Texte intégral
CHRISTOPHE BARBIER Bonne année !
LUC CHATEL Bonne année.
CHRISTOPHE BARBIER Au ministre et à tous les enseignants et à tous les élèves qui vont reprendre, mais qui ne vont reprendre que demain, eux, ils ont eu un jour de plus, ce nest pas le cas pour les affaires. Lannée démarre, les affaires continuent. Selon LIBERATION, Nicolas SARKOZY, alors ministre du Budget, ne pouvait pas ignorer la création dune société luxembourgeoise, destinée à gérer les commissions versées au Pakistan, dans le cadre de ventes darmes. Que répondez-vous ?
LUC CHATEL Eh bien je réponds : « Laissons lenquête judiciaire aller à son terme ». C'est une affaire qui remonte à plus de 20 ans, aujourd'hui. Il y a une enquête judiciaire qui est en cours. A chaque fois que le gouvernement a été sollicité pour fournir des informations à la justice, il la fait, donc nous voulons la transparence et laissons lenquête judiciaire se dérouler.
CHRISTOPHE BARBIER Cétait en 93, un peu moins de 20 ans les souvenirs sont frais quand même, Nicolas SARKOZY avait dit : « Tout ça cest des fables ». Il faudra quil sexplique.
LUC CHATEL Mais, la justice agit, la justice avance, laissons la justice faire son travail et attendons les faits et non pas des supposées déclarations via voix de presse.
CHRISTOPHE BARBIER Ça va peser sur les 100 jours de campagne quil reste ?
LUC CHATEL Non, moi, ce que je souhaite, c'est que... Vous savez, 2012 va être une année très importante, a mon sens c'est une année de responsabilités, où les Français vont devoir faire des choix, et où le gouvernement va montrer quil est au travail jusquau dernier jour. Vu la situation économique, vu la crise, nous devons travailler jusquau dernier jour, c'est ça être responsable vis-à-vis des Français, et ensuite ils auront à se prononcer. Ce qui nous préoccupe, c'est la situation du pays, et c'est lavenir de notre pays. Donc nous sommes 100 % mobilisés autour de ça.
CHRISTOPHE BARBIER Un mois de voeux, quand même, pour le président de la République, à travers toute la France, ça, ce n'est pas continuer les réformes, c'est déjà anticiper la campagne électorale.
LUC CHATEL Non, mais un mois de voeux, le président de la République, c'est une tradition, il va sadresser à différentes catégories de Français, pour se tourner vers eux en ce moment particulier de début dannée et peut-être encore plus particulier compte tenu de la crise. On ne peut pas reprocher à Nicolas SARKOZY de ne pas sêtre déplacé pendant ces 5 années. Il a été le président de la République qui a été le plus présent sur le terrain...
CHRISTOPHE BARBIER Un message...
LUC CHATEL ... ça a peut-être échappé au Parti socialiste, mais Nicolas SARKOZY, et je suis bien placé pour le savoir, pour laccompagner régulièrement, il effectue deux ou trois déplacements par semaine, là où ses prédécesseurs, lorsquils effectuaient un déplacement, cétait lévènement du mois ou de la décennie.
CHRISTOPHE BARBIER On saucissonne lélectorat et on délivre un message par catégorie ?
LUC CHATEL Non, je pense que c'est important dapporter une attention particulière à chacun de nos concitoyens, qui sont aujourd'hui exposés à la crise, qui sont parfois en situation difficile, et de leur rappeler que derrière une stratégie globale, derrière un cap, il y a une politique qui sadresse à chacun dentre nous.
CHRISTOPHE BARBIER La commission Attali le réclamait fortement il y a plus de trois ans, voilà la formation intensive pour les chômeurs qui revient dans les voeux du président samedi soir. Quelle forme peut prendre cette formation intensive ?
LUC CHATEL La question de la formation, c'est et c'est le ministre de lEducation nationale qui sexprime une question absolument majeure. Vous savez, aujourd'hui, ceux qui ne trouvent pas demploi, c'est souvent ceux qui ne sont pas qualifiés par rapport à une attente du marché du travail. On le voit avec les jeunes qui quittent le système éducatif sans diplôme, et c'est pour ça que nous avons décidé de mettre en place un système contre les décrocheurs, ceux qui sortent du système éducatif sans diplôme, ils seront dorénavant traités individuellement et c'est la même chose pour la formation continue. Il faut un traitement individuel, il faut quon soit capable...
