Interview de Mme Roselyne Bachelot, ministre des solidarités et de la cohésion sociale à Europe 1 le 3 février 2012, sur la campagne électorale de l'élection présidentielle d'avril 2012 et les programmes des différents candidats.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : Europe 1

Texte intégral


 
BENJAMIN PETROVER Ecoutez, cette étude ou plutôt cette synthèse d’études publiée dans les colonnes du Monde daté d’aujourd'hui et qui a de quoi inquiéter : la consommation excessive de sucre nuit gravement à la santé. Les chercheurs ont même établi un lien entre consommation de sucre et augmentation de maladies telles que cancer, maladies cardio-vasculaires et même, et ça on va s’en douter, diabète ou obésité. Roselyne BACHELOT, ces chercheurs réclament un encadrement strict de la vente de ces produits, même leur taxation. Traiter le sucre comme le tabac ou l’alcool, vous y êtes pour, vous ?
 
ROSELYNE BACHELOT, MINISTRE DES SOLIDARITES ET DE LA COHESION SOCIALE Je crois que les propos mesurés du professionnel sont parfaitement eux aussi équilibrés. Le sucre en lui-même n’est pas un poison : c’est le comportement alimentaire avec les excès qui doit être – le mauvais comportement qui doit être encadré. C’est d’ailleurs ce que nous avons fait dans les plans nationaux nutrition santé avec un certain nombre d’informations.
 
BENJAMIN PETROVER Mangez, bougez…
 
ROSELYNE BACHELOT Mangez, bougez, évitez de manger trop gras, trop sucré. On a appelé à des chartes de qualité alimentaire, des professionnels se sont engagés parce que c’est vrai que les produits industriels sont trop gras et trop sucrés inutilement.
 
BENJAMIN PETROVER Mais parallèlement, ces producteurs font aussi des campagnes. Pour vous, c’est nuisible ?
 
ROSELYNE BACHELOT C'est-à-dire qu’il faut qu’ils s’engagent dans une démarche nutritionnelle équilibrée. Il faut aussi cibler, et je suis heureuse de voir que Xavier BERTRAND et Nora BERRA sont allés dans ce chemin, il faut axer aussi l’information sur les populations les plus fragiles parce que c’est vrai aussi que ce sont les populations les plus précaires et les plus déshéritées qui mangent des produits trop gras et trop sucrés. Donc c’est aussi un marqueur social.
 
BENJAMIN PETROVER Et je remercie le docteur Boris HANSEL d’avoir été avec nous ce matin. Merci.
 
BORIS HANSEL Merci à vous.
 
BENJAMIN PETROVER Alors Roselyne BACHELOT, ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale, vous êtes notre invitée ce matin sur Europe 1, hier soir Martine AUBRY affrontait François FILLON, un débat très technique, c’était aussi le cas la semaine dernière entre François HOLLANDE et Alain JUPPE. On a presque l’impression de part et d’autres, qu’il y a cette volonté de montrer qu’on est technicien. Est-ce que c’est en menant ce genre de campagne que l’on va séduire les Français ?
 
ROSELYNE BACHELOT La crise est là, les Français ont besoin avant l’élection présidentielle de débats qui ne soient pas des lancements de slogans à la figure les uns des autres, mais d’éléments d’informations et moi je salue au contraire cette démarche, qui est une démarche responsable, de véritables présentations des projets.
 
BENJAMIN PETROVER Beaucoup d’analyses disent, au lieu d’être technicien, c’est devenu presque ennuyeux ce débat, que ce soit la semaine dernière ou cette semaine.
 
ROSELYNE BACHELOT Peut-être que la politique est ennuyeuse…
 
BENJAMIN PETROVER C’est ce qu’on lit dans la presse de ce matin.
 
ROSELYNE BACHELOT … mais quand on fait différemment on nous accuse de populisme. Moi, ce que j’ai remarqué, c’est que François FILLON avec sa pondération, son sérieux habituel a parfaitement défini et défendu les réformes de structures du président de la République. Nous sommes dans un monde qui est en train de changer, il n’y a pas seulement que la crise financière, le monde sous l’effet de la mondialisation, de la globalisation, de l’augmentation de l’espérance de vie, voit ses fondamentaux profondément changer et même si demain nous sortons de la crise financière, il faudra des réformes de structures.
 
BENJAMIN PETROVER Mais cette posture n’aide pas pour autant le président et l’UMP à monter dans les sondages.
 
ROSELYNE BACHELOT Oui mais nous serons, nous sommes sur une explication sérieuse et nous disons aux Français que nous sommes face à des défis, ces défis c’est que nous avons la protection sociale la plus généreuse du monde, 30 % de notre richesse nationale est consacrée à la protection sociale, et que si nous voulons garder ce modèle social, il faut changer son mode de financement. Et c’est ça que fait le président de la République, changer le mode de financement qui ne peut pas reposer uniquement sur le travail.
 
BENJAMIN PETROVER Alors vous Roselyne BACHELOT, le week-end dernier vous avez évoqué votre après 2012, votre souhait de, non pas de vous retirer de la vie politique, mais de faire…
 
ROSELYNE BACHELOT Certainement pas.
 
BENJAMIN PETROVER … la politique différemment. Ca veut dire quoi, vous ne vous représenterez pas aux législatives dans le Maine et Loire en juin prochain, vous ferez quoi ?
 
ROSELYNE BACHELOT Alors d’abord on est toujours étonné que les hommes et les femmes politiques soient conformes aux engagements qu’ils ont pris il y a très longtemps. J’avais dit très nettement et très clairement que j’avais été et réélue cinq fois dans mon département de Maine et Loire et que je passais donc le relai à mon suppléant Paul JEANNETEAU qui a fait un travail absolument extraordinaire sur la circonscription, donc ce n’est pas une nouveauté.
 
BENJAMIN PETROVER Ce veut dire vous anticipez une défaite, vous partez avant tout le monde ?
 
ROSELYNE BACHELOT Mais pas du tout justement, j’ai pris cette décision, il y a une dizaine d’années, je l’ai confirmée en 2007, alors donc vraiment cette accusation est parfaitement, excusez-moi, j’allais dire ridicule. Ca vous ne me l’avez pas posé cette question…
 
BENJAMIN PETROVER En tout cas c’est vous prêtez de mauvaises intentions. Alors vous ferez quoi Roselyne BACHELOT ?
 
ROSELYNE BACHELOT Voilà c’est me prêter de mauvaises intentions. Alors je participerai aux débats publics de toutes les façons possibles, d’abord en écrivant des livres que j’ai en préparation, en participant à des débats, en animant un cercle de réflexion qui est déjà réuni autour de moi depuis une dizaine d’années. Et puis vraiment en faisant la promotion dans ma famille politique et dans l’ensemble de la classe politique pour d’autres modes de fonctionnement de la vie politique en particulier à travers un certain nombre d’expériences que j’ai mené, par exemple sur les états généraux de la bioéthique, en faisant la promotion d’une participation démocratique différente.
 
BENJAMIN PETROVER Dernière question Roselyne BACHELOT, François HOLLANDE a détaillé hier soir son programme de santé, il prévoit notamment un nouveau plan cancer, poursuite du plan Alzheimer, l’aide à l’installation de jeunes médecins, négociation d’un nouveau pacte social l’hôpital, Xavier BERTRAND voit dans ce programme une reprise des bonnes idées du gouvernement, qu’en pense l’ancienne ministre de la Santé ?
 
ROSELYNE BACHELOT Ecoutez, j’ai été un peu sidérée par le programme de François HOLLANDE, effectivement quel hommage aux politiques que nous avons mené depuis 5 ans, la loi hôpital-patient-santé-territoire a créé les moyens, les outils de lutter contre la désertification médicale, d’ailleurs pour la première fois cette année, nous enregistrons le fait qu’il y a plus d’installations de médecins en zone… que de départ de médecin.
 
BENJAMIN PETROVER François HOLLANDE a aussi dénoncé un service public hospitalier vu comme une entreprise.
 
ROSELYNE BACHELOT Ecoutez, vraiment cette réflexion, ce slogan, alors là vraiment on est dans le slogan absurde, au contraire nous avons conforté l’hôpital public.
 
BENJAMIN PETROVER Et vous vous dites quoi, que les mesures d’HOLLANDE sont bonnes ou pas…
 
ROSELYNE BACHELOT Et d’ailleurs ce que nous notons également c’est que l’hôpital public gagne avec les politiques que nous avons menées, gagne de façon continue des parts de marché sur l’hospitalisation privée. Si nous avions mis l’hôpital public à mal ça ne se produirait certainement pas de cette façon.
 
BENJAMIN PETROVER Ca veut dire quoi, si HOLLANDE propose des mesures qui sont des copies des vôtres, c'est-à-dire qu’il a de bonnes idées ? Que son programme est bon ?
 
ROSELYNE BACHELOT Ca veut dire que, je ne sais pas parce qu’il faudra mettre son accord, ses actes en accord avec ses paroles parce que ce que j’ai constaté, c’est que les gens qui le soutiennent n’ont pas arrêté de nous combattre pendant 5 ans.
 Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 7 février 2012