Texte intégral
Je vous remercie pour votre invitation. Cest la première fois quun ministre du Travail ouvre votre Convention nationale et je suis heureux dêtre celui-ci. Ma présence ici na rien danodine. Elle est le témoignage de lattention que le gouvernement porte à léconomie sociale et solidaire. Celle-ci dispose désormais dun ministre qui porte quotidiennement ses intérêts et sa philosophie, Benoît Hamon, qui conclura la journée. Votre organisation a été partie prenante des débats lors de la Grande conférence sociale de juillet dernier.
Je considère les acteurs de léconomie sociale et solidaire comme des interlocuteurs à part entière, comme des employeurs et non comme des travailleurs sociaux.
A part entière, cela ne veut pas dire « comme les autres » car léconomie sociale et solidaire coopératives, syndicats, groupements demployeurs, associations, mutuelles, fondations ont une identité spécifique et des principes forts, à commencer par le principe dégalité, le souci démocratique au coeur de léconomie et la perspective solidaire.
Discrète mais forte, puisquemployant 2,3 millions de personnes, léconomie sociale et solidaire ne doit pas oublier doù elle vient : du refus de la violence économique. Elle est lidée concrétisée que la solidarité est la force de ceux qui nont pas le pouvoir de largent. Elle porte aussi la conviction que le travail et le capital ne sont pas forcément ennemis. Elle est surtout un champ ouvert de créativité et dinnovations sociales en tous genres.
Il y a bien longtemps les soi-disant utopistes (en réalités très concrets) construisaient des phalanstères et familistères, groupant leurs forces et faisant de largent gagné ensemble, le moyen de financer les oeuvres sociales : école, théâtre, bibliothèques, caisses de secours mutuel. Léconomie était ainsi mise au service de tous. Chacun était dailleurs sociétaire, ce qui ne signifie pas que lanarchie régnait, mais au contraire que chacun avait à la fois une place et une voix.
Le mouvement coopératif, mutualiste, solidariste est ainsi enraciné dans une histoire concrète qui a démontré la viabilité de son modèle, mêlant réalisme économique, valeurs sociales et idéal de transformation de la société. Oui, à côté dune économie parfois violente, il y a aussi une économie qui sait être clémente. Léconomie sociale et solidaire nest pas celle des bons sentiments, des loups transformés en agneaux. Elle est celle du contrôle réciproque, dune répartition juste de la valeur créée. Elle est la démonstration que le social a une valeur économique irremplaçable.
Laide à domicile, lanimation, les centres sociaux et socioculturels, les coopératives bancaires et de production, les foyers de jeunes travailleurs, le logement social, les missions locales et PAIO, les mutualités, régies de quartiers ou le tourisme social et familial, sont le visage dune économie à haute valeur sociale ajoutée et qui a de plus limmense mérite dêtre ancrée dans les territoires.
En tant que Ministre du travail, de lemploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, jai toutes les raisons de me sentir concerné par le dialogue avec les représentants de léconomie sociale et solidaire, au premier rang desquels est lUSGERES. Et vous plus que dautres, sachez donner au nom « demployeur » le plein sens qui est le sien : la responsabilité.
Vous avez une responsabilité en termes demplois. La crise que nous traversons renforce cette utilité mais démontre aussi que léconomie sociale et solidaire est mieux armée pour résister aux assauts du chômage, car elle est globalement en croissance. Depuis une dizaine dannées, lESS créée, proportionnellement, deux fois plus demplois que le secteur privé. Nous comptons sur vous pour nous aider à inverser la courbe du chômage.
Vous êtes en première ligne dans la mise en place des emplois davenir. Il y a dans notre pays 500 000 jeunes qui ne sont ni en emploi, ni en formation. Nous avons conçu pour eux les emplois davenir, véritable marchepied vers lemploi stable et durable. Le secteur non marchand est le premier mobilisé, vous en êtes des acteurs clefs et nous comptons sur vous. Nous avons besoin de tous les acteurs de lESS pour permettre à des jeunes dentrer dans lemploi, pour franchir cette première marche si difficile à gravir et acquérir de lexpérience et de la qualification. Je sais que vous avez cette fibre sociale et que linsertion vous tient à coeur.
Vous serez également en première ligne pour la mise en oeuvre du contrat de génération qui constituera pour vos structures une aide précieuse à lembauche des jeunes en CDI et au maintien dans lemploi des seniors. Vous avez une responsabilité en termes de travail. Nous attendons de vous que vos soyez encore les militants de la qualité du travail dans un contexte où celui-ci est abîmé par le management au regard fixé sur le cours de bourse, par les cadences infernales, les horaires décalées ou les tâches vidées de sens. Tout nest pas simple dans les secteurs dactivité qui sont les vôtres, tout nest pas rose non plus mais cest aussi dans vos métiers que se gagne le combat de lamélioration de la qualité de vie au travail.
Vous avez une responsabilité en matière de formation professionnelle : chacun ici connaît la place éminente dUNIFORMATION, partenaires de cette journée, dans le paysage des OPCA. La formation professionnelle est un défi majeur sur lequel nous sommes pleinement investis Thierry Repentin et moi-même. Vous avez enfin une responsabilité en matière de dialogue social : la question de la représentativité est posée. Je vais laborder. Mais, je voudrais souligner dabord quen dehors même de cette question, il y a dores et déjà un dialogue à faire vivre au quotidien dans les branches et dans les structures dont vous avez la charge. Jy attache une grande importance.
Jen viens à la question de la représentativité. La balle est dans le camp des organisations professionnelles. Vous et dautres avaient fait des propositions.
Elles nourrissent le débat. Dautres sont attendues, elles le sont avant lété 2013. Le grand débat que vous organisez en début daprès midi avec tous les acteurs patronaux montre, comme vous lavez dit, que les lignes bougent.
Le Gouvernement est déterminé à accompagner et encourager le mouvement et saura le moment venu prendre ces responsabilités. LUSGERES y aura toute sa place. Le processus, mesdames et messieurs, est enclenché. Il prend tout sens dans le cadre de lengagement du Président de la République de constitutionnaliser le dialogue social. Il est évident quil aura à se matérialiser par des actes concrets, je pense aux différentes instances consultatives nationales ou dans les territoires. Jai bien noté les points que vous avez mis en avant M. Cordesse et je mengage à y travailler avec un état desprit positif.
Sagissant des instances consultatives, le lien avec la réforme de la représentativité est évident. Mais il y a dautres instances je pense notamment aux instances de réflexion où lUSGERES nest pas représentée alors quelle devrait y avoir toute sa place. Ainsi, je proposerai au Premier ministre que lUSGERES puisse disposer dun représentant, en tant que personnalité qualifiée, au sein du Conseil dorientation pour lemploi. Cest lengagement que je souhaitais prendre devant vous.
Je vous remercie et vous laisse à vos travaux. Je les sais riches et ne voudrais pas empiéter sur leur tenue.
Source http://travail-emploi.gouv.fr, le 17 octobre 2012