Texte intégral
A. Chabot
(...)
Avez-vous de la sympathie pour les manifestants [du sommet du G8]?
- "La lutte contre la mondialisation est un thème que je partage."
Vous êtes du côté de J. Bové ou de C. Aguitton ?
- "Non, je ne suis pas du côté de J. Bové, je suis de mon propre côté. Je dis simplement qu'il ne faut pas s'étonner des conséquences de la mondialisation. Ce qui m'étonne, c'est le comportement de messieurs Jospin, Chirac, de la plupart des chefs d'Etat qui étaient réunis, et qui, tout d'un coup, se rendent compte des conséquences de la mondialisation. La mondialisation n'est pas un phénomène météorologique, mais c'est la conséquence des mesures de désarmement douanier, arrêtées par les chefs d'Etat, sous la pression des Etats-Unis. Voilà la réalité des choses. Il faut s'en rendre compte. Après, on vient vous parler de "mondialisation à visage humain", etc. Ce que je constate, c'est que ceux qui luttent contre la mondialisation, feraient mieux de se rendre compte également que, par exemple, dans l'Union européenne, l'euro est un instrument de la mondialisation. Je ne veux pas paraître comme un maniaque, mais c'est la réalité. Il faut regarder les choses comme elles sont."
Il y a aussi des bienfaits de la mondialisation pour les pays pauvres, par exemple.
- "Non, ce n'est pas du tout un bienfait ! Parce que les résultats des précédents sommets de Marrakech etc., où l'on nous avait déjà expliqué que la mondialisation permettrait le décollage des pays pauvres... Or, nous avons vu qu'en réalité, ces pays ont perdu 50 % de leur PIB. Voilà la réalité des choses."
Mais pour vous, la légitimité est du côté des chefs d'Etat ou de gouvernement qui se réunissent au G8 ou dans la rue ?
- "Non, la légitimité n'est pas dans la rue. La légalité est du côté des dirigeants du G8. Sauf qu'on ne sait pas trop à quoi sert ce G8, sinon à sortir des institutions qui sont chargées de régler un certain nombre de problèmes. Je prends rapidement un exemple : la santé publique. Le G8 prend des décisions, mais il y a l'OMS pour cela ! "
Alors, vous êtes plutôt du côté de L. Jospin qui dit qu'il y a les institutions comme l'ONU, l'OMS ; il a raison ?
- "Oui, de ce point de vue, il a raison."
Vous êtes d'accord avec L. Jospin ?
- "Non, je ne suis pas d'accord avec L. Jospin mais il peut m'arriver de partager son point de vue sur certains points ; cela ne veut pas dire pour autant que je sois d'accord avec lui, pas du tout ! Par contre, ce que je dis, c'est que si les gouvernants continuent à ne tenir aucunement compte de l'opinion des citoyens, des populations, ils vont au-devant de graves déboires. A mon avis, c'est un signal d'alarme pour les démocraties parlementaires, c'est-à-dire ces régimes qui considèrent qu'une fois que les citoyens ont voté tous les cinq ans, qu'on n'a plus besoin de tenir compte de leur opinion."
Oui, mais ils sont éventuellement réélus ou battus les dirigeants en question ; il y a la sanction du suffrage universel ...
- "Oui, mais il n'y a pas suffisamment de débats, et sur les grands sujets, on ne consulte pas le peuple. Or les peuples doivent être consultés, et pour cela il y a un système très simple : c'est le référendum."
Quelle sera, selon vous, le prochain représentant de la France au G8 : J. Chirac ou L. Jospin ?
- "Peut-être aucun des deux, on verra bien. Nous sommes encore à dix mois de l'élection présidentielle. Nous verrons ce qui se passera. Je ne crois pas du tout que l'élection présidentielle s'engagera comme on le croit aujourd'hui."
C'est-à-dire ? Vous pensez que l'un des deux pourra être éliminé, d'une façon ou d'une autre ? Lequel ?
- "Je pense qu'il le pourrait, et peut-être même tous les deux, on verra bien."
Après l'interview du 14 Juillet, vous avez conseillé à J. Chirac de dissoudre l'Assemblée ou à L. Jospin de démissionner...
- "Non, je n'ai rien conseillé du tout. J'ai regardé la situation telle qu'elle était ; j'ai vu que les deux têtes de l'exécutif, le président de la République formulait des critiques extrêmement dures contre le Gouvernement, un Gouvernement qu'il a contribué à installer - c'est quand même lui qui prononcé la dissolution ! - et avec lequel il vit depuis près de quatre ans. C'est la première fois qu'il prononce des critiques aussi dures."
