Texte intégral
Les mesures contre les licenciements en discussion depuis hier à l'Assemblée pourraient-elles faire partie de votre projet de la " France humaine " ?
François Bayrou : j'ai horreur qu'on trompe les gens. Ces dispositions ne serviront à rien qu'à faire lever des espoirs vains chez les salariés et au bout du compte à préparer de nouvelles déceptions. Souvenez-vous : il n'y a jamais eu autant de licenciements que pendant la période où ils étaient soumis à l'autorisation administrative ! Quand une entreprise licencie, hélas !, c'est toujours pour des raisons graves qui tiennent à son avenir. On lance donc les Français sur une idée fausse : celle de vouloir punir une entreprise qui licencie. Autrement plus juste et plus importante serait la question des garanties apportées au salarié. Le chantier d'un statut nouveau pour les salariés est à ouvrir. Est-ce qu'on leur apporte la formation dont ils ont besoin ? Est-ce qu'on pourrait améliorer leur réemploi sur place, dans le même bassin ? Les pistes habituelles sont des impasses, il faut ouvrir des pistes nouvelles !
Vous souhaitez rassembler la droite modérée et la gauche modérée pour sortir de la bipolarisation de la vie politique. Mais sur quels thèmes peut-il y avoir accord ?
L'affrontement droite-gauche auquel nous sommes habitués nous aide-t-il à résoudre les problèmes ? Non. Il nous empêche de les résoudre. Depuis dix ans, il n'y a aucun des grands problèmes de notre pays qui trouve sa réponse dans ce système ! L'Europe, la décentralisation, les retraites, les services publics, les services garantis dans les transports, sur chacun de ces sujets, depuis dix ans, c'est l'impasse. Et pourquoi ? Parce que les divisions sur ces grands sujets passent à l'intérieur des camps et pas entre les camps. Les clivages sont à l'intérieur de chaque camp. Pourtant ce sont des sujets cruciaux pour notre avenir. Il faut donc réfléchir à d'autres pratiques politiques qui permettent d'élargir les majorités pour trouver de vraies majorités d'idées. La droite et la gauche existent, bien sûr, et continueront d'exister. Mais est-ce qu'elles doivent interdire de se retrouver lorsqu'on est d'accord sur le fond ? Je ne le crois pas : on peut et on doit trouver des majorités d'idées.
N'est-il pas contradictoire d'essayer d'élargir votre assise à gauche alors que vous avez déjà annoncé que vous appelleriez à voter Chirac au second tour s'il arrivait devant vous ?
Je suis loyal envers mon camp et je compte bien défendre mes idées : je propose une approche plus ouverte, plus moderne, qui fasse travailler ensemble des sensibilités différentes, au lieu de les voir s'affronter stérilement sur tous les sujets. Et il n'y a qu'une seule occasion de choisir cette approche nouvelle : ce sont les élections présidentielles.
Vous allez avoir du mal à vous positionner dans cette campagne, notamment vis-à-vis de Chirac ?
C'est le contraire. En votant, les Français vont répondre à une question toute simple : est-ce qu'ils reprennent les mêmes pour cinq ans de plus, ou est-ce qu'ils choisissent une approche nouvelle. Les mêmes hommes, les mêmes méthodes, les mêmes promesses sur tous les sujets, ils connaissent bien, ils ont déjà donné.
Comment qualifieriez-vous et jugeriez-vous les bilans respectifs de Chirac et de Jospin ?
Le bilan de Jacques Chirac est un bilan de deux ans couronné par la dissolution... On ne peut pas dire qu'il ait tenu les promesses de 1995 ! Le bilan de Lionel Jospin c'est celui d'une période plus longue, plus chanceuse à cause de la croissance mais inadapté à la France d'aujourd'hui. C'est pour cela qu'il sera désavoué. En pensant à l'un comme à l'autre, je pense à toutes les espérances déçues.
Dans votre projet comment répartissez-vous le rôle de l'Etat et celui des collectivités locales ?
