Texte intégral
Avant dentrer dans le débat de répartition des crédits je voudrais décliner devant vous ce qui guide mon action et lensemble des priorités de mon ministère. Elles tiennent en deux principes de méthode et quatre grands axes politiques.
I. Les deux principes de méthode
La prise en compte du point de vue des personnes : les politiques publiques doivent avant tout répondre aux besoins de nos concitoyens. Cela paraît une lapalissade mais lempilement de trente ans de dispositifs emplois formation conduit parfois au sentiment que certains dentre eux nexistent plus que pour eux-mêmes ! Cela mamène à penser toujours simplification, lisibilité, accessibilité.
Le dialogue avec tous les acteurs de la formation et de lapprentissage. Cest essentiel. Dès ma prise de fonction jai souhaité renouer le dialogue, notamment avec les partenaires sociaux (tous les partenaires sociaux) et les Région afin délaborer nos stratégies en confiance et, là encore, en bonne intelligence. Pour quune réforme fonctionne, il faut encore quelle soit expliquée, partagée, comprise et acceptée de tous. Cela évite bien des blocages par la suite, et la concertation sera donc ma méthode de travail comme celle de tout le Gouvernement.
Au-delà de ces axes de méthode, laction de mon Ministère sétablira autour de quatre grands axes stratégiques dont un certain nombre de déclinaisons ont pris ancrage dans les conclusions de la Grande Conférence Sociale des 9 et 10 juillet dernier.
Les quatre grands axes politiques
Je les traiterai successivement, à savoir :
* Rendre effectif et concret le droit à la formation tout au long de vie ;
* offrir à chaque jeune laccès à un premier niveau de qualification ;
* Concrétiser le service public de lorientation pour que chacun puisse choisir sa vie professionnelle
* Affirmer et sécuriser le service public de la formation. Sur lensemble de ces quatre chantiers, la préparation de la nouvelle étape de décentralisation constitue un enjeu transversal. La décentralisation est en effet loccasion de renforcer la lisibilité du système ainsi que son efficacité en développant de nouvelles modalités de pilotage et de coordination des acteurs, au service notamment de la qualification des jeunes et de la formation tout au long de la vie.
Beaucoup de ces chantiers sont communs avec Michel SAPIN bien évidemment mais aussi avec mon collègue Vincent PEILLON, avec lequel je travaille de manière très proche.
Dores et déjà, je puis vous indiquer les trois grands principes qui structurent ma vision de lacte III de la décentralisation en matière de formation professionnelle :
* Conforter les régions sur leurs blocs de compétences et organiser celles-ci dans le cadre dun service public régional de la formation ;
* Affirmer la région comme chef de file sur le service public de lorientation et sur la coordination des actions à destination des jeunes non ou peu qualifiés ;
* Rationaliser et simplifier les instances de concertation au niveau national comme au niveau régional.
A) Le premier axe de ma feuille de route sattachera donc à rendre effectif et concret le droit à la formation tout au long de la vie.
Le constat a montré la complexité daccès à la formation professionnelle renforcée par des outils manquant de cohérence nationale et, à lautre bout de la chaîne, une sous utilisation des droits individuels de formation de la part des salariés.
* Sur cet axe, jentends dabord améliorer laccès des demandeurs demploi à la formation professionnelle.
Cest un des « chantiers » ouvert par la feuille de route de la « Grande Conférence Sociale ».
Jai réuni à nouveau les participants à la table ronde « Formation Professionnelle » il y a quelques semaines et nous nous reverrons de nouveau la semaine prochaine.
Avec leur accord, un document de « méthode » sera diffusé en Régions pour organiser une déclinaison régionale sur cette question. Dans ce cadre, nous mobiliserons les actions des programmes de lutte contre lillettrisme ou le programme « compétence clé », et nous veillerons à loptimisation des actions menées par les Régions.
* Ensuite, jentends accompagner la création du compte individuel de formation.
Cest là aussi un des chantiers issu de la Grande Conférence Sociale et dont le principe vient dêtre réaffirmé dans le cadre des décisions du Pacte national pour la croissance, la compétitivité et lemploi annoncé hier par le Gouvernement. Cest un élément essentiel pour améliorer la portabilité des droits à la formation.
Le CNFPTLV a dores et déjà été saisi en septembre. Il sagira de suivre les travaux, dêtre attentif aux conclusions, et en fonction de celles-ci de préparer une négociation interprofessionnelle et les textes nécessaires à sa mise en oeuvre.
