Texte intégral
* M. Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement
Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Sénateurs, je suis heureux d'être là aujourd'hui pour vous présenter le budget de la mission aide publique au développement. Mais avant de vous présenter les grandes lignes de la mission, je voulais m'excuser du retard pris dans la transmission des documents budgétaires, les questions parlementaires et le rapport bisannuel au Parlement. Nous avons dans ce domaine une marge de progression certaine.
Je me réjouis de pouvoir présenter la mission dans son ensemble car, en tant que ministre délégué chargé du développement, je me suis battu pour défendre l'ensemble de la mission, qui repose effectivement sur deux programmes budgétaires dépendants l'un du quai d'Orsay, l'autre du ministère des finances. Raisonner de façon globale en terme de missions et non pas de programmes budgétaires, est un des éléments de réponses aux critiques de la Cour des comptes sur le pilotage de notre politique.
Concernant la mesure des résultats et la transparence, la préparation des documents budgétaires, bien que finalisée tardivement, a commencé très en amont et il n'a pas été possible dès cette année de progresser dans la mesure de l'efficacité de l'aide. Ces questions seront largement traitées lors des assises du développement et de la solidarité internationale et j'invite les parlementaires à s'associer pleinement à ce processus. Nos services travaillent en parallèle à résoudre les difficultés techniques que présente un tel exercice.
Pour en revenir à la mission budgétaire, la mission budgétaire «Aide publique au développement» est stabilisée en valeur sur la période 2013-2015 par rapport à la dépense réalisée en 2012 (légèrement au-dessus de 3,05 milliards d'euros). La diminution observée par rapport à la LFI 2012 de 200 millions correspond essentiellement à des économies de constatation. La Commission européenne n'a pas décaissé 213,3 millions d'euros sur la dotation française pour 2012 au Fonds européen de développement (FED). Le Gouvernement assume en effet le choix, dans le contexte du redressement des comptes publics, de ne pas avoir redéployé ces crédits vers des dépenses nouvelles. Non seulement nous avons stabilisé le budget, mais nous allons abonder les crédits avec 160 millions d'euros en provenance de la TTF (taxe sur les transactions financières).
Ce budget contient en effet une inflexion politique. Il reprend les quatre engagements pris par le président de la République durant sa campagne.
Malgré le contexte budgétaire difficile, le gouvernement, et moi-même avec Laurent Fabius avons obtenu d'affecter 10 % du produit de la taxe française sur les transactions financières au développement, contrairement au gouvernement précédent qui avait affecté l'ensemble du produit de la taxe au budget. Ces fonds viennent s'ajouter, de manière additionnelle, au budget de l'aide publique au développement. C'est un signal très fort du maintien de l'ambition française en matière de solidarité internationale. Cette décision va au-delà de l'engagement de campagne du président de la République qui ne portait que sur la taxe européenne.
L'affectation de 10 % du produit de la TTF française permettra de financer des actions, en priorité dans les domaines de la lutte contre le changement climatique et l'environnement, et de la santé, notamment en Afrique. Concrètement, la France prendra des engagements de financements sur la période 2013-2015 correspondant à au moins 10 % du produit de la TTF (1,6 milliard d'euros par an), soit près d'un demi-milliard d'euros, dont une partie sera affectée au Fonds Vert. Les premiers déboursements seront effectués dès 2013 (60 millions d'euros) et monteront en charge progressivement. Au niveau européen, 11 pays ont décidé de participer à une coopération renforcée. La Commission européenne doit présenter un texte remanié d'ici la fin de l'année. Conformément aux engagements pris à Rio par le président de la République, la France continuera de porter le principe de l'affectation au développement d'une part significative du produit de la future taxe européenne sur les transactions financières.
L'autre engagement du président de la République qui sera tenu en 2013, c'est le doublement de l'aide aux ONG. Cet engagement portait sur un doublement sur le quinquennat. Nous avons fléché ce doublement sur le quinquennat avec une trajectoire de 45 millions d'augmentation, soit 9 millions par an, et donc 9 millions en 2013 pour commencer. Ce doublement de la part de l'aide passant par les ONG implique de formaliser les relations entre l'Agence française de développement, qui sera le véhicule par lequel transitera cette augmentation, et les ONG concernées. Les règles doivent être clarifiées. Pour la première fois, au premier trimestre 2013, l'AFD mettra en oeuvre un cadre, actuellement en cours de rédaction, de règles de partenariat entre l'Agence et les ONG. Si les crédits qui transitent par les ONG augmentent, c'est pour répondre à la nécessité de développer des projets plus petits, qui ne sont pas de grosses infrastructures fonctionnant par prêts. Ces projets viennent donc en complément de ce que sait faire traditionnellement l'Agence française de développement, ce qui suppose d'établir de manière totalement transparente la politique dans laquelle ils s'inscrivent, d'où la clarification des règles.
