Déclaration de M. Thierry Repentin, ministre de la formation professionnelle et de l'apprentissage, sur la politique en matière de formation professionnelle, Paris le 21 janvier 2013.

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Circonstance : Voeux à la presse le 21 janvier 2013

Texte intégral


C’est avec joie que je vous présente tous mes voeux de bonheur et d’accomplissement professionnel et personnel.
Dans cette période de crise que nous traversons, j’aime à penser que votre profession joue un rôle particulier. Le droit à une information de qualité, une information la plus fiable, la plus juste et la plus sincère possible pour éclairer nos concitoyens est indispensable à notre démocratie. Une presse libre, indépendante, est consubstantielle à son bon fonctionnement.
Votre métier a beaucoup évolué ces dernières années. Vous êtes soumis à de fortes contraintes de production et les évolutions que vous connaissez ne sont pas très différentes de celles que connaissent tous nos concitoyens. L’évolution technologique, la révolution numérique, la concentration des outils de production, viennent transformer en profondeur le travail, l’emploi, et rendent nécessaire l’adaptation permanente des compétences. Ces sujets sont pour Michel SAPIN et moi, notre pain quotidien.
Les voeux sont moins affaire de rétrospective que de perspective. Néanmoins, on sait toujours mieux où l’on va quand on connaît d’où l’on vient ! Permettez-moi donc de rappeler quelques chantiers lourds que nous avons eu à traiter sur le champ de la formation professionnelle.
Le premier concerne la remise sur pieds de l’AFPA, le principal organisme de formation en France qui depuis 60 ans accompagne nos politiques d’emploi, et que nos prédécesseurs avaient placé dans une situation qui ne pouvait conduire qu’à sa disparition. En juin Michel SAPIN et moi avons découvert que les salaires des employés ne seraient plus assurés au-delà de l’été et que l’AFPA était au bord du dépôt de bilan. 9000 emplois étaient menacés ! Et 120 000 stagiaires (chaque année) risquaient de ne plus pouvoir être accueillis alors que les ¾ sont demandeurs d’emploi. Grâce à un travail très étroit avec le nouveau Président de l’AFPA Yves BAROU et les partenaires bancaires nous avons pu élaborer un plan de redressement dont les grandes lignes ont été annoncées par le Premier Ministre lundi dernier à Caen : règlement de la question immobilière, participation aux fonds propres et nouvelle gouvernance.
Nous avons aussi accompagné très étroitement la mise en place des emplois d’avenir et notamment leur volet formation. C’est un élément essentiel du dispositif, ce doit être l’un de ses marqueurs de qualité. Je suis moi-même allé à la rencontre des jeunes recrutés dans une quinzaine de départements. J’ai entendu que ces contrats allaient changer leur vie et je leur ai dit combien il était important qu’ils en profitent pour acquérir une qualification… d’autant qu’elle sera financée d’office, notamment par les OPCA et les Régions.
Enfin, je voudrais aussi souligner notre action en faveur d’un dialogue social retrouvé et constructif avec les partenaires sociaux, dans la droite ligne que ce qui vient d’être souligné par Michel SAPIN. La grande conférence sociale de juillet a, je crois, marqué le développement d’une ère nouvelle dans la relation entre les pouvoirs publics et les partenaires sociaux. Après la condescendance… le dialogue et le respect.
Pour ce qui concerne la table ronde formation professionnelle que je présidais, les travaux se sont poursuivis au delà de juillet jusque fin novembre, pour décliner toujours dans le dialogue les conclusions de la feuille de route en faveur de la formation des demandeurs d’emploi d’une part et des jeunes sans qualification d’autre part.
Pour 2013, l’action que j’entends conduire auprès de Michel SAPIN s’inscrit pleinement dans le cadre de la feuille de route tracée par le Président de la République : mener la bataille de l’emploi, donner la priorité à la jeunesse et préparer l’avenir.
* La formation professionnelle au service de l’emploi
Sans être un sésame pour l’emploi, la qualification est un solide rempart contre le chômage. Elle contribue à l’insertion durable de la personne sur le marché du travail. Elle contribue aussi à l’emploi national en ce qu’elle favorise l’évolution des compétences et l’adaptation de nos entreprises dans un monde en constante et exigeante évolution. C’est précisément en cela que la formation est un élément de compétitivité hors-coût pour la Maison France et pour cela qu’elle est stratégique.
A cette fin, le dialogue renoué avec les partenaires sociaux nous a permis de rapidement arriver à un accord sur l’utilisation du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP).
Nous avons dégagé des objectifs communs : la formation des jeunes sans qualification, notamment en emploi d’avenir, la prévention des mutations économiques, la formation des salariés, notamment en direction des publics les plus fragiles.
Ce sera le cas par exemple par une contribution historique du FPSPP à la lutte contre l’illettrisme. Une étude récente de l’INSEE dévoilée jeudi dernier ici, par l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANCLI) a montré que si des progrès étaient constatés, 2,5 millions de nos concitoyens sont encore en difficulté de savoir lire, écrire, compter. On imagine le handicap qui en résulte dans leur vie quotidienne, familiale ou professionnelle. L’Agence a engagé avec un collectif d’une soixantaine d’associations une démarche auprès du Premier Ministre afin de qualifier la lutte contre l’illettrisme de « grande cause nationale » en 2013. Nous souhaitons avec Michel Sapin qu’elle trouve un écho favorable.
