Interview de Mme Nadine Morano, ministre de l'apprentissage et de la formation professionnelle à Europe 1 le 30 janvier 2012, sur l'élection présidentielle et la candidature de Nicolas Sarkozy.

 
BRUCE TOUSSAINT Alors Nadine MORANO, c’est quand, vous avez la date, vous l’avez forcément ? NADINE MORANO Non, c’est lui qui déterminera en son âme et conscience son calendrier. Donc la date, je ne pourrais pas vous la dire ce matin.
 
BRUCE TOUSSAINT Ce matin Thierry GUERRIER dans le Buzz Politique d’Europe 1…
 
NADINE MORANO S’il est candidat d’ailleurs monsieur TOUSSAINT, quand il dit qu’il a rendez-vous avec les Français, il n’a pas annoncé sa candidature, il a dit qu’il ne se déroberait pas. Pour ma part, je ne vois pas comment en connaissant son tempérament…
 
BRUCE TOUSSAINT Merci de le préciser.
 
NADINE MORANO … il renoncerait à continuer le travail…
 
BRUCE TOUSSAINT Merci de le préciser.
 
NADINE MORANO … qu’il a engagé et notamment parce que la France traverse une crise planétaire comme jamais. Et puis aussi parce que comme il a fait modifier la constitution, comme vous le savez un président en exercice ne peut plus faire que deux mandats successifs parce que dans son esprit et dans son caractère, il vaut mieux être là pour agir et non pas pour durer.
 
BRUCE TOUSSAINT Juste, on referme la parenthèse, mais juste avant de parler du fond, Thierry GUERRIER, tout à l’heure, disait, entrée en campagne possible, c’est ce qu’on dit dans les états majors, dès la première quinzaine de février.
 
NADINE MORANO Non, écoutez, d’abord le rôle de l’UMP, c’est d’aller expliquer partout sur le terrain et j’engage les militants évidemment à expliquer les réformes et les mesures que nous allons mettre en place aujourd'hui.
 
BRUCE TOUSSAINT Mais ce matin vous êtes soulagée au fond qu’il ait été clair, vous savez on a compris que voilà, ce n’était pas officiel mais il a été clair pour… les Français ont compris, ça vous soulage, vous êtes rassurée ?
 
NADINE MORANO Sur quoi ?
 
BRUCE TOUSSAINT Sur le fait qu’il sera bien candidat et qu’il l’ait dit.
 
NADINE MORANO Non mais écoutez, nous on fait de la politique, vous savez quand vous vous engagez, c’est pour servir la France, ce n’est pas par rapport à un destin personnel et donc on est confronté aujourd'hui à un taux de chômage important, nous voyons bien que nous avons un chômage d’ailleurs qui au-delà de la crise a des problèmes structurels. Nous devons apporter une réponse. Et donc, c’est ce qu’a fait le président de la République hier et d’ailleurs j’appellerais Manuel VALLS, qui a tellement soutenu, qui a fait l’apologie, qui a écrit une tribune dans les Echos, le 7 octobre dernier sur la TVA sociale, à soutenir le dispositif présenté hier par le chef de l’Etat, qui encore une fois n’est pas une réforme de droite ou de gauche puisque j’en veux pour preuve qu’en Allemagne, elle avait été mise en place par le chancelier socialiste, que Manuel VALLS, le directeur de la communication de campagne de monsieur HOLLANDE soutient cette mesure, c’est une mesure qui mériterait l’unité nationale parce que c’est l’emploi qui est en jeu dans notre pays.
 
BRUCE TOUSSAINT Alors le président a expliqué hier que ça n’aurait pas d’effet sur les prix, et que ça allait sauver des emplois, c’est extrêmement audacieux, mais c’est quand même un pari.
 
NADINE MORANO C’est d’abord une réalité au regard des exemples que nous avons observé.
 
BRUCE TOUSSAINT Il y a l’exemple allemand.
 
NADINE MORANO Voilà. Alors on va vous dire qu’il a cité de nombreuses fois l’Allemagne, mais je vous rassure en Allemagne, on cite très souvent l’exemple de la France, s’agissant de sa politique familiale, puisque j’ai reçu moi-même ici dans notre pays Ursula VON DER LEYEN qui est maintenant ministre en charge de l’emploi et qui a eu, elle, à développer lorsqu’elle était en charge de la famille, les modes de garde en Allemagne, puisque le taux de natalité là bas est de 1,4 et que chez nous il dépasse les deux points de taux de fécondité par femme, donc vous savez l’Allemagne prend beaucoup exemple aussi sur la politique familiale de la France, que l’Allemagne essaie de transcrire dans son pays là bas. Alors nous, nous regardons ce qui fonctionne chez eux et la réalité, c’est que l’Allemagne a fait ce changement d’abaisser le coût du travail et en même temps d’augmenter la TVA. Et on observe qu’il n’y a pas eu de hausse des prix.
 
BRUCE TOUSSAINT Mais on constate surtout que c’est un engagement à moyen terme, voire à long terme, ce sera effectif en octobre, les premiers effets se feront sentir sans doute en 2013 et c’est assez étonnant parce qu’on est à moins de trois mois du premier tour de la présidentielle. Comment est-ce que vous pouvez justifier le timing ?
 