Dans cet objectif, nous aurons à travailler au rapprochement des instruments de concertation et de prévision en matière demploi et de formation.
B) Second axe de travail pour moi : offrir à chaque jeune laccès à un premier niveau de qualification.
Cet axe est également un des objectifs de la feuille de route issue de la Grande Conférence Sociale.
Sur ce point aussi nous avons également saisi les partenaires sociaux dun document cadre. Il engage les objectifs que nous pouvons nous donner sur lalternance, et sur le partenariat avec les Régions, ainsi quavec le ministère de lEducation nationale.
Comme la rappelé le Président de la République, le Gouvernement entend articuler une meilleure complémentarité entre lapprentissage et les formations non alternées en définissant une carte des formations que les régions prépareront en dialogue avec lEtat.
Toutes les voies de la formation doivent être développées et lapprentissage que lon doit faire progresser - ne doit pas se substituer aux autres typologies de formations.
* Offrir à chaque jeune un premier niveau de qualification, cest avant tout, ne laisser aucun jeune sans solution.
Cest là tout le sens des « pactes pour la réussite éducative et professionnelle » que nous allons promouvoir dans chaque région de façon à inciter à une meilleure organisation des dispositifs locaux de décrochage/raccrochage et dinsertion professionnelle des jeunes et concrétiser lengagement du Gouvernement et les Régions diminuer par 2 sur 5 ans le nombre de jeunes sortis du dispositif de formation initiale sans formation !
Ce point rejoint dailleurs ma volonté de construire un droit daccès pour chaque jeune à un premier niveau de qualification. Jen avais pris lengagement le 10 juillet dernier. Il est à présent sur les rails.
* Ne laisser aucun jeune sans solution, mais aussi, soutenir les jeunes en alternance.
- Il sagit premièrement de veiller à ce que loffre de contrats en alternance se maintienne pour une part importante sur les premiers niveaux. Les deux tiers « seulement » des nouveaux contrats de 2010 concernent des jeunes de niveau V ou infra alors même quils représentaient les trois quarts des contrats signés en 1992.
Il ne sagit ici nullement de discuter de lopportunité du développement de cette forme dapprentissage en université, mais il convient de rééquilibrer cette tendance délévation des niveaux à lentrée en apprentissage et de maintenir une offre dès les premiers niveaux de qualifications de même quun usage équilibré de la ressource, en particulier la taxe dapprentissage. Nous aurons à travailler en ce sens avec les partenaires sociaux et avec les chambres consulaires avec lesquelles nous allons reconventionner pour le renouvellement de leur « développement de lapprentissage »
- Offrir à chaque jeune laccès à un premier niveau de qualification, particulièrement lorsquils sont peu qualifiés. Cest enfin accompagner la qualification en cours demploi.
Cest tout le sens de ce nous avons prévu pour les jeunes qui sengageront dans un emploi davenir qui devrait permettre aux jeunes réellement engager un parcours de qualification.
C) Troisième axe de travail : Concrétiser le service public de lorientation pour que chacun puisse choisir sa vie professionnelle
Choisir sa voie, maîtriser sa vie professionnelle sentend comme un tout : de la formation initiale à la formation continue, en passant par lemploi et éventuellement la création dentreprise et pouvoir sorienter à tous les âges de la vie.
Or laccès à linformation sur les parcours professionnels est complexe. Les lieux et personnes ressources sont segmentés voire étanches, en tout cas peu lisibles pour la personne.
enjeu est donc de créer les conditions dun accès facilité et fluide aux éléments de nature à permettre à chacun de faire ses choix, sans opposer formation et emploi, jeunes et actifs. Le service public de lorientation devra également permettre une meilleure connaissance de la diversité des métiers et contribuer à leur valorisation.
La mise en oeuvre du service public de lorientation sinscrit dans les perspectives de décentralisation. Elle nécessitera un cadre concerté en veillant à un maillage optimal du territoire.
Il sagira de mieux coordonner les dispositifs existants, mieux territorialiser le SPO (service public de lorientation) et bien le positionner comme une offre de service pour répondre aux interrogations professionnelles de nos concitoyens tout au long de leur vie alors quil est encore trop souvent associé à la scolarité et aux adolescents.
D) Enfin, quatrième et dernier grand axe de travail : affirmer et sécuriser le service public de la formation.
