je pense qu’on peut vivre les uns avec les autres sans pour autant nier notre histoire.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Laurent WAUQUIEZ, est-il vrai que vous allez proposer un grand débat sur le temps de travail à l’occasion du sommet social ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Ca fait partie des sujets qui ont été avancés, notamment par Xavier BERTRAND qui a dit, est-ce qu’on arrive dans des entreprises à faire des accords comme ce qui se passe en Allemagne ? Il y a plus d’activités, on s’accorde tous ensemble pour travailler plus, il y a un peu moins d’activité, ce que j’avais fait quand j’étais à l’emploi sur l’activité partielle, on permet à une entreprise d’en faire un peu moins, mais surtout de garder l’emploi.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN C'est-à-dire qu’on garde l’emploi, le salarié est moins payé, il travaille moins.
 
LAURENT WAUQUIEZ Un petit peu moins.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Il travaille moins.
 
LAURENT WAUQUIEZ Je vais prendre un cas très concret, les entreprises de décolletage en Savoie ont été très menacées, notamment en 2009/2010 par de la sous activité. Elles auraient pu licencier tous leurs salariés, on s’est battu pour faire des accords chez elles. On disait, vous gardez vos salariés, nous on prend en partie en charge leur salaire et du coup ils ne perdent pas leur emploi.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Est-ce que vous savez que les travailleurs indépendants en France travaillent 45 % de plus que les salariés ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, mais sur les travailleurs indépendants et vous êtes une des rares radios où on en parle, énorme travail de leur part.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Les travailleurs indépendants sont les artisans, les commerçants, les professions libérales, mais pas qu’eux, pas qu’eux, les taxis, les agriculteurs, enfin bon, etc…
 
LAURENT WAUQUIEZ Bien sûr et surtout moi il y a un point qui me préoccupe parce que c’est celui là qui est le plus préoccupant, c’est le harcèlement normatif et c’est à ça auquel il faut qu’on fasse attention, vos travailleurs indépendants, trop de contraintes, trop de normes, trop de règles dans tous les sens. Je vais vous évoquer un cas très simple que tout le monde comprendra, un maçon de chez moi, qui travaille avec sa femme, on est venu me voir en me disant, vous avez une femme chez vous, c’est très bien, elle travaille avec vous parfait, ça veut dire qu’il faut avoir deux vestiaires séparés, un homme, une femme, deux toilettes séparés, deux accès séparés. Il a dit, mais c’est ma femme. On lui a répondu, ça c’est votre vie privée. C’est ce bon sens qui a été perdu dans la relation entre l’administration et les travailleurs indépendants qu’il faut retrouver, parce que je pense que ce sont des professions…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Est-ce que vous savez aussi que les travailleurs et les salariés des petites entreprises travaillent plus que les salariés des très grandes entreprises ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Monsieur BOURDIN, j’ai un département dans lequel ultra majoritairement ce sont des PME et des entreprises de travail intermédiaire.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors vous savez qu’ils travaillent plus que dans les très grandes entreprises ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui, mais juste un autre point aussi.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Et qu’ils sont moins bien payés ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui et non, parce que notamment sur ces travailleurs des PME, pour eux ce qui est très important dans leur salaire, c’est les heures supplémentaires. Et si jamais vous commencez à taper et à interdire les heures supplémentaires comme c’est d’ailleurs, parce que ça fait partie de débats concrets qu’on doit avoir dans le programme de François HOLLANDE, vous leur sabrez toute une partie de leur rémunération. Chez moi par exemple…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais vous permettez l’embauche peut-être ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Je ne suis pas tout à fait d’accord avec ce choix là.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Ca coûte une fortune, quatre milliards et demi par an les heures supplémentaires.
 
LAURENT WAUQUIEZ Mettre quatre milliards et demi par an sur la table, pour faire en sorte qu’un ouvrier qui est à 1,7 SMIC puisse avoir un peu d’heures supplémentaires à la fin du mois et que ça se traduise par un peu plus sur son salaire, je ne pense pas que c’est de l’argent perdu.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Sauf que quand vous mettez en place les heures supplémentaires, vous baissez les charges de certaines entreprises, quand vous mettez en place les 35 heures, vous baissez les charges de certaines entreprises et notamment des grandes entreprises et ça coûte une fortune.
 
LAURENT WAUQUIEZ Le drame de notre pays, ça a été quoi ? Baisser le temps de travail, il y a une étude qui a été faite avec les 35 heures qui l’a montré, on a perdu en salaire, on a perdu en emploi.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Et donner des compensations financières aux grandes entreprises ?
 
LAURENT WAUQUIEZ L’objectif qui est le rendez-vous fixé par le président de la République, c’est un : Comment est-ce qu’on baisse le coût du travail pour gagner en emploi, mais surtout sans toucher au salaire et notamment à cette composante importante des salaires qu’est les heures sup, plus particulièrement dans les PME.
 Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 16 janvier 2012