NADINE MORANO Mais parce que celui qui vous dit que la politique et les réformes, ça se passe avec une baguette magique et c’est instantané, c’est un mensonge. Il faut évidemment du temps pour construire des réformes, il faut les appliquer et c’est vrai que les résultats arrivent après. Mais par exemple…
 
BRUCE TOUSSAINT Ca ne ressemblerait pas à un discours ou une intervention de début de mandat ce qu’on a vu hier soir quand même ?
 
NADINE MORANO Non, parce que c’est dans la totale cohérence de ce qui a été mis en place depuis que Nicolas SARKOZY est président. Je vais vous citer un exemple, la suppression de la taxe professionnelle, François MITTERRAND disait que c’était un impôt imbécile, jamais les socialistes ne l’ont supprimé et nous, nous avons supprimé la taxe professionnelle, donc l’allégement fiscal en 2010 a été à hauteur de 7,3 milliards d’euros et pour être encore plus précise sur un exemple pointu, le fait d’avoir supprimé la taxe professionnelle en France a permis à notre région, à notre pays et dans ma région, en Lorraine, de pouvoir construire la Smart électrique parce que, vous savez combien monsieur TOUSSAINT, coûte la taxe professionnelle, coutait la taxe professionnelle sur le coût de fabrication d’un véhicule, 250 euros.
 
BRUCE TOUSSAINT Vous allez me le dire.
 
NADINE MORANO 250 euros. Donc le fait d’avoir supprimé cette taxe professionnelle a permis justement au groupe DAIMLER de pouvoir choisir de construire la Smart électrique en Lorraine.
 
BRUCE TOUSSAINT Revenons à ce qui s’est dit hier soir, pas assez de jeunes dans les entreprises, c’est ce qu’a dit le président, donc le quota des jeunes en apprentissage a passé de 4 à 5 % dans les entreprises de plus de 250 salariés. D’après le Figaro ce matin, les grandes entreprises, vous êtes forcément au courant de ça puisque c’est votre domaine, c’est votre ministère, les grandes entreprises comptent en moyenne 1,7 % de jeune apprenti, il faudrait déjà essayer d’atteindre 4 % avant d’espérer atteindre 5, non ?
 
NADINE MORANO Oui alors nous avons déjà modifié la législation sur ce sujet. Nous avons d’excellents résultats. Vous savez qu’en un an, en un an dans notre pays et malgré la crise, nous avons enregistré près de 8 %, 8 % d’augmentations du nombre de contrats d’alternance dans notre pays.
 
BRUCE TOUSSAINT Mais on est encore loin.
 
NADINE MORANO Ce qui veut dire que près de 40 000 jeunes ont pu signer un contrat et je sais que vous y êtes sensible, puisque vous m’avez dit hors antenne que vous étiez passé par ce genre de formation, on voit bien qu’après ça amène à un métier et donc nous devons aller plus loin.
 
BRUCE TOUSSAINT Si les entreprises n’embauchent pas de jeune, c’est peut-être tout simplement parce qu’elles n’arrivent pas à embaucher tout court.
 
NADINE MORANO Ecoutez, nous avons mis en place plusieurs dispositifs. Le premier dispositif, c’est pour les entreprises de moins de 250 salariés, où nous avons mis le zéro charge, c'est-à-dire qu’ils ne paient pas de charge et ça marche. Donc en France…
 
BRUCE TOUSSAINT Et pourquoi ne pas l’avoir fait plus tôt ça, c’est quand même ça aussi c’est une réforme de débit de mandat non ? Non, mais ce n’est pas une réforme qui est directement liée à la crise, c’est pour ça.
 
NADINE MORANO Mais monsieur TOUSSAINT…
 
BRUCE TOUSSAINT Contrairement à tout le reste.
 
NADINE MORANO Non, mais vous comprenez bien qu’en 5 ans, on n’a pas pu transformer la France de fond en comble, donc vous voyez bien qu’il nous faut encore cinq ans pour continuer. J’ai engagé ce travail, nous avons des résultats, nous devons aller plus loin. Notre objectif étant de passer de 800 000, je dirais même à un million d’alternants dans notre pays, en France, parce que, encore une fois, je vais prendre l’exemple de l’Allemagne sur ce sujet, le taux de chômage des jeunes n’est que de 10 %. Et eux, ça fait des décennies qu’ils pratiquent la formation duale, donc nous devons aller vers les mesures annoncées par le président de la République.
 
BRUCE TOUSSAINT Merci Nadine MORANO, tiens vous n’avez pas twitté hier soir, pendant l’intervention.
 
NADINE MORANO Si j’ai twitté, j’ai dit que je venais chez vous, alors vous voyez que c’est important.
 
BRUCE TOUSSAINT Je vous remercie, ça veut dire quoi, ça veut dire que vous levez le pied sur twitter ?
 
NADINE MORANO Pas du tout, ça veut dire qu’il m’arrive de twitter le matin, tard le soir et très ponctuellement, autrement je n’ai pas le temps.
 Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 6 février 2012