Accroître les compétences des personnes nest pas une prestation marchande comme les autres, en particulier lorsquelle sadresse aux actifs précaires et peu qualifiés.
Elle ne peut donc être soumise aux seules lois du marché. Cette affirmation constitue un élément de rupture avec les politiques conduites précédemment. Cela implique de définir le service public national de la formation et les exigences de service public auxquelles il doit être soumis et sécuriser juridiquement les instruments de conventionnement quil peut utiliser dans sa relation aux organismes de formation.
Cela nous impose aussi de définir des critères de qualité de la formation et dévaluation de cette qualité.
Voici donc les grandes orientations que jentends mettre en place pour le développement et la réussite de lapprentissage et le renforcement du droit à la formation.
Pour conduire cette politique je mappuierai sur les moyens du budget 2013. Ce budget traduit, dans la droite ligne des orientations que je viens dexprimer, notre volonté dinvestir dans la formation, dans la qualification, dans le développement de lapprentissage et de la formation professionnelle.
Cest un élément déterminant du pacte national pour la croissance, la compétitivité et lemploi que vient dadopter le gouvernement.
La compétitivité nest en effet pas quaffaire de coûts, de stocks et de flux. Elle est aussi affaire de savoirs et savoir-faire, dexpériences et de compétences. Cest une histoire dhommes et de femmes au travail, et de ce quils savent faire ensemble.
Doù leffort global dinvestissement dans la formation professionnelle. Le budget total que lEtat prévoit de consacrer à la formation professionnelle en 2013 sélève à 3 milliards 732 millions deuros, soit une hausse de 2,6 % par rapport à la loi de finances pour 2012. Vous retrouvez le détail de ces chiffres dans le document annexé au PLF 2013, le « jaune budgétaire » formation professionnelle. Je voudrai insister sur les 3 points suivants, en commençant par lAFPA.
LEtat sengage à maintenir ses financements à lAFPA : 87 M sont ainsi inscrits (réinscris devrais-je dire car ils avaient été débudgétisés) dans ce projet de loi de finances :
* 56 millions deuros pour le financement de la politique de certification du ministère du Travail ;
* 21 millions deuros au titre de lhébergement et la restauration des publics fragiles pris en charge par lÉtat ;
* 10 millions deuros dinvestissement pour la modernisation du dispositif de formation.
Car si le gouvernement précédent avait programmé une opération dabandon de lAFPA, nous nous engageons à linverse à sauver et à rester aux côtés de lAFPA.
Et je vous dis : lEtat apportera sa contribution au plan de redressement de lassociation. Je salue au passage et remercie vivement, pour le travail quil a déjà accompli depuis sa nomination, en juin, son nouveau président, Yves Barou. Nous poursuivrons notre politique de développement de lapprentissage, Nous souhaitons attendre en conduisant une politique qualitative de lapprentissage, sans concurrence avec les autres voies de formation car chacune à son utilité, 500 000 apprentis en 2017. Dans cet objectif, cest un pari audacieux car il présuppose que malgré la crise économique, nous ayons chaque année plus dapprentis que lannée précédente.
LEtat finance différents dispositifs, à la fois sur le budget de la mission Travail et Emploi ou à partir du compte daffectation spécial dédié au développement et à la modernisation de cette politique.
Il compense ainsi à la sécurité sociale les exonérations de charges associées aux contrats dapprentissage et aux contrats de professionnalisation (à destination des jeunes et des salariés de plus de 45 ans) pour un coût de 1 250 M. Enfin notre budget compensera aux régions le coût financier des compétences qui leur ont été transférées en matière de formation professionnelle et dapprentissage au titre des différentes lois de décentralisation. La dotation globale de décentralisation est stable depuis 2011 et sélève à 1 702,7 M.
En 2013, une partie de cette dotation, celle qui finance au niveau local des actions en faveur du développement de lapprentissage, autres que des primes dapprentissage (250 M), sera financée à partir du compte daffectation spéciale. Si cette présentation permet dassurer une meilleure lisibilité des dépenses engagées par les régions pour le développement de lapprentissage en les regroupant sur le compte daffectation spéciale, elle ne modifie en rien la compensation versée aux Régions.
Cest donc un budget volontariste concerté avec les partenaires sociaux et les Régions ouvert à la jeunesse et aux salariés de notre pays que je vous proposerais dadopter.
Source http://travail-emploi.gouv.fr, le 19 novembre 2012