Texte intégral
Mesdames et Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs,
Nous voici donc réunis pour lancer ensemble une grande consultation nationale destinée à "refonder lEcole". Refonder lEcole, lexpression est forte et peut paraître excessive. Comment envisager de refonder une institution vieille comme la République dont elle est par ailleurs lun des fondements ?
Et pourtant ! Si nous estimons si essentielle une telle consultation, cest parce que nous sommes persuadés que létat de lEcole aujourdhui mérite que nous linterrogions ensemble. Que le président de la République veuille faire de léducation la première priorité de son quinquennat, et quil lait traduit par un engagement aussi fort que la création de 60 000 emplois nous oblige. Vous le savez, cette priorité est déjà suivie deffets à travers les mesures durgence prises pour la rentrée 2012.
Je lai dit il y a deux jours devant la représentation nationale, notre façon dagir marque une volonté de changement. Prenons le temps de la réflexion et de laction. En effet, lEcole, ces dernières années, na pas seulement été malmenée, na pas simplement subi des coupes budgétaires aveugles. Elle a été maltraitée dans lintelligence même de ses missions, elle a été laissée sans boussole face aux questions nouvelles que lui posent tant la société française que son environnement international. Nous sommes là, aujourdhui, pour nous interroger sur les vrais défis à relever et sur les meilleures voies pour y parvenir.
Refonder lEcole, cest dabord la redresser.
Alors quelles questions et pourquoi cette consultation ?
Dans ma déclaration de politique générale, jai mis laccent sur lefficacité et la justice. Vous laurez compris, cela sapplique particulièrement à lEcole.
Notre Ecole est-elle efficace ? Notre Ecole est-elle juste ? Quen est-il de la confiance de notre nation en son Ecole, de lEcole en elle-même ? Comment voyons-nous son avenir ?
Notre Ecole est-elle efficace ?
Le constat est largement partagé depuis des années. Et dabord sur ce qui a réussi. Pour le dire simplement, la démocratisation de laccès à lEcole, la scolarisation de tous a pour lessentiel réussi pour ce qui est de la scolarisation obligatoire jusquà 16 ans. Et même au-delà, puisque la très grande majorité des jeunes de 18 ans sont aujourdhui scolarisés. Mais ce que demande désormais notre pays à son Ecole, cest autre chose, cest de conduire tous ses élèves jusquà la maitrise effective des connaissances et compétences indispensables non seulement à la poursuite détudes, supérieures ou professionnelles, mais aussi à la réussite de la vie ultérieure, professionnelle, sociale, personnelle, sans oublier la culture scientifique et technique. Là est le sens des grandes missions assignées à lEcole par les deux lois dorientation les plus récentes, celle portée par L. Jospin en 1989 et celle de F. Fillon en 2005.
L. Jospin avait fait adopter deux objectifs forts dès 1989 : quaucun jeune ne sorte du système éducatif sans qualification reconnue et que 80 % dune génération puisse accéder au niveau du baccalauréat. La loi de 2005 a complété cette ambition en introduisant la notion de "socle commun de connaissances et compétences" qui assigne désormais un objectif à la scolarité obligatoire. Elle la aussi prolongée avec lobjectif damener 50 % dune génération à un diplôme denseignement supérieur.
Soyons clairs, ces objectifs, nous ne les avons pas atteints. Les sorties sans qualification varient selon les estimations entre 10 et 20 % dune génération. Environ 80 % dune génération seulement peut être jugée comme maîtrisant le "socle commun", le pourcentage darrivée au niveau du bac peine à franchir la barre des deux tiers et celui dobtention dun diplôme du supérieur natteint pas 30 % en ce qui concerne la licence.
Plus profondément peut-être encore, à lécole primaire, 15 % de nos élèves en moyenne et jusquà 50 % dans certains quartiers ne maîtrisent pas les compétences de base et sont promis, si rien ne change, à un difficile destin scolaire.
Cette situation ne peut que nous interroger. Tout se passe en effet comme si notre Ecole continuait à bien marcher pour 80 % de nos élèves mais se heurtait à une sorte de plafond de verre pour tous les autres.