Un autre engagement de campagne du président de la République était de stabiliser la part des dons-projets, le coeur de l'aide en quelque sorte. Nous l'avons fait dans ce premier budget et prévoyons de le faire sur le triennal. Nous avons donc calibré le budget de façon à respecter le troisième engagement qui avait été pris par le président.
Le président de la République avait pris un quatrième engagement durant sa campagne celui d'organiser, avant la fin de la première année de son mandat, des assises de la solidarité internationale. Ces assises se sont ouvertes hier. Dans le cadre de ces assises, nous discuterons notamment de nos choix et de nos arbitrages en matière de transparence et d'efficacité. Certes, une grande partie des critiques du rapport de la Cour des comptes, malheureusement justifiées, s'adresse au gouvernement antérieur sans que nous ayons à en assumer le coût politique, il n'en reste pas moins que nous devons nous appuyer sur ces critiques pour changer les pratiques. Pour cela, nous avons besoin de votre volontarisme, de votre énergie, de votre regard critique. Je compte vraiment sur vous pour faire entendre votre voix et faire des propositions concrètes et argumentées. La loi proposition d'une loi d'orientation, portez-la pendant les assises, tout comme les autres sujets que vous avez évoqués en matière d'efficacité et de transparence. Les assises sont précisément faites pour déboucher sur des modifications concrètes en matière de gestion et de pilotage de notre aide.
(Interventions des parlementaires)
* M. Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement
Les fonds issus de la taxe française sur les transactions financières seront essentiellement affectés à deux thématiques, le climat et la santé. Il nous reste à déterminer dans quelle proportion et par le biais de quel opérateur. Il nous faudra notamment trancher entre des opérateurs bilatéraux et des opérateurs multilatéraux. Dans le domaine de la santé, notre coopération passe majoritairement par des opérateurs multilatéraux tels que, par exemple, le fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Le débat reste ouvert, ma préférence allant à un rééquilibrage au profit de l'aide bilatérale en articulation avec des opérateurs multilatéraux. En ce qui concerne le climat, ces crédits supplémentaires permettront d'honorer nos engagements à l'égard du fonds vert dont la création a été décidée au sommet de Copenhague et confirmée par la suite.
S'agissant de la taxe sur les transactions financières européennes, nous devrions trouver une majorité au Parlement européen pour autoriser une coopération renforcée. En revanche, nous ne sommes pas encore assurés d'avoir une majorité au Conseil européen, notamment en raison de l'hostilité britannique. À ce niveau des négociations, nous n'avons pas d'indications précises sur la destination des fonds issus de la taxe, mais nous espérons bien qu'une partie de ces fonds sera affectée à l'aide au développement.
En ce qui concerne les transferts de compétence à l'AFD, la réforme de 1998 et celle de 2004 ont conduit à transférer l'ensemble des secteurs opérationnels à l'AFD, à l'exception de la gouvernance. Cet équilibre a sa raison d'être, il importe surtout que «l'équipe France» travaille en étroite collaboration sur le terrain et notamment que les agences de l'AFD et les SCAC coordonnent leur action.
Le président de la République s'est en effet engagé lors de la campagne présidentielle à présenter au Parlement une loi de programmation sur la coopération au développement. N'hésitez pas, si vous jugez cette proposition utile, à la soutenir, notamment dans le cadre des assises.
Le document de politique transversale est en effet un document aride et, à vrai dire, peu lisible. Nous espérons, dans les années à venir, pouvoir en améliorer la présentation. S'agissant des engagements internationaux, il est vrai qu'ils ne figurent pas dans le DPT. Une partie du bilan a été intégrée dans le rapport bisannuel que nous venons de vous adresser. Pour le reste, j'ai considéré qu'il fallait, avant de publier ces informations, consolider les chiffres afin d'en assurer l'exactitude.
S'agissant du partenariat de Deauville, la France s'est effectivement engagée à hauteur de 2,7 milliards d'euros en 2011 pour 3 ans. 1,4 milliard d'euros ont été engagés. Il nous reste encore un an et demi pour honorer notre promesse.