Il nous faut aussi mieux mettre la formation au service du développement de l’emploi. Je souhaite en ce sens un développement de la formation aux nouveaux métiers, notamment ceux identifiés par le Pacte de compétitivité comme cibles du programme d’investissements d’avenir : les éco-industries, les métiers verts, les métiers de l’énergie renouvelable, les métiers du traitement et de la valorisation des déchets, du traitement de l’eau, de l’agroalimentaire, des services à la personne, du secteur médico-social et dans le tourisme. Il faut se tourner vers toutes ces filières porteuses qui demandent une anticipation des besoins. Je serai d’ailleurs avec Geneviève FIORASO et Delphine BATHO en Isère et en Savoie à la fin du mois afin de montrer que le Gouvernement est pleinement mobilisé, dans toutes ses composantes, pour soutenir les filières émergentes.
C’est aussi dans le dialogue social que nous améliorerons l’accès à la formation dans les entreprises : je souhaite par exemple une lecture partagée des orientations du plan de formation de sorte que les représentants des salariés soient associés à l’évolution des besoins de compétences.
* Deuxième objectif prioritaire pour 2013 : donner toute sa place à la jeunesse. C’est permettre à chaque jeune d’accéder à un premier niveau de qualification. Sur la priorité jeunesse qui guide notre action, le constat est clair : le taux de chômage des jeunes sans qualification est quatre fois et demie plus élevé que le taux de chômage des diplômés du supérieur. J’ai donc demandé aux services de l’Etat, aux Régions et aux acteurs locaux la mise en place de Pactes de réussite éducative et professionnelle afin de mobiliser toutes les forces vives territoriales pour permettre à chaque jeune d’accéder à un premier niveau de qualification.
Toute mon action sera centrée sur cet objectif : tout doit être fait pour qu’aucun jeune ne sorte du système scolaire sans aucun diplôme ni aucune qualification. Le Président a fixé l’objectif de réduire par deux le nombre de décrocheurs et les Régions vont se mobiliser fortement dans ce sens. C’est la raison pour laquelle nous voulons créer un service public de l’orientation dans le texte de décentralisation qui est actuellement en préparation. L’orientation ne se résume ni à la jeunesse ni à la formation.
S’orienter, on le fait tout au long de sa vie professionnelle et cela passe autant par l’emploi que par la formation ou la création d’activité. Et c’est bien ainsi que sera positionné ce service public de l’orientation dont nous entendons confier l’animation aux Régions. Mais les jeunes seront une cible prioritaire de ce nouveau service parce qu’il est de notre devoir de donner aux jeunes adultes une plus grande capacité de choix. Il conviendra de les aider à identifier leurs aspirations, à élargir leur représentation des métiers possibles et à découvrir des univers professionnels inconnus.
Toujours pour la jeunesse, je souhaite développer l’alternance, outil efficace d’insertion professionnelle.
Nous préparons des mesures législatives en présentant un projet de loi au Parlement à la fin du mois de juin. En effet, l’outil législatif sera nécessaire pour faire évoluer le cadre légal de l’apprentissage et de la taxe. L’objectif est d’aboutir à la mise en oeuvre d’un grand plan de développement de l’apprentissage qui doit nous amener à l’objectif de 500 000 apprentis en 2017. C’est un objectif réaliste. Et c’est pour cela que nous le tiendrons. Plutôt que de faire de grandes annonces, comme ça a été fait quelquefois par le passé, je souhaite me concentrer de manière vigoureuse sur les freins qui nuisent à l’apprentissage.
Nous travaillons avec les acteurs de l’apprentissage aux contours de ce projet de loi. Il s’agira d’abord d’augmenter l’offre de contrats d’apprentissage. Nous prendrons des mesures pour mobiliser des secteurs et des entreprises qui ont encore trop peu recours aux apprentis, et nous lèverons les freins au développement de l’apprentissage dans le secteur public, notamment dans les collectivités territoriales. Il faut également travailler à mieux mettre en relation l’entreprise et le candidat apprenti car ils sont trop nombreux à m’écrire désespérés de ne pouvoir trouver une entreprise pour faire leur apprentissage, faute de réseau familial ou social, alors qu’ils sont admis dans un CFA.
* Troisième priorité : la formation professionnelle, investissement d’avenir La formation et la qualification de nos salariés sont une clef de réussite de notre pays dans la compétition internationale. A condition qu’elle soit bien utilisée, à un coût abordable pour la Nation et assurée par des organismes de qualité.
Notre système de formation professionnelle est souvent décrié. C’est vrai qu’il est complexe, et que son efficacité peut-être améliorée. Toutefois la critique globale et systématique est injuste. Des résultats existent, il faut les valoriser car dénigrer la formation c’est aussi décourager les gens de se former. Or, je l’ai déjà dit, nous avons besoin de faire évoluer les compétences et les métiers dans tous les secteurs et à tous les âges.
Mon action se dirigera dans deux directions : ouvrir plus largement le droit à la formation et veiller à une plus grande égalité d’accès. La création souhaitée par les partenaires sociaux dans l’ANI du 11 janvier d’un compte personnel de formation, va dans le bon sens. Le caractère universel envisagé et individuel de ce compte, sa portabilité totale, permettent d’avancer très concrètement vers l’effectivité du droit à la formation tout au long de la vie. Nous y reviendrons pour donner de la chair à cette avancée et en préciser les modalités ainsi que le financement. Nous le ferons en lien étroit avec les partenaires sociaux et avec les parlementaires.
Je me réjouis des voeux prononcés par le Président de la République la semaine dernière à destination des acteurs de l’entreprise et de l’emploi. Il a cité la formation professionnelle comme axe de développement de ce grand ministère de l’emploi. C’est une parole qui aidera aux arbitrages qui seront sans doute nécessaires dans la période à venir. Je sais déjà pouvoir compter sur le soutien de Michel Sapin.
Pour cette année 2013, ma feuille de route se veut ambitieuse. 2012 fut l’année du changement et des premières décisions. 2013 sera celle de la transformation et de l’aboutissement !
Je vous remercie.
Source http://travail-emploi.gouv.fr, le 24 janvier 2013