Vouloir refonder lEcole, cest accepter de considérer ensemble les leviers du changement. Ni lEcole ni la nation tout entière ne peuvent éviter de sinterroger. On le voit, mon propos nest pas de mettre en cause les uns ou les autres mais de vous inciter à cette mobilisation générale qui seule nous apportera des solutions nouvelles. Nous savons bien en effet les efforts, le dévouement, labnégation de tous les personnels chargés de léducation. Des personnels mais aussi de tous ceux qui les accompagnent au quotidien comme partenaires de lEcole, parents, élus des collectivités, représentants des divers mondes dont se nourrit lEcole, économique, social, culturel, sportif, associatif plus généralement, et qui eux aussi font lEcole.
Je crois à la force de la mobilisation collective que vous représentez si bien ce soir. Il en naîtra, jen suis certain, les ressorts dune créativité nouvelle où pourront se conjuguer initiatives et innovations.
Un exemple pour me faire comprendre. Quand dans une école primaire située dans un quartier difficile où un pourcentage important délèves connait année après année, de graves difficultés dapprentissage, comment ne pas interroger le modèle classique dorganisation de la classe autrement quà travers le seul nombre délèves ? Comment ne pas encourager la recherche dautres façons de travailler, par exemple avec deux maitres intervenant conjointement face au même groupe de façon à mieux prendre en compte les situations individuelles. Les expériences conduites en ce sens montrent que tout le monde y trouve son compte.
Notre Ecole est-elle juste ?
Nous recherchons donc une Ecole plus efficace mais aussi plus juste. Bien des indicateurs démontrent à quel point le destin scolaire dun enfant est déterminé par son origine sociale, à quel point la transmission du capital culturel ressemble de plus en plus à celle du capital économique. Ainsi, les 10 à 20 % en moyenne délèves en échec sont principalement issus des couches les plus modestes.
Cest bien lun des paradoxes de ce siècle : plus lEcole ouvre ses portes, plus elle se démocratise donc, du moins quant à son accès, plus elle apparait injuste, plus elle apparaît comme reproductrice des inégalités sociales.
Il en est une raison simple. Contrairement aux situations qui ont prévalu pendant longtemps, la formation et la qualification sont aujourdhui les clefs majeures dans la distribution des places dans la hiérarchie économique et sociale.
De là un double phénomène : dune part samplifie la demande vis-à-vis de lEcole ; dautre part les enfants dorigine modeste partent avec des handicaps culturels considérables dans la course au diplôme.
De là lexigence de remettre au cur du projet éducatif léducation prioritaire. Il faut certes en redéfinir les contours mais il faut laffirmer comme le lieu privilégié où sapprécieront lefficacité et la justice de notre système. Comment lEcole pourrait-elle être juste si elle abandonne au bord du chemin ceux qui ont le plus besoin delle?
Une Ecole plus juste, plus efficace, mais aussi avec un horizon plus large.
Horizon de temps
Je lai suggéré plus haut : il importe de retrouver le temps long de la réflexion et de la maturation. Il faut à la fois que nous redressions rapidement ce qui doit lêtre et que nous nous fixions un agenda. Je suis mieux placé que quiconque pour connaitre les exigences du temps court de la politique. Cest pourquoi je mautorise à vous dire que vous devez utiliser ce temps un peu plus long que nous offre le quinquennat de F. Hollande.
Lhorizon cest aussi lespace.
Les élèves que nous formons vivront demain dans un monde encore plus ouvert quaujourdhui. A ce monde-là nous devons absolument les préparer en leur donnant tous les outils nécessaires : la meilleure maitrise possible dautres langues et cultures, loccasion de découvrir dautres horizons et modes de vie.
Qui donc, parmi les enfants des classes populaires voyage à létranger ou peut sy instruire si ce nest pas lEcole qui le lui permet ?
Cet horizon international nest évidemment pas incompatible avec le lien profond que lEcole entretient avec son territoire de proximité. Cela fait presque deux siècles que lhistoire de lécole primaire se confond avec celle des communes et trente ans que le premier gouvernement de F. Mitterrand a créé une relation analogue entre départements et collèges, régions et lycées. Cela sappelle une compétence partagée. Je suis très attaché à ce que lEcole vive pleinement cette relation de proximité. Cette compétence partagée doit être respectée, au premier chef par lEtat lui-même qui a trop souvent tendance à décider avant de consulter ceux qui devraient être ses premiers partenaires. Sur ce point aussi je mengage à ce quil nen soit plus ainsi.
