Interview de M. Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche à RTL le 4 janvier 2012, sur le statut et les diplômes des étudiants étrangers et la campagne pour l'élection présidentielle de 2012.

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral


 
 
 
JEAN-MICHEL APHATIE Une circulaire du 31 mai dernier – signée par le ministre de l’Intérieur Claude GUEANT – enjoignait aux préfets de distribuer parcimonieusement des autorisations de travail aux étrangers étudiant en France. Le fait d’avoir séjourné régulièrement en France en tant qu’étudiant, écrivait le ministre de l’Intérieur, ne donne droit à aucune facilité particulière dans l’examen de la procédure de délivrance d’une autorisation de travail. Cette circulaire a provoqué un tollé dans le monde universitaire, elle a même suscité une pétition. Cette circulaire est-elle abrogée ce matin, Laurent WAUQUIEZ ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Alors, pour nous, de quoi est-ce qu’il s’agit, de concilier deux exigences, d’une part, la France maîtrise et doit maîtriser sa politique de l’immigration, d’autre part, accueillir les étudiants étrangers talentueux du monde est un impératif pour notre système d’enseignement supérieur…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Et cette circulaire ne permettait pas de concilier ces deux obligations.
 
LAURENT WAUQUIEZ Cette circulaire avait deux problèmes, le premier d’abord, elle ne rappelait pas suffisamment qu’accueillir des étudiants étrangers, les étudiants étrangers à haut potentiel, est un enjeu pour l’attractivité et la compétitivité de notre pays, pourquoi, ces étudiants étrangers de haut niveau, on parle de gens qui ont fait des masters, des doctorats, sur lesquels on a investi, peuvent être ensuite des ambassadeurs pour notre pays et pour nos entreprises. Le deuxième sujet, c’est que c’est une question qui est particulière, des étudiants étrangers à haut potentiel, c’est un enjeu qui est particulier pour notre pays. Et le problème qu’on avait, c’est que, étant traité dans une circulaire qui parlait globalement de notre politique de maîtrise de l’immigration, ça a généré des malentendus.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Et comme vous parlez à l’imparfait, ça veut dire que cette circulaire n’existe plus.
 
LAURENT WAUQUIEZ Ça veut dire que l’objectif, et c’est la réunion de travail de ce soir, de cet après-midi, on a travaillé dessus avec Claude GUEANT, c’est d’avoir une instruction aux préfets, qui soit uniquement sur le sujet des étudiants étrangers à haut potentiel et qui rappelle…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Pour leur dire aux préfets : délivrez des autorisations de travail à ceux qui ont un parcours universitaire important, pour qu’ils puissent travailler en France, parce que souvent, ils sont possiblement employés en France par une entreprise.
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui, parce que notre volonté n’a jamais été de fermer la porte aux étudiants étrangers et talentueux. Et je voudrais juste rappeler un chiffre, cette année, on a délivré 20% d’autorisations de plus de travailler dans des entreprises françaises pour des étudiants étrangers à haut potentiel. Donc le but de cette instruction précise sur cette question, c’est de rappeler : la France veut rester attractive pour les étudiants talentueux, tout simplement parce que c’est un atout pour nous.
 
JEAN-MICHEL APHATIE C’est une nouvelle circulaire ?
 
LAURENT WAUQUIEZ C’est une instruction qui portera cette fois-ci précisément sur cette question, pour lever les malentendus et les difficultés qu’on a pu avoir.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Et cette instruction, vous la signez cette fois, parce que la fameuse circulaire du 31 mai, vous ne l’aviez pas… enfin, vous étiez déjà ministre de l’Enseignement supérieur, vous ne l’aviez pas signée, c’était GUEANT et BERTRAND, ministre du Travail, vous, vous n’étiez pas signataire, et là, vous serez signataire de ce document, pour montrer que le sort des étudiants est important ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui, et puis surtout, pour montrer que c’est une instruction qui, cette fois-ci, porte essentiellement, et même uniquement, sur les étudiants étrangers au haut potentiel.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Donc les étudiants étrangers en France qui auront fait cinq, six, sept ans d’études qui pourront dire à la préfecture : j’ai un contrat de travail possible si vous me donnez l’autorisation de travailler, ceux-là n’auront plus de problèmes, ils auront leur permis de travail ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Alors, attention…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Leur autorisation de travail…
 
LAURENT WAUQUIEZ Ce n’est pas : portes ouvertes n’importe comment, n’importe quand, l’instruction va viser des cas très précis, prenons-en deux, si vous êtes d’accord…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Un peut-être.
 