S'agissant des ratios prudentiels grands risques de l'AFD, vous soulevez un véritable sujet qui doit faire l'objet d'une discussion interministérielle.
Vous avez raison de soulever la question de l'expertise technique, c'est un enjeu important. Nous avons travaillé jusqu'à présent sur d'autres dossiers. Je crois qu'il nous faut aujourd'hui essayer de trouver des moyens de coordonner l'action des différents opérateurs ainsi que celle de l'AFD qui va bientôt bénéficier d'un fonds dédié à l'expertise. En ce qui concerne la faiblesse des décaissements du FED, elle a principalement des facteurs structurels comme la conditionnalité politique renforcée de l'aide budgétaire ou le choix de secteurs à faibles décaissements. C'est pourquoi il nous semblerait judicieux d'augmenter la part des dépenses dédiées à la mise en oeuvre du FED afin d'en appuyer le rythme de décaissement.
Nous observons que la faiblesse des coûts de gestion du FED, qui est en soi une bonne chose, traduit également la faiblesse des effectifs de ce fonds pour instruire les dossiers et les suivre. C'est pourquoi il faudra avoir une discussion lors de la reconstitution du 11ème FED sur les ressources humaines du fonds. Nous pensons, comme les Allemands du reste, que ce 11e FED devrait se situer autour de 30 milliards d'euros, qui correspondent à une stabilisation en volume à l'image de l'évolution de la PAC.
(Interventions des parlementaires)
* M. Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement
Sur la TTF, en 2013, 160 millions, c'est-à-dire 10 % des recettes escomptées, (qui devraient s'élever à 1,6 milliard d'euros), seront attribuées au fonds social de développement. En 2013, il s'agira de 60 millions d'euros de crédits de paiement qui devraient être décaissés dans l'année et de 100 millions d'euros d'autorisations d'engagement pour des actions qui seront décaissées sur les années suivantes. Sur les trois ans, il s'agira de 160 millions d'euros en moyenne, avec un rythme de décaissement qui peut varier en fonction des projets. Cette solution est très cohérente par rapport à la nature des projets à financer, elle présente l'inconvénient d'être peu lisible et exige un effort de pédagogie que je m'efforce de déployer. Les priorités sont la santé et le climat, comme je l'ai indiqué précédemment.
S'agissant du Sahel, une éventuelle intervention doit reposer sur quatre piliers : militaire, politique, humanitaire et développement. Sur l'aspect humanitaire, nous travaillons en concertation avec les opérateurs de l'ONU pour se tenir prêts à intervenir en faveur des populations qui pourraient être touchées par les conséquences d'une intervention militaire. Sur l'aspect de développement, il est évident que nous devons nous tenir prêt à déployer des actions structurantes pour répondre aux besoins de la population. Nous travaillons dans le cadre d'intervention européen, AGIR, dont nous essayons de préciser le contenu et qui dispose de moyens financiers substantiels. Sur l'Afghanistan, le budget et les opérations financées se situent en face avec le traité d'amitié et de coopération ratifié récemment.
En ce qui concerne l'évaluation, c'est une de mes priorités et c'est un des chantiers des assises. Je le dis ici, la France ne peut pas rester en retard sur cette question. Nous devons pouvoir expliquer aux Français combien de vaccins, combien d'enfants scolarisés, combien d'accès au réseau potable, la France a financé grâce au budget que j'ai l'honneur de vous présenter.
Nous devons nous engager dans une gestion par les résultats. On ne peut pas continuer à ne raisonner qu'en termes de moyens. Il nous faut mesurer nos résultats et notre impact sur le développement des pays partenaires. La situation actuelle nuit à la légitimité de notre effort. Je ne crois pas que la situation des ONG soit différente des autres opérateurs. Leur action doit être évaluée de la même façon. Elles sont d'ores et déjà soumises aux procédures de l'AFD qui ont vocation à garantir le sérieux des actions menées.
(Interventions des parlementaires)
* M. Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement
Il y a sur notre déclaration au CAD un sujet récurrent. Je crois qu'il faut examiner sérieusement la façon dont nous interprétons les critères du CAD. Il y a un juste équilibre à trouver. Les assises peuvent être l'occasion d'avancer sur ce sujet.