Les objectifs de la concertation découlent directement de ces exigences
Monsieur le Ministre, Madame la ministre déléguée, japprécie que vous en ayez tenu compte dans les thématiques que vous avez retenues au lancement de cette concertation.
Reconsidérer le travail conduit à lécole primaire et au-delà au collège dans la perspective de la réussite de tous simpose.
De la même manière, cest sous langle de lefficacité et de la justice que la question des rythmes scolaires doit être envisagée : efficacité dans les apprentissages mais aussi pour le meilleur épanouissement de lenfant à lécole et en-dehors de lécole.
Comment enfin ne pas mettre au cur de la réflexion les principaux acteurs de cette recherche defficacité et de justice, les maitres eux-mêmes et ce qui les fait devenir maitres autant que professeurs: leur formation. On le sait, les décisions du gouvernement précédent ont été néfastes en ce domaine parce quelles ont oublié lessentiel, à savoir que ce métier sapprend, pas seulement dans les livres ou sur les bancs des amphithéâtres mais en le pratiquant. Il faut donc à la fois tirer les leçons des dispositifs antérieurs et inventer un modèle adapté aux nécessités daujourdhui, qui prépare les futurs maitres à cette double exigence defficacité et de justice. Cest ce modèle que nous rechercherons en créant les futures écoles supérieures du professorat et de léducation au sein de nos universités.
La concertation, ce sont des objectifs mais c'est aussi une méthode,
celle que nous voulons désormais instaurer pour toutes les grandes questions qui concernent notre pays. Cest aussi la volonté dexprimer notre confiance à une communauté éducative régulièrement meurtrie. Mais cest bien davantage.
Face à un tel défi, ma conviction est que le meilleur arbitrage politique est toujours celui qui se trouve au point de rencontre ou déquilibre entre le point de vue des experts et celui des citoyens. La vertu dune concertation bien conduite vient de ce quelle permet la recherche de ce point déquilibre. Les principes qui doivent inspirer son organisation en découlent.
Principe de diversité dabord. Lassemblée que jai devant moi témoigne de ce que vous avez eu ce souci. De même le quatuor de personnalités que vous avez choisies. Dans lensemble quils constituent, je vois à la fois le monde scolaire et universitaire, lunivers des collectivités et celui de léconomie. Merci à vous tous.
Les auditions que vous conduirez, les contributions que vous recueillerez, les travaux que vous mènerez dans les groupes prévus à cet effet, tout cela fournira un matériau important, riche et utile.
Mais lEcole, cest tout le territoire. Il convient donc de donner sa pleine dimension territoriale à cette consultation. Aux côtés des recteurs, de leurs équipes et des acteurs locaux, les collectivités territoriales, vous apporteront une aide précieuse.
Calendrier enfin. Je laisserai au Ministre le soin de le préciser en détail. Mais je souhaiterais que vous sachiez concilier les différents temps nécessaires à cette noble entreprise.
Une première étape devra être marquée dès lautomne avec des premières conclusions importantes qui pourraient prendre la forme dun projet de loi dorientation. Mais la réflexion, léchange la concertation voire la négociation ne sauraient sarrêter à cette première étape.
Nous avons devant nous le temps plus long dun quinquennat pour conduire le changement en profondeur.
En conclusion
Vous le voyez, et ma présence ici navait dautre but que de le souligner, le président de la République et moi-même attendons beaucoup de cette consultation pour définir les voies et moyens dun renouveau, dune refondation de lEcole.
Vous êtes nombreux à nous faire confiance dans cette voie dun effort non pas conduit par une mécanique aveugle mais orienté par des choix stratégiques. Les engagements aussi concrets que les mesures prises pour la rentrée 2012 et la création de 60 000 emplois en cinq ans, témoignent aussi de la confiance que nous plaçons en vous.
Mais cette confiance a une contrepartie, lattente considérable quelle suscite dans tout le pays dune Ecole plus juste et plus efficace. Ne la décevons pas ! Il sagit de lavenir de la jeunesse ; il sagit de lavenir de la France.