CHRISTOPHE BARBIER Quest-ce qui manque ? Il manque de largent, il manque des postes, il manque des formateurs ?
LUC CHATEL Il manque, je pense, un travail en commun et une organisation, une coopération entre les différents acteurs qui sont nombreux. Le président de la République veut, avec le Premier ministre, réunir les partenaires sociaux sur ce sujet, ce sera le 18 janvier, et comme il la dit dans ses voeux, il attend de leur part, des propositions. Il ne sagit pas dagir de manière autoritaire, il sagit de regarder la réalité en face. Oui, la situation économique est difficile, oui le chômage est là, eh bien il nous faut réagir et nous ferons avec et sur la base de propositions qui nous serons fournies.
CHRISTOPHE BARBIER Le chômage peut faire perdre Nicolas SARKOZY, en avril ?
LUC CHATEL Vous savez, les choses sont très compliquées. Les Français savent que la crise est exceptionnelle. Nous avons mis en place des dispositifs daccompagnement du chômage qui sont sans précédent, nous lavons fait au moment de la crise de 2008. Nous devons réfléchir, sans doute, à pérenniser certains dentre eux, c'est-à-dire à réfléchir comment il peut y avoir un accompagnement des chômeurs qui soit différent, qui évite les ruptures que lon connait en France, hein, perdre son emploi c'est un drame en France, comme dans une entreprise on a du mal à rompre un contrat, eh bien on préfère ne pas embaucher, on peut se poser des questions sur la fluidité du marché du travail et il faut se poser des questions de protection de ceux qui perdent leur emploi, c'est tout lenjeu de ce sommet social du 18 janvier.
CHRISTOPHE BARBIER Eh bien Serge DASSAULT apporte des réponses, lui, il dit : « Il faut supprimer toutes les aides à lemploi, ça coûte 10 milliards, ça ne crée pas un poste ». Que lui répondez-vous ?
LUC CHATEL Je pense que c'est une solution, certes, tentante sur le papier, mais plus complexe que ça en a lair, au moment où nous mettons laccent sur la compétitivité de notre industrie et de nos entreprises, si on supprimait immédiatement certaines aides, eh bien on aurait mécaniquement une augmentation du coût du travail, donc une perte de compétitivité de la part de ces entreprises. Donc, il faut tendre vers une baisse, voire une suppression des aides, de laccompagnement aux entreprises, simplement il faut éviter les pertes de compétitivité.
CHRISTOPHE BARBIER Ce que lon appelle la TVA sociale, c'est-à-dire viser les importations plutôt que lemploi, ce nétait pas réalisable en juin 2007, pourquoi ça le serait en janvier 2012 ?
LUC CHATEL Mais, parce que, entre temps il y a eu, trois, quatre crises, qui font quaujourd'hui la France est dans une situation difficile, le monde est dans une situation difficile, et, vous savez, c'est souvent dans les périodes difficiles que lon voit les écarts se creuser entre les pays et c'est donc dans ces périodes-là quil faut prendre les bonnes décisions, notamment en comparaison internationale, c'est-à-dire en compétitivité, faire en sorte que notre pays soit attractif sur le plan du travail, parce que nous résoudrons la crise, par le travail en faisant en sorte quil y ait davantage de production en France et en faisant en France quil y ait davantage demploi pour résoudre la problématique du chômage.
CHRISTOPHE BARBIER Mais, est-ce que vous nallez pas casser la consommation en augmentant la TVA ?
LUC CHATEL Vous savez, ce qui casse la consommation, ce sont tous ces nouveaux demandeurs demploi qui voient leurs revenus diminuer et qui donc consomment moins. Ce sont ces jeunes sans emploi, qui sortent du système éducatif sans qualification, qui ne peuvent pas trouver leur place sur le marché du travail, qui donc ne consomment pas. Donc il faut aujourd'hui réfléchir à un système qui permette à nos entreprises dêtre plus compétitives, donc de créer davantage demploi, un marché du travail plus souple, plus fluide, avec moins deffets de seuil, de manière à ce que lon ait une France qui, au total, aille vers une meilleure prospérité.