Nous avons présenté notre stratégie relative à la question du genre pour les années 2007-2012. Ce document est de nature à amplifier la prise en compte de cette dimension dans l'ensemble de notre politique de coopération. C'est un sujet compliqué, car, d'un côté, si vous mettez des conditionnalités trop fortes dans les pays qui ne respectent pas le droit des femmes, vous êtes conduit à interrompre toute aide à des pays qui en ont pourtant besoin.
Je suis désolé si ma présentation est apparue trop technocratique. Il est vrai que je souhaite me concentrer sur mon domaine de compétence qui est le développement, laissant, pour ce qui est du Sahel, au ministre des affaires étrangères, dont je suis le ministre délégué, et au ministre de la défense, le soin de vous répondre sur les aspects militaires et diplomatiques de l'éventuelle intervention de la CEDEAO au Mali. Sachez, par ailleurs, que le futur représentant de l'Union européenne au Mali pourrait être un Français.
Pour ce qui me concerne, je travaille, en liaison avec la Commission européenne, à la mise en place d'un plan d'intervention en faveur du développement pour le Nord-Mali. Ce plan va être finalisé dans quelques jours, et je souhaite d'ici là laisser la primeur de ce plan au ministre des affaires étrangères.
(...)
Vous avez tout à fait raison, Monsieur Chevènement, mais, dans le respect des usages républicains auxquels je vous sais sensible, je tiens à avoir d'abord un échange avec mes collègues du Gouvernement sur des projets en cours d'élaboration.
Vous avez raison, Monsieur Reiner, la doctrine en matière d'allocations multilatérales n'est pas d'une grande clarté. Le discours en faveur de l'aide multilatérale est parfois critiqué, notamment au Parlement, mais je crois que l'enjeu principal c'est bien l'articulation entre l'aide bilatérale et l'aide multilatérale. Nous travaillons à favoriser cette cohérence. L'idée est également de peser davantage dans les instances multilatérales.
Monsieur Berthou, vous avez tout à fait raison de poser la question de l'assistance technique. La création d'un fonds d'assistance au sein de l'AFD est l'occasion de réfléchir à la meilleure façon d'assurer une cohérence entre les acteurs. Ce fonds pourrait être un élément de synthèse ; il convient de poursuivre la réflexion.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 novembre 2012
Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Sénateurs, je suis heureux d'être là aujourd'hui pour vous présenter le budget de la mission aide publique au développement. Mais avant de vous présenter les grandes lignes de la mission, je voulais m'excuser du retard pris dans la transmission des documents budgétaires, les questions parlementaires et le rapport bisannuel au Parlement. Nous avons dans ce domaine une marge de progression certaine.
Je me réjouis de pouvoir présenter la mission dans son ensemble car, en tant que ministre délégué chargé du développement, je me suis battu pour défendre l'ensemble de la mission, qui repose effectivement sur deux programmes budgétaires dépendants l'un du quai d'Orsay, l'autre du ministère des finances. Raisonner de façon globale en terme de missions et non pas de programmes budgétaires, est un des éléments de réponses aux critiques de la Cour des comptes sur le pilotage de notre politique.
Concernant la mesure des résultats et la transparence, la préparation des documents budgétaires, bien que finalisée tardivement, a commencé très en amont et il n'a pas été possible dès cette année de progresser dans la mesure de l'efficacité de l'aide. Ces questions seront largement traitées lors des assises du développement et de la solidarité internationale et j'invite les parlementaires à s'associer pleinement à ce processus. Nos services travaillent en parallèle à résoudre les difficultés techniques que présente un tel exercice.
Pour en revenir à la mission budgétaire, la mission budgétaire «Aide publique au développement» est stabilisée en valeur sur la période 2013-2015 par rapport à la dépense réalisée en 2012 (légèrement au-dessus de 3,05 milliards d'euros). La diminution observée par rapport à la LFI 2012 de 200 millions correspond essentiellement à des économies de constatation. La Commission européenne n'a pas décaissé 213,3 millions d'euros sur la dotation française pour 2012 au Fonds européen de développement (FED). Le Gouvernement assume en effet le choix, dans le contexte du redressement des comptes publics, de ne pas avoir redéployé ces crédits vers des dépenses nouvelles. Non seulement nous avons stabilisé le budget, mais nous allons abonder les crédits avec 160 millions d'euros en provenance de la TTF (taxe sur les transactions financières).
Ce budget contient en effet une inflexion politique. Il reprend les quatre engagements pris par le président de la République durant sa campagne.