Source http://www.gouvernement.fr, le 12 juillet 2012
Mesdames et Messieurs,
Nous voici donc réunis pour lancer ensemble une grande consultation nationale destinée à "refonder lEcole". Refonder lEcole, lexpression est forte et peut paraître excessive. Comment envisager de refonder une institution vieille comme la République dont elle est par ailleurs lun des fondements ?
Et pourtant ! Si nous estimons si essentielle une telle consultation, cest parce que nous sommes persuadés que létat de lEcole aujourdhui mérite que nous linterrogions ensemble. Que le président de la République veuille faire de léducation la première priorité de son quinquennat, et quil lait traduit par un engagement aussi fort que la création de 60 000 emplois nous oblige. Vous le savez, cette priorité est déjà suivie deffets à travers les mesures durgence prises pour la rentrée 2012.
Je lai dit il y a deux jours devant la représentation nationale, notre façon dagir marque une volonté de changement. Prenons le temps de la réflexion et de laction. En effet, lEcole, ces dernières années, na pas seulement été malmenée, na pas simplement subi des coupes budgétaires aveugles. Elle a été maltraitée dans lintelligence même de ses missions, elle a été laissée sans boussole face aux questions nouvelles que lui posent tant la société française que son environnement international. Nous sommes là, aujourdhui, pour nous interroger sur les vrais défis à relever et sur les meilleures voies pour y parvenir.
Refonder lEcole, cest dabord la redresser.
Alors quelles questions et pourquoi cette consultation ?
Dans ma déclaration de politique générale, jai mis laccent sur lefficacité et la justice. Vous laurez compris, cela sapplique particulièrement à lEcole.
Notre Ecole est-elle efficace ? Notre Ecole est-elle juste ? Quen est-il de la confiance de notre nation en son Ecole, de lEcole en elle-même ? Comment voyons-nous son avenir ?
Notre Ecole est-elle efficace ?
Le constat est largement partagé depuis des années. Et dabord sur ce qui a réussi. Pour le dire simplement, la démocratisation de laccès à lEcole, la scolarisation de tous a pour lessentiel réussi pour ce qui est de la scolarisation obligatoire jusquà 16 ans. Et même au-delà, puisque la très grande majorité des jeunes de 18 ans sont aujourdhui scolarisés. Mais ce que demande désormais notre pays à son Ecole, cest autre chose, cest de conduire tous ses élèves jusquà la maitrise effective des connaissances et compétences indispensables non seulement à la poursuite détudes, supérieures ou professionnelles, mais aussi à la réussite de la vie ultérieure, professionnelle, sociale, personnelle, sans oublier la culture scientifique et technique. Là est le sens des grandes missions assignées à lEcole par les deux lois dorientation les plus récentes, celle portée par L. Jospin en 1989 et celle de F. Fillon en 2005.
L. Jospin avait fait adopter deux objectifs forts dès 1989 : quaucun jeune ne sorte du système éducatif sans qualification reconnue et que 80 % dune génération puisse accéder au niveau du baccalauréat. La loi de 2005 a complété cette ambition en introduisant la notion de "socle commun de connaissances et compétences" qui assigne désormais un objectif à la scolarité obligatoire. Elle la aussi prolongée avec lobjectif damener 50 % dune génération à un diplôme denseignement supérieur.
Soyons clairs, ces objectifs, nous ne les avons pas atteints. Les sorties sans qualification varient selon les estimations entre 10 et 20 % dune génération. Environ 80 % dune génération seulement peut être jugée comme maîtrisant le "socle commun", le pourcentage darrivée au niveau du bac peine à franchir la barre des deux tiers et celui dobtention dun diplôme du supérieur natteint pas 30 % en ce qui concerne la licence.
Plus profondément peut-être encore, à lécole primaire, 15 % de nos élèves en moyenne et jusquà 50 % dans certains quartiers ne maîtrisent pas les compétences de base et sont promis, si rien ne change, à un difficile destin scolaire.
Cette situation ne peut que nous interroger. Tout se passe en effet comme si notre Ecole continuait à bien marcher pour 80 % de nos élèves mais se heurtait à une sorte de plafond de verre pour tous les autres.
