Déclaration de Mme Yamina Benguigui, ministre de la francophonie, sur la Francophonie, à Paris le 29 août 2012.

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Circonstance : XXe Conférence des ambassadeurs, les 28 et 29 août 2012

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les Députés et les Sénateurs,
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
Je me réjouis de vous accueillir nombreuses et nombreux à ce déjeuner de travail. Je souhaite remercier les uns et les autres d'avoir répondu à notre invitation. Permettez-moi également de remercier toutes celles et tous ceux, notamment Nicolas Chibaef et son équipe, pour tout le travail réalisé pour cette organisation.
Ce déjeuner thématique que nous avons souhaité organiser Laurent Fabius et moi est très important. Il est à la mesure de la mission que le président de la République et le Premier ministre m'ont confiée.
Les enjeux en matière de Francophonie sont considérables et touchent à la fois à la défense de la langue française là où elle est en déclin et à sa promotion partout ailleurs. Ces enjeux touchent également à nos valeurs et à notre politique d'influence. Je sais que vous êtes toutes et tous impliqués dans cette bataille linguistique que nous devons mener partout et de façon permanente et je vous en suis très reconnaissante.
Notre langue commune est source de valeurs et de partage. On lit encore ici ou là que le français est la langue de la colonisation ou encore la langue de la «Françafrique». Tout ceci est désormais derrière nous. La langue française s'est débarrassée des oripeaux de la colonisation. Aujourd'hui, c'est une langue solidaire et égalitaire qui se parle à hauteur d'homme.
C'est sur cette base que nous devons bâtir une nouvelle relation avec nos partenaires francophones. Une relation d'égal à égal, une relation faite de solidarité, une relation faite d'égalité, de franchise et de respect mutuel.
Quand on appartient à une famille, je parle de la famille francophone, on doit partager les succès mais aussi les échecs pour avancer ensemble et construire un avenir commun.
La langue française, c'est tout cela. C'est avant tout le véhicule de la stabilité et de la cohésion, de la tolérance et de la diversité. C'est aussi et surtout une langue en évolution permanente et qui demeure une source de créativité exceptionnelle dans le domaine culturel notamment. La langue française, nous devons tous en être les militants tant pour sa défense que sa promotion.
Mesdames et Messieurs, chers Amis,
Le président de la République a annoncé lundi soir qu'il participera du 12 au 14 octobre au Sommet de la Francophonie à Kinshasa. Je me félicite d'avoir contribué à cette décision.
La mission n'était pas simple. En préparant ce déplacement, j'avais souhaité pouvoir rester suffisamment longtemps sur place et ainsi prendre le temps de rencontrer, de dialoguer, d'écouter les colères, les peurs, les incompréhensions, les espoirs, les humiliations et, aussi et surtout, l'expression d'un véritable besoin de reconnaissance.
Durant quatre jours, j'ai ainsi rencontré un peu plus de 100 personnes qui représentaient toutes les composantes de la société congolaise.
Que m'ont dit toutes ces personnes de l'opposition, des organisations de défenseurs des droits de l'homme, des communautés religieuses ainsi que des artistes, des femmes engagées dans la vie publique ? Elles m'ont toutes dit qu'il était nécessaire que le président de la République puisse participer à ce Sommet. J'ai également rencontré le président Kabila, le Premier ministre, le ministre des affaires étrangères, le président de l'Assemblée nationale et le vice-président du Sénat. Nos échanges ont permis d'obtenir de réels engagements de la part des autorités congolaises. Le 22 aout dernier, Aubin Minaku, le président de l'Assemblée nationale de RDC a rendu public le programme de travail des députés à la rentrée prochaine et deux textes très importants seront examinés : le texte sur la réforme de la Commission électorale nationale indépendante et un autre sur la création de la commission nationale des droits de l'Homme. Ce sont là des avancées importantes.
On dit également ici ou là que nous devrions pas y aller car la guerre fait rage dans le Nord Kivu. Je ne suis pas d'accord avec ces affirmations. J'ai rencontré les témoins des exactions commises par les groupes rebelles qui déstabilisent la région depuis trop longtemps. La situation dans le Nord Kivu, les avancées du M23, sont dans tous les esprits.
Présente sur place et en contact permanent avec le président de la République et le ministre des Affaires étrangères, nous avons demandé au Conseil de sécurité de se réunir sur cette question pour condamner fermement l'action du M23 et de ses soutiens extérieurs. C'est une avancée. Le Sommet de Kinshasa permettra de lever le voile sur cette guerre oubliée où les armes n'ont rien de conventionnel. Ces armes, ce sont le viol des femmes, l'enrôlement d'enfants soldats et notamment de jeunes femmes.
Mesdames et Messieurs,
Vous le voyez. Le Sommet de la Francophonie de Kinshasa sera l'occasion, pour le président de la République, de rappeler l'attachement de la France aux valeurs de la Francophonie, à ses principes et ses idéaux, à son nécessaire dynamisme et à sa modernité. Cette participation s'inscrit parfaitement dans la volonté de rappeler au monde entier que le socle des valeurs de la Francophonie constitue les fondations d'une nouvelle relation non seulement entre les États mais également entre les sociétés civiles.
Avec Laurent Fabius, nous élaborons actuellement un plan stratégique pour la Francophonie qui s'inscrit dans le plan de relance souhaité par le président de la République. Dans ce plan stratégique, la dimension économique de la Francophonie tiendra une place toute particulière.
Je pense en effet que la langue française doit être un outil au service de la croissance économique. Elle peut s'imposer dans l'espace francophone comme un outil au service de l'économie dans les échanges nord-sud comme dans les échanges sud-sud.
L'un des éléments clés de la réussite est, je le pense sincèrement, qu'il est très important d'investir dans la formation d'ingénieurs, de techniciens. Nous devons promouvoir la mise en oeuvre d'échanges renforcés entre les universités francophones. C'est ce travail de base qui permettra aux entreprises de recruter localement des collaborateurs de qualité. Nous devons également favoriser le développement de la mobilité et renforcer la formation des journalistes et des techniciens.
Certaines entreprises sont prêtes à investir localement dans des programmes de formation. Nous devons partout où cela est possible encourager de nouvelles formes de partenariats entre les universités, les écoles d'ingénieurs ou de techniciens, les entreprises et les États concernés dans le but de permettre à nos entreprises de prendre place sur de nouveaux marchés en pleine croissance.
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs
Mesdames et Messieurs, Chers Amis,
Comme vous le voyez, nous avons beaucoup de travail. La relance de la francophonie est un chantier ambitieux.
C'est un combat pour nos valeurs.
Ne l'oublions pas... C'est en français que les femmes maliennes en appellent à la solidarité. C'est en français que les femmes victimes des viols dans l'est de la RDC nous tendent les mains. C'est en français que les acteurs des printemps arabes se sont exprimés avec ce mot si fort : «Dégage !!!». C'est encore en français que s'inscrit notre vision de la politique en matière de droits de l'Homme et de lutte contre toutes les formes de discrimination. C'est en français enfin que nous serons plus forts, tous ensemble, pour transmettre au monde cette ambition universelle.
Je vous remercie de votre attention.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 septembre 2012