Malgré le contexte budgétaire difficile, le gouvernement, et moi-même avec Laurent Fabius avons obtenu d'affecter 10 % du produit de la taxe française sur les transactions financières au développement, contrairement au gouvernement précédent qui avait affecté l'ensemble du produit de la taxe au budget. Ces fonds viennent s'ajouter, de manière additionnelle, au budget de l'aide publique au développement. C'est un signal très fort du maintien de l'ambition française en matière de solidarité internationale. Cette décision va au-delà de l'engagement de campagne du président de la République qui ne portait que sur la taxe européenne.
L'affectation de 10 % du produit de la TTF française permettra de financer des actions, en priorité dans les domaines de la lutte contre le changement climatique et l'environnement, et de la santé, notamment en Afrique. Concrètement, la France prendra des engagements de financements sur la période 2013-2015 correspondant à au moins 10 % du produit de la TTF (1,6 milliard d'euros par an), soit près d'un demi-milliard d'euros, dont une partie sera affectée au Fonds Vert. Les premiers déboursements seront effectués dès 2013 (60 millions d'euros) et monteront en charge progressivement. Au niveau européen, 11 pays ont décidé de participer à une coopération renforcée. La Commission européenne doit présenter un texte remanié d'ici la fin de l'année. Conformément aux engagements pris à Rio par le président de la République, la France continuera de porter le principe de l'affectation au développement d'une part significative du produit de la future taxe européenne sur les transactions financières.
L'autre engagement du président de la République qui sera tenu en 2013, c'est le doublement de l'aide aux ONG. Cet engagement portait sur un doublement sur le quinquennat. Nous avons fléché ce doublement sur le quinquennat avec une trajectoire de 45 millions d'augmentation, soit 9 millions par an, et donc 9 millions en 2013 pour commencer. Ce doublement de la part de l'aide passant par les ONG implique de formaliser les relations entre l'Agence française de développement, qui sera le véhicule par lequel transitera cette augmentation, et les ONG concernées. Les règles doivent être clarifiées. Pour la première fois, au premier trimestre 2013, l'AFD mettra en oeuvre un cadre, actuellement en cours de rédaction, de règles de partenariat entre l'Agence et les ONG. Si les crédits qui transitent par les ONG augmentent, c'est pour répondre à la nécessité de développer des projets plus petits, qui ne sont pas de grosses infrastructures fonctionnant par prêts. Ces projets viennent donc en complément de ce que sait faire traditionnellement l'Agence française de développement, ce qui suppose d'établir de manière totalement transparente la politique dans laquelle ils s'inscrivent, d'où la clarification des règles.
Un autre engagement de campagne du président de la République était de stabiliser la part des dons-projets, le coeur de l'aide en quelque sorte. Nous l'avons fait dans ce premier budget et prévoyons de le faire sur le triennal. Nous avons donc calibré le budget de façon à respecter le troisième engagement qui avait été pris par le président.
Le président de la République avait pris un quatrième engagement durant sa campagne celui d'organiser, avant la fin de la première année de son mandat, des assises de la solidarité internationale. Ces assises se sont ouvertes hier. Dans le cadre de ces assises, nous discuterons notamment de nos choix et de nos arbitrages en matière de transparence et d'efficacité. Certes, une grande partie des critiques du rapport de la Cour des comptes, malheureusement justifiées, s'adresse au gouvernement antérieur sans que nous ayons à en assumer le coût politique, il n'en reste pas moins que nous devons nous appuyer sur ces critiques pour changer les pratiques. Pour cela, nous avons besoin de votre volontarisme, de votre énergie, de votre regard critique. Je compte vraiment sur vous pour faire entendre votre voix et faire des propositions concrètes et argumentées. La loi proposition d'une loi d'orientation, portez-la pendant les assises, tout comme les autres sujets que vous avez évoqués en matière d'efficacité et de transparence. Les assises sont précisément faites pour déboucher sur des modifications concrètes en matière de gestion et de pilotage de notre aide.