Vouloir refonder lEcole, cest accepter de considérer ensemble les leviers du changement. Ni lEcole ni la nation tout entière ne peuvent éviter de sinterroger. On le voit, mon propos nest pas de mettre en cause les uns ou les autres mais de vous inciter à cette mobilisation générale qui seule nous apportera des solutions nouvelles. Nous savons bien en effet les efforts, le dévouement, labnégation de tous les personnels chargés de léducation. Des personnels mais aussi de tous ceux qui les accompagnent au quotidien comme partenaires de lEcole, parents, élus des collectivités, représentants des divers mondes dont se nourrit lEcole, économique, social, culturel, sportif, associatif plus généralement, et qui eux aussi font lEcole.
Je crois à la force de la mobilisation collective que vous représentez si bien ce soir. Il en naîtra, jen suis certain, les ressorts dune créativité nouvelle où pourront se conjuguer initiatives et innovations.
Un exemple pour me faire comprendre. Quand dans une école primaire située dans un quartier difficile où un pourcentage important délèves connait année après année, de graves difficultés dapprentissage, comment ne pas interroger le modèle classique dorganisation de la classe autrement quà travers le seul nombre délèves ? Comment ne pas encourager la recherche dautres façons de travailler, par exemple avec deux maitres intervenant conjointement face au même groupe de façon à mieux prendre en compte les situations individuelles. Les expériences conduites en ce sens montrent que tout le monde y trouve son compte.
Notre Ecole est-elle juste ?
Nous recherchons donc une Ecole plus efficace mais aussi plus juste. Bien des indicateurs démontrent à quel point le destin scolaire dun enfant est déterminé par son origine sociale, à quel point la transmission du capital culturel ressemble de plus en plus à celle du capital économique. Ainsi, les 10 à 20 % en moyenne délèves en échec sont principalement issus des couches les plus modestes.
Cest bien lun des paradoxes de ce siècle : plus lEcole ouvre ses portes, plus elle se démocratise donc, du moins quant à son accès, plus elle apparait injuste, plus elle apparaît comme reproductrice des inégalités sociales.
Il en est une raison simple. Contrairement aux situations qui ont prévalu pendant longtemps, la formation et la qualification sont aujourdhui les clefs majeures dans la distribution des places dans la hiérarchie économique et sociale.
De là un double phénomène : dune part samplifie la demande vis-à-vis de lEcole ; dautre part les enfants dorigine modeste partent avec des handicaps culturels considérables dans la course au diplôme.
De là lexigence de remettre au cur du projet éducatif léducation prioritaire. Il faut certes en redéfinir les contours mais il faut laffirmer comme le lieu privilégié où sapprécieront lefficacité et la justice de notre système. Comment lEcole pourrait-elle être juste si elle abandonne au bord du chemin ceux qui ont le plus besoin delle?
Une Ecole plus juste, plus efficace, mais aussi avec un horizon plus large.
Horizon de temps
Je lai suggéré plus haut : il importe de retrouver le temps long de la réflexion et de la maturation. Il faut à la fois que nous redressions rapidement ce qui doit lêtre et que nous nous fixions un agenda. Je suis mieux placé que quiconque pour connaitre les exigences du temps court de la politique. Cest pourquoi je mautorise à vous dire que vous devez utiliser ce temps un peu plus long que nous offre le quinquennat de F. Hollande.
Lhorizon cest aussi lespace.
Les élèves que nous formons vivront demain dans un monde encore plus ouvert quaujourdhui. A ce monde-là nous devons absolument les préparer en leur donnant tous les outils nécessaires : la meilleure maitrise possible dautres langues et cultures, loccasion de découvrir dautres horizons et modes de vie.
Qui donc, parmi les enfants des classes populaires voyage à létranger ou peut sy instruire si ce nest pas lEcole qui le lui permet ?
Cet horizon international nest évidemment pas incompatible avec le lien profond que lEcole entretient avec son territoire de proximité. Cela fait presque deux siècles que lhistoire de lécole primaire se confond avec celle des communes et trente ans que le premier gouvernement de F. Mitterrand a créé une relation analogue entre départements et collèges, régions et lycées. Cela sappelle une compétence partagée. Je suis très attaché à ce que lEcole vive pleinement cette relation de proximité. Cette compétence partagée doit être respectée, au premier chef par lEtat lui-même qui a trop souvent tendance à décider avant de consulter ceux qui devraient être ses premiers partenaires. Sur ce point aussi je mengage à ce quil nen soit plus ainsi.