C'est la campagne qui approche ?
- "Oui, c'est peut-être la campagne qui approche mais cela ne donne pas, à l'extérieur de la France, une image très convenable."
Donc, ils affaiblissent l'image de la France ?
- "C'est certain. Ils affaiblissent l'image de la France et ils portent un coup supplémentaire aux institutions. Quant aux ministres qui ont pratiquement injurié le chef de l'Etat, et ensuite, tout ce beau monde se retrouve, comme si de rien n'était... Cela n'a plus rien à voir avec l'esprit des institutions de la Vème République."
Pour l'instant, en tout cas, et J. Chirac et L. Jospin dominent la scène. A droite, F. Bayrou, A. Madelin ou vous, avez du mal à vous créer un petit espace ?
- "Oui, c'est vrai. Nous verrons bien ; on est encore à dix mois des élections. Je constate, en tous les cas, que leur cote dans l'opinion diminue, si tant est qu'on puisse se fier aux sondages."
Demain, le bureau de l'Assemblée nationale décidera ou non de communiquer aux magistrats qui enquêtent sur ce que l'on appelle "l'affaire des billets d'avion", les déclarations de patrimoine du député J. Chirac de 1988 à 1995. Ils doivent donner ces déclarations de patrimoine ?
- "Je ne donne pas mon sentiment sur cette affaire."
Vous êtes pour la transparence ou pas ?
- "Oui, je suis pour la transparence mais je suis aussi pour le respect de la loi et le respect des textes. Que ceux qui sont en charge de cela prennent leurs responsabilités."
Mais vous diriez qu'il y a un acharnement des juges contre J. Chirac ?
- "Cela me paraît évident !"
Il a raison, à votre avis, de ne pas répondre aux demandes des juges ?
- "De toute façon, laissons J. Chirac, parlons du président de la République, car c'est cela qui est en cause : il y a la personne de J. Chirac et puis il y a le Président, responsable des institutions et de la défense de celles-ci. Or il est bien évident que le président de la République, dans le système actuel et compte tenu des dispositions constitutionnelles, n'a pas à répondre aux questions des juges. Peut-être faut-il changer la loi ? C'est un autre problème. Mais dans le contexte actuel, il est bien évident qu'il n'a pas à répondre aux questions des juges."
Donc acharnement contre J. Chirac, comme il y a acharnement contre vous ?
- "Je crois que tout cela est en grande partie lié aux élections présidentielles et à la situation politique."
C'est-à-dire que vous dites toujours que vous n'avez rien à vous reprocher, qu'on essaie de vous empêcher d'être candidat ?
- "Je ne vais pas développer davantage ce point. Les juges font ce qu'ils croient devoir faire, mais mes avocats font ce qu'ils croient devoir faire. Si j'étais persuadé d'avoir commis des choses répréhensibles, je ne serais pas là ce matin."
Vous disiez tout à l'heure : la cote de popularité de J. Chirac et L. Jospin baisse ; la vôtre aussi. C'est dû aux affaires selon vous ?
- "Je ne sais pas. De toute façon, je ne suis pas en charge, actuellement, de la politique de la France. Si je l'étais, cela se saurait, et notamment si j'étais en charge de la Sécurité, il se passerait certainement autre chose que ce qui se passe aujourd'hui."
Justement, en Corse, par exemple, attentat, hier, dans une caserne de gendarmes mobiles, 22 blessés ! Vous dites quoi : c'est le processus de Matignon qui est remis en cause ? C'est le retour de la violence ? Jospin s'est trompé ?
- "Que Jospin se soit trompé, cela me paraît évident ! Jospin, dans cette affaire, a joué les apprentis-sorciers. Il s'est figuré qu'il allait désamorcer la violence et amener les nationalistes à résipiscence, il a une réponse. Maintenant, la question est de savoir ce qu'il va faire. Va-t-il, une fois de plus, lâcher devant les nationalistes ou va-t-il assumer ses responsabilités ? Nous verrons bien. Mais les Français le jugeront aussi là-dessus."
La campagne se fera essentiellement autour du thème de la sécurité. Vous dites : "c'est bon pour moi ça" ?
- "Essentiellement, peut-être pas. Mais en tous les cas, à l'heure actuelle, c'est la préoccupation majeure des Français. C'est clair."
Et rien ne vous empêchera d'être candidat ?
- "Je l'espère. "Rien ne m'empêchera" sauf ..."
Sauf quoi ?!
- "Sauf Dieu."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 26 juillet 2001)
(...)