(Interventions des parlementaires)
* M. Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement
Les fonds issus de la taxe française sur les transactions financières seront essentiellement affectés à deux thématiques, le climat et la santé. Il nous reste à déterminer dans quelle proportion et par le biais de quel opérateur. Il nous faudra notamment trancher entre des opérateurs bilatéraux et des opérateurs multilatéraux. Dans le domaine de la santé, notre coopération passe majoritairement par des opérateurs multilatéraux tels que, par exemple, le fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Le débat reste ouvert, ma préférence allant à un rééquilibrage au profit de l'aide bilatérale en articulation avec des opérateurs multilatéraux. En ce qui concerne le climat, ces crédits supplémentaires permettront d'honorer nos engagements à l'égard du fonds vert dont la création a été décidée au sommet de Copenhague et confirmée par la suite.
S'agissant de la taxe sur les transactions financières européennes, nous devrions trouver une majorité au Parlement européen pour autoriser une coopération renforcée. En revanche, nous ne sommes pas encore assurés d'avoir une majorité au Conseil européen, notamment en raison de l'hostilité britannique. À ce niveau des négociations, nous n'avons pas d'indications précises sur la destination des fonds issus de la taxe, mais nous espérons bien qu'une partie de ces fonds sera affectée à l'aide au développement.
En ce qui concerne les transferts de compétence à l'AFD, la réforme de 1998 et celle de 2004 ont conduit à transférer l'ensemble des secteurs opérationnels à l'AFD, à l'exception de la gouvernance. Cet équilibre a sa raison d'être, il importe surtout que «l'équipe France» travaille en étroite collaboration sur le terrain et notamment que les agences de l'AFD et les SCAC coordonnent leur action.
Le président de la République s'est en effet engagé lors de la campagne présidentielle à présenter au Parlement une loi de programmation sur la coopération au développement. N'hésitez pas, si vous jugez cette proposition utile, à la soutenir, notamment dans le cadre des assises.
Le document de politique transversale est en effet un document aride et, à vrai dire, peu lisible. Nous espérons, dans les années à venir, pouvoir en améliorer la présentation. S'agissant des engagements internationaux, il est vrai qu'ils ne figurent pas dans le DPT. Une partie du bilan a été intégrée dans le rapport bisannuel que nous venons de vous adresser. Pour le reste, j'ai considéré qu'il fallait, avant de publier ces informations, consolider les chiffres afin d'en assurer l'exactitude.
S'agissant du partenariat de Deauville, la France s'est effectivement engagée à hauteur de 2,7 milliards d'euros en 2011 pour 3 ans. 1,4 milliard d'euros ont été engagés. Il nous reste encore un an et demi pour honorer notre promesse.
S'agissant des ratios prudentiels grands risques de l'AFD, vous soulevez un véritable sujet qui doit faire l'objet d'une discussion interministérielle.
Vous avez raison de soulever la question de l'expertise technique, c'est un enjeu important. Nous avons travaillé jusqu'à présent sur d'autres dossiers. Je crois qu'il nous faut aujourd'hui essayer de trouver des moyens de coordonner l'action des différents opérateurs ainsi que celle de l'AFD qui va bientôt bénéficier d'un fonds dédié à l'expertise. En ce qui concerne la faiblesse des décaissements du FED, elle a principalement des facteurs structurels comme la conditionnalité politique renforcée de l'aide budgétaire ou le choix de secteurs à faibles décaissements. C'est pourquoi il nous semblerait judicieux d'augmenter la part des dépenses dédiées à la mise en oeuvre du FED afin d'en appuyer le rythme de décaissement.
Nous observons que la faiblesse des coûts de gestion du FED, qui est en soi une bonne chose, traduit également la faiblesse des effectifs de ce fonds pour instruire les dossiers et les suivre. C'est pourquoi il faudra avoir une discussion lors de la reconstitution du 11ème FED sur les ressources humaines du fonds. Nous pensons, comme les Allemands du reste, que ce 11e FED devrait se situer autour de 30 milliards d'euros, qui correspondent à une stabilisation en volume à l'image de l'évolution de la PAC.
(Interventions des parlementaires)
* M. Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement
Sur la TTF, en 2013, 160 millions, c'est-à-dire 10 % des recettes escomptées, (qui devraient s'élever à 1,6 milliard d'euros), seront attribuées au fonds social de développement. En 2013, il s'agira de 60 millions d'euros de crédits de paiement qui devraient être décaissés dans l'année et de 100 millions d'euros d'autorisations d'engagement pour des actions qui seront décaissées sur les années suivantes. Sur les trois ans, il s'agira de 160 millions d'euros en moyenne, avec un rythme de décaissement qui peut varier en fonction des projets. Cette solution est très cohérente par rapport à la nature des projets à financer, elle présente l'inconvénient d'être peu lisible et exige un effort de pédagogie que je m'efforce de déployer. Les priorités sont la santé et le climat, comme je l'ai indiqué précédemment.
