Texte intégral
CHRISTOPHE BARBIER Laurent WAUQUIEZ, bonjour.
LAURENT WAUQUIEZ Bonjour. CHRISTOPHE BARBIER Laurent WAUQUIEZ qui va être à la pointe de la campagne, une partie de vos thèses, d'ailleurs, se retrouvent dans le programme du candidat Nicolas SARKOZY. Comment avez-vous trouvé sa prestation hier soir ?
LAURENT WAUQUIEZ Jai trouvé que cétait une prestation qui nous obligeait. Elle nous oblige à quoi ? Elle nous oblige à tourner la page des petites phrases, à tourner la page des petites caricatures et elle nous oblige à faire une campagne intelligente. Et une campagne intelligente qui, pour moi, doit être centrée sur trois thèmes. Un, comment faire du social responsable dans ce pays, pas du social assistanat mais du social responsable. Deux, la question des classes moyennes, sur la sortie de crise, et trois, comment réaffirmer une France républicaine, dans un pays qui est devenu beaucoup plus multiculturel. Et je trouve que ça doit être la ligne que lon doit tenir. Le président a demandé hier une campagne intelligente.
CHRISTOPHE BARBIER Pourquoi parler de soulagement pour cette entrée en campagne, comme sil avait hâte de finir ?
LAURENT WAUQUIEZ Non, jai trouvé juste, moi, il y a deux impressions qui sont ressorties pour moi, dabord un président qui la fait simplement. Ce n'est pas un exercice facile, il la fait simplement, et je crois que c'est la meilleure réponse à toutes les caricatures qui peuvent être faites. Et puis la deuxième chose, je crois quil y a pour lui un soulagement à être à nouveau libre, libre de parler, libre de sexpliquer, libre de répondre aux attaques.
CHRISTOPHE BARBIER Mais il na pas arrêté daller sur le terrain, ces derniers mois, il était toujours libre.
LAURENT WAUQUIEZ Un candidat, c'est quelquun qui redevient beaucoup plus libre dans sa parole. Un président, il incarne le pays, il incarne la République, il ny a pas la même forme de liberté. Et mon souhait aussi, c'est que ça sonne lheure de vérité, et que ça oblige tout le monde à sortir de lesquive. Il y a du côté des socialistes, une stratégie de campagne desquive. Vous recevez tout à l'heure Pierre MOSCOVICI, vous êtes un excellent intervieweur, monsieur BARBIER, je vous fixe un défit : est-ce que vous arrivez à faire expliquer par Pierre MOSCOVICI, ce quils mettent dans les 12 milliards dimpôts supplémentaires quils proposent, sur les ménages ? Cest 12 milliards de remise en cause de dispositifs fiscaux. Demandez-lui de détailler, qu'est-ce qui est mis dedans ? Vous naurez sans doute pas de réponse, sauf ce que je sais, à ce que vous soyez vraiment un intervieweur remarquable.
CHRISTOPHE BARBIER Eh ben on va essayer tout à l'heure avec Pierre MOSCOVICI. Quand le président SARKOZY en appelle au référendum, il dit : « Voilà, je procèderai par référendum ». Est-ce que ce n'est pas se défausser, un petit peu ? On avait lhyper président, on aura maintenant un président qui ne prend plus de décisions ?
LAURENT WAUQUIEZ Non. Je pense que... Quest-ce qua souligné le président ? On est face à des choix qui sont des choix majeurs, difficiles à faire pour notre pays. Par exemple, cette conception du social, est-ce que lon continue à défendre une vision qui est quand même une vision où le social consiste à verser des prestations sociales, à faire de lassistanat ? Ou est-ce quon est collectivement daccord pour passer sur cette vision dun social responsable ? Il y a un moment où ce type de sujets, c'est aux Français de les trancher, sur des questions de fond, qui engagent notre pays sur un profond changement de son approche, ça suppose que les Français soient consultés directement.
CHRISTOPHE BARBIER Mais cette révolution du système du chômage et de formations, il faudra des années pour la mener, notre système de formations n'est pas du tout prêt.
LAURENT WAUQUIEZ Oui, raison de plus pour commencer, et c'est dailleurs dans ce sens-là que javais plaidé très rapidement avec la droite sociale, en disant : il faut quon se pose sur cette sortie de crise, les bonnes questions. Des pays comme lAllemagne, comme la Grèce, comme les pays nordiques ont, sont amenés à se poser cette question, est-ce que nous on peut y échapper ?
CHRISTOPHE BARBIER Est-ce que ça ne va pas, dabord, brutaliser des chômeurs faibles, avant que dans quelques années ça se mette à marcher ?
LAURENT WAUQUIEZ Je pense que ce qui brutalise surtout les chômeurs, c'est précisément quon ne leur offre aucune solution, quon soit uniquement sur des prestations sociales. Aider un chômeur à sen sortir, c'est beaucoup plus par exemple, laider à passer un permis de conduire, qui va lui permettre de prendre un travail qui est à 15 km, c'est laider à passer une formation qui lui permettra de se repositionner sur des métiers qui sont en croissance, c'est laider à créer son entreprise, c'est ça la question qui se pose. Notre système de protection sociale est un système qui ne raisonne que prestations, qui du coup a dérivé vers lassistanat et la, une des questions de fond de cette campagne, c'est comment repartir sur cette idée dun social responsable.
CHRISTOPHE BARBIER Dans le social responsable, est-ce quil faut mettre aussi la fin de lemploi à vie pour les fonctionnaires ?