Avez-vous de la sympathie pour les manifestants [du sommet du G8]?
- "La lutte contre la mondialisation est un thème que je partage."
Vous êtes du côté de J. Bové ou de C. Aguitton ?
- "Non, je ne suis pas du côté de J. Bové, je suis de mon propre côté. Je dis simplement qu'il ne faut pas s'étonner des conséquences de la mondialisation. Ce qui m'étonne, c'est le comportement de messieurs Jospin, Chirac, de la plupart des chefs d'Etat qui étaient réunis, et qui, tout d'un coup, se rendent compte des conséquences de la mondialisation. La mondialisation n'est pas un phénomène météorologique, mais c'est la conséquence des mesures de désarmement douanier, arrêtées par les chefs d'Etat, sous la pression des Etats-Unis. Voilà la réalité des choses. Il faut s'en rendre compte. Après, on vient vous parler de "mondialisation à visage humain", etc. Ce que je constate, c'est que ceux qui luttent contre la mondialisation, feraient mieux de se rendre compte également que, par exemple, dans l'Union européenne, l'euro est un instrument de la mondialisation. Je ne veux pas paraître comme un maniaque, mais c'est la réalité. Il faut regarder les choses comme elles sont."
Il y a aussi des bienfaits de la mondialisation pour les pays pauvres, par exemple.
- "Non, ce n'est pas du tout un bienfait ! Parce que les résultats des précédents sommets de Marrakech etc., où l'on nous avait déjà expliqué que la mondialisation permettrait le décollage des pays pauvres... Or, nous avons vu qu'en réalité, ces pays ont perdu 50 % de leur PIB. Voilà la réalité des choses."
Mais pour vous, la légitimité est du côté des chefs d'Etat ou de gouvernement qui se réunissent au G8 ou dans la rue ?
- "Non, la légitimité n'est pas dans la rue. La légalité est du côté des dirigeants du G8. Sauf qu'on ne sait pas trop à quoi sert ce G8, sinon à sortir des institutions qui sont chargées de régler un certain nombre de problèmes. Je prends rapidement un exemple : la santé publique. Le G8 prend des décisions, mais il y a l'OMS pour cela ! "
Alors, vous êtes plutôt du côté de L. Jospin qui dit qu'il y a les institutions comme l'ONU, l'OMS ; il a raison ?
- "Oui, de ce point de vue, il a raison."
Vous êtes d'accord avec L. Jospin ?
- "Non, je ne suis pas d'accord avec L. Jospin mais il peut m'arriver de partager son point de vue sur certains points ; cela ne veut pas dire pour autant que je sois d'accord avec lui, pas du tout ! Par contre, ce que je dis, c'est que si les gouvernants continuent à ne tenir aucunement compte de l'opinion des citoyens, des populations, ils vont au-devant de graves déboires. A mon avis, c'est un signal d'alarme pour les démocraties parlementaires, c'est-à-dire ces régimes qui considèrent qu'une fois que les citoyens ont voté tous les cinq ans, qu'on n'a plus besoin de tenir compte de leur opinion."
Oui, mais ils sont éventuellement réélus ou battus les dirigeants en question ; il y a la sanction du suffrage universel ...
- "Oui, mais il n'y a pas suffisamment de débats, et sur les grands sujets, on ne consulte pas le peuple. Or les peuples doivent être consultés, et pour cela il y a un système très simple : c'est le référendum."
Quelle sera, selon vous, le prochain représentant de la France au G8 : J. Chirac ou L. Jospin ?
- "Peut-être aucun des deux, on verra bien. Nous sommes encore à dix mois de l'élection présidentielle. Nous verrons ce qui se passera. Je ne crois pas du tout que l'élection présidentielle s'engagera comme on le croit aujourd'hui."
C'est-à-dire ? Vous pensez que l'un des deux pourra être éliminé, d'une façon ou d'une autre ? Lequel ?
- "Je pense qu'il le pourrait, et peut-être même tous les deux, on verra bien."
Après l'interview du 14 Juillet, vous avez conseillé à J. Chirac de dissoudre l'Assemblée ou à L. Jospin de démissionner...
- "Non, je n'ai rien conseillé du tout. J'ai regardé la situation telle qu'elle était ; j'ai vu que les deux têtes de l'exécutif, le président de la République formulait des critiques extrêmement dures contre le Gouvernement, un Gouvernement qu'il a contribué à installer - c'est quand même lui qui prononcé la dissolution ! - et avec lequel il vit depuis près de quatre ans. C'est la première fois qu'il prononce des critiques aussi dures."