S'agissant du Sahel, une éventuelle intervention doit reposer sur quatre piliers : militaire, politique, humanitaire et développement. Sur l'aspect humanitaire, nous travaillons en concertation avec les opérateurs de l'ONU pour se tenir prêts à intervenir en faveur des populations qui pourraient être touchées par les conséquences d'une intervention militaire. Sur l'aspect de développement, il est évident que nous devons nous tenir prêt à déployer des actions structurantes pour répondre aux besoins de la population. Nous travaillons dans le cadre d'intervention européen, AGIR, dont nous essayons de préciser le contenu et qui dispose de moyens financiers substantiels. Sur l'Afghanistan, le budget et les opérations financées se situent en face avec le traité d'amitié et de coopération ratifié récemment.
En ce qui concerne l'évaluation, c'est une de mes priorités et c'est un des chantiers des assises. Je le dis ici, la France ne peut pas rester en retard sur cette question. Nous devons pouvoir expliquer aux Français combien de vaccins, combien d'enfants scolarisés, combien d'accès au réseau potable, la France a financé grâce au budget que j'ai l'honneur de vous présenter.
Nous devons nous engager dans une gestion par les résultats. On ne peut pas continuer à ne raisonner qu'en termes de moyens. Il nous faut mesurer nos résultats et notre impact sur le développement des pays partenaires. La situation actuelle nuit à la légitimité de notre effort. Je ne crois pas que la situation des ONG soit différente des autres opérateurs. Leur action doit être évaluée de la même façon. Elles sont d'ores et déjà soumises aux procédures de l'AFD qui ont vocation à garantir le sérieux des actions menées.
(Interventions des parlementaires)
* M. Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement
Il y a sur notre déclaration au CAD un sujet récurrent. Je crois qu'il faut examiner sérieusement la façon dont nous interprétons les critères du CAD. Il y a un juste équilibre à trouver. Les assises peuvent être l'occasion d'avancer sur ce sujet.
Nous avons présenté notre stratégie relative à la question du genre pour les années 2007-2012. Ce document est de nature à amplifier la prise en compte de cette dimension dans l'ensemble de notre politique de coopération. C'est un sujet compliqué, car, d'un côté, si vous mettez des conditionnalités trop fortes dans les pays qui ne respectent pas le droit des femmes, vous êtes conduit à interrompre toute aide à des pays qui en ont pourtant besoin.
Je suis désolé si ma présentation est apparue trop technocratique. Il est vrai que je souhaite me concentrer sur mon domaine de compétence qui est le développement, laissant, pour ce qui est du Sahel, au ministre des affaires étrangères, dont je suis le ministre délégué, et au ministre de la défense, le soin de vous répondre sur les aspects militaires et diplomatiques de l'éventuelle intervention de la CEDEAO au Mali. Sachez, par ailleurs, que le futur représentant de l'Union européenne au Mali pourrait être un Français.
Pour ce qui me concerne, je travaille, en liaison avec la Commission européenne, à la mise en place d'un plan d'intervention en faveur du développement pour le Nord-Mali. Ce plan va être finalisé dans quelques jours, et je souhaite d'ici là laisser la primeur de ce plan au ministre des affaires étrangères.
(...)
Vous avez tout à fait raison, Monsieur Chevènement, mais, dans le respect des usages républicains auxquels je vous sais sensible, je tiens à avoir d'abord un échange avec mes collègues du Gouvernement sur des projets en cours d'élaboration.
Vous avez raison, Monsieur Reiner, la doctrine en matière d'allocations multilatérales n'est pas d'une grande clarté. Le discours en faveur de l'aide multilatérale est parfois critiqué, notamment au Parlement, mais je crois que l'enjeu principal c'est bien l'articulation entre l'aide bilatérale et l'aide multilatérale. Nous travaillons à favoriser cette cohérence. L'idée est également de peser davantage dans les instances multilatérales.
Monsieur Berthou, vous avez tout à fait raison de poser la question de l'assistance technique. La création d'un fonds d'assistance au sein de l'AFD est l'occasion de réfléchir à la meilleure façon d'assurer une cohérence entre les acteurs. Ce fonds pourrait être un élément de synthèse ; il convient de poursuivre la réflexion.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 novembre 2012