Les objectifs de la concertation découlent directement de ces exigences
Monsieur le Ministre, Madame la ministre déléguée, japprécie que vous en ayez tenu compte dans les thématiques que vous avez retenues au lancement de cette concertation.
Reconsidérer le travail conduit à lécole primaire et au-delà au collège dans la perspective de la réussite de tous simpose.
De la même manière, cest sous langle de lefficacité et de la justice que la question des rythmes scolaires doit être envisagée : efficacité dans les apprentissages mais aussi pour le meilleur épanouissement de lenfant à lécole et en-dehors de lécole.
Comment enfin ne pas mettre au cur de la réflexion les principaux acteurs de cette recherche defficacité et de justice, les maitres eux-mêmes et ce qui les fait devenir maitres autant que professeurs: leur formation. On le sait, les décisions du gouvernement précédent ont été néfastes en ce domaine parce quelles ont oublié lessentiel, à savoir que ce métier sapprend, pas seulement dans les livres ou sur les bancs des amphithéâtres mais en le pratiquant. Il faut donc à la fois tirer les leçons des dispositifs antérieurs et inventer un modèle adapté aux nécessités daujourdhui, qui prépare les futurs maitres à cette double exigence defficacité et de justice. Cest ce modèle que nous rechercherons en créant les futures écoles supérieures du professorat et de léducation au sein de nos universités.
La concertation, ce sont des objectifs mais c'est aussi une méthode,
celle que nous voulons désormais instaurer pour toutes les grandes questions qui concernent notre pays. Cest aussi la volonté dexprimer notre confiance à une communauté éducative régulièrement meurtrie. Mais cest bien davantage.
Face à un tel défi, ma conviction est que le meilleur arbitrage politique est toujours celui qui se trouve au point de rencontre ou déquilibre entre le point de vue des experts et celui des citoyens. La vertu dune concertation bien conduite vient de ce quelle permet la recherche de ce point déquilibre. Les principes qui doivent inspirer son organisation en découlent.
Principe de diversité dabord. Lassemblée que jai devant moi témoigne de ce que vous avez eu ce souci. De même le quatuor de personnalités que vous avez choisies. Dans lensemble quils constituent, je vois à la fois le monde scolaire et universitaire, lunivers des collectivités et celui de léconomie. Merci à vous tous.
Les auditions que vous conduirez, les contributions que vous recueillerez, les travaux que vous mènerez dans les groupes prévus à cet effet, tout cela fournira un matériau important, riche et utile.
Mais lEcole, cest tout le territoire. Il convient donc de donner sa pleine dimension territoriale à cette consultation. Aux côtés des recteurs, de leurs équipes et des acteurs locaux, les collectivités territoriales, vous apporteront une aide précieuse.
Calendrier enfin. Je laisserai au Ministre le soin de le préciser en détail. Mais je souhaiterais que vous sachiez concilier les différents temps nécessaires à cette noble entreprise.
Une première étape devra être marquée dès lautomne avec des premières conclusions importantes qui pourraient prendre la forme dun projet de loi dorientation. Mais la réflexion, léchange la concertation voire la négociation ne sauraient sarrêter à cette première étape.
Nous avons devant nous le temps plus long dun quinquennat pour conduire le changement en profondeur.
En conclusion
Vous le voyez, et ma présence ici navait dautre but que de le souligner, le président de la République et moi-même attendons beaucoup de cette consultation pour définir les voies et moyens dun renouveau, dune refondation de lEcole.
Vous êtes nombreux à nous faire confiance dans cette voie dun effort non pas conduit par une mécanique aveugle mais orienté par des choix stratégiques. Les engagements aussi concrets que les mesures prises pour la rentrée 2012 et la création de 60 000 emplois en cinq ans, témoignent aussi de la confiance que nous plaçons en vous.
Mais cette confiance a une contrepartie, lattente considérable quelle suscite dans tout le pays dune Ecole plus juste et plus efficace. Ne la décevons pas ! Il sagit de lavenir de la jeunesse ; il sagit de lavenir de la France.
Source http://www.gouvernement.fr, le 12 juillet 2012