C'est la campagne qui approche ?
- "Oui, c'est peut-être la campagne qui approche mais cela ne donne pas, à l'extérieur de la France, une image très convenable."
Donc, ils affaiblissent l'image de la France ?
- "C'est certain. Ils affaiblissent l'image de la France et ils portent un coup supplémentaire aux institutions. Quant aux ministres qui ont pratiquement injurié le chef de l'Etat, et ensuite, tout ce beau monde se retrouve, comme si de rien n'était... Cela n'a plus rien à voir avec l'esprit des institutions de la Vème République."
Pour l'instant, en tout cas, et J. Chirac et L. Jospin dominent la scène. A droite, F. Bayrou, A. Madelin ou vous, avez du mal à vous créer un petit espace ?
- "Oui, c'est vrai. Nous verrons bien ; on est encore à dix mois des élections. Je constate, en tous les cas, que leur cote dans l'opinion diminue, si tant est qu'on puisse se fier aux sondages."
Demain, le bureau de l'Assemblée nationale décidera ou non de communiquer aux magistrats qui enquêtent sur ce que l'on appelle "l'affaire des billets d'avion", les déclarations de patrimoine du député J. Chirac de 1988 à 1995. Ils doivent donner ces déclarations de patrimoine ?
- "Je ne donne pas mon sentiment sur cette affaire."
Vous êtes pour la transparence ou pas ?
- "Oui, je suis pour la transparence mais je suis aussi pour le respect de la loi et le respect des textes. Que ceux qui sont en charge de cela prennent leurs responsabilités."
Mais vous diriez qu'il y a un acharnement des juges contre J. Chirac ?
- "Cela me paraît évident !"
Il a raison, à votre avis, de ne pas répondre aux demandes des juges ?
- "De toute façon, laissons J. Chirac, parlons du président de la République, car c'est cela qui est en cause : il y a la personne de J. Chirac et puis il y a le Président, responsable des institutions et de la défense de celles-ci. Or il est bien évident que le président de la République, dans le système actuel et compte tenu des dispositions constitutionnelles, n'a pas à répondre aux questions des juges. Peut-être faut-il changer la loi ? C'est un autre problème. Mais dans le contexte actuel, il est bien évident qu'il n'a pas à répondre aux questions des juges."
Donc acharnement contre J. Chirac, comme il y a acharnement contre vous ?
- "Je crois que tout cela est en grande partie lié aux élections présidentielles et à la situation politique."
C'est-à-dire que vous dites toujours que vous n'avez rien à vous reprocher, qu'on essaie de vous empêcher d'être candidat ?
- "Je ne vais pas développer davantage ce point. Les juges font ce qu'ils croient devoir faire, mais mes avocats font ce qu'ils croient devoir faire. Si j'étais persuadé d'avoir commis des choses répréhensibles, je ne serais pas là ce matin."
Vous disiez tout à l'heure : la cote de popularité de J. Chirac et L. Jospin baisse ; la vôtre aussi. C'est dû aux affaires selon vous ?
- "Je ne sais pas. De toute façon, je ne suis pas en charge, actuellement, de la politique de la France. Si je l'étais, cela se saurait, et notamment si j'étais en charge de la Sécurité, il se passerait certainement autre chose que ce qui se passe aujourd'hui."
Justement, en Corse, par exemple, attentat, hier, dans une caserne de gendarmes mobiles, 22 blessés ! Vous dites quoi : c'est le processus de Matignon qui est remis en cause ? C'est le retour de la violence ? Jospin s'est trompé ?
- "Que Jospin se soit trompé, cela me paraît évident ! Jospin, dans cette affaire, a joué les apprentis-sorciers. Il s'est figuré qu'il allait désamorcer la violence et amener les nationalistes à résipiscence, il a une réponse. Maintenant, la question est de savoir ce qu'il va faire. Va-t-il, une fois de plus, lâcher devant les nationalistes ou va-t-il assumer ses responsabilités ? Nous verrons bien. Mais les Français le jugeront aussi là-dessus."
La campagne se fera essentiellement autour du thème de la sécurité. Vous dites : "c'est bon pour moi ça" ?
- "Essentiellement, peut-être pas. Mais en tous les cas, à l'heure actuelle, c'est la préoccupation majeure des Français. C'est clair."
Et rien ne vous empêchera d'être candidat ?
- "Je l'espère. "Rien ne m'empêchera" sauf ..."
Sauf quoi ?!
- "Sauf Dieu."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 26 juillet 2001)