LAURENT WAUQUIEZ Non, personnellement, je ny suis pas favorable. Ça fait partie de ma vision de ce qu'est la place de lEtat, la place de la Fonction publique. En revanche, il y a évidemment toute une réflexion à mener sur comment est-ce que lEtat peut être plus stratège, peut être en partenariat avec ses acteurs privés autour de lui, c'est ce que lon fait autour de luniversité. Dans le domaine de luniversité, on a tout changé. Lautonomie des universités a permis davoir des relations avec les entreprises, plus fortes, de réinvestir sur nos campus universitaires, donc de changer la vision de lEtat. Et un des reproches, quand même, que je fais par rapport à la vision du Parti socialiste, c'est que c'est une vision où on nous dit : « Ma seule approche de lEtat, c'est 60 000 fonctionnaires de plus ». Cest un peu pauvre. Cette campagne présidentielle mérite de limagination.
CHRISTOPHE BARBIER Est-il vrai que Nicolas SARKOZY a été agacé par votre gestion trop personnelle de laffaire LEJABY ?
LAURENT WAUQUIEZ Je vais vous dire, dans une campagne présidentielle, il y a beaucoup de rumeurs, et dans la vie politique, il y en a beaucoup, mais alors celle-ci elle est parfaitement ridicule. Le président s'est investi sur ce dossier, je lai souligné, c'est dans mon département. C'est un enjeu qui était extrêmement important, et dailleurs auquel il a fait référence hier, qui nous a permis de sauver beaucoup demplois. Vous croyez franchement que le président aurait été agacé du fait que lon ait réussi à sauver les emplois de ces filles ? Cest ridicule.
CHRISTOPHE BARBIER Est-ce que vous lui conseillez daller sur le site LEJABY pendant sa campagne ? Est-ce que vous lui conseillez daller à Gandrange ?
LAURENT WAUQUIEZ Je lui ai non seulement conseillé... ce n'est pas à moi de conseiller, mais les salariées de LEJABY...
CHRISTOPHE BARBIER Sont venues à l'Elysée.
LAURENT WAUQUIEZ Oui, elles sont venues à l'Elysée et lont invité, et elles savent le rôle quil a joué.
CHRISTOPHE BARBIER Est-ce quil ira à Gandrange ?
LAURENT WAUQUIEZ Et je pense... Vous savez, sur ces dossiers-là, quelle est la marque de fabrique du président ? Cest : il ne sest pas caché. Oui il sest impliqué sur Gandrange, oui il s'est impliqué sur PhotoWatt, oui il s'est impliqué sur LEJABY. Ce ne sont pas des dossiers où la réussite est toujours au rendez-vous, mais ce qui me semble important c'est de ne pas les fuir. Et il y a une chose quon ne peut pas lui reprocher, il na jamais fuit ses responsabilités sur ces dossiers, il ne s'est jamais dérobé.
CHRISTOPHE BARBIER Hervé MORIN retire sa candidature. C'est la fin dune pantalonnade ?
LAURENT WAUQUIEZ Non, je ne dirais pas ça. Hervé MORIN est quelquun pour qui jai de lestime, je trouve quil tire les conséquences qui sont responsables. C'est une campagne dans laquelle on voit bien que notre pays est face à des gros défis, la question simple c'est comment est-ce quon se prépare au monde de demain, eh bien il considère que la logique la plus efficace c'est dêtre avec le président plutôt que dans une candidature qui aurait fait de lémiettage. Et je crois que de ce point de vue, il y a quand même une différence, qui est intéressante à noter, du côté du PS on a MELENCHON, on a Eva JOLY, de notre côté, on sent progressivement une dynamique, un pack qui se soude autour du président.
CHRISTOPHE BARBIER Il y a parfois des francs-tireurs gênants, faut-il exclure Christian VANNESTE rapidement de l'UMP ?
LAURENT WAUQUIEZ Je crois que la décision a été prise par Jean-François COPE, il faut lui rendre hommage. Il a pris une bonne décision, courageuse, rapidement, voilà.
CHRISTOPHE BARBIER Le conseil constitutionnel se prononce aujourd'hui sur lanonymat des parrainages délus. Est-ce que vous souhaitez le rétablissement de cet anonymat, ce qui permettra de qualifier Marine LE PEN sans problème ?
LAURENT WAUQUIEZ Moi je ne souhaite pas que lon fonctionne dans la République, avec des masques, et je ne souhaite pas que lon fonctionne dans la République de façon cachée. Et je vais même vous dire mon sentiment : si le FN aujourd'hui a des difficultés, n'est-ce pas parce que finalement il ne sest pas suffisamment occupé à temps de ce sujet ? Si le FN a des difficultés aujourd'hui, n'est-ce pas parce que ce parti fonctionne trop sur les plateaux télévisés, sur les émissions, et pas assez sur le terrain ? Cest peut-être aussi des questions à se poser.
CHRISTOPHE BARBIER Tant pis pour lui donc.
LAURENT WAUQUIEZ Non, mais en tout cas je pense que ça doit lamener à se poser les bonnes questions sur son fonctionnement dans la République.
CHRISTOPHE BARBIER Avancer sans masque, c'est dire quil faudra la proportionnelle pour plaire aux centristes ?
LAURENT WAUQUIEZ Moi, ce n'est pas mon souhait, je lai toujours dit, mais je suis un élu du suffrage universel direct. Moi je considère que la relation elle est entre un élu et le peuple, sans intermédiaire, mais c'est une vision très gaulliste.
CHRISTOPHE BARBIER Laurent WAUQUIEZ merci, bonne journée.
DENIS GIROLAMI Merci à tous les deux. Christophe, dans un instant, vous recevrez lun des principaux lieutenants de François HOLLANDE, Pierre MOSCOVICI.
Source : Premier ministre, Service dInformation du Gouvernement, le 16 février 2012