LAURENT WAUQUIEZ Un, le premier…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Oui, merci.
 
LAURENT WAUQUIEZ Le premier, une entreprise française qui veut se développer en Chine, en Inde, au Brésil, elle a identifié un étudiant étranger qui est venu étudier chez nous, qui connaît bien ces pays parce qu’il en est originaire, ça peut l’aider à développer sa compétitivité et percer sur ces marchés, eh bien, on autorisera pour l’étudiant étranger à travailler dans cette entreprise. Voilà un cas précis, simple, visé dans l’instruction ; la France veut rester attractive pour ces étudiants.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Comment vous expliquer qu’on en soit arrivé là, c’est-à-dire à faire une circulaire qui ne respectait pas justement ce qui est bien pour la France, l’ouverture vers l’étranger, la capacité à accueillir les étudiants étrangers ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Vous savez, je fais partie de ceux qui considèrent qu’en politique, il faut savoir reconnaître qu’on a pu avoir des difficultés d’application des malentendus sur un texte, quand c’est comme ça, il faut savoir corriger…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Ce n’est pas un peu plus que ça, ce n’est pas une idéologie trop axée contre les immigrés, qui fait que, on rédige de manière maladroite une circulaire ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, je pense que par contre, et ça, c’est très important, on doit garder une maîtrise de notre politique de l’immigration. C’est fondamental.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Personne ne la met en cause ?
 
LAURENT WAUQUIEZ On est bien d’accord, et c’est pour ça que sur les étudiants étrangers, qui sont, ces étudiants étrangers, masters, doctorats, on avait besoin d’un texte particulier, c’est ce qu’on fait.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Pour en finir, on peut dire, là, ce matin, sur RTL, Laurent WAUQUIEZ, la circulaire du 31 mai, c’est fini, elle n’existe plus ?
 
LAURENT WAUQUIEZ On va avoir une instruction qui porte spécifiquement sur les étudiants étrangers à haut potentiel, et mon objectif, c’est que ça lève tous les malentendus, je le dis clairement à votre micro.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Donc la circulaire a disparu ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Ça veut dire que pas toute la circulaire, pourquoi je vous dis ça…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Ah, c’est dur à dire !
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, non, pourquoi je vous dis ça…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Ne tournons pas autour du pot, disons les choses ce matin…
 
LAURENT WAUQUIEZ Je ne vais pas tourner autour du pot, la circulaire, dans son ensemble, portait sur toute la politique de l’immigration, on ne renonce pas à toute la maîtrise de notre politique de l’immigration, on corrige le sujet précis sur lequel il y a eu des difficultés, oui, et ça, je n’ai aucun problème à le dire à votre micro.
 
JEAN-MICHEL APHATIE D’accord, donc c’est dit, et les personnes intéressées sans doute l’ont enregistré, et on lira la circulaire qui… comment vous dites ça ?
 
LAURENT WAUQUIEZ L’instruction…
 
JEAN-MICHEL APHATIE L’instruction qui sera publiée…
 
LAURENT WAUQUIEZ C’est plus précis…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Qui sera publiée quand alors ?
 
LAURENT WAUQUIEZ On la présente cet après-midi aux présidents d’universités, donc dans la foulée, ce sera publié.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Campagne présidentielle ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Si vous voulez.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Ça ne vole pas toujours haut, on lit dans les journaux que le président de la République, beaucoup de ministres, vous-même d’ailleurs, mettez en cause François HOLLANDE, oh, là, là, il n’est pas taillé pour le job, tout ça, il vous a répondu hier soir sur FRANCE 2.
 
FRANÇOIS HOLLANDE, CANDIDAT PS A L’ELECTION PRESIDENTIELLE Vous croyez que j’en serais là, candidat à l’élection présidentielle, pour le Parti socialiste et les radicaux de gauche, si je n’avais pas une force de caractère ?
 