CHRISTOPHE BARBIER « Nicolas SARKOZY joue sur les peurs », c'est ce que dit Manuel VALLS. Que lui répondez-vous ?
LUC CHATEL Je dis quil sagit dun déni de réalité, sans doute, de la part de Manuel VALLS. Il ne voit pas la réalité en face. Jentendais ce matin dailleurs un certain nombre déditorialistes décrire objectivement la situation du monde et de notre pays. Le monde est en crise, la France est en crise. Certes, elle a mieux résisté quailleurs, mais pourquoi elle a mieux résisté quailleurs ? Parce que la politique du gouvernement a été efficace, elle a permis de mieux protéger les Français, le gouvernement a pris un certain nombre dinitiatives fortes, que dailleurs, jobserve, le Parti socialiste na jamais soutenues. Donc, je dis à Manuel VALLS, je dis à François HOLLANDE « Ouvrez les yeux ». Quand on veut être chef de lEtat, il ne faut pas regarder le monde tel quon veut quil soit, il faut regarder le monde tel quil est, il faut être réaliste, il faut avoir le courage de regarder les difficultés, avant de les affronter, c'est ce que fait Nicolas SARKOZY.
CHRISTOPHE BARBIER Etre réaliste, ouvrir les yeux, pour Nicolas SARKOZY, ce n'est pas donner raison à Luc FERRY, il y a un problème de détestation personnelle, dit votre prédécesseur à légard du président de la République.
LUC CHATEL Ecoutez, je suis souvent en accord avec Luc FERRY, mon ami Luc FERRY, c'est un ami que je vois régulièrement, mais jai eu loccasion de dire hier que ses propos étaient excessifs, je dirais quils sont même malvenus, parce quil y a tout sauf une détestation de Nicolas SARKOZY dans le pays. Certes, il y a des clivages, il y a des gens qui adulent et qui soutiennent à fond la politique de Nicolas SARKOZY...
CHRISTOPHE BARBIER Il y a beaucoup de déçus, aussi, c'est ceux-là qui lui en veulent.
LUC CHATEL Mais il y a toujours des déçus. Mais souvenez-vous, en 2007, Christophe BARBIER vous êtes un observateur avisé de la vie politique on nous expliquait que Nicolas SARKOZY ne serait jamais élu président de la République, parce quavec les paroles quil portait, avec le message quil portait, il y avait un front « tout sauf SARKOZY », qui empêcherait Nicolas SARKOZY dêtre élu président de la République. On a vu la suite. Donc je crois quaujourd'hui, le temps il est plus à la mobilisation générale, derrière notre candidat, plutôt quà la différenciation par les paroles. Cest le sens de la réponse que jai faite à Luc FERRY hier.
CHRISTOPHE BARBIER La semaine dernière, une enseignante a été suspendue, parce que dans des courriels, elle avait évoqué les thèmes du baccalauréat sur lesquels elle avait été testée. Allez-vous intervenir dans ce litige ?
LUC CHATEL Alors, je suis intervenu via le recteur, c'est-à-dire que nous avons décidé de suspendre immédiatement cette enseignante. Pourquoi ? Cest une enseignante qui participe à lélaboration des sujets du baccalauréat, en testant les sujets qui sont préparés. Et dans ce cadre-là, elle a signé une clause de confidentialité ; elle a été amenée à divulguer un certain nombre déléments, pas, le sujet en entier, mais des éléments de ces sujets auprès de ses collègues, c'est inadmissible, c'est une faute grave, donc il y a une procédure disciplinaire qui a été engagée et qui...
CHRISTOPHE BARBIER Elle sera révoquée ?
LUC CHATEL Une procédure disciplinaire est engagée et qui décidera de la suite à donner à cette affaire.
CHRISTOPHE BARBIER Luc CHATEL, merci, bonne journée.
LUC CHATEL Merci à vous.
Source : Premier ministre, Service dInformation du Gouvernement, le 16 janvier 2012