Interview de Mme Delphine Batho, ministre déléguée auprès de la ministre de la justice, à RTL le 13 juin 2012, sur son soutien à la candidature de Ségolène Royal aux élections législatives.

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

BRUCE TOUSSAINT  Delphine BATHO est avec nous, ministre déléguée à la Justice, députée des  Deux-Sèvres, on peut le dire proche de Ségolène ROYAL. Vous avez été sa porteparole.  Valérie TRIERWEILER doit-elle fermer son compte Twitter ? 
 
DELPHINE BATHO Ecoutez, c’est sa liberté. Ce n’est pas un secret que ce qu’elle a exprimé comme  opinion personnelle n’est pas en accord avec celle du président de la République,  comme celle du gouvernement, comme celle des socialistes. Ce matin, la seule chose  qui compte, c’est que la candidate à La Rochelle qui a la légitimité du soutien du  président de la République, c’est Ségolène ROYAL. La seule chose qui compte, c’est  que les citoyens, les électeurs à La Rochelle puissent se déterminer librement, en  fonction des compétences, du bilan de l’action des candidats qui se présentent devant  eux, et notamment du bilan de Ségolène ROYAL qui a un vrai bilan dans son action  locale, mais aussi dans sa dimension nationale. 
 
BRUCE TOUSSAINT  Son intervention, celle de Valérie TRIERWEILER, affaiblit-elle le gouvernement  et le président ? 
 
DELPHINE BATHO Ecoutez, l’essentiel n’est pas là. Elle ne s’est pas exprimée comme une  responsable politique. Ses tweets n’engagent, je vous le disais, ni le président, ni le  gouvernement, donc chaque chose doit être remise à sa place. Je pense que l’actualité  politique de ce matin, ce n’est pas ce tweet. C’est le tournant historique qui vient de se  produire dans l’histoire de la droite française, qui est en train de se compromettre dans  une alliance avec le Front National, ce qui est sans précédent dans l’histoire de la droite  en France. 
 
BRUCE TOUSSAINT  Vous avez raison. C’est un fait politique important, mais ce qui retient l’attention  de toute la presse ce matin, notre attention ici à Europe 1 et sans doute aussi celle des  auditeurs, c’est cette affaire. Je voudrais vous demander si vous en avez parlé à  Ségolène ROYAL depuis hier. 
 
DELPHINE BATHO  Non, pas du tout. 
 
BRUCE TOUSSAINT  Non. Est-ce que vous pouvez nous dire ce matin qu’il s’agit au fond d’une affaire  privée, sans entrer dans les détails. Est-ce que c’est une affaire privée ? 
 
DELPHINE BATHO La liberté d’expression d’une personne qui n’a pas de rôle politique n’a pas à être  mis sur le même plan que l’expression des responsables politiques. Donc je vois bien où  vous voulez m’entraîner mais je n’aurai pas d’autres commentaires à faire. 
 
BRUCE TOUSSAINT  C’est pour essayer de comprendre, tout simplement. Parce que quand on voit par  exemple quelqu'un comme Daniel COHN-BENDIT dire : « C’est indécent », qu’est-ce  que ça vous inspire ? 
 
DELPHINE BATHO Ecoutez, c’est une péripétie. Je pense qu’il n’y a pas lieu de s’étendre davantage.  Ce qui compte, je vous l’ai dit, c’est que dimanche prochain les électeurs fassent le bon  choix à La Rochelle et qu’ils aient conscience que dans ce second tour, ils ont devant  eux une candidate de la majorité présidentielle – Ségolène ROYAL – face à un autre  candidat qui désormais est soutenu par la droite et par Dominique BUSSEREAU. 
 
BRUCE TOUSSAINT  Rien n’aura été épargné à Ségolène ROYAL ? 
 
DELPHINE BATHO Effectivement, effectivement. 
 
BRUCE TOUSSAINT  C'est-à-dire ? 
 
DELPHINE BATHO Ecoutez, elle a subi souvent des attaques. Je ne veux pas… Je ne veux pas… 
 
BRUCE TOUSSAINT  Vous qui la connaissez bien, vous qui étiez à ses côtés encore pendant les  primaires il y a quelques mois, aujourd'hui ce qu’elle subit, ce qu’elle vit aujourd'hui c’est  quoi ? 
 
DELPHINE BATHO Ecoutez, Ségolène ROYAL est une… 
 
BRUCE TOUSSAINT  Une humiliation ? 
 
DELPHINE BATHO  Non. Ségolène ROYAL est une grande femme de la politique française et nous  sommes nombreuses, y compris aujourd'hui au gouvernement, dans une nouvelle  génération de responsables politiques, à lui devoir beaucoup. Donc je pense à la fois  pour sa capacité d’action locale qu’elle a prouvée comme présidente de région, et pour  ce qu’elle a apporté à la vie politique française, qu’elle mérite d’être élue députée  dimanche, et c’est ça qui compte. 
 