JEAN-MICHEL APHATIE Il ne faudra pas changer de terrain et arrêter d’attaquer les hommes pour parler du fond ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Si, mais moi, mon problème, c’est précisément qu’il ne parle pas du fond.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Mais quelquefois, vous attaquez l’homme aussi, son caractère, son incapacité supposée à exercer la fonction…
 
LAURENT WAUQUIEZ La seule chose que j’attaque, c’est que veut François HOLLANDE, ça fait un an qu’il est en campagne, hier, il fait sa très grande sortie médiatique, il n’y a aucune proposition qui est mise sur la table. François MITTERRAND, au moins, avait 110 propositions, bon, François HOLLANDE, la seule chose qu’il a rappelée hier, c’est dans 110 jours, on a l’élection présidentielle. C’est un candidat qui est en contre, c’est un candidat qui systématiquement sort des très jolis slogans de marketing, par exemple : 2012, le changement. Personne ne peut mettre en face des propositions qui soient étayées. Je voudrais juste prendre un cas très précis.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Allez-y…
 
LAURENT WAUQUIEZ Il sort comme proposition majeure, le contrat générationnel, le contrat générationnel, c’est quoi, on en avait d’ailleurs parlé à votre micro à l’époque, c’est le tutorat, que le président de la République nous avait demandé de mettre en place au niveau de la politique de l’emploi, et qui existe depuis maintenant deux ans. Quand on est candidat à la présidentielle, et qu’on sort comme mesure majeure un simple recyclage d’une proposition qui d’ailleurs avait fait l’objet de négociations, et qui est d’ores et déjà en partie appliquée, je me dis : que veut François HOLLANDE. Alors, je crois que, effectivement, le sujet n’est pas sa personnalité, le sujet, c’est juste…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Mais il a le caractère pour la fonction ou pas ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Mais, moi, je n’ai aucun doute que quand vous vous présentez à une élection présidentielle, c’est parce que vous avez envie d’être président, mon seul problème, c’est que…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Envie, mais capable ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Eh bien, capable, moi, je juge sur ce qu’il met sur la table, hier, il n’y a encore une fois rien, rien qui a été mis sur la table, c’est tout, c’est la seule chose que je constate.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Et alors comme ça ne vole pas haut, on découvre dans LE PARISIEN ce matin que François HOLLANDE, hier, devant des journalistes, a qualifié Nicolas SARKOZY – c’est entre guillemets – de sale mec !
 
LAURENT WAUQUIEZ Eh oui, Monsieur APHATIE, mais précisément, ce que je trouve d’assez consternant, c’est : est-ce que finalement, ce n’est pas ça seulement son programme. Est-ce que finalement, le seul programme de François HOLLANDE, ce n’est pas d’être uniquement dans la critique et de ne jamais sortir du bois pour se mettre en position de risque, et d’expliquer exactement ce qu’il veut pour la France.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Il faut que tout le monde arrête dans la démolition, ce sera peut-être mieux.
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui, y compris au micro.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Allez, y compris au micro, on va le dire ! Tiens, justement, j’avais noté la semaine dernière une phrase de Jean-François COPE vous concernant, très violente, alors je ne sais pas si vous vous en êtes expliqué avec lui : je ne suis pas sûr, a dit, aurait dit Jean-François COPE, cité dans LE CANARD ENCHAINE, que pendant la guerre, Laurent WAUQUIEZ aurait été du bon côté, quand on lit ça, on se dit : dis donc, hou ! Vous en avez parlé à Jean-François COPE ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Alors, je n’en ai pas parlé avec Jean-François COPE pour une raison, c’est que, il est assez rare que les propos du CANARD ENCHAINE soient totalement véritables…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Et il est assez rare que tout soit faux aussi, vous savez, dans un journal…
 
LAURENT WAUQUIEZ Et il est parfois assez rare que tout soit faux, je suis assez d’accord. La seule chose que je dirais, et je l’évoquerai simplement, c’est que j’ai mes origines au Chambon-sur-Lignon, le Chambon-sur-Lignon, c’est la seule commune qui, pendant la guerre, en France, a collectivement résisté et accueilli et sauvé des enfants juifs. Ce n’est pas un petit sujet pour moi.
 
JEAN-MICHEL APHATIE Bon. Vous en parlerez avec Jean-François COPE.
 
LAURENT WAUQUIEZ J’en parlerai avec LE CANARD ENCHAINE.
 
JEAN-MICHEL APHATIE D’accord. Laurent WAUQUIEZ, le ministre de l’Enseignement supérieur, qui a enterré, sans le dire, mais en le disant, la circulaire du 31 mai…
 
VINCENT PARIZOT Oui, on a compris… poubelle, mais sur l’aspect qui fâchait tout le monde…
 
JEAN-MICHEL APHATIE Il ne faut pas le dire, chut !
 
LAURENT WAUQUIEZ Si, si, je l’ai dit, j’ai dit clairement qu’on corrigeait les…
 
JEAN-MICHEL APHATIE A demain !
 
LAURENT WAUQUIEZ Je n’ai pas de problèmes à assumer Monsieur APHATIE !
 Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 20 janvier 2012