Il faut un nouvel équilibre. Paris a trop de pouvoirs qu'il exerce mal. Et les régions sont trop faibles pour être de véritables interlocuteurs. Il faudra une grande loi constitutionnelle qui simplifie et revalorise la vie locale et régionale en France et oblige les départements et les régions à travailler ensemble au lieu de s'ignorer
(source http://www.udf.org, le 7 juin 2001)
François Bayrou : j'ai horreur qu'on trompe les gens. Ces dispositions ne serviront à rien qu'à faire lever des espoirs vains chez les salariés et au bout du compte à préparer de nouvelles déceptions. Souvenez-vous : il n'y a jamais eu autant de licenciements que pendant la période où ils étaient soumis à l'autorisation administrative ! Quand une entreprise licencie, hélas !, c'est toujours pour des raisons graves qui tiennent à son avenir. On lance donc les Français sur une idée fausse : celle de vouloir punir une entreprise qui licencie. Autrement plus juste et plus importante serait la question des garanties apportées au salarié. Le chantier d'un statut nouveau pour les salariés est à ouvrir. Est-ce qu'on leur apporte la formation dont ils ont besoin ? Est-ce qu'on pourrait améliorer leur réemploi sur place, dans le même bassin ? Les pistes habituelles sont des impasses, il faut ouvrir des pistes nouvelles !
Vous souhaitez rassembler la droite modérée et la gauche modérée pour sortir de la bipolarisation de la vie politique. Mais sur quels thèmes peut-il y avoir accord ?
L'affrontement droite-gauche auquel nous sommes habitués nous aide-t-il à résoudre les problèmes ? Non. Il nous empêche de les résoudre. Depuis dix ans, il n'y a aucun des grands problèmes de notre pays qui trouve sa réponse dans ce système ! L'Europe, la décentralisation, les retraites, les services publics, les services garantis dans les transports, sur chacun de ces sujets, depuis dix ans, c'est l'impasse. Et pourquoi ? Parce que les divisions sur ces grands sujets passent à l'intérieur des camps et pas entre les camps. Les clivages sont à l'intérieur de chaque camp. Pourtant ce sont des sujets cruciaux pour notre avenir. Il faut donc réfléchir à d'autres pratiques politiques qui permettent d'élargir les majorités pour trouver de vraies majorités d'idées. La droite et la gauche existent, bien sûr, et continueront d'exister. Mais est-ce qu'elles doivent interdire de se retrouver lorsqu'on est d'accord sur le fond ? Je ne le crois pas : on peut et on doit trouver des majorités d'idées.
N'est-il pas contradictoire d'essayer d'élargir votre assise à gauche alors que vous avez déjà annoncé que vous appelleriez à voter Chirac au second tour s'il arrivait devant vous ?
Je suis loyal envers mon camp et je compte bien défendre mes idées : je propose une approche plus ouverte, plus moderne, qui fasse travailler ensemble des sensibilités différentes, au lieu de les voir s'affronter stérilement sur tous les sujets. Et il n'y a qu'une seule occasion de choisir cette approche nouvelle : ce sont les élections présidentielles.
Vous allez avoir du mal à vous positionner dans cette campagne, notamment vis-à-vis de Chirac ?
C'est le contraire. En votant, les Français vont répondre à une question toute simple : est-ce qu'ils reprennent les mêmes pour cinq ans de plus, ou est-ce qu'ils choisissent une approche nouvelle. Les mêmes hommes, les mêmes méthodes, les mêmes promesses sur tous les sujets, ils connaissent bien, ils ont déjà donné.
Comment qualifieriez-vous et jugeriez-vous les bilans respectifs de Chirac et de Jospin ?
Le bilan de Jacques Chirac est un bilan de deux ans couronné par la dissolution... On ne peut pas dire qu'il ait tenu les promesses de 1995 ! Le bilan de Lionel Jospin c'est celui d'une période plus longue, plus chanceuse à cause de la croissance mais inadapté à la France d'aujourd'hui. C'est pour cela qu'il sera désavoué. En pensant à l'un comme à l'autre, je pense à toutes les espérances déçues.
Dans votre projet comment répartissez-vous le rôle de l'Etat et celui des collectivités locales ?
Il faut un nouvel équilibre. Paris a trop de pouvoirs qu'il exerce mal. Et les régions sont trop faibles pour être de véritables interlocuteurs. Il faudra une grande loi constitutionnelle qui simplifie et revalorise la vie locale et régionale en France et oblige les départements et les régions à travailler ensemble au lieu de s'ignorer
(source http://www.udf.org, le 7 juin 2001)