BRUCE TOUSSAINT  Quant à Valérie TRIERWEILER, est-ce que François HOLLANDE doit  aujourd'hui, dans les prochaines heures, clarifier la situation ? 
 
DELPHINE BATHOJ  e ne vais pas faire plus de commentaires que cela. Je pense que les auditeurs  ont parfaitement compris mon point de vue et que, pour nous, l’essentiel ce matin à la  fois dans l’action gouvernementale comme dans la campagne des élections  législatives… 
 
BRUCE TOUSSAINT  Je vous assure que ce n’est pas très clair, mais ce n’est pas pour vous  embêter… 
 
DELPHINE BATHO  C’est parfaitement clair. C’est parfaitement clair donc, si vous voulez, je le  répète : une opinion personnelle n’a pas à être mise sur le même plan que l’engagement  politique de responsables politiques et notamment celui du président de la République et  du Premier ministre. 
 
BRUCE TOUSSAINT  Elle doit juste se taire, c’est ça. 
 
DELPHINE BATHOJ  e n’ai pas dit ça. C’est une femme libre, indépendante. 
 
BRUCE TOUSSAINT  Est-ce qu’il faudrait peut-être un jour penser, ouvrir une réflexion sur le rôle de la  Première Dame ? Est-ce qu’elle ne pourrait pas avoir un statut ? Ça existe aux Etats-  Unis par exemple. 
 
DELPHINE BATHO  Ce n’est pas une question qui me paraît fondamentale. 
 
BRUCE TOUSSAINT  Pour ce qui concerne votre domaine de compétences au gouvernement, la  justice, il y a cet avis publié au Journal Officiel aujourd'hui. Jean-Marie DELARUE, qui  est contrôleur des prisons, il demande le retour de l’amnistie pour les courtes peines.  Qu’en pensez-vous ? 
 
DELPHINE BATHO François HOLLANDE avait dit dans la campagne présidentielle qu’il n’y aurait  pas de loi d’amnistie ni pour les PV de stationnement ou les problèmes d’excès de  vitesse, de retrait de points, ni pour les peines de prison. Pour la simple raison que tout  ce qui serait une amnistie de cette nature pourrait être interprété comme un très  mauvais signal. 
 
BRUCE TOUSSAINT  Donc du laxisme, quoi. On peut le dire. 
 
DELPHINE BATHO  Comme un mauvais signal et donc aujourd'hui, le contrôleur général des lieux  privatifs de liberté est dans son rôle. D’ailleurs le gouvernement est à son écoute  lorsqu’il tire le signal d’alarme sur la situation qui est celle aujourd'hui des prisons  françaises avec une surpopulation carcérale catastrophique de 117 %, 67 000 détenus  pour 57 000 places, donc c’est vrai… 
 
BRUCE TOUSSAINT  Absolument. Alors qu’est-ce qu’on fait, d’ailleurs ? 
 
DELPHINE BATHO  Nous travaillons avec Christiane TAUBIRA… 
 
BRUCE TOUSSAINT  Ministre de la Justice. 
 
DELPHINE BATHOA  Apporter des solutions pérennes, des solutions nouvelles, des solutions  sérieuses. 
 
BRUCE TOUSSAINT  A moyen terme ? à long terme ? Parce qu’on sait qu’à court terme, c’est  impossible quasiment. 
 
DELPHINE BATHOA  moyen terme et à plus long terme, mais la solution n’est pas d’aller vers des  amnisties automatiques. Ce n’est pas la bonne solution parce que tout ce qui est de  cette nature est un très mauvais signal dans la lutte contre la délinquance. 
 
BRUCE TOUSSAINT  C’est quoi les pistes ? C’est le bracelet électronique ? C’est des choses comme  ça que vous aimeriez développer ? 
 
DELPHINE BATHOIl y a tout un panel de solutions sur lequel nous travaillons avec Christiane  TAUBIRA et notre méthode, c’est le travail d’abord et la communication ensuite, mais  c’est un problème qui est une priorité d’action pour le gouvernement. 
 
BRUCE TOUSSAINT  Dernier mot. Nadine MORANO qui attribue, qui donne une interview plutôt à  Minute, le journal d’extrême droite et qui déclare : « A ce que je sache, le Front National  n’est pas interdit ». Elle n’a pas tort. 
 
DELPHINE BATHO  Ce n’est pas pour autant que c’est un parti comme les autres, ni que c’est un  parti qui partage les valeurs républicaines et la façon dont la droite est en train de se  compromettre avec l’extrême droite est une pente particulièrement dangereuse. Et voilà  selon moi ce qui ce matin devrait faire la une de l’actualité et qui doit dimanche prochain  mobiliser tous les électeurs qui partagent les valeurs de gauche, des valeurs  démocratiques, des valeurs républicaines pour faire barrage à cette alliance entre la  droite et l’extrême droite.     
 
 BRUCE TOUSSAINT   Vous allez tweetter aujourd'hui ou ce n’est pas prévu ?    
 
DELPHINE BATHO Je ne sais pas.   
 
Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 19 juin 2012