Texte intégral
JEAN-MICHEL APHATIE Avez-vous des éléments dinformation concernant lenquête sur le tueur de Toulouse ?
LUC CHATEL Je nai pas déléments nouveaux de la nuit, le ministre de lIntérieur, le président de la République ont eu loccasion dévoquer hier soir lenquête, en indiquant quil y avait un certain nombre de points communs entre cette agression épouvantable, cette tragédie de lécole de Toulouse hier, et les agressions auprès des militaires français. Lenquête suit son cours, jai pu constater hier, avec le président de la République, quil y avait une mobilisation exceptionnelle des services de police autour de la justice, pour retrouver ce meurtrier.
JEAN-MICHEL APHATIE Le plan Vigipirate a été hissé au niveau « écarlate » en Midi- Pyrénées, cela veut dire, concrètement pour la protection des écoles, quoi ?
LUC CHATEL Alors, ça veut dire une protection, jallais dire, sans précédent, puisque cest la première fois quest activé ce plan « écarlate », ça veut dire présence policière devant ces établissements, ça veut dire : mesures de contrôle à lentrée, filtrages, et ça veut dire généralisation également devant toutes les écoles du plan Vigipirate avec, là encore, mesures de renforcement, cétait le devoir de la République que de faire face, de lutter, de montrer quelle était présente pour que lécole continue à fonctionner.
JEAN-MICHEL APHATIE Est-ce un plan limité dans le temps, Luc CHATEL ou prévoyez-vous que ce plan puisse durer autant de temps que par exemple le tueur sera en liberté ?
LUC CHATEL Jallais dire que la réponse est dans votre question, cest-à-dire que cest par définition un plan qui est amené à évoluer, en fonction de la situation, tous les moyens sont mis en oeuvre pour retrouver lassassin, en fonction de ces résultats, le gouvernement décidera de la suite du plan Vigipirate.
JEAN-MICHEL APHATIE Uniquement en Midi-Pyrénées, ce niveau « écarlate », pourquoi ne pas létendre peut-être à la France entière, puisque des écoles juives, il y en a sur tout le territoire, et étant donné la menace qui pèse aujourdhui, on se dit que peut-être le danger peut se déplacer très rapidement ?
LUC CHATEL Vous me permettrez de ne pas répondre à cette question, cest une réponse qui touche particulièrement au contenu de lenquête, je ne suis pas ministre de lIntérieur ni ministre de la Justice, et je pense que ce qui est important, cest que tous les moyens soient mobilisés pour que dans les meilleurs délais, on retrouve cet assassin, auteur de cet acte, ce crime ignoble.
JEAN-MICHEL APHATIE Vous serez tout à lheure, Luc CHATEL, avec le président de la République, dans un collège, à Paris, à 11h, pour observer avec les personnes qui se trouveront dans cet établissement une minute de silence, qui se déroulera dans lensemble des écoles en France. Pourquoi avoir voulu cette minute de silence aujourdhui ?
LUC CHATEL Dabord, parce que, en sattaquant hier à lécole Ozar Hatorah de Toulouse, lassassin en question sest attaqué à une communauté, la communauté juive, et il sest attaqué à des enfants, il sest attaqué à lécole de la République. Et cest important que tous les républicains soient soudés face à cela, et réagissent, et cétait lesprit du déplacement du président de la République hier matin, auprès des familles, bien sûr, auprès des victimes, auprès de la communauté juive, mais aussi auprès de lensemble des familles de France qui ont été bouleversées par ce drame. Cest donc important que ce matin, nous fassions face, que nous rendions hommage aux victimes, cest dabord un moment de recueillement, et puis, cest peut-être loccasion aussi dévoquer ce drame, dévoquer ces questions dinsécurité, lévolution de la société, simplement, la liberté pédagogique est laissée à chaque établissement, à chaque enseignant, qui, en fonction de leurs élèves, en fonction des situations, déterminera du meilleur moyen dexprimer ce moment de recueillement.
JEAN-MICHEL APHATIE On imagine que cest difficile dans les écoles primaires par exemple, avec des enfants qui sont jeunes, qui ne comprennent pas bien, qui peuvent être un peu angoissés par ce type de situation, quil est difficile dobserver une minute de silence dans ces établissements-là.
LUC CHATEL Cest difficile, mais vous savez, les enseignants savent trouver les mots, dabord, cest leur métier que de transmettre les valeurs à nos enfants, et dès le plus jeune âge, ils savent trouver les mots pour faire passer un message, une émotion, rendre hommage à des camarades qui nous ont quittés, et rappeler quelles sont les valeurs qui doivent être enseignées au sein des écoles de la République.
JEAN-MICHEL APHATIE Et donc cette minute de silence sera observée dans toutes les écoles sans exception.
LUC CHATEL Absolument, elle sera observée dans toutes les écoles, je pense que cest un moment républicain très important, je vous disais tout à lheure, en sattaquant à une école, on sattaque à une institution, aujourdhui, lécole est sans doute la dernière incarnation des institutions de la République, des valeurs de la République. Donc cest très important de faire face, de répondre, de riposter, la République nest pas à genoux face à ce crime odieux, la République, elle fait face, la République va retrouver cet assassin, et lécole de la République continue, parce que cest elle qui permet délever le savoir, de transmettre les valeurs, déduquer nos enfants, et cest lesprit de cette minute de silence.
JEAN-MICHEL APHATIE Ce drame pose beaucoup de questions à la société française, certains candidats ont mis leur campagne présidentielle entre parenthèses, François BAYROU a fait hier toutefois, hier soir, une déclaration que je voudrais vous soumettre, Luc CHATEL : « le fait de montrer du doigt les uns et les autres, a dit François BAYROU, en fonction de leur origine, cest faire flamber les passions, et on le fait parce quil y a dans ce feu-là des voix à prendre. »
LUC CHATEL Je crois que dans ce type de tragédie, lorsquon rencontre dans un pays ce type de tragédie, ce quon attend dabord des responsables politiques, cest de la retenue, du sang-froid, déviter toute récupération, dabord, nous verrons nous verrons en fonction des résultats de lenquête qui est exactement ce tueur, de quel profil sagit-il. Ensuite, nous pourrons effectuer toutes les analyses que lon veut, je voudrais simplement observer deux inexactitudes dans ce qua dit François BAYROU hier, premièrement : il faisait référence à une évolution de la société française, cest inexact, la France avait jusquà présent échappé à ce type de drame, et cétait tant mieux, qui malheureusement sétait déroulé des fusillades dans des établissements scolaires dans beaucoup de grands pays développés, en Allemagne, dans les pays nordiques ou aux Etats-Unis, deuxième élément : il sous-entendait que ce type de crime était en augmentation dans notre pays, et je rappelais que grâce à la mobilisation du gouvernement, des services de police et de gendarmerie, de lexcellente coopération que nous entretenons avec la communauté juive, eh bien, nous avons fait baisser depuis deux ans les actes et les insultes, les injures antisémites, nous les avons fait baisser de 17%. Donc le gouvernement est pleinement mobilisé face à ce fléau, mais cest un combat de tous les jours, cest un combat de tous les instants.
JEAN-MICHEL APHATIE On lance des sujets dans le débat, a dit aussi François BAYROU, on prononce des mots qui roulent comme une avalanche, et qui tombent parfois sur des fous ; vous pensez que le gouvernement, par certains des aspects de son action, est visé par ce type de phrases, Luc CHATEL ?
LUC CHATEL Vous savez, quand on refuse de parler, quand on refuse dexprimer certains mots, cest le début de la dictature, lorsquon sinterdit de prononcer telle ou telle parole, lorsquon sinterdit de parler de tel ou tel problème, cest le début du reniement, du renoncement, donc ça nest pas la façon dont nous considérons les choses ; et encore une fois, je pense que ce moment mérite un moment de concorde, dunité nationale, comme nous lavons vu tout au long de la journée dhier, qui était, je crois, la bonne réponse face à ce drame épouvantable.
Source : Premier ministre, Service dInformation du Gouvernement